Les yeux grands ouverts après l'intervention de sa sœur, bouche bée après son mensonge et ses larmes factices, Zeyros regarda les parents se tourner maintenant vers lui l'air horrifié : Le pauvre garçon s'était fait interpeller par les adultes pour savoir quelle était l'origine de ses blessures de plus en plus nombreuses, depuis plusieurs années maintenant il était couvert de bleus, voir de coupures. N'osant pas imaginer ce qui lui arriverait s'il disait la vérité, sa sœur le violant et le frappant et le griffant dans l'action de plus en plus souvent, il répondait qu'il était maladroit et se blesser en tombant dans les escaliers, en passant trop près d'une porte ou d'un mur, de trébucher dehors... Mais là il n'en pouvait plus, craquant sous la pression accumulée entre ses violents "parents" qui n'étaient autre que des profiteurs bien contents d'avoir un esclave et Ayrine qui le voyait probablement plus comme un objet de plaisir qu'autre chose, l'adolescent ne parvenait plus à retenir ses larmes et s'écroula en pleurs en dévoilant la vérité, tout ce qu'elle lui faisait, le forçait à faire, et pleura encore et encore.
Une fois la surprise passée, le père colla une furieuse claque à son bâtard. Comment osait-il ainsi accuser sa demi-sœur d'un tel comportement !? Rien que pour cet immonde mensonge ne visant probablement qu'à discréditer la jeune fille pour la faire punir et tenter de prendre sa place, il méritait d'être sévèrement, très sévèrement châtié ! Cependant avant de pouvoir le frapper une deuxième fois, l'incestueuse s'invita dans la salle. Sans doute était-elle là depuis le début et avait-elle tout vu, car elle se mit à pleurer lentement, à s'effondrer avec une lenteur désespérée sur les genoux et à porter ses mains à ses yeux pour les essuyer et essaya entre deux sanglots de dévoiler la vérité, l'affreuse réalité :
"De...depuis presque tr...trois ans...snif...Zeyros....Zeyros me viole régulièrement, j'ai..j'ai voulu vous en parler...mais j'avais peur...il m'a menacé...il a dit que si je racontais quoique ce soit il me tuait...je ne voulais pas mourir, je l'ai laissé faire, je n'en peux plus...par pitié, père, mère, aidez-moi..."
À terre après le coup de son père et une main sur la joue pour atténuer la douleur, le jeune homme en était les yeux ronds comme des billes. Il n'en croyait pas ses oreilles, quelle fourbe ! Elle le violait, le battait, puis l'accusait ? Comment pouvait-on être aussi...aussi immonde ? Ses pupilles s'écarquillèrent ensuite de peur lorsqu'il vit ses deux "maîtres", parents n'étant pas un terme utilisable, se tourner vers lui, estomaqués de ce qu'ils venaient d'apprendre. Ce sale petit gamin qu'ils nourrissaient et logeaient avait osé faire une chose aussi atroce ? L'infidèle paternel s'avança d'un pas rageur et empoigna par le col le léger garçon aux cheveux rouges, avant de lui mettre une violente gifle :
"C'est comme ça que tu nous remercie de t'avoir donné un toit et à manger !?"
Le bruit d'une deuxième claque retentit fortement dans la pièce, la mère était allé enlacer sa fille pour la calmer. Non pas qu'elle se souciait vraiment d'elle, mais plutôt qu'elle préférait ne pas se trouver trop près de son époux un peu trop agressif, et si elle n'avait pas lancé un regard noir au pauvre jeune homme, elle aurait peut-être pu voir le sourire cruel sur les lèvres de sa fille qui continuait à jouer son jeu de larmes.
"C'est ainsi que tu nous remercie de t'avoir élevé !?"
Tous les regards étaient rivés sur le malheureux Zeyros qui connut durant de trop longues minutes une effroyable souffrance : Son géniteur lui coller gifle sur gifle en rugissant sa fureur, le traitant de tous les noms, l'insultant, le frappant encore et encore alors qu'il peiner ne serait-ce qu'à respirer à cause de sa maladie qui s'était réveillée sous la peur qui lui engourdissait le corps. Mais bientôt il ne bougea plus, ne cria plus sous la douleur qui lui rongeait le visage. Ses oreilles semblaient closes, et ses yeux refusaient de voir plus longtemps ce monde d'agonie, il ne sentait même plus les baffes redoutables qui lui chauffaient les tympans. La fragile carcasse sous-nourrie du jeune homme n'avait pas supporté un tel traitement et celui-ci avait perdu connaissance.
