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 La nuit, tous les chats sont gris [Lucius]

 
La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mar 31 Déc - 15:50
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Le soir était doux en ce début d'été à Sen'tsura, et le monde s'enfonçait tout doucement dans l'obscurité, glissant paisiblement vers une nuit limpide qu'éclairaient déjà des flambeaux vacillants dans la brise. Embusquée derrière les fins rideaux de sa fenêtre, Messaline souriait dans l'obscurité; c'était son heure favorite entre toutes, comme elle suspendue entre deux mondes, un pied dans le jour, un pied dans la nuit, sans que l'on sache vraiment ce à quoi elle appartenait. La lumière déclinante éclairait encore le ciel de grands feux orangés qui se mêlaient à l'ombre nocturne dont le velours bleuté était déjà serti de la lueur des premières étoiles. Un vent tiède soufflait, chargé des parfums lourds venus des jardins et des fleurs capiteuses qui s'étaient ouvertes au crépuscule. La Belle de Nuit et la Fleur de Lune éclosaient peu à peu en grandes corolles blanches qui grimpaient le long de la façade et embaumaient l'air du soir d'une fragrance volatile et délicate.
Le silence tombait peu à peu sur les parcs et les belles demeures, et Messaline s'attardait encore, profitant de la fraîcheur de cette heure incertaine, entre chien et loup, avant de s'en aller courir des quartiers plus animés et à la vie nocturne moins morose. Elle aimait savourer en solitaire ce moment tout particulier de la journée, et musarder dans les derniers instants du jour, quand la lumière du soleil s'en allait peu à peu en cédant le pas à l'obscurité de la nuit, profiter de la chaleur résiduelle que dégageaient les pierres et s'adonner sans vergogne à la paresse comme un chat alangui.

Assise sur le petit balcon de sa chambre, elle était à demi dissimulée derrière les voiles blancs qui ondoyaient sous la brise dans l'encadrement de la porte. Un narguilé fumait à ses pieds, lâchant de longs rubans d'une fumée épaisse et capiteuse qui s'enroulaient en serpentins vaporeux et portaient jusque dans la rue son parfum lourd. On sentait l'odeur caractéristique et ennivrante de certaines drogues précieuses dont elle faisait grand usage pour apaiser ses maux et divertir son esprit, qui se mêlait à celle des fleurs autour de la fenêtre.

Dans le souffler léger de la brise nocturne, les rideaux se balançaient, dévoilaient par intermittence la silhouette de la jeune femme tapie comme une ombre, dont on pouvait de temps à autre entr'apercevoir les traits gracieux à la lueur d'une petite lampe posée sur le balcon. La flamme jetait une lumière étrange sur elle, dansante et fugace, et dévoilait de temps à autre l'éclat de la chevelure dénouée qui ruisselait sur ses épaules laissées à demi-nues par sa robe blanche, négligemment nouée à la poitrine d'une écharpe de brocart. Des reflets d'or sombre et chatoyant glissaient le long de ses cheveux roux dont les boucles soulevées par la brise se laissaient apercevoir comme les joyaux d'un trésor à demi-dissimulé, glissant en vagues de soie lourde sur sa peau de lait. Les mèches torsadées de la chevelure retombaient presque jusqu'à terre dans les replis épais de la ceinture couleur d'émeraude, et s'y mêlaient comme des broderies fabuleuses, mêlant le cuivre chaud à l'or précieux dans les motifs qui couraient sur la riche étoffe.
La tête paresseusement appuyée contre le montant de la fenêtre, elle avait posé sur ses genoux son oud dont le bois ciré luisait de reflets gras à la lueur de la bougie, et en pinçait les cordes du bout de ses doigts engourdis par la drogue. Elle avait les yeux à demi clos, laissant de lourdes vagues de fumée s'échapper de sa bouche entrouverte. Quelques notes s'envolèrent, soudaines et habiles comme une trille d'oiseau chanteur, résonnant faiblement dans la rue. L'obscurité était tombée à présent et la lampe vacillante brillait dans la ruelle déserte comme une étoile, révélant la silhouette de la jeune femme comme une ombre chinoises environnée de fumerolles délétères.

L'ombre murmurait aux oreilles de Messaline de douces complaintes qu'elle était la seule à entendre et infusait son esprit d'étranges rêves qui se reflétaient dans la danse de ses doigts sur les cordes fines dont elle tirait des accords mélodieux qui s'envolaient au hasard. La musique semblait hasardeuse, mais à bien écouter on y distinguait une structure, comme un refrain dont le rythme devenait plus perceptible à chaque instant, comme quelque chose qui se formait, peu à peu, que du chaos des premiers moments elle extrayait une mélodie nouvelle qu'accompagnait sa voix de gorge. Elle fredonnait, doucement, cet air sans suite qui revenait, entêtant comme un parfum, et s'envolait dans l'ombre pour saluer le clair de lune.

Et puis, alors que la nuit était totalement tombée, elle se tut, laissant le silence s'étendre à nouveau. C'est en se penchant pour souffler la flamme de la lampe, repoussant d'une main les rideaux qu'elle souleva à demi, que Messaline crut apercevoir quelqu'un en contrebas et qui semblait l'observer. Difficile d'en juger dans le noir, à la seule lueur du croissant de lune. La nuit était claire, mais ses yeux embrouillés par la drogue ne pouvaient en juger clairement, plus elle essayait de se concentrer sur cette silhouette, plus elle semblait se fondre dans l'obscurité.

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mar 31 Déc - 23:36
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Ah ! Sen’Tsura … de toutes les villes de Terra, celle-ci était sans aucun doute la plus envoûtante et la plus impressionnante. Le matin, les marchés s’animaient de leur ardeur caractéristique, les nombreuses odeurs s’entremêlaient savamment dans l’air. Chaque marchand rivalisait avec un autre en mettant à l’épreuve ses cordes vocales, vantant ses marchandises aux passants en élevant sa voix au-dessus du vacarme ambiant. Certains accrochaient à leurs auvents des banderoles, des pancartes et des guirlandes pour attirer les chalands. On aurait dit un air de fête tant l’animation était grande. Une foule de gens se pressait dans la rue des épiciers, la place des notaires, le marché des merveilles. Des âniers poussaient leurs chétives créatures lourdement chargés de marchandises venus d’ailleurs, de sacs de légumes, de vaisselle de faïence et d’autres bibelots.

Se faufilant à travers les groupes de badauds qui se formaient à chaque carrefour, un homme aux cheveux immaculés avançait à pas mesurés, tenant un petit coffre coincé sous son aisselle. Circulant aisément entre les remous humains, il atteignait les places les plus luxueuses du marché. Nettement plus propres, c’est ici que les plus riches marchands vendaient leurs produits de qualité. Des robes de drap amarante, en voile de laine, des bijoux, des mets exquis, des satins moirés et d’autres produits exotiques. Le gazouillis des femmes qui pullulaient dans ce lieu donnaient à ce lieu une étrange atmosphère d’intimité, tandis que les gardes postés dans des coins précis montraient la valeur de chaque boutique. Les marchands de cette partie différaient beaucoup du reste du marché public. La plupart étaient de jeunes hommes aux beaux visages, bien soignés dans leur mise et très courtois. Jamais une ride de colère n’apparaissait sur leurs visages joviaux. Ils faisaient montre d’une patience sans égal, usaient de paroles mielleuses pour mettre en confiance les clients, se dérangeaient pour montrer leurs marchandises les plus inaccessibles de leurs boutiques.

Mais derrière cette ambiance de paisible communion se cachait une terrible rivalité entre chaque marchand, et tous n’hésitaient pas à se servir de moyens « radicales » pour se débarrasser d’un concurrent trop ambitieux. C’est ainsi que Lucius avait trouvé une belle prime : abattre un certain marchand d’épices du nom d’Harold qui détenait des informations compromettantes sur le bijoutier Laurin. Lucius avait aussitôt promis au bijoutier de mettre au silence l’épicier dans les plus brefs délais. N’étant pas un assassin, ce ne fut pas fait dans une grande discrétion. Au lieu d’user d’insidieux poisons ou de pièges sournois, il se contenta de le coincer dans l’impasse d’une ruelle sombre et de l’achever rapidement d’un coup de dague au cœur. Un coup de maître, l’homme s’était effondré sans pousser le moindre gémissement. Le jeune homme s’était alors éclipsé dans l’obscurité des rues en laissant le cadavre exposé à la cruelle nature. On ne tarderait pas à découvrir le corps, et on classera cela dans les affaires de crimes normaux.

Lucius s’arrêtait devant plusieurs magasins. Les marchands s’empressaient de lui montrer leurs produits de toutes tailles. Toutes les nuances de couleurs défilaient devant ses yeux, mais aucune ne le détournait de son objectif. Il finit par atteindre la bijouterie de Laurin. Lorsqu’il entra, il fut frappé par l’odeur d’encens qui imprégnait l’air. Mais il savait que ce parfum servait à cacher l’odeur de sa marchandise illégale. Laurin était là, les coudes contre la table, inspectant chacun de ses précieux bijoux avec l’intérêt d’un père attendrit devant ses fils. Il leva ses petits yeux sournois pour voir qui entrait, et sourit en reconnaissant le chasseur de primes.

« _ Tiens tiens tiens, ne serait-ce pas mon cher bras vengeur, mon sauveur, ma main exécutrice ? Alors, as-tu supprimé ce maudit Harold ? »

Lucius ne répondit pas tout de suite. Il regardait d’un air absent un bouquet de roses au parfum délicat dans un vase de porcelaine. Avec lenteur, il prit l’une des roses, renifla longuement leur odeur puis la coinça dans le col de son manteau. Puis il daignât s’approcher de Laurin. Il posa le coffret sur la table et l’ouvrit devant ses yeux avides. Aussitôt, l’odeur caractéristique de la décomposition se fit sentir, se montrant plus forte que l’encens. Laurin plissa le nez et afficha durant un bref instant une mine dégoûtée. Mais rapidement un sourire satisfait apparut au coin de ses lèvres.

