Lagbayaëmsahr est un misanthrope mystérieux et violent. Il est très difficile de deviner ses pensées en lisant dans son regard, mais cet être est rongé par une violence intérieure depuis l'enfance. S'il peut paraître plutôt calme au premier abord, il s'énerve rapidement, et la patience semble être quelque chose qu'il ne connaît pas. L'argent ne l'intéresse pas, et il n'a aucunement l'intention de se faire des amis (d'autant que sa froideur et son dédain naturels font qu'il ne sait absolument pas s'y prendre pour se socialiser). Fourbe et égoïste, il n'hésite pas à sacrifier la vie d'un inconnu pour arriver à ses fins. À la recherche de la divinité qui l'a arraché aux griffes de la Mort, il ne laisse jamais rien ni personne se dresser sur son passage, et se montre même parfois gratuitement violent. D'un naturel hautain, il a tendance à mépriser à peu près toutes les races, fussent-elles mortelles tout comme lui, et n'accorde aucun intérêt aux affaires politiques, à moins que celles-ci puissent servir ses propres intérêts. Il passe son temps à errer, cherchant des signes pouvant le conduire à découvrir enfin le sens de sa vie, et ne s'arrête dans des villes que pour se nourrir et se reposer. Il est toujours extrêmement sûr de lui et ne connaît pas la peur, car il prétend l'inspirer, ce qui causera peut-être sa perte.

Lagbayaëmsahr n'a aujourd'hui pratiquement plus aucun souvenir de sa petite enfance. Il lui est même impossible de se remémorer le visage de ses parents, à présent certainement morts (il serait capable de les tuer lui-même s'il les retrouvait vivants un jour). À l'âge d'environ cinq ans, Lagbayaëmsahr fut abandonné par ses parents et, dans son inconscience enfantine, décida de suivre le chemin d'une grande forêt dans laquelle il se perdit. Il y resta plusieurs jours, se nourrissant des quelques fruits qu'il parvenait à cueillir, sursautant à chaque bruit, et tremblant de froid et de peur chaque nuit. Il faillit mourir dans cette même forêt, après avoir tenté de grimper au sommet d'un arbre pour voir au-delà des cimes. La chute qu'il fit ensuite aurait été fatale à n'importe quel enfant de son âge, mais il semblerait qu'un miracle soit survenu.

Il resta au sol, inconscient, pendant plusieurs jours, peut-être plusieurs semaines, avant de s'éveiller à nouveau. À son réveil, il se retrouva entouré de plusieurs dizaines de corbeaux. Les oiseaux, qui d'abord l'effrayaient, ne se montraient pas hostiles, mais restaient silencieux, le fixant d'une manière étrange. C'est quelques jours plus tard qu'il découvrit ce don qu'il avait de communiquer avec eux. Grandissant durant plusieurs années dans la forêt, seul comme un enfant sauvage, il se forgea un tempérament guerrier, autonome et prudent, impressionnant pour un garçon de son âge. Il apprit à se défendre contre les bêtes des bois en utilisant des bouts de bois à la façon d'une épée, et ne sortit de la forêt qu'à l'âge de quinze ans environ. Depuis ce temps, il n'avait trouvé qu'une seule explication au fait qu'il soit toujours en vie: une intervention divine. Mais de quel Dieu ? Lui qui a vécu en dehors de la civilisation ne connaissait pas les Dieux que l'on vénérait dans ce monde qui lui était inconnu.

Il erra de ville en ville pendant longtemps, vivant la plupart du temps de petits larcins. Il découvrit par la même occasion son pouvoir inné (en tant qu'Esper, même s'il l'ignorait) de télékinésie. En découvrant les mentalités de ceux qui l'entouraient, il devint vite las de la compagnie des autres, et commença vite à les mépriser. Le nom de Lagbayaëmsahr lui fut donné par un vieillard qui lui fit savoir que ce mot avait une signification dans une autre langue. Lagbayaëmsahr a aujourd'hui oublié cette signification. Son mépris de l'autre continua néanmoins de croître, jusqu'à ce que meure sa première victime. Ayant pris soin de toujours porter un bâton sur lui, dans le cas où il devrait se défendre, il tomba un soir sur un brigand, dans une ruelle sombre. Les animaux de la forêt lui ayant appris (malgré eux) à anticiper les mouvements d'un adversaire, il parvint à donner le premier coup, et frappa le bandit dans les côtes, le genou et la tête. Une fois le bandit au sol, le jeune homme se contenta de voler son poignard pour l'achever, dérobant sa bourse au passage. Il devait avoir à peine vingt ans.

Sans trop chercher à savoir pourquoi, il considéra que cette violence qu'il avait en lui était un tempérament transmis par le Dieu qui l'avait sauvé. Une rédemption par la violence. Depuis ce jour, Lagbayaëmsahr n'a qu'une idée en tête: découvrir qui est ce Dieu, cette entité qui a refusé qu'il meure le jour où il est tombé de cet arbre, et de comprendre pourquoi ce miracle lui était arrivé, à lui. Cela fait maintenant plus de dix ans que Lagbayaëmsahr erre, parcourant villes et campagnes en compagnie des corbeaux avec qui il a appris à communiquer, à la recherche de sa divinité protectrice…