La grande guerre

C'était l'apocalypse avant l'heure, car en effet, il n'était que 14h28 en ce samedi, et tout le monde sait que l'apocalypse a toujours lieu un mercredi à 18h. Ces barbares n'avaient définitivement aucune éducation - aucune bonne tout au moins. Ils croyaient avoir anticipé les actions des S et des L réunis... Ces gueux étaient bien loin de la vérité. Tout faisait partie du plan.

Il se rappelait, plus tôt dans la semaine, quand les négociations avec les L avaient abouties à un accord en bonne et due forme. Ils étaient alliés pour toute la durée de cette guerre, mettant leurs immenses talents en commun. Albar espérait d'ailleurs en profiter pour se taper la lieutenante, Ayael. Bah quoi, qui a dit qu'il ne fallait pas mélanger travail et plaisir? Le général, en revanche, avait été retrouvé mort juste après, étranglé par ce qui semblait avoir été un cercle trigonométrique. Les S avaient affirmé en toute bonne foi ne pas être responsable de cette trahison, et l'état major littéraire les a cru, Dieu merci. Il était évident que c'était une sordide tactique de ES pour dissoudre leur union. Mais comme tous les L ont l'esprit tordu d'un roman policier, ils avaient envisagé cette option et l'avaient accepté, tandis que les S, avec leur pragmatisme unique au monde, avaient déduis de différents indices qu'ils n'avaient rien fait, notamment à partir du fait qu'ils n'avaient rien fait.

Humiliés, les ES, qui accumulent tous les défauts, s'étaient sentis vexés et étaient passés à l'assaut. Ils étaient de féroces guerriers, car leurs armes étaient inconnues mais puissantes. De plus, ils étaient venus avec leurs animaux de guerre, les STG, au QI tapant dans les négatifs, mais très doués en EPS. Ils hurlaient, ils mordaient, ils griffaient, et surtout, ils écoutaient des musiques horribles, ce qui avait beaucoup déstabilisé les L, troublés par une si mauvaise connaissance du langage. Les S avaient comme théorie que ce n'était pas une question de langage mais plutôt de capacité. Ils n'avaient tout simplement pas les dispositions biologiques pour y parvenir, à l'instar de l'éléphant d'asie dont les oreilles sont trop courtes pour qu'il puisse se les gratter avec la trompe, ce qui finit par les pousser au suicide collectif. Malheureusement, l'intelligence plus que limitée de STG ne leur permettaient pas de comprendra la notion de suicide ou même de vie.

La façon de lutter n'était pas la même, et les si L avaient un grand avantage par rapport au S, c'était un meilleur rapport qualité prix d'armes lors des carnages comme celui ci. En effet, les livres coûtaient bien moins cher que les calculettes, et étaient bien plus solides et puissants que les règles et autres équerres, qui n'arrivaient à arracher jamais plus d'un oeil. Les livres étaient des armes lourdes, puissantes, utilisables au corps à corps, à distance, voire même comme arme psychologique. Albar se rappela avec joie avoir vu un courageux L paralyser toute une horde de ES en citant du Flaubert, tandis que les STG faisaient des anévrismes cérébraux en boucle.

Les S, eux, étaient mieux équipés pour les frappes chirurgicales (c'est d'ailleurs pour ça que pour faire médecine il faut absolument avoir été en S), alors que les L étaient des combattants passionnés, qui éprouvaient chaque seconde comme la dernière, et la vivaient à fond. Les S étaient des pragmatiques, des tacticiens, des manipulateurs bref, ils n'étaient pas des tortues Ninja - même si je connais un type en S qui s'appelle Raphaël, mais ça peut pas être une tortue Ninja, il n'aime pas les pizzas. Notons tout de même que les S disposaient pourtant de ninjas, quand bien même ce n'étaient pas des tortues : les "Kompas", en hommage aux "Koopas" de Mario, étaient marrons et moches, mais surtout, ils lançaient loin et fort des compas acérés, qui ne rataient jamais leur cible. Ou presque.

Albar était sur le front, blessé par un compas boomerang qui avait raté sa cible et son retour - son utilisateur était un ancien ES reconverti, il avait encore besoin de temps pour sa rééducation et Albar avait expressément dit qu'il ne fallait pas l'emmener. Sa jambe en sang, il ne pouvait plus bouger, et l'ennemi se rapprochait, malgré la résistance héroïque de ses soldats. Quel dommage que les feuilles de papier millimétrés fussent de si piètres boucliers !

Lara était posté devant ses ordinateurs, à surveiller le combat, avec d'autre S de son genre... des vrai geek, les pirates du net qui avait entrepris une réelle bataille à l'encontre des STG kikoolol en massacrant méthodiquement chacun de leurs ordinateur. La jeune fille était chef de cette unité et secondait Albar dans les autres décisions de guerre.

Elle avait fortement encouragé l'union avec le L car seuls, ils n'auraient pu lutter. Comment diable les ES avait pris le pouvoir ? Bien évidemment à cause de la guéguerre inutile des S et des L. Les deux ennemies de toujours n'avait pas prit garde à cette unité montante qu'était les ES. Maintenant, les classes de cours n'étaient que désolation.

Poussant un profond soupir, Lara chercha à localiser Albar à l'aide des cameras de surveillance qui avait été piraté depuis la première déclaration de guerre contre les ES. Elle vit alors avec effarement que le général des S était touché, et que les ES avait déjà des airs de victoire...

Laissant son second prendre les choses de la salle informatique en main, elle couru chercher les biologistes... leur armes un peu secrète. En effet, en premier lieu avait été envoyé les physiciens et les mathématiciens, pour les chimiste et les biologistes s'était réservée...

S'armant elle-même de scalpel et pipette gradué, Lara ouvrit sa veste d'où quelques cliquetis ressortaient par moment pour laisser voir les fioles d'acides et bases fortes qu'elle conservait toujours sur elle.

Elle devait aussi pouvoir trouver quelques poisons à passer sur son scalpel, mais elle se souvenait en avoir donné à la lieutenante des L qui était fascinée par les empoisonneuses de l'histoire. Aussi, elle se contenta de prendre sa fiole contenant un acide d'un pH si faible qu'il valait mieux le conserver dans un verre traiter pour lui résister.

Lançant l'ordre de l'attaque des bio et chimie, Lara ne se jetant pas immédiatement dans la bataille, cherchant par tout les moyens à rejoindre son général ! Elle parvint à le localiser grâce à son téléphone : une petite merveille de technologie qui lui permettait de suivre les cameras du bahut et avait ainsi éviter des coup foireux de ES qui était observé...

Elle s'approcha enfin de lui pour voir un ES spécialité math qui s'apprêtait à frapper son général avec une calculatrice graphique doublé d'un traité d'économie. N'écoutant que son courage, Lara s'élança et jeta son scalpel qui manqua l'oeil de peu pour en revanche griffer violemment la joue de jeune homme.

Ce dernier reporta son regard vers Lara d'un air mauvais et un brin lubrique... qui ne demeura sur son visage que le temps que le poison ne fasse effet... Aaaaaah ces petites merveilles de bactéries ! Lara les adorait et s'amusait bien avec !

Elle s'approcha alors de son supérieur et l'aida à se remettre sur pied avant de sortir de quoi le soigner et lui faire un bandage précaire.

-Qu'est-ce que tu ferais sans moi, soupira-t-elle avec un sourire.

Elle lui tendis alors une fiole contenant un liquide sirupeux et à l'odeur sucré.

-Bois-ça. C'est un dérivé de morphine qu'on a trafiqué... Tu ne sentiras plus la douleur, mais pourras toujours être actif !

Elle vit alors venir vers eux une bande complète de STG visiblement membre d'un club de rugbys. Avant qu'elle n'ait pu réagir, ils tentèrent de les attaquer, mais une cymbale de batterie passa à toute vitesse leur coupant la tête.

Se retournant, Lara salua le L d'un signe de tête.

-Je t'avais dit qu'ils feraient de bon allié, rappela-t-elle à Albar. Mais la guerre ne fait que commencer...

La douleur disparaissait progressivement... Dans le monde normal, les expérimentations louches de Lara avaient attiré l'attention et étaient un peu mal vues, mais aujourd'hui, elles s'avéraient capitales. Si elle n'avait pas volé des dizaines de souches de bactéries différentes par le passé, rien ne se serait déroulé comme prévu, et la situation aurait été bien plus critique. La préférée d'Albar était sans conteste la gastro. Simple, facile à se procurer, et plus humiliante que n'importe laquelle des autres bactéries, le fait qu'elle soit non létale n'était pas un problème. Elle rendait grâce aux ES, étalant au grand jour, et sur la cour, toute la poésie qui se trouvait dans leur coeur.

"Merci pour ton aide, mais j'aurais très bien pu m'en tirer tout seul, avec un peu de temps. Et de chance. Quant à ce que je ferai sans toi... Exactement les même choses que maintenant mais en prenant plus de risques et en ayant enfin la paix"

Il lui lança cependant un sourire entendu, comme il en avait l'habitude. Il se remit péniblement debout mais chaque instant était plus facile que le précédent. Tout doucement, après s'être appuyé sur sa lieutenante, il ré-apprenait à marcher. Il jeta un regard réprobateur à Lara :

"Tu n'aurais pas du sortir, on a besoin de toi là haut. Bon, d'accord, tu distrais les ennemis, mais c'est à double tranchant : les STG deviennent plus agressifs lorsqu'ils te voient, guidés par leurs hormones. A chaque fois que tu sors tu es une cible privilégiée, et je ne veux pas qu'il t'arrive quoi que ce soit... Quand je te vois je me sens vraiment supérieur, j'ai pas envie de perdre ce sentiment tu vois."

Après s'être pris un violent coup de poing, il redevint sérieux, si tant est qu'il l'ai jamais été :

"Il faut qu'on se replie, on ne peut plus tenir ici. Agent Tchang, cria-t-il a l'un des S encore debout, quelle est la situation?
- Le serpent se mords la queue général, répondit Tchang avec un fort accent asiatique, et comme le disant mon grand père, il n'est nulle autre folie que celle...
- Oui c'est très bien tout ça mais je ne te demande pas de me répondre un statut msn.
- Navré, Ô grand fleur de lotus au coeur de fer, vous qui me rappelez mon Tokyo natal de part votre...
- Mais par tous les dieux, Tchang, tu es chinois !
- Roh ça va chef, reprit-il avec un accent marseillais, si on peut plus déconner. Eh bien on est dans le pétrin, il faut qu'on se replie, là on perds des hommes.
- Vous avez vérifié dans le placard?"

Tchang alla alors ouvrir le-dit placard, et y trouva les hommes qui avaient été perdus.

"Merci général, sans vous j'aurais été incapable de les retrouver !
- Faites attention où vous les mettez la prochaine fois tout de même !
- Oui mon général, bien mon général !
- On sonne la retraite, cria Albar à l'attention des personnes présentes. Vous entendez tous? Retraite, retraite, on se replie dans le CDI !"

Il entraîna Lara avec lui, l'accès aux ordinateurs étant devenu dangereux. Elle pourrait toujours se débrouiller avec ceux du CDI. Certes ils étaient infestés de virus et de mauvaise qualité, mais il reconnaissait volontiers qu'elle pouvait tout faire avec un ordinateur, ou presque. En ce moment elle était entrain d'apprendre au sien à cuisiner, et il se débrouillait plutôt bien, si ce n'est pour faire les mayonnaises.

Tous les S et L encore présents s'étaient barricadés dans le CDI avec une étonnante promptitude. Les portes étaient bloquées, les fenêtres barricadées, et les étagères allaient leur servir de couverture pour le moment où les STG et les ES entreraient.

"Rechargez tous vos compas, vérifiez les piles de vos calculatrices, affutez vous ciseaux ! Littéraires, faites en sorte que l'ennemi ne s'empare pas de votre armurerie ! Ce lieux que nous défendons mes enfants est plus qu'un stock d'arme pour littéraires ! Il est plus qu'un accès internet salutaire pour les S ! C'est un symbole ! Un monde où ceux qui lisent des livres cohabitent - comme le cri d'amour du crapaud - avec ceux qui codent des forums. Regardez donc !"

Il se dirigea au centre de la pièce, vers une étagère remplie de livres de maths et de physique, éclairée par une étrange lumière qui ne venait de nulle part. En passant devant le rayon "Théologie", les livres prirent feu de manière inexplicable, mais il n'y fit pas attention. Il avait l'habitude.

"L'unité, mes amis... Un mathématiques, l'unité veut dire "un", la singularité, mais dans la littérature, c'est l'union ! Ensemble, tous réunis, nous sommes un ! Une voix, une parole, une seule promesse que nous faisons au monde : c'est de le débarrasser de ces immondices qui veulent traverser la porte ! Pour tout ce qui vous est cher, sur cette bonne terre, je vous demande de tenir, Hommes de l'Ouest !"

Citer le Seigneur des Anneaux mettait toujours du baume au coeur de ceux qui l'écoutaient. Il rejoignit sa lieutenante, se mettant à couvert à ses côtés.

"Je te fais confiance pour nous épauler et assurer la liaison entre nos deux groupes. On aura besoin de renfort, j'ai besoin que tu contactes les services informatiques. Notre seule chance de réussite dépends de toi, tu as toute ma confiance. Si jamais la situation se gâte, passe par le conduit d'aération, ils ne penserons jamais à aller te chercher là bas - en même temps c'est normal, jamais personne ne passe par les conduits d'aération."

Lara acquiesça et se jeta immédiatement sur un ordinateur. Enfin non, plusieurs... elle les alluma pratiquement tous. Relié en réseau, cela lui permettrait de pouvoir faire plusieurs actions à la fois tout en montrant de façon claire le plan du lycée aux autres. Tapotant sur les touches du clavier rapidement, elle émis pourtant un grognement sourd au bout d'un instant.

-Bon sang mais qui a encore IE sur son ordinateur ! On devrait porter plainte juste pour ça !!!

Branchant sa clé USB qu'elle portait habituellement en collier, Lara fit basculer l'ordinateur entier sous un nouveau logiciel qu'elle et la classe d'info avait mis deux mois à inventer... comme quoi, menacé par un mignon petit ebola... tout est possible !

Une fois l'ordi ainsi optimisé, elle chercha par tout les moyens à contacter la salle informatique mais un message s'inscrivis sur son écran : ALL DATA DELETED

Lara se figea.

-Chef... on a un GROS problème ! Ils ont la salle informatique !! Certes toute nos données ont été supprimé, mais on perd les infos !

Elle n'attendit même pas la réponse, et lança la caméra qu'elle avait caché dans cette salle. Ses hommes étaient attachés au milieu de la pièce, et les STG leur tournaient autour comme des rapaces attendant leur mort. La jeune fille serra des dents et regarda son chef.

- Laisse-moi aller les sauver ! On a besoin d'eux ! Sans l'informatique on est fichue !
- Comment veux-tu faire?
-J'ai installé des tubes de phénol là bas... une respiration et je les décimes... il suffit que je fasse diversion le temps que mes hommes mettent leurs masque à gaz !
- Si par "faire diversion", tu entends "me mettre en danger pendant quelques secondes", je ne te cache pas que je ne suis pas totalement pour.
-Si par "je ne suis pas totalement pour" tu entends "bouge pas de là sinon je t'y attache", je ne te cache pas que je suis carrément contre. On a besoin d'eux !
-Si par "je t'y attaches", tu entends... Oublie ce que je viens de dire ! Dans tous les cas je ne te laisserai pas y aller seule, on a aussi besoin de toi !
-Chef... vraiment là... M'enfin. Tu ne peux pas venir avec moi ! Et tes autres hommes se feraient massacrer ! Tu sais très bien cela !!
-Je sais, mais ça ne veut pas dire que tu dois y aller seule ! Choisis l'une des personnes présentes - tu as le droit de choisir le plus mignon - pour t'accompagner, et file moi une oreillette, que l'on reste en contact.
-Et bien… Présenté comme ça, je ne peux pas dire non !

Elle lui donna donc une oreillette et lui alluma par sécurité. Elle lui donna ensuite un micro dentaire qui était d’une précision sans faille, et elle mit le sien en place avant de se tourner vers ceux présent dans la salle pour choisir sa cible.

-Même un L, général ?
- S'il sait se servir d'un livre pour briser des testicules autrement que de manière métaphorique, je t'en prie.
-Bien !

Elle eut un léger sourire et se tourna vers un des officiers de l’armée de L et s’approcha de lui tout sourire. Elle lança une discussion animée et finit sur un vibrant discours pour qu’il accepte de la suivre. Lara l’équipa alors d’une oreillette et d’un micro, tout comme elle et son général, et elle s’arma ensuite avec une burette trempée dans une souche particulièrement virulente de lèpre. Se tournant vers l’officier, et elle eut un léger sourire… Il n’était peut être pas le plus efficace (elle n’en savait rien !) Mais le plus mignon, ça oui. Il se prénommait Lucas et son sourire charmait la jeune femme. Elle lui expliqua alors rapidement la mission, et lui donna un masque à gaz. S’il réussissait à vaincre les STG… Alors les ES accuseraient le choc. Lara se refusait à la défaite…