Fin d'année cent treize, quelque part aux abords de la frontière entre la forêt de Drayane et les montagnes...

Courir, ne plus penser, ne plus avoir mal. Cela fessait plusieurs semaines qu'Aywana courait sans but. Elle était partie sous sa forme lupine et depuis n'avait pas repris forme humaine. Elle ne s'était pas aperçue qu'elle faiblissait. Elle se nourrissait de petits gibiers de temps à autre pour continuer sa course contre son mal-être. Ce n'était plus le loup qu'elle était avant. Magnifique fourrure d'un noir brillant, imposante musculature, forte, rapide. Son poil paraissait souillé, emmêlé, terne. C'était les signes qu'elle n'allait pas bien. Elle ne s'en préoccupait pas, tout ce qui comptait pour elle maintenant c'était de ne plus s'arrêter jusqu'à ce que la mort vienne la délivrer de sa douleur. A bout de forces, Aywana s'écroula. Elle attendait patiemment que celle-ci vienne la chercher à son tour.

Cela fessait bientôt trois semaines que le vieux Arthag avait recueilli la louve à moitié morte. Il l'avait soigné, nourri et rassuré quand elle en avait besoin. Arthag comprenait bien qu'elle souffrait intérieurement. Un soir alors qu'ils dînaient, le vieux entama la conversation qu'il repoussait depuis trois jours. Celui-ci mal à l'aise se racla la gorge et se lança.

- Ecoute Aywie, j'ai très bien compris ce qui te tourmente. Toutes les nuits je suis là pour te calmer après tes crises. J'ai vu le masque l'autre jour sur le bureau dans ta chambre, excuse-moi je ne voulais pas être indiscret...

- Ce n'est rien, je n'ai pas à laisser traîner mes affaires. D'ailleurs cela ne se reproduira plus. Je vais beaucoup mieux maintenant. J'ai repris toutes mes forces. Je m'en irai demain à la première heure.

- Non, non, tu n'as pas compris, ce n'est pas pour cela que je te disais ça. Écoute-moi Aywana, je sais que les disciples de Nayris ont tué ta meute. Plus haut, ils ont brûlé tout le village. Ils ont tué femmes et enfants. Des bébés Aywana !

La jeune femme ne pouvait plus respirer. Des larmes coulèrent sur ses joues. Sa gorge se nouait, une voix tremblotante sortait de sa bouche.

- Ils...Ils... Elle essayait de contrôler ses sanglots à présent. Ils ont tué ma meute. Mon amour, l'homme avec qui je devais passer le reste de l'éternité. C'est lui qui m'a transformé.

Arthag se leva. Il caressait son dos pour la réconforter et lui murmurait à son oreille.

- Ils m'ont pris ma femme et mon enfant, mon fils. Il avait tout juste sept ans.

Aywana se retournait vers le vieil homme et l'étreignit.

- C'est atroce Arthag, il faut faire quelque chose !

Le vieux ne lâchait pas la belle et serrait son étreinte. Tout en lui caressant les cheveux, il ajouta.

- Je sais, ma petite, je sais. Écoute assis toi !

Aywie s'exécuta et le vieil homme prit place en face d'elle. Il dépliait une carte sous le regard interrogateur de la belle.

-Écoute-moi bien, nous sommes ici. Il indiquait leur position sur la carte. A trois jours de marche voire quatre tout au plus, j'ai repéré un temple caché à la gloire de Nayris. On pourrait y faire un tour et leur rendre leur monnaie de leur pièce pour tous les crimes qu'ils ont commis.


Aywana en avait assez de tout ça. Une lueur de vengeance parcourrait ses veines. Elle pensait que cela pourrait la soulager au moins pendant un temps.

- Dis-moi, on part quand ?

Le lendemain matin, ils équipaient leurs montures pour le voyage. Arthag possédait deux chevaux en grande forme. Aywana eut un temps d'adaptation, car ça n'était pas son mode de déplacement et forcément le cheval devenait nerveux en sa présence. Finalement, au bout d'une demi-journée de voyage, la belle et sa monture s'adaptaient l'un à l'autre.

C'était facile. Pour les repas, Aywana prenait sa forme lupine et chassait. Le vieil Arthag utilisait sa magie avec son bâton pour créer une barrière protectrice autour de leur campement pour les nuits. Aywie était reconnaissante envers le vieil homme, il s'occupait d'elle comme sa propre fille. Elle avait besoin de cette petite vengeance. Peut-être qu'elle se sentirait un peu mieux après. Elle pouvait faire cela pour Arthag aussi. Seul il n'y arriverait pas. Il n'était pas assez fort et puissant pour affronter un petit groupe d'adorateurs de Nayris sans aide. Elle se sentait plus forte maintenant et guidé par la vengeance, sa puissance en saurait que multiplié. A eux deux, ils avaient toutes leurs chances d'y arriver.

Les deux compagnons se postèrent en hauteur à environ cinquante mètres du temple. Ainsi ils avaient une vue parfaite sur les lieux. Le vieux et la belle comptaient cinq disciples ainsi qu'un garçonnet pied et mains liés.

- Ils vont le sacrifier murmura Aywana.

Arthag n'avait pas eu le temps de répondre que la belle s'était transformé en loup. Elle avançait déjà, son corps en alerte, doucement pour ne pas faire de bruit, les oreilles dressées à l'affût du moindre danger. Arthag émit un grognement. Ils n'avaient pas eu le temps d'échafauder un plan. La louve se retourna et retroussait les babines pour exprimer son mécontentement. Ils avançaient ainsi, la louve devant pour écarter tous dangers et Arthag à l'arrière pour les couvrir en cas de besoin. Aywana savait qu'il fallait agir vite, la vie du jeune garçon en dépendait.

Quand ils rentraient dans le temple, l'enfant était allongé sur l'autel, le disciple prêt à lui assener le coup de grâce. Ni une, ni deux, prit d'une violente fureur la louve sauta sur celui-ci et d'un seul coup de mâchoire, elle lui arracha la gorge. Surpris par l'attaque, les autres réagissaient trop tard. Aywana atterrissait déjà sur le deuxième disciple et Artahg lançait des éclairs sur le troisième. Enfin les deux autres reprenaient leurs esprits, ils sautèrent sur la louve.

L'un deux reçus un éclair en pleine poitrine et tomba lourdement sur le sol, mort. L'autre disciple fessait une tentative pour frapper la louve sur son flanc droit, mais celle-ci encore plus rapide qu'à son habitude du faite de l'adrénaline qui parcourait ses veines, l'évita, lui arracha une jambe et l'envoya à l'autre bout de la salle.

Le garçon effrayé par toute cette scène, hurlait de terreur. Les deux compagnons n'arrivaient pas à le calmer, alors Arthag lui lançait un sort d'endormissement. Cela leurs permettaient de sortir plus rapidement du temple avant que d'autres adorateurs n'arrivent. Voilà comment Aywana a eu sa première vengeance. Pendant son combat, aveuglé par celle-ci, sa douleur avait disparu. Après les événements, elle revenait la frapper toujours aussi puissante. Mais maintenant elle savait qu'elle pouvait l'apaiser un temps. Son but à présent : Survive jusqu'à ce que tous les disciple de Nayris et Nayris elle même ne puisse plus faire de mal à quiconque en ce monde.