Voyant l'inactivité du corps malingre qu'il portait à bout de bras, l'homme le jeta furieusement à terre et somma le reste de sa famille de le suivre pour aller porter plainte à la justice et faire exécuter dans les règles ce sale chien de bâtard, sa femme aida sa "malheureuse fille" à se relever et fut grandement tenté de lui répliquer que s'il lui arrivait de penser avec autre chose que ce qu'il cache sous sa ceinture ça ne serait jamais arrivé, mais voyant son énervement et l'état du gamin, elle préféra se taire et emboîta de le pas de son époux en lâchant l'incestueuse menteuse qui se mit à leur suite peu après, et qui lança un regard sadique et moqueur au corps inerte de son jouet préféré et lui tira la langue dans une attitude victorieuse, avant de tâcher d'avoir l'air triste et désespérée pour paraître plus crédible et, qui sait, peut-être charmer un des hommes de loi ?
Un certain temps s'écoula après le départ de cette affreuse famille avant que Zeyros ne redonne un signe de vie, revenant très lentement à lui, la tête particulièrement douloureuse, la vision instable et penchante, les oreilles sifflantes, lorsqu'il porta la main à son visage il put apercevoir entre deux flous noirs du sang. Cette vision vitale ramena son esprit et il put en décider rapidement l'attitude à suivre : S'il restait ici il allait mourir, les parents de sa violeuse ne croiraient qu'elle et le tueraient dès leur retour, il n'y avait donc pas à tergiverser sur quoi faire car il n'y avait qu'une seule solution.
La fuite.
Souffrant de toute la peine du monde pour parvenir à se mettre à quatre pattes, puis réussir enfin après de longs instants douloureux pour retrouver le sol du plafond, le jeune homme finit par se mettre debout bien que ses jambes refusèrent de le porter et qu'il se déporta rapidement de coté jusqu'à en heurter un mur, par chance ses mains avaient touché la pierre avant et lui avaient évité de s'assommer une nouvelle fois. Au contraire c'était même une aubaine d'être contre ce roc taillé, ça lui servirait d'appui. Ses neurones retrouvaient peu à peu leurs fonctions intellectuelles et parvenaient à établir un peu une démarche à suivre : S'il voulait partir, il fallait qu'il puisse se nourrir et se défendre, au moins le temps de s'habituer à une vie plus...sauvage. Donc il était nécessaire qu'il emporte de quoi subvenir à ses maigres besoins durant quelques temps, et une arme. Si ses pensées encore résonnantes après les gifles ne le trompaient pas, il se trouvait près de la chambre de ses parents dont il ne se servaient que pour recevoir des clients, Zeyros n'en avait jamais retenu le nom mais pour avoir dû la nettoyer plusieurs fois il se rappelait la présence d'une belle épée courte. Vu sa force légendaire, elle serait parfaite pour lui, et si sa mémoire ne lui joue pas de tour il y avait une dague planquée derrière un rideau des étagères. Tout ce qu'il pourrait prendre serait du bonus, en plus ça serait une vengeance, certes bien maigre, contre ses bourreaux.
Le bâtard ne s'était pas fourvoyé et avait vu juste : Il y avait bien dans ce "bureau" deux armes de petite taille qui iraient parfaitement bien à ses bras maigrichons. Visiblement la plus grande des deux était prévue initialement pour être portée car son joli fourreau blanc était relié à une espèce de ceinture, sans attendre plus longtemps malgré son tournis qui ne voulait décidément pas le lâcher, Zeyros s'empara de la lame et l'attacha à sa taille, puis en s'appuyant encore un peu sur le mur alla rejoindre l'endroit où il lui semblait avoir vu autrefois un poignard, n'y connaissant rien en arme il lui donnait le nom qui lui semblait le plus approprié. Cette fois encore il constata l'efficacité de ses méninges lorsqu'ils n'étaient pas maltraités et trouva son bonheur. Mais alors qu'il s'apprêtait à filer vers la cuisine, il se mit à fouiller le reste de la pièce en tâchant d'être assez rapide pour récupérer de la monnaie, il ne savait pas s'il y en avait mais vu que ses "parents" avaient tendance à planquer du pognon un peu partout...
Après avoir fait le tour de la salle sans vraie profondeur, il se remercia tout de même de cette belle idée qui lui permit de s'emparer de quelques dragons d'argent et partit ensuite vers la salle où il avait l'habitude de laver le linge de son horrible demi-sœur pour récupérer le petit sac qui l'accompagnait parfois lorsqu'il devait accompagner sa regrettée mère lorsqu'elle allait faire des courses pour ses maîtres tout aussi horribles que leur engeance, et une fois cette brave et modeste sacoche à la main se dirigea illico vers la cuisine et enfourna dans son bagage tout ce qui pouvait y rentrer tant que ça ne pourrissait pas rapidement, se retrouvant rapidement avec une poche pleine de pain et de viande séchée ainsi que d'une grande gourde qu'il avait remplie le matin même, loin de se douter qu'elle allait lui servir...
Une fois son "larcin" accompli, il referma ce qui assurerait sa survie durant quelques jours et le mit sur son dos avant de prendre la poudre d'escampette en filant par la porte des domestiques. Il s'agissait d'une petite entrée cachée pour permettre aux larbins d'aller et venir sans déranger les gens, comme si eux n'étaient que des bêtes, et donnait sur le coté opposé au cœur de la ville, donc s'il s'éclipsait par-là il serait plus en sécurité car ses prétentieux "parents" se jugeaient trop supérieurs pour aller courir la campagne. Il n'y avait plus qu'à espérer qu'il ne se fasse pas attaquer dans sa fuite, que ce soit par des bandits ou des fauves... Mais ne sachant pas quelle distance le séparait de ses bourreaux, ni combien de temps le protégeaient de leur retour, Zeyros s'enfuit au pas de course.
Un petit cours d'eau, ne faisant même pas un pouce ou deux de profondeur, s'écoulait paisiblement à une lieue de la maison aux décorations luxurieuses et inutiles. C'est à ce même modeste ruisseau que le jeune homme fit sa deuxième pause, la première lui fut forcée par son corps qui ne parvenait pas à supporter son déplacement précipité après quelques trop courtes minutes et l'avait forcé à marcher pour s'en aller. L'avantage de cette eau ruisselante était qu'elle était particulièrement fraîche et qu'elle amusait beaucoup le garçon qui trouvait plaisant de se comparer à elle : Tout maigre. Le fluide qui passait son chemin était des plus malingres, comme lui, rien que cette simplette réalité un peu enfantine lui donnait un léger sourire alors qu'il s'y abreuvait de tout son saoul. Puis profitant de ces instant de pause à l'ombre d'un arbre, il s'assit contre le tronc après avoir étanché sa soif et sortit son premier bout de pain dont il en cassa à la main un bon morceau qu'il fourra dans la poche de son vieux pantalon et rangea le reste dans le sac, souffla quelques minutes, retira ses modestes chausses et se releva : Il n'avait pas la moindre idée des moyens que seraient prêts à déployer ses maîtres non pas pour le retrouver lui, mais pour ramener son cadavre et lui arracher la belle épée qu'il venait de dérober. Aussi préférant éviter d'avoir à courser des chiens, Zeyros releva les manches de son pantalon en tenant dans chaque main une de ses chaussures et commença à remonter le petit cours d'eau.
Il remercia du fond du cœur sa véritable mère qui avait tenue malgré son modeste savoir à lui prodiguer un minimum d'enseignement et lui avait dit un jour que les chiens se servaient beaucoup de leur nez pour suivre les traces. Or l'eau ne conserve pas très bien les odeurs, surtout si elle ne stagne pas au même endroit, en la remontant ainsi il s'assurait de se débarrasser de tout traqueur durant un certain temps, quitte à en chopper un rhume. Entre la goutte au nez ou une épée dans la poitrine, le choix est vite fait... Même si la montée dans cette fraîcheur mordante et un peu glissant des fois était franchement désagréable, le jeune homme tâcha de persévérer et grimpa encore et encore... Sa marche salvatrice dans le courant s'arrêta après un bon quart d'heure, il n'en pouvait plus de cette sensation glaciale qui lui rongeait les orteils, et il sortit du ruisseau pour remettre ses chausses, et reprendre sa marche en se demandant ce qu'il allait désormais faire de sa vie. Déjà filer aussi loin que possible d'ici, puis ensuite...il n'avait pas la moindre envie de vraiment s'établir quelque part ou chercher un vrai boulot, toute son existence il n'avait été qu'un esclave et il ne tenait pas le moins du monde à faire encore des tâches ménagères ! Et puis il n'avait pas non plus envie de s'enfermer dans sa déprime continue, tiens et si il essayait d'être joyeux ? Ou au moins de le paraître ? S'il faisait n'importe quoi, particulièrement l'idiot, peut-être ça le distrairait ? Après tout il n'a plus rien à perdre.
Marchant encore pour mettre le plus de distance possible entre la maison de son enfance douloureuse et lui, Zeyros choisit peu à peu de devenir ce qu'il est aujourd'hui : Une sorte de mercenaire sans réelle importance qui fait un peu ce qui lui passe par la tête... Au fil des années il ne se passa rien de nouveau, ses pingres de "parents" durent sans doute mettre rapidement fin à leurs recherches pour économiser leurs précieux sous et de son coté lui rendait service en échange de quelques pièces. La seule nouveauté en fait dans sa vie après sa fuite, c'est qu'il parvenait maintenant à peu près à se battre à l'épée bien que son style soit des plus...uniques.