« _ C’est bien Harold, je reconnaîtrais son visage entre milles, même mort. Bon travail, tu mérite bien ta récompense. »

Poussant le coffret de coté, il posa une bourse bien rebondie sur le bois lisse. Le tintement de l’or résonna comme une mélodie dans la pièce. Lucius brandit rapidement sa dague et d’un coup horizontal, éventra le cuir de la bourse. Quelques pièces d’or s’en extirpèrent, mais le reste ne constituait que de vulgaires pièces de cuivre sans grande valeur, même pour un mendiant. Lucius agrippa aussitôt le col de Laurin et posa le tranchant de sa miséricorde sur son cou.

« _ Me prends-tu pour un imbécile, Laurin ? Duper quelqu’un d’aussi dangereux que moi … ce n’est pas très prudent. »

« _ Pitié ! Ne me tue pas ! Je te donnerais tout ce que tu voudras, mais je t’en prie, ne me tue pas ! » Cria le bijoutier avec la voix d’un porc blessé.

Lucius garda son poing fermé sur le vêtement de l’homme, et tapota d’un air rêveur le plat de sa lame sur son cou. Puis il le regarda de nouveau et lui afficha un sourire qui aurait fracassé le cœur de toute femme.

« _ Un sachet de la marchandise pourrait apaiser mon envie de t’étrangler avec tes intestins. »

Laurin se jeta aussitôt derrière une tapisserie et ouvrit un coffre secret. Il en sortit un sachet de lin au contenu douteux.

« _ De la bonne qualité, le meilleur dans tout le marché noir, je vous le garantis. Mais par pitié, ne me … »

Sa phrase fut interrompue par le geste brusque de l’ancien capitaine : il planta sa dague dans la table d’un air inquisiteur, l’intimant au silence. Puis il ouvrit délicatement le sachet et renifla la poudre qu’il contenait. Aussitôt, il roula des yeux avec une mine extasiée. Aussitôt, ses sens furent troublés par l’effet de la drogue précieuse. Il se sentait plus léger, flottant dans un monde ou’ la gravité n’avait aucun effet. Les couleurs prenaient un éclat plus joyeux, le monde semblait plus beau. Un soupir de plaisir s’échappa de sa bouche ouverte. Il quitta alors la boutique, laissant Laurin pétrifié sur place, un long filet humide tachant son pantalon …

Le merveilleux dragueur marchait à présent dans les carrefours de la ville, faisant en sorte d’économiser son précieux butin en le gardant caché dans sa poche. La nuit tombait et Lucius continuait son vagabondage. Lorsqu’il reprit un peu ses esprits, il se rendit compte qu’il devait chercher un lit pour dormir. Et il devait se dépêcher, au risque de dormir à la belle étoile en compagnie des chiens errants et des mendiants loqueteux.

Alors qu’il cherchait hâtivement une auberge, une odeur attirante atteignit ses narines uniques. Ses sens aiguisés distinguèrent l’odeur de la fumée du plaisir. Il leva les yeux et aperçut alors La Beauté, baignée dans un nuage de douceurs. C’était l’incarnation même de la tentation qui le fixait du haut d’un balcon de ses yeux aussi brillants que des joyaux. Affichant son sourire le plus charmeur, il laissa faire son don d’attirer la gente féminine. D’une voix envoûtante, il dit :

« _ Oh belle créature, auriez-vous l’immense gentillesse de m’ouvrir vos portes ? L’air est froid et les rues sombres. Être l’hôte d’une aussi charmante demoiselle serait pour moi un honneur. Je pourrais payer bien sûr, si vous le souhaitez. Quelque soit le prix que vous me demanderez, je le payerai, parole d’honneur ! »

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mer 1 Jan - 16:05
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Messaline plissa les yeux un moment pour tenter d'apercevoir la silhouette en contrebas, quand elle entendit sa voix monter jusqu'à elle. Sa vision quelque peu altérée par la drogue ne lui laissait entrevoir qu'une ombre pâle dans la ruelle, comme un spectre, blanc dans la nuit limpide. Elle sourit, et se redressa sur ses pieds vacillants, rallumant la lanterne qu'elle posa sur le rebord du balcon. L'homme lui apparut plus nettement dans la lueur vacillante de la bougie, et dans l'obscurité se dessina une chevelure immaculée qui encadrait un visage de marbre clair à l'expression avenante. Aux yeux ivres de la jeune femme, il avait des airs d'apparition fabuleuse, et son sourire déroutant faisait briller son regard rougeoyant de curieuse manière. Il n'était pas humain, c'était certain, et dans l'ombre où il se tenait, à peine éclairé par la chiche lumière de la lampe, il semblait issu d'un de ces sombres rêves, de ces légendes qu'on raconte au sujet des beaux jeunes gens qui viennent charmer les demoiselles pour les prier de les laisser entrer et se repaître d'elles. On disait que ces spectres, ces étranges vampires aux yeux de pierreries et au sourire d'ange ne pouvaient entrer que si on les invitait, sans quoi ils devaient rester au-dehors et se trouver une autre proie. Et s'il était l'un d'eux? Il semblait si peu réel, tout façonné d'ombres claires et d'obscurités fugaces, de riches soieries et de pierres qui brillaient comme des yeux aveugles. Mais sa voix résonnait encore à ses oreilles, trop nette et trop tangible pour qu'il ne s'agisse que d'une apparition causée par ses divagations.

Messaline s'accouda négligemment au balcon, se penchant vers l'inconnu avec un fin sourire. Tout cela amusait follement son esprit chaviré de drogues et de fumées, fut-elle en train de s'adresser à quelqu'un qui ne lui voulait que du mal. Hé, qu'importe? Le comportement et l'audace de ce bel inconnu lui plaisaient, et la surprenaient, ce qui était chose rare avec les hommes.

-D'ordinaire ce n'est guère pour cela que l'on me paie, répondit-elle avec une petite mine angélique, tandis qu'elle inclinait la tête de côté en laissant ses cheveux ruisseler sur son épaule à demi nue.

Elle se pencha un peu plus pour le regarder, et fit une moue faussement chagrine.

-Mais je suis seule dans ma chambre et vous avez l'air bien armé, qui me dit que vous n'en profiterez pas pour me piller pendant mon sommeil?

Disant cela, il y avait toujours dans ses yeux d'ambre sombre un sourire embusqué, son regard riait en silence alors qu'elle espérait qu'il entre dans son jeu. Car quel intérêt pouvait-elle trouver à héberger un inconnu pour la nuit, si elle ne pouvait en tirer plus qu'un peu d'argent? Il avait l'air plaisant le seul fait qu'il se soit permit de l'interpeller de la sorte suggérait qu'il y avait de quoi passer une soirée intéressante à ses côtés. Mais avant cela, elle avait envie de s'amuser un peu, juste pour voir, car on n'entrait pas comme aussi facilement chez elle, c'était un fait.

-Allons, reprit-elle avec son petit sourire de chat tandis qu'elle jouait avec une mèche de ses cheveux. Quelle demoiselle raisonnable laisserait un inconnu monter chez elle, sans aucun gage pour sa sécurité?

Son sourire semblait démentir ses paroles, comme une invite à répliquer à cette fausse innocence un peu farouche qu'elle arborait en façade, et il y avait dans ses yeux une lueur insolente. Insiste donc, si tu l'oses.

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mer 1 Jan - 22:19
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A’ mesure que la jeune femme se baissait pour le voir, Lucius avait l’occasion de mieux la contempler. Elle éclatait de jeunesse et de fraîcheur. Une robe blanche et éclatante venait illuminer la noirceur de la nuit. Le doux tissu laissait voir la pâleur de sa peau, et la taille de ses atouts, sur lesquels Lucius s’attarda à regarder un moment. Son visage était un vrai masque de beauté, avec des yeux chargés de malice et un sourire amusant. Sa chevelure écarlate ressemblait à un fleuve de flammes qui coulait sur une terre de marbre. Décidément elle était ravissante. Il n’avait pas vu de femmes pareilles depuis fort longtemps.

La voix de la dame glissait sur son esprit comme une musique. Chaque syllabe était un ravissement pour sa fine oreille. L’ivresse verbale était plaisante. Quand elle finit de parler, l’enchantement pris fin, et Lucius sourit comme après être sortis d’un bain agréable.

« _ Dans certaines situations, j’aurais dis que l’honneur m’empêcherais de m’en prendre aux biens d’une femme, mais ce serait un piètre mensonge. Mais, dîtes-moi, délicieuse créature : Avez-vous jamais vu un brigand demander la permission d’entrer dans une demeure pour la cambrioler ? Avez-vous vu un assassin prier sa victime de lui ouvrir ses portes ? »

Et sur ce ton ironique, il attrapa son manteau et fit mine de l’ajuster. Durant un bref instant, son torse athlétique apparut dans le champ de vision de la dame. Toujours souriant, il continua à la charmer de ses belles paroles :

« _ J’aurais aimé gravir des lauriers pour atteindre votre balcon comme le chevalier sauvant une princesse … mais en ces temps-ci cela serait apparenté à un voleur sans scrupule prenant d’assaut la tanière d’un riche marchand. J’ai bon nombre d’armes, certes, mais je pense qu’une seule pourrait vous intéresser … »

Un rire amusé s’échappa de sa gorge. C’était si amusant de faire la cour aux beautés de la nature. C’était un jeu fascinant et très divertissant, ou’ chaque interlocuteur usait de styles et de sous-entendus habilement cachés sous des phrases ajustées. Il leva les yeux au ciel et poussa un profond soupir. Une buée apparut un court instant avant de se dissiper.

« _ L’air est froid, cette nuit … Vous dîtes que vous êtes seule, n’est-ce-pas ? Et bien, je pense que ma présence pourrait agréablement réchauffer votre antre. Je connais nombre de moyens de divertir des personnes aussi intéressantes que vous. De l’art, de la poésie, des récits … ou des distractions plus sulfureuses »

Un clin d’œil prometteur conclus cette phrase mielleuse.

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mer 1 Jan - 23:31
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Le sourire de Messaline s'élargit furtivement quand l'étranger lui répondit presque aussitôt, comme un accord tacite pour rentrer dans la danse. Elle se réjouissait, déjà, de leur petite joute verbable et de l'habileté qu'il avait à rétorquer à ses provocations à demi dissimulées. Quelque chose au fond d'elle jubilait par avance de ce qui s'annonçait, des promesses de toutes sortes qui planaient dans les yeux d'or rouge de l'étrange inconnu. D'un geste, elle cueillit une fleur du liseron qui accrochait ses fines vrilles sur la façade et en froissa pensivement les pétales entre ses doigts.

-La force n'est pas toujours la meilleure solution, répondit-elle.

Elle avait légèrement baissé les yeux sur ses mains, disant cela, mais son regard continuait à l'observer en biais, embusqué derrière le long rideau de ses cils noirs.

-On ne se méfie jamais assez de ceux qui viennent susurrer des mots d'amour sous nos fenêtres, reprit elle avec une pointe d'amusement, le regard attiré par le geste qu'il eut en rajustant son manteau.

Son sourire s'accentua légèrement et une expression soudain plus attentive fila dans ses yeux comme une ride sur l'onde. De plus en plus intéressant, de cher spectre en habits précieux qui venait nuitamment lui demander hospitalité -et peut-être un peu plus, à en croire ses paroles. Elle se redressa, piquant la fleur dans ses cheveux, et l'observa un moment, le coude posé sur le rebord du balcon et le menton appuyé sur sa paume.

-Oh, vous pouvez toujours essayer, au moins aurez-vous amplement mérité votre repos dans mon lit si vous parvenez jusqu'ici sans passer par la porte, répliqua-elle d'un ton dont la légèreté voilait à peine le défi qu'elle venait de formuler.

Un petit rire lui échappa quand il parla d'une arme susceptible de lui plaire et elle haussa un sourcil, tandis qu'un long et fin sourire qui ne niait pas un certain intérêt soudain se peignait sur ses lèvres délicates. De l'audace, toujours de l'audace, et elle se prit à espérer qu'il en eût autant dans le verbe que dans d'autres domaines. L'allusion était certes plutôt graveleuse mais suffisamment élégante pour la divertir, et elle ne put manquer d'y répondre avec d'autant plus d'impertinence que la vantardise du personnage l'amusait.

-Tiens donc, une arme susceptible de m'intéresser? Je n'en vois aucune sur vous, je suis curieuse que vous me montriez ce dont vous me parlez, si toutefois on peut réellement l'appeler ainsi.

Elle le gratifia d'un sourire d'une insolence charmante et rajusta d'un geste le col de sa robe qui glissait un peu trop bas sur son épaule, l'observant d'un oeil de chat songeur quand il détailla les avantages que pourraient apporter sa présence dans sa chambre. Elle appréciait sa manière d'exprimer le fond de sa pensée qui était manifestement loin d'être innocente, tout en conservant la plus grande courtoisie, et surtout un aplomb qui semblait signifier que personne au monde n'était capable de résister à ses charmes. Eh bien, il avait en cela trouvé un adversaire à sa taille en la personne de Messaline, qui était soudain bien aise de s'être attardée autant avant de s'en aller en quête de clients.

La jeune femme répondit à son clin d'oeil par un léger haussement de sourcil assorti d'une petite moue innocente.

-Plus sulfureuses? Messire, en auriez-vous après ma vertu?

De savoir qui en avait après la vertu de l'autre, c'était plutôt difficile à cet instant, car l'éclat de son regard démentait clairement l'expression de son visage.

-Je serais néanmoins curieuse de savoir quel genre de poésie vous pourriez me réciter, reprit-elle avec un sourire. Il se peut qu'il me vienne, dans un accès de bon coeur, l'envie de vous accorder l'hospitalité, tout compte fait...

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Jeu 2 Jan - 19:37
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Les choses prenaient une tournure encore plus amusante. La belle semblait s’amuser de cet échange de bonnes paroles. Tant mieux. Le froid du soir commençait à caresser sa peau de granit, et un frisson agréable traversa son corps. Il jeta un regard de coté et aperçut une grande boîte de bois, sans doute abandonnée par un marchand ambulant. Il s’assit alors dessus et pris son aise, les jambes tendues et les mains derrière la tête. Cette position, vus d’en haut, ne pouvait que donner une idée encore plus générale sur son physique avantageux. Il poursuivit donc la plaisante conversation, le sourire ne quittant pas ses lèvres :

« _ Certes, mais si c’était le cas je pense que la dite personne n’userait pas de termes pareils. Elle inventerait plutôt une situation désavantageuse et jouerait sur les sentiments en tentant de faire surgir en vous votre part de pitié et de compassion … ce que hélas je n’excelle guère dessus. »

Tiens, voilà qu’elle l’invitait à grimper l’obstacle pour venir la rejoindre. La perspective d’un lit bien chaud était certes, très tentante. Surtout avec la promesse d’une compagnie des plus charmantes. Mais allons, il n’allait pas gâcher le plaisir de la cour si vite. Il passa ses doigts sur son menton d’un air songeur.

« _ Quelle ravissante invitation. Je serais un sans-cœur si je ne répondais pas à cet appel … mais à moins que des griffes ou des ailes ne poussent sur mon corps, je ne pense pas être à la hauteur de cette tâche … ou du moins pourrais la faire mais avec des moyens beaucoup moins subtiles … »

Il était bien capable de grimper là-haut : son fouet lui servirait de corde, sa dague de soutien. Mais inutile de l’effrayer, il devait garder cette ambiance de confiance réciproque. Un nouveau rire s’échappa de sa bouche lorsqu’elle parla de sa fameuse « arme ». Elle avait du caractère… pour son plus grand plaisir. Son sourire ravageur et quelque peu provocateur lui donnait des airs de déesse capricieuse.

« _ Et bien, belle enfant, vous êtes auréolée par la fumée du fantasme qui vient caresser mes narines, et vous me parlez de vertu ? Comme c’est curieux … »

Et, pour répondre à sa dernière phrase, il se leva, joua un peu des muscles pour faciliter la circulation sanguine et la regarda de nouveau. Il se mit soudain à faire des pas de danse de toutes sortes, d’imiter des duels imaginaires et des parades à des coups invisibles. A’ mesure qu’il faisait un mouvement, il racontait un récit en chantant d’une voix mélodieuse. Enfaite, il ne faisait que raconter sa situation avec des airs de fantaisie.

« _♫♪ Par une douce nuit dans la capitale des merveilles, un jeune paon rodait dans les ruelles. Marchant d’un pas ferme mais léger, en quête de joie et de volupté. C’est alors qu’attiré par une fumée odorante, il vit une déesse blanche dotée d’une couronne flamboyante. Le jeune homme tomba aussitôt sous son charme, et devint le serviteur de ses fantasmes. Tel le chevalier attendant le mouchoir de sa dame, tel le gladiateur cherchant la gloire par la lame. Dans la froideur du soir il patiente, attendant la réponse de cette belle amante.♪♫ »

Et sur ce, il inclina l’échine avec grâce, saluant les spectateurs à la fin d’un théâtre. Pendant son jeu, il avait galamment coincé la rose qu’il cachait dans son manteau entre ses dents blanches, un sourire éclatant venant éclairer son visage. La magnifique demoiselle allait-elle enfin lui ouvrir ses portes ? Ou allait-il encore savourer la froideur de l’air ?

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Jeu 2 Jan - 22:59
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Messaline, accoudée à son balcon, leva les yeux au ciel avec un petit sourire rêveur.

-Oh, je crois pourtant que j'aurais adoré vous voir me supplier...

Une petite moue déçue lui vint quand il déclina, toujours aussi élégamment, son invitation à la rejoindre par ses propres moyens. Dommage, le spectacle aurait été appréciable, et voir un tel homme en action ne lui aurait sans doute pas déplu, mais quelque chose lui suggérait qu'elle le verrait très bientôt, peut-être sous une autre forme.

-Comme c'est curieux? Répliqua-elle avec une moue outragée. Je ne vous permet pas, monsieur, c'est vous qui venez me proposer de drôles de choses, et je ne doute pas qu'une fois dans mon lit, vous ne songiez guère à dormir.

Une pause, et elle leva de nouveau les yeux au ciel comme si elle réfléchissait.

-Quoique je vous comprends, à votre place, j'aurais sans doute les mêmes pensées. Je vous pardonne.

Ce disant, elle rajusta coquettement une mèche de ses cheveux, tandis qu'elle le voyait se lever de l'endroit où il s'était assis pour converser avec elle, observant son petit manège avec attention. Un sourire lui vint, et dans son regard attentif on vit poindre une étincelle, quand il s'étira, laissant entrevoir sous ses vêtements une silhouette propre à lui inspirer quelques pensées fort peu vertueuses. Son sourire s'élargit encore lorsqu'il commença son étrange pantomime, et elle se redressa pour mieux voir, portant une main à sa bouche pour étouffer le rire surpris et amusé que la scène lui inspirait: sous le clair de lune fugace, il évoluait comme une ombre blanche dans le noir, drapé de ses atours chatoyants et de ses riches étoffes, le rouge sanglant de son manteau faisant une tache mouvante dans l'obscurité. C'était soudain une scène de conte, à ses yeux ivres; comme dans ces vieux récits où l'amant soupire dans la nuit au balcon de sa belle et où l'on s'échange des voeux éternels du bout des lèvres avant une conclusion fatale.

Il était tout aussi gracieux et habile à jouer et réciter que ses manières le laissaient présager, laissant deviner un talent, sinon un fort attrait pour les choses du théâtre, comme s'il était en constante représentation. Cela lui plaisait, à elle, qui se forgeait d'artifices et de faux-semblants et avait fait de sa vie toute entière un masque, une façade savamment construite et étudiée; elle connaissait si bien cet art qu'elle décelait sans peine aucune l'attrait de l'étrange personnage pour les choses de l'art. Tout homme se doit de porter une oeuvre d'art, disait un penseur connu, et il semblait avoir tout à fait assimilé cette maxime au point d'en devenir une lui-même, en toutes choses de sa vie.

Lorsqu'il courba l'échine devant elle, signalant la fin de son petit récit, elle rit encore, et ôta de ses cheveux la fleur qu'elle y avait glissée. D'un geste théâtral, elle la porta à sa bouche pour y déposer un baiser, avant de la laisser tomber aux pieds de son nocturne visiteur. Son sourire éclatant avait sans aucun doute fait chavirer bien des coeurs, et elle lui reconnut un charme indéniable.

-Voici le gage de que vous espériez, mon doux ami, affectant l'attitude chaste d'une princesse de contes de fée.

D'un sourire, les apparences s'effacèrent et elle s'accouda de nouveau au balcon, l'observant d'un regard effronté.

-Votre récit ressemble à un joli conte, et vous avez tout du prince charmant. N'accomplirez-vous donc pas quelque action valeureuse afin de me prouver votre valeur?

Et dans ses beaux yeux sombres, il y avait quelque chose qui disait "surprends-moi encore". Elle était curieuse de voir jusqu'où irait son audace, de l'observer, d'assister au spectacle qu'il semblait se plaire à offrir au monde entier, n'y eut-il qu'une unique spectatrice.

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Ven 3 Jan - 15:51
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Son manège semblait faire son effet : Il parvint, comme promis, à divertir sa douce spectatrice. La belle laissa échapper un mignon petit rire qui ne fit que la rendre encore plus désirable. La dame aux cheveux ardents embrassa la fleur qu’elle portait et la laissa théâtralement tomber. Durant sa lente descente, Lucius s’agenouilla comme un preux templier et tendit lentement sa main gantée pour attraper la plante. Une fois la fleur au creux de sa main, il l’inspira longuement, avec un brin de sensualité, puis la porta à son cœur, yeux fermés et sourire serein.

« _ Ma belle demoiselle, je vous remercie pour ce tendre présent qui égaye l’antre de mon esprit et brûle mes sens d’une belle chaleur. »

Il se releva avec élégance, gardant toujours la rose entre ses dents. La couleur de ses pétales se mariait avec celle de son manteau, un rouge vif et joyeux qui venait percer l’épais rideau des ténèbres du soir. Un bref éclat traversa ses yeux au rouge doré lorsqu’elle l’apparenta à un prince charmant. Un courbement de tête respectueux répondit à cette belle comparaison. Il gagnait ainsi toujours plus de terrain dans cette bataille verbale. La victoire était là, comme une pomme d’or scintillante, attendant qu’un brave assez courageux la cueille avec délicatesse. Mais encore fallait-il grimper sur le tronc d’arbre.

Et en parlant de ça, voilà que la princesse des flammes l’invitait à l’impressionner encore plus par un acte de valeur. C’était l’invitation finale, la cerise sur le gâteau. Enfin, la dame l’invitait à le rejoindre. Elle n’allait pas lui ouvrir tout simplement ses portes, non ! Elle voulait encore tester ses capacités, voir à quel point il pouvait aller pour la satisfaire. Il médita pendant quelques secondes, le temps de voir comment atteindre sa récompense (oh combien désirable). Il se décida finalement à lui prouver son désir en escaladant les murs de sa chaleureuse demeure. Les plantes grimpantes allaient lui faciliter la tâche. On aurait dit que la nature elle-même lui venait en aide pour assister à l’accomplissement d’un acte héroïque… A’ moins qu’elle ne veuille plutôt regarder la suite des événements, qui se révélaient être de plus en plus intéressants.

« _ Tendre amie, je vais gravir l’obstacle que représente vos murs pour atteindre votre accueillant balcon. Comme le papillon attiré par la lumière, je vais escalader la pierre pour atteindre la douceur qui vous imbibe comme un manteau de tendresse. C’est avec le cœur en joie que je vais vous rejoindre pour partager avec vous, cette agréable soirée. »

Et sur ces belles paroles, il tira sur ses gants, et commença sa laborieuse ascension. Lucius prenait tout son temps, laissant ainsi la charmante créature le contempler plus longtemps. La tâche n’était pas ardue, et tout homme bien bâti et suffisamment entraîné pourrait sans grand mal atteindre la hauteur de la maison.
A’ mesure qu’il montait, l’odeur des drogues laissait place au parfum savourant de la femme. Cette odeur envoûtante avait sur lui l’effet d’une essence divine, et il décupla d’ardeur et de volonté. Petit à petit, il s’approchait du but, et il sifflait un air entraînant pour ignorer la froideur qui tentait de le déstabilisé.

Enfin, quelques instants plus tard, sa main se referma sur le rebord du balcon. Il se hissa triomphalement et resta debout sur l’étroit espace qui le séparait du sol ferme. Il froissa rapidement les pétales de la fleur que lui avait offerte la femme et les lança au-dessus de lui. Elles retombèrent sur lui comme sur un gladiateur victorieux. Puis il posa ses deux bras sur le balcon et avança son thorax en avant pour s’approcher de la femme. Un petit espace seulement les séparaient l’un de l’autre à présent.
Cérémonieusement, il ôta la rose de sa bouche et la tendit à cette charmante amante au sourire mielleux.

« _ Voici une fleur, pour une autre fleur … »

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Sam 4 Jan - 20:10
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Le sourire victorieux du flamboyant personnage n'échappa pas à Messaline qui devait bien lui concéder d'avoir remporté avec brio cette manche. Mais avec une pointe de mauvaise fois, elle la lui accordait seulement parce qu'elle le voulait bien, eut-il était plus laid à regarder et n'eut-elle été de l'humeur adéquate, il aurait dû aller chercher ailleurs une autre qui lui ouvre ses portes -et ses bras, sans nul doute.
Elle répondit à sa courbette par un petit signe de la main, et attendit en souriant qu'il réagisse à ses paroles, ce qui ne tarda pas. Elle rit de nouveau, et lui tendit la main en se penchant par-dessus la balustrade.

-Venez donc à moi, doux ami; j'ai ici de quoi récompenser votre bravoure et votre dévouement. Vous avez mérité votre place auprès de moi pour ce soir, et je me languis déjà de vous avoir auprès de moi...

Messaline ne put s'empêcher d'assister au spectacle fort intéressant qu'il offrait alors que son étrange compagnon du soir s'attaquait à l'escalade de la maison. L'étage n'était pas bien haut et les vrilles des plantes qui la couvraient faisaient autant de prises solides pour s'y appuyer, ce qui ne représentait pas d'obstacle insurmontable pour un homme de sa stature. Il semblait se plaire au jeu autant qu'elle et elle devina dans sa lenteur théâtrale un effet tout à fait voulu qu'elle sut apprécier à sa juste valeur. Cela faisait bien longtemps qu'on n'avait pas prit le temps de lui faire la cour en bonne et dûe forme, et ça, pour y mettre les formes, elle lui concédait un talent indéniable. Restait à voir ce qu'il réservait pour la suite et quelque chose lui disait qu'elle n'allait certainement pas s'ennuyer, ce soir. Cela ne remplirait pas ses maigres finances mais qu'importe; elle ne ratait jamais une occasion de se distraire en aimable compagnie.

Quelques pensées vagabondes filèrent sous sa rousse caboche alors qu'elle le voyait venir à elle, fredonnant en souriant ainsi qu'un de ces galants de contes qui vont à la nuit tombée se glisser dans l'alcôve des demoiselles pour quelque secrète aventure. Le rouge du manteau de la rose ensanglantaient l'obscurité dansante à la lumière de la lanterne et répondaient dans un accord harmonieux à la nuance changeante de ses yeux étranges qui luisaient comme des pupilles de chat dans le noir. Il avait quelque chose d'un fauve, soudain, même sous ses dehors aimables, comme une panthère blanche éclaboussée de pourpre fumante, un fantôme chuchotant dans la nuit douce de l'été, trainant dans son sillage un parfum de soufre.
Il surgit sur la balustrade comme une apparition, soudainement éclairé par la lampe tout près de lui. La flamme fit étinceler l'ambre rousse de ses yeux fauves, et elle lui sourit, s'avançant d'un pas quand il lui tendit la rose qu'il avait portée dans sa bouche. Elle en respira le parfum un instant avec un air de princesse ébouie par ce miracle, avant d'en rompre la tige pour orner son décolleté. La jeune femme l'observa un instant, et puis eut un petit sourire en coin qui dissipa très vite ces airs angéliques.

-Voici déjà un peu de votre gratification, beau seigneur. Après tant d'efforts pour parvenir jusqu'à moi, laissez-moi vous offrir un peu de réconfort. Après tout, ne l'avez-vous pas mérité?

Ce disant, son sourire s'élargit un peu plus et elle se pencha, tout doucement, pour déposer un baiser au coin des lèvres de son galant inconnu.

Elle se redressa vivement, comme si de rien n'était, et écarta de la main les draperies qui fermaient la fenêtre, emportant la lampe avec elle. Sa lumière rasante qu'elle gardait près d'elle la dessinait en contre-jour et révélait d'une vive clarté la transparence légère de sa robe que serrait à la poitrine son écharpe de brocard. Sous la cape ondoyante de la chevelure qui descendait jusqu'à la cambrure de ses reins, il pouvait sans peine entrevoir les formes délicates de son dos gracieux et de ses hanches depuis lesquelles retombaient les longs plis légers de son vêtement. Elle s'arrêta un instant, jetant un regard par-dessus son épaule pour voir s'il la suivait, et entra dans sa chambre, où la lueur de la lampe fit étinceler quelques parures abandonnées ça et là comme des trésors répandus sur le sol. La pièce n'était pas grande, et manifestement, c'était un endroit fait pour y dormir, et non y vivre. On pouvait deviner beaucoup d'une personne, en regardant l'endroit où elle vivait, et la chambre de Messaline ne faisait pas exception. On n'y voyait qu'un grand lit chargé de draperies usées et de coussins profonds, et de toutes parts, répandus sur les rares meubles et ses quelques effets, tous les matériaux nécessaires aux artifices de la coquetteries. Quelques instruments de musique gisaient ça et là, certains enveloppés avec précautions de linges épais. Elle semblait de passage, et à peine rien de plus qu'une chaise et quelques coffres de bois usé n'occupaient l'espace de la pièce, comme si elle ne venait ici que pour s'y reposer et entreposer ses effets personnels.
Une odeur lourde planait dans la chambre, à peine diluée par le vent frais qui s'immisçait entre les rideaux. Un mélange de parfums, de tubéreuse, de poivre et d'encens, et surtout des effluves reconnaissables de diverses drogues que l'on voyait précieusement entreposées dans un coffret près du lit.

Messaline eut une petite courbette en priant l'inconnu d'entrer, disposant quelques coussins autour d'une petite table basse où, après en avoir ravivé les braises, elle avait déposé le narguilé encore fumant.

-Prenez place, dit-elle aimablement en s'y asseyant en tailleur. Profitez-donc d'avoir échappé au froid de la nuit, vous êtes ici chez vous, pour ce soir.

Elle rajusta les pans de sa robe sur ses jambes, et froissa délicatement les pétales de la rose qui faisaient comme une tache de sang pressée contre son sein pâle. Son sourire faisait briller ses yeux sombres d'un éclat charmant tandis qu'elle souriait avec l'expression caractéristique de celle qui a une idée -et plus d'une, en vérité- derrière la tête, et tarde de les concrétiser. Mais point encore, oh, non; patience, le jeu était loin d'être terminé. Elle était curieuse, à vrai dire, maintenant que le loup était dans la bergerie.

-Vous me promettiez des choses, tantôt; dit-elle d'une voix douce. Nous divertir, je crois, de choses et d'autres... J'ose espérer que ce n'étaient pas des paroles en l'air, mais au vu de la hardiesse dont vous avez fait preuve pour venir à moi, je gage que vous ne tarderez pas à tenir vos promesses, peut-être même au-delà de mes espérances.

Et s'il ne les tenait pas, eh bien, elle ferait le nécessaire pour que la soirée soit intéressante tout de même. La manière dont elle le regardait à présent laisser planer un doute quant à savoir qui des deux était le chasseur et la proie. Il l'avait sans doute déjà deviné, elle n'était pas du genre à se laisser chastement courtiser et si elle lui laissait pour l'heure les devant, c'était car il semblait plein de surprises et qu'elle cherchait d'abord à voir jusqu'où irait son audace. Le loup dans la bergerie, vraiment? Peut-être finalement que c'était lui, qui s'était laissé piéger dans son antre... La joute n'était en aucun cas terminée, elle sans nul doute qu'elle se prolongerait encore, sans peut-être même qu'il n'y ait de gagnant au bout du compte.

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 5 Jan - 16:56
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La vie était pleine de surprises, et réservait toujours aux hommes des tournants surprenants. Certains auraient dis que ce n’était qu’un hasard, d’autres prétendraient que c’est l’œuvre d’une force invisible. Des personnes fanatiques insisteraient sur l’influence de grandes divinités, et des individus plus lunatiques prétendraient que c’est la toute puissance du destin qui était à l’œuvre. Le chasseur de primes se refusait à croire à ces sottises. Le Destin … une pathétique entité capricieuse qui se joue de l’existence et agit comme bon lui semble, qu’elle qu’en soit la conséquence. Ce n’était qu’un vieux conte de grand-mères destinés aux enfants trop belliqueux. Quant aux dieux … Il niait leurs existences, alors qu’il croyait en leurs existences. On l’appelait hérétique, mais ce terrible surnom marqué au fer rouge dans son esprit n’était rien comparé à la vérité, la si cruelle et infâme vérité : Le monde est soumis à des entités mesquines et arrogantes, qui prenaient un malin plaisir à faire souffrir les êtres vivants. La guerre, la douleur, les malheurs … tout ça n’existerait pas si ces puissances célestes avaient jugés bon d’en priver leurs créations. Mais le spectacle de leurs misères était un trop beau divertissement pour eux.

Non, le fruit de cette rencontre n’était qu’un hasard pur et simple, un hasard merveilleux qui tombait à pic pour notre aventurier. Lucius put mieux savourer la beauté de son amie quand il parvint à la rejoindre : La lumière de la lampe donnait un éclat flamboyant à ses cheveux, et la prunelle de ses yeux brillait d’un éclat de pierre précieuse. Il sourit lorsqu’elle s’approcha de lui avec la grâce d’un ange, et lorsque ses lèvres généreuses posèrent un doux baiser sur le coin de ses lèvres, son sourire s’élargit encore plus. Pendant un bref instant, il ressentît cette douce quiétude qui l’enveloppe à chaque contact aussi intime. Puis il reprît ses esprits et reporta son attention vers sa ravissante hôte. Cette dernière avançait à pas feutrés vers son antre, d’où émanait une douce chaleur. L’ancien capitaine ne put qu’admirer la forme parfaite de cette merveille de la nature. C’était un ravissement pour les yeux que de contempler la blancheur de sa peau, le rougeoiement de ses cheveux, la splendeur de ses hanches et de son dos. Certes il n’était pas monté si haut pour venir abuser d’elle, mais pour passer la nuit. Néanmoins, partager le lit d’une aussi délicieuse créature ne serait pas un drame, bien au contraire.

Il bondit avec allégresse au-dessus de la balustrade et suivit la demoiselle dans sa chambre. L’ambiance environnante qui le frappa était tout à fait à son goût : Simple, paisible, peu décoré mais chaleureux. La caresse de la chaleur de l’air fit détendre ses muscles engourdis, et un soupir d’aise s’échappa de sa poitrine. Il inspira profondément, et reconnut parmi les nombreuses odeurs celles du plaisir secret. La dame ne se privait pas de bonheur, c’était certains.

L’invité ôta son manteau écarlate et l’accrocha soigneusement sur l’un des meubles de la chambre. A’ présent, il n’avait pas besoin de ce riche vêtement pour se réchauffer. Seul son gilet noir cachait son torse de la vue de la sublime femme, mais à présent elle avait une idée plus générale sur ses bras musclés et ses épaules bien bâties. Répondant à sa douce invitation, il s’assit près d’elle sans grande gêne. La douce hôte lui demanda alors de réaliser ses promesses. Et bien, elle ne serait pas déçue.

« _ Mon don, noble dame, est de décupler le plaisir autour de moi par un merveilleux parfum. Désormais, durant cette nuit, votre plaisir atteindra des sommets inimaginables. Une nouvelle porte s’ouvre pour vos sens. Profitez-en , c’est le gage de ma gratitude envers vous, douce demoiselle. »

Et alors qu’il parlait, une odeur de musc fantastique envahit l’air. Aussitôt, les sens de la charmante femme évoluèrent au-dessus de la normal. Désormais toute chose plaisante prenait un degré de paroxysme surnaturel. L’effet des odeurs de ses drogues prenait une puissance rare et embrouillait son esprit de douces saveurs. L’homme, dans un geste visant à fouiller les poches de son manteau, toucha pendant un bref instant la peau délicate de sa douce amie. Le sens du toucher, décuplé, avait surement laissé un frisson de plaisir la parcourir. Il extirpa une petite gourde métallique décorée d’une rose de fer. Il versa dans deux petits verres son contenu : un vin rouge à la douceur réputée. Le goût du vin aussi, changeait pour s’apparenter à un véritable nectar divin.

« _ Buvons à cette charmante rencontre ! »

Et lorsqu’il finit son verre, il posa le sachet de poudre précieuse sur la table, cadeau pour la femme. Une drogue de très grande qualité, tirée des champignons de Flore. Elle allait être ravie. Puis il s’empara d’une harpe qui trônait dans la salle et pinça ses cordes. La mélodie qui atteignit les oreilles était un véritable hymne à l’extase. Jamais oreille humaine, ni même elfique, n’aurait savouré avec autant de délice cette musique. Le son, affecté par son don surnaturel, se transformais à lui seul en un baume pour le cœur et une caresse pour l’esprit. Et sur ce début prometteur, il poursuivit son jeu avec grâce, ne décevant nullement son amie.

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 5 Jan - 22:26
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S'affairant à remettre des herbes à brûler dans le narguilé, Messaline ne quittait qu'à peine son hôte des yeux, savourant déjà du regard le joli poisson qu'elle avait pêché de son balcon. Maintenant qu'elle le voyait si proche et en pleine lumière, elle était absolument certaine de ne pas regretter sa décision. Toutefois, ses paroles semèrent le doute, et elle haussa un sourcil alors qu'il en disait un peu plus sur ses fameux talents pour égayer leur soirée; un soupçon de perplexité et surtout de la méfiance. Prudence, soufflait quelque chose dans son esprit, comme un vestige de raison dans les tourments qui l'habitaient. Prudence, ou bien tu tombera le nez dedans avant de comprendre ce qui t'arrive. Mais très vite, tout s'effaça, tout se tut, et elle sourit d'un air de petite fille à qui l'ont vient de faire le plus fabuleux des présents, sa gorge et ses narines emplies de ce parfum qui soudain se répandait et recouvrait toutes les fragrances qui planaient dans la pièce. Elle aurait été bien en peine de décrire cette odeur, pourtant si forte, qui lui faisait tourner la tête; c'était comme vouloir décrire le goût du sel, difficilement qualifiable quand on n'y avait pas goûté. On y sentait quelque chose comme du musc, une note persistante et lourde qui semblait imprégner toute chose et laissait comme une saveur suave sur sa langue, avant que ne s'épanouissent les émanations plus légère de ce qui ressemblait au parfum d'une fleur, de quelque jacinthe ou népenthès. Un soupçon d'encens, un soupçon d'épices. Et tout au fond, tapi en dedans, les prémisses de sa propre perdition.

Il y eut au fond d'elle un élan d'inquiétude, un vertige soudain, comme si elle se tenait juste au bord d'un immense précipice, tout prêt à l'engloutir. Elle resta silencieuse, comme subjuguée, et cette fois, eh bien; c'était lui qui avait gagné. Elle frémit à son contact, et quelque chose d'obscur s'agita dans ses décombres intérieurs; quelque chose qui chuchotait dans le noir de douces promesses, et la certitude qu'une fois qu'elle aurait goûté cela, il n'y aurait plus d'ivresse assez profonde, plus de transe assez intense, plus de drogue assez délétère pour assouvir sa soif. Elle qui avait vécu dans la souffrance pendant des années ne recherchait plus que le plaisir, comme une fin en soi, jusqu'à ce que la mort revienne la cueillir en son bel âge. Si peu de temps à vivre, et tant de choses à faire... Et soudain, voilà que le destin mettait sur sa route celui qui pouvait d'un souffle exhaucer son souhait le plus cher, celui qui semblait incarner tout ce qu'elle pouvait espérer de l'existence. Un sourire de serpent et des yeux d'ambre sourde, et la mort, là, tapie dans chacun de ses gestes, comme un chat qui se cache de sa proie pour mieux la duper. Il était un danger pour elle, et il l'apprendrait, tôt ou tard.

Messaline se reprit, esquissant un sourire incrédule, et lâcha un petit rire, le regardant droit dans les yeux. Elle y voyait danser le reflet des bougies, et dans leur éclat mordoré, elle y distinguait comme un signe: ce beau visage souriant qui la contemplait était celui de sa propre perte.

-Vous êtes stupéfiant, dit-elle à voix basse, l'esprit troublé par ce charme étrange qu'il dégageait comme une aura.

Elle ferma les yeux un instant, respirant profondément pour repousser les vapeurs qui lui montaient à la tête. Accoutumée qu'elle était à l'usage de substances diverses, Messaline savait toutefois garder un minimum de contrôle sur les effets que tout cela pouvait produire sur elle, et avait l'habitude d'évoluer dans un état second. Elle sourit, l'étourdissement passé, et eut un petit signe de tête charmant qui fit dégringoler quelques mèches de ses cheveux le long de son décolleté.

-Je vois à présent que vous étiez hautement dans le vrai dans vos vantardises de tout à l'heure, et j'en suis bien aise. Si seulement tous les vagabonds qui rôdent sous mes fenêtres pouvaient être comme vous...

Il était manifeste qu'elle était plus que fascinée par le personnage, et tout ce que ce don étrange pouvait impliquer. Ses yeux sombres ne cessaient de le fixer, de le dévorer littéralement du regard, et il y avait dans leur incandescence profonde le reflet des idées vagabondes qui filaient dans son esprit et s'échafaudaient déjà en rêveries fébriles.

-Aux joies du hasard, dit-elle en trinquant avec lui, et à ce qui nous a menés à cette charmante rencontre!

Le vin capiteux ne lui dégagea pas plus l'esprit, mais qu'importe. Quand la perspective d'une ivresse sans pareille lui tendait les bras, elle n'était certes pas du genre à s'y refuser.
Elle posa un oeil curieux sur le sachet qu'il déposa sur la table, mais très vite, l'odeur qui s'en dégagea la renseigna sur son contenu. Elle eut un sourire ravi, et en préleva un peu du bout des doigts pour la déposer sur le dos de sa main, dans le creux que formait son pouce et son index. Le geste, familier et rapide, trahissait ce qui était bien plus qu'une habitude, chez elle, et elle eut un petit hochement de tête assorti d'un sourire satisfait.

-C'est un beau cadeau que vous m'offrez là, et je devine qu'il s'agit de la plus grande qualité, même si je dois reconnaître que votre... influence est plutôt propre à fausser le jugement.

Messaline esquissa un geste pour le retenir en le voyant saisir une harpe, mais se ravisa quand les premières notes résonnèrent dans la chambre. Elle n'aimait pas que l'on touche à ses instruments de musique, ces vieilleries sans âge qui l'avaient suivies depuis la maison de sa mère. Ils étaient, d'une certaine manière, la chose la plus intime qu'elle puisse posséder, tant elle avait versé son âme, son enfance et ses larmes dans les boiseries craquelées de ces vieux objets. Mais la sonorité envoûtante qu'il tirait de cette transgression dont il n'avait sans doute pas conscience chassa bien vite le malaise, et elle ferma les yeux un instant, les sens affûtés par la drogue et ce qu'il dégageait, laissant les notes résonner et se dessiner, presque tangibles, derrière ses paupières closes.

Doucement, tout doucement, elle l'accompagna de sa voix claire, fredonnant à sa suite cet air inconnu. Elle avait toujours eu pour la musique plus de passion que pour toute autre chose au monde, et cet air qui la ravissait avait un charme sans pareille pour son esprit connaisseur.

Messaline

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Et c’est ainsi que la gente dame connus le plus doux et le plus exquis des plaisirs. Ce don, venu de nulle part, avait servis durant maintes années au jeune chasseur de primes dans ses incessants voyages en quête de délice et de plaisir. Tout en son être était fait pour attiser les désirs et les fantasmes, les excès et les rêves. Plusieurs fois, de fervents prêtres le prirent pour un incube, ces démons malfaisants qui abusent du sexe opposé par d’obscurs maléfices pour ensuite se nourrir de leur sang tels des vampires. Mais Lucius n’en était point un. C’était un simple humain proche de la perfection, voilà tout.

Certes, cette description n’était point modeste, mais comment donc décrire un être aussi sublime que lui ? Les simples mots ne suffisent pas … Et cela semble être le cas aussi de la délicieuse demoiselle à la chevelure écarlate. La nature s’était montrée très habile pour créer une aussi belle femme. La contempler, sous la lumière des bougies, était presque un enchantement, et Lucius, si son esprit n’était pas aussi résistant face à l’alcool, aurait bien crus que ses yeux étaient abusés par une quelconque mystification.

Quoiqu’il en soit, la musique qu’il jouait habilement faisait son effet. Son hôte se balançait lentement au rythme de la mélodie. C’était une douce musique qu’il avait appris à jouer au coté d’un musicien impérial. Séduis par la douceur de ses octaves, par la régularité de ses notes et par la tonalité des sons, il s’appliqua aussitôt à appliquer cette voluptueuse musique.

Bientôt, sa bonne amie accompagna son air par un chant clair et tendre. La voix fusionna avec la musique, et ensembles, donnèrent une symphonie digne des grands théâtres. Lui-même fut emporté par la mer de ces sensations qu’ils réveillaient. Il balança doucement la tête de gauche à droite, un sourire rêveur au coin des lèvres. Puis aussi brusquement qu’un fil qui se rompe, l’enchantement disparut, et la musique prit fin.

L’artiste reposa délicatement la harpe là ou’ elle était, avec la lenteur et la minutie que l’on accorde à un objet sacré. Puis il retourna son attention vers sa douce compagne.

« _ Et bien ma dame, votre voix semble être faîte pour le chant. Vous auriez accomplis bien des exploits dans les grands théâtres de Sen’Tsura. »

Il posa ses deux mains derrière sa nuque et s’étendit un peu pour mieux savourer la chaleur réconfortante du narguilé. Ses yeux vagabonds errèrent pendant un moment à contempler le décor simple et pourtant sympathique de la demeure. La chambre était, en tout cas, bien plus propre et beaucoup plus accueillante que certains dortoirs. Il sentait que ce paisible lieu allait lui offrir bien du réconfort cette nuit, et peut être même plus qui sait …

« Mais dîtes moi très chère, vous ne m’avez pas donné l’honneur de connaître votre nom. Le mien est Lucius. Puis-je connaître le votre, douce enfant ? »

Ainsi, les liens qu’ils tisseraient seraient beaucoup plus forts, et le sentiment de distance entre eux n’en serait qu’amoindrie. Il attendit donc de nouveau la réponse de la demoiselle avec cette patience qui, jusqu’à maintenant, ne lui à jamais fait défaut.

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Ven 24 Jan - 13:36
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La musique adoucit les moeurs, dit-on, et ce ne fut jamais plus vrai qu'en cette nuit limpide où il y eut comme un instant de grâce, bercé par la douce mélopée où Messaline fit résonner sa voix au son de la harpe que maniait de main de maître son hôte de passage. Comme un prélude à l'abandon, elle s'était laissée emporter, les yeux à demi clos pour ne plus entendre que la musique qui s'envolait, claire et cristalline comme une averse de cristal, et ondoyait comme les vagues merveilleuse de quelqu'océan de perles précieuses. Au travers de ses paupières entrouvertes, elle ne distinguait plus qu'un brouillard de lueurs diffuses et la silhouette pâle de son compagnon qui se dessinait en blancheurs crayeuses et en replis d'étoffes couleur de sang frais. Comme des algues dans le courant, comme les branches d'un même arbre, elle et lui se balançaient lentement au même rythme, à l'unisson, jusqu'à ce que tout retombe dans un silence qui vint tout recouvrir un instant. Messaline s'affaissa un peu sur elle-même lorsque la chanson fut terminée, comme si la musique lui avait prêté des forces qu'elle n'avait pas d'ordinaire, et une grâce que la mélodie seule pouvait lui donner.
Elle rouvrit les yeux, et le voyant reposer la harpe avec tout le soin et le respect que l'objet le méritait, le pardonna tout à fait d'avoir enfreint ce qu'elle interdisait d'ordinaire à tout autre.

-C'est un des nombreux talents que l'on me prête,
répondit-elle aimablement avec l'un de ses petits sourires angéliques qui faisaient briller ses yeux d'un éclat déroutant. La musique a des dons que l'on ne soupçonne pas, et vous semblez vous aussi un fin connaisseur, c'est heureux.

Elle conclut ses paroles par une petite mine satisfaite, assorti du hochement de tête typique de celui qui se reconnaît un égal. Sur bien des plans, leurs talents semblaient assez bien assortis pour leur permettre de trouver assez à partager et à faire pour le restant de la soirée, voire même de la nuit.

Lorsqu'il se présenta, elle posa sur lui un regard curieux, et inclina de côté sa jolie tête qui fit dégringoler quelques mèches folles le long de sa gorge.

-Lucius, répéta-elle en faisant siffler les syllabes sous sa langue. Eh bien, c'est un nom peu commun que voici. En cela, je trouve qu'il vous sied fort.

En vérité, l'apparence du personnage était toute aussi inhabituelle que pouvait l'être son prénom. La sonorité des lettres filait comme le chuintement d'une lame hors du fourreau, prête à faire couler le sang, dont quelques gouttes semblaient s'être égarées au fond de l'ambre de ses yeux. Il était toujours intéressant de connaître le nom d'une personne; Messaline n'avait jamais vraiment cru aux vieilles légendes que l'on racontent et qui prétendent que connaître le nom de quelqu'un, c'était avoir un peu de pouvoir sur lui et que bien des sortilèges devaient plus efficaces quand on connaissait cela. Toutefois, elle devait bien reconnaître que le fait de dévoiler son nom pouvait en dire plus long qu'on ne le croyait à propos de soi. Les mots ont un pouvoir et les ceux-là plus encore, car ils disent d'où l'on vient, et renferment en eux un peu de ce que l'on est. On ne peut connaître ce que l'on ne nomme pas, et les noms, comme les masques, sont autant de manière de renfermer un secret.
Finalement, ce blanc spectre tout vêtu d'ombres et de rouge qui était apparu dans la nuit, que pouvait-il être, sinon Lucius?

Répondant à la question qu'il posa ensuite, elle fit un petit salut compliqué tel qu'en était l'usage à Feu et qui lui donnait toujours des airs de grande dame.

-Mon nom est Messaline, dit-elle en se redressant élégamment.

Elle avait eu un instant, alors qu'elle se présentait, une certaine noblesse dans sa manière se tenir et de saluer, des manières aristocratiques qui n'échappaient que rarement à un regard exercé. Pourtant, tout sembla s'effacer quand elle porta à sa bouche l'embout fumant du narguilé et laissa un flot de fumée grise s'échapper de ses lèvres entrouvertes. Quelle genre de demoiselle bien éduquée pouvait se permettre de se vêtir de la sorte et d'agir ainsi? Messaline aimait laisser planer le doute sur son identité, et ses origines. On croyait parfois saisir quelque chose, mais, passée maîtresse dans l'art de mentir et de se cacher, on n'attrapait au vol qu'un faux-semblant, une illusion, qui s'évanouissait aussi vite qu'une vapeur entre les doigts, au point que l'on ne sache plus distinguer le vrai et le faux dans ses paroles et dans tout le reste.

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Sam 1 Fév - 23:15
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Belle soirée … oui, très belle soirée. La musique, douce et envoutante, avait apaisé les esprits et attendrit les cœurs. Le parfum de musc planait encore dans l’air, tel un doux nuage invisible caressant les deux protagonistes, venant se mêler à la fumée et à l’air glacé dans une fusion de sensations et de sentiments vifs et puissants. Le plaisir et la bonne entente se mariaient dans cette chambre simple mais accueillante. Le temps lui-même semblait s’être arrêté, tentant d’apaiser son éternel fardeau en se reposant avec eux.

Après des jours d’activités fiévreuses, la citadelle de Sen’Tsura s’installa dans un état de calme total. La nuit semblait être la seule chose capable de faire régner la paix dans les rues de la capitale. Les gens étaient néanmoins assez nombreux à errer dans les ruelles. Certains passaient, étrangement furtifs, aussi silencieux que des ombres illusoires. Un garde qui patrouillait dans la cour eut droit aux regards perplexes de chats errants, véritables fantômes des quartiers. Les allées et venues et les bruits nocturnes éveillaient la curiosité des flâneurs. Ceux qui arrivaient dans la citadelle en cette nuit on prenaient vite les façons discrètes.

Cet épais silence, serein et tranquille, était presque aussi agréable que la mélodie qui venait de résonner entre les murs qui encadraient Messaline et Lucius. D’ailleurs, ces derniers venaient à peine de connaître le nom d’autrui. Messaline … un nom curieux, qui résonnait lentement dans les oreilles du chasseur de primes et de conquêtes. Messaline … ce nom semblait être fait pour être prononcé lentement, comme pour savourer chaque syllabe avec le même délice qu’un fruit mielleux. Un nom mystérieux, mais plaisant.

Et la façon dont elle se présenta lui rappela quelque chose … un souvenir lointain, détenteur de fortes sensations … Mais oui ! C’était Feu, cette terre chaude et impressionnante, gardienne de nombre de secrets et de merveilles. Lucius avait déjà eu l’occasion de visiter ce lieu pour une mission. Les souvenirs refluent soudain : Il se remémore, lui, grand guerrier aux cheveux immaculés, contemplant le désert dans la lumière du matin qui se découpait dans une faille au-dessus d’une falaise. Quel beau spectacle ce fut, ce jour-là …

Et c’est pourquoi il ne pût s’empêcher de laisser un sourire rêveur traverser ses lèvres, les yeux fermés dans une attitude sereine. Puis il s’approcha de la belle dame, d’un pas agile mais soutenu. Une prestance tangible imprégnait chacun de ses gestes en ce moment, éclairé par la lumière des lampes. Il saisit délicatement la main de son amie et porta doucement ses lèvres à sa peau fraîche et douce. Il laissa ce baiser durer un moment, puis lentement, sa bouche quitta la main de la demoiselle avec toute l’élégance qui l’avait accompagnée. Il regarda ensuite l’avatar de la beauté qui le fixait de haut et lui sourit en penchant sa tête de coté.

« _ Enchanté … Je suis heureux d’avoir fait la connaissance d’une aussi délicieuse demoiselle. C’est un plaisir que ni le vin ni le tabac ne pourraient compenser ! »

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 2 Fév - 0:25
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Messaline laissa de nouveau une longue et profonde bouffée de fumée odorante s'échapper mollement de sa bouche entrouverte, observant Lucius d'un regard curieux, alors qu'il semblait se laisser aller à une rêverie profonde, fermant à demi ses paupières sous lesquelles on saisissait le reflet fugace de ses yeux d'ambre rousse. Elle pencha légèrement la tête sur le côté, devinant que quelque chose dans les paroles qu'elle avait prononcées, dans son nom peut-être, avait ravivé chez lui quelques souvenirs heureux.

Ses grands yeux sombres ne le quittèrent pas alors qu'il s'approchait d'elle, comme un spectre qui resserrait l'étau autour de sa proie, le détaillant au passage dans la lueur mouvante des lampes qui animaient sa peau et ses cheveux de longs reflets d'or pâle. Il y avait chez lui une grâce et une prestance qui le rendaient fascinant à observer, la même puissance subtile et cachée que celle d'un fauve en chasse. Elle eut un sourire quand Lucius prit délicatement sa main pour la porter à ses lèvres dans un long baiser, de ces expressions qui illuminaient son regard insolent des mêmes braises qui tapissent les enfers. Un frisson lui courut le long de l'échine, tandis que ce qui n'était somme toute qu'une marque de politesse se transformait soudain en toute autre chose, plutôt une promesse de délices futurs qu'une démonstration de galanterie.

-Tout le plaisir est pour moi, répondit-elle avec un gracieux hochement de tête.

Son sourire n'avait pas quitté son visage, et s'accentua un petit peu à présent qu'ils étaient si proches. Elle l'invita à s'asseoir près d'elle, et remplit de nouveau leurs verres avant de vider le sien aussitôt. Ce soir, comme bien souvent, elle avait le goût de l'ivresse, le goût de la perdition, et celle-ci n'était jamais plus complète que lorsqu'on s'abandonne en compagnie d'un inconnu. Elle ne savait rien de lui, et n'en voulait rien connaître, car de toute manière, de lui resterait-il à l'aube? Rien de plus que le vestige d'un parfum au creux des draps, piégé dans ses cheveux, rien de plus qu'une image qui passe et qui s'efface, et s'abîme bien vite dans l'oubli. Nul n'est irremplaçable, et tout talentueux qu'il fut, quels que fussent ses dons en matière de plaisirs divers, il y en aurait d'autres, bien d'autres, d'autres vins, d'autres drogues, d'autres gens pour peupler ses nuits d'étreintes fugaces. Le plus important était l'instant. L'alcool qui lui brûlait la gorge, la fumée qui emplissait sa gorge et sa poitrine, et s'élevait de toutes parts dans un brouillard à peine troublé par la brise venue de la fenêtre. Le plus important était cette seconde, chaque seconde, chaque sensation. Celle des grains de la poudre qu'elle avait aspirée et qui se dissolvaient lentement en libérant leur ivresse, celle qui s'attardait encore comme une brûlure à l'endroit où il avait posé ses lèvres, celle du parfum qui émanait de lui et lui faisait tourner la tête... Qu'importe ce qu'il était, qu'importe qui était, qu'importe le mal qu'il pouvait lui faire.

Elle reposa doucement sa coupe sur la table basse, et ses yeux, comme des perles d'onyx, étaient emplis des relfets des lampes et d'un éclat intérieur qui brûlait d'une incandescence profonde. Elle ne cessait de l'observer, lovée dans les coussins, très exactement comme un chat dont on ne sait que dire des intentions qui l'animent. Curieuse encore, elle attendait, mais il y eut encore, dans son attitude et dans sa voix, un reste de convenances, comme si aucune pensée autre que la courtoisie d'une généreuse hôtesse n'occupait son esprit lorsqu'elle le regardait.

-Mais dites-moi, dit-elle avec un petit sourire; cela vous arrive-il souvent de chercher abri pour la nuit sous le balcon des demoiselles? J'imagine qu'un homme de votre qualité n'est pas sans le sou, au point de devoir errer le soir venu à la recherche d'un gîte convenable.

Ce disant, son regard qui fixait d'abord les yeux de Lucius avait fini par s'égarer un peu, jusqu'au pli fin de sa bouche, suggérant quelques idées vagabondes qui n'avaient plus beaucoup de rapport avec leur conversation.

Messaline

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 2 Fév - 17:32
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Van Horrificus se releva lentement, et s’arrêta au niveau de la demoiselle. Ainsi en tête à tête, il avait tout le loisir de contempler son joli minois et son sourire cajoleur. Ses yeux couleur d’ambre semblaient briller à mesure qu’ils se perdaient dans les pupilles couleur perle de Messaline, comme si ils tentaient de sonder l’abîme profond d’un lointain horizon, perdu dans les confins d’un océan illusoire. Il s’approcha encore un peu plus, puis renifla sensuellement le parfum exquis qui imprégnait le cou de la dame. Cette nuance olfactive, riche et forte, était une caresse pour ses narines, une preuve de l’appartenance de cette femme à un monde différend, un monde de mythes et de légendes.

Lucius ne put que sourire à mesure que cette belle créature attisait sa curiosité et l’envoutait à la manière d’une pierre précieuse. Messaline était un rubis rouge étincelant, qui n’attendait qu’à être délicatement saisi pour en contempler plus profondément les facettes reluisantes. Un trésor qui vous tendait les bras … n’allez-vous pas le saisir à l’instant ? Mais Lucius était un homme patient, qui aimait prendre son temps, savourer chaque instant. Car sa devise n’était-elle pas « La vie ne vaut la peine d’être vécue que si on savoure chaque expérience plaisante qu’elle nous offre » ?

A’ la suite de l’invitation de sa douce campagne, Lucius s’assît près d’elle, presque collé à elle dans une amusante insolence. Les coussins étaient confortables, et cela lui rappela l’une de ses somptueuses tavernes de Feu, ou’ les gens s’asseyaient sur des coussins autour d’une table ronde, se partageant d’impressionnants mets dans des ambiances joviales et chaleureuses, le tout baignant dans la chaleur de la foule et l’odeur de l’encens. Il se saisit délicatement de la coupe que lui tendit son hôte et but lentement, savamment, la liqueur. Le goût du vin coulant sur sa gorge fit l’effet d’une marche empressée de milliers de fourmis. Un chatouillement aussi agréable qu’apaisant. La lenteur avec laquelle il buvait les boissons aurait put exaspérer ses camarades, mais à quoi bon vider son verre d’un trait si on ne prenait pas le temps de déceler les nombreuses saveurs qu’il cache comme un coffre au trésor enfouis ? C’était la philosophie de notre charmant ami, et il n’était pas prêt de changer.

Messaline, de sa voix suave, lui posa une amusante question qui lui soutira un petit rire. Elle était perspicace, et savait bien jouer avec les mots. Encore un duel oral ? C’était un jeu qu’il avait souvent pratiqué, dans les grandes cours ou dans l’ombre des rues, que ce soit avec de grands seigneurs ou de savants érudits. C’était un jeu difficile, car chaque personne tentait de faire crouler l’inspiration de l’autre comme un château de cartes, sous les assauts de sous-entendus et de mots habilement cachés. Le jeu pouvait se révéler être dangereux, quand l’un des joueurs se révélait être un cruel roi, un triste sir ou un prédateur jouant avec sa proie. Mais un jeu restait un jeu, et quelques soit sa contrepartie ou ses règles, il était fait pour amuser. Mais allons allons … ils étaient déjà en train de jouer au jeu de la cour, jeu tout aussi subtil et plaisant. Un seul jeu à la fois, voilà ce qu’il aurait dit.

Lucius posa sa main sur sa joue dans un air de penseur amusé, son coude posé sur la douce surface des coussins. Il semblait préparer une quelconque réponse, comme un félin méditant sur sa future attaque, en pleine partie de chasse. Puis la réponse vint, lente et méticuleuse. Elle était prononcée en chantant, comme un de ces philosophes ou bardes en pleine divagation artistique :

« _ Ma chère amie, d’habitude je passe ma nuit dans quelques tavernes, maisons ou auberges. Parfois, c’est sous la bonne étoile que je me couche, exposé à la nature et à ses caprices. Bref, vous l’aurez compris, je passe souvent d’un lit à l’autre … »

Et oui, il ne put s’empêcher de répondre au petit défi oratoire. C’était tentant, car la charmante demoiselle savait aussi jouer. Mais le temps passe et on ne pouvait jouer indéfiniment au même jeu …

« _ Mais j’avoue que, si j’avais eu le temps d’atteindre une auberge, je n’aurais pas eu l’immense plaisir de vous tenir compagnie. Aussi, je ne regrette pas d’avoir chercher abri sous votre balcon. »

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Mer 26 Fév - 21:40
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Lentement, doucement, la nuit tissait des charmes ténus autour de Messaline et de son invité du soir et semait des bouquets de fragrances mêlées comme des encens brûlés à la gloire de l'inconstance et du plaisir. La drogue se consumait lentement sur les braises et ses fumerolles vagues se déroulaient avec paresses en longs rubans vaporeux où se faufilait la lueur des lampes vacillantes qui faisaient comme un brouillard d'or gris. Il ne semblait plus demeurer dans la pièce un lieu qui ne fut habité par les vapeurs odorantes de la résine brûlée, et par la présence, envahissante, écrasante, enivrante, du pâle visiteur venu cueillir, à même la gorge de Messaline, les effluves de son parfum. Il y respira, tout contre sa peau, comme on goûte à la fragrance d'une fleur avant de la cueillir, laissant derrière lui le vestige d'un frisson ardent. Lentement, lentement... Tant de délicatesse encore, tant de précautions... Lucius avait, dans chacun de ses gestes, jusqu'à la moindre de ses manières, l'attitude de celui qui cherche à profiter de chaque chose, chaque instant, pour en tirer tout ce qui était possible. Messaline n'avait pas cette patience qui vient sans doute à ceux qui ont une longue vie encore devant eux, et brûlait chaque seconde avec frénésie afin de n'avoir plus rien à regretter une fois l'heure arrivée. Mais pour le moment, ils avaient encore toute la nuit devant eux, et comme elle s'annonçait prometteuse...

Le laissant s'asseoir près d'elle, la jeune femme sourit, alors que reprenait sans coup férir leur joute verbale. Le son de sa voix lui était agréable, et plaisait à son oreille musicale, d'autant qu'il semblait se plaire à cette manière de s'exprimer qu'ont les gens de lettres et les bardes.

-Passer d'un lit à l'autre, voilà une activité amusante. Mais je n'ai aucun doute sur le fait que vous auriez trouvé une galante compagnie pour ce soir, fut-elle d'une qualité moindre à la mienne.

Elle eut, ce disant, une petite mine arrogante qui dissimulait un rire au fond de ses yeux.
Remplissant de nouveau sa coupe, elle la porta à ses lèvres pour y boire une gorgée avant de poursuivre.

-Il est bon d'avoir l'âme vagabonde, à trop rester au même endroit, l'on finit par n'y dénicher que l'ennui. Il y a bien trop à voir dans le vaste monde pour pouvoir se contenter d'un seul lieu, mais c'est une chose que les honnêtes gens ne semblent guère comprendre, je crois.


La jeune femme acheva ses paroles sur un fin sourire, qui s'élargit encore tandis qu'elle poursuivait.

-Mais il y a tant de choses qui sont hors d'atteinte de ceux qui se targuent d'être des bonnes gens... Il m'arrive de les plaindre, parfois, quand je songe à tout ce qu'ils ratent, en essayant de demeurer dans le droit chemin.

Ceci dit, Messaline n'avait jamais réellement essayé d'être de ces gens honnêtes, ne serait-ce que parce qu'on n'avait jamais rien attendu d'elle, sinon qu'elle aie la délicatesse de ne jamais avoir existé. Mais à grandir dans l'ombre, dans les marges et entre les mondes, elle avait vite compris que la bonté d'âme ne serait guère à ceux qui se trouvaient dans sa position et que, puisque l'on ne se souciait pas d'elle, tout lui était permis. Même avec tous les efforts du monde, elle ne pourrait sans doute pas se fondre dans le moule étroit d'une vie ordinaire, corsetée de principes et de restrictions morales. Sans doute n'en aurait-elle jamais le temps, de toute manière. C'était rassurant, d'une manière, de se dire qu'elle pourrait tout à loisir s'éparpiller aux quatre vents, s'empoisonner à toutes les drogues du monde et agir à sa guise sans que l'âge ne la rappelle aux tristes conséquences de sa jeunesse mouvementée. La mort viendrait bien assez tôt pour tuer dans l’œuf tous les maux amorcés par son existence dissolue, aussi, il ne lui restait plus qu'à faire en sorte d'en avoir assez profité pour en être repue.

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Jeu 27 Fév - 21:51
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Le chasseur de primes hocha la tête, ses dents régulières et blanches apparaissant derrière ses lèvres dont la couleur démontrait la vitalité de cet homme. Il écoutait attentivement, et peut être même avec passion, les paroles bien modelées et élégamment prononcées de sa galante compagne. Elle avait une ravissante façon de prononcé chaque syllabe comme le chant d’un rossignol par une belle journée de printemps. Encore une fois, il fut saisit par le charme naturel qui émanait de cette dame tels les chaleureuses caresses des rayons d’un soleil éclatant. Il se laissa un peu allé à la douce rêverie qui l’enivrait, amplifiée par les effluves confus des drogues et par le parfum de sa douce amie. Encore une fois, la conscience semblait le quitter pour laisser place au rêve, qui se manifestait en une aurore aux doigts de roses.

Mais notre charmant ami fut tiré de sa torpeur passagère par les paroles mielleuses de Messaline, dont la lueur fugace qui animait ses yeux comme une braise ne trompaient pas sur ses coquettes arrière-pensées. Pendant un instant, un bref instant, il eu l’envie de se saisir délicatement de cette fine fleur, de la cueillir de ses mains avides et tremblantes pour ensuite inhaler totalement son parfum exquis et unique, véritable supplice venant fusionner avec la très légère robe qui recouvrait l’havre de délice qu’était son corps favorable. Mais heureusement, cet homme, en grand dandy et honorable gentlemen, savait se contrôler, calmer ses pulsions par d’habiles promesses. Une fois de plus, la raison et l’expérience vinrent en renfort pour refermer la porte grinçante de l’antichambre de ses désirs.

Lucius se met de côté, offrant une position avantageuse pour contempler sa douce interlocutrice. Cette position, outre le fait de lui donner plus de confort, était une invitation silencieuse pour se lover au creux de son torse, disant, athlétique. Face à lui, la femme à la chevelure de braises semble pensive, presque inquiète. L’ancien capitaine n’était pas un expert dans le domaine des troubles mentaux et physiques, mais il pouvait lire, dans la prunelle de ses yeux brillants, comme le reflet de sa délicieuse âme, l’ombre d’une inquiétude. Une joute silencieuse se peignait sur les traits raffinés de Messaline, à mesure qu’elle tentait de garder son apparence amusée et paisible. En vrai homme d’honneur, il se devait de réconforter son hôte avec la même douceur qu’un jardinier envers sa plus belle plante.

Soudain, sa promesse d’amusement atteignit son esprit noyé dans le flot d’alcool et de fumée comme la flèche dorée d’Apollon. N’avait-il pas promis à cette généreuse demoiselle de l’amuser en gage de son hospitalité ? Certes, il l’avait déjà fait, mais il se devait d’être à la hauteur de sa réputation. On l’appelait le phénicien, non pas pour sa grande beauté, mais pour sa capacité à toujours ravir et surprendre, comme un Phoenix renaissant de ses cendres. Alors, il déclara doucement, amicalement, pour briser le dôme fragile mais exaspérant de ses mornes inquiétudes :

« _ L’humain est comme l’eau. A’ rester dans le même endroit, il devient stagné et imbuvable. Sa couleur perd de sa clarté et des plus personne ne s’y approche. Une personne aventureuse, au contraire, est l’incarnation même d’un fleuve vigoureux, à l’eau fraîche et claire, pleine de vitalité, dévalant les montagnes et les prairies dans sa course éternelle. »

Il prît un temps de réflexion, laissant planer le suspens. Le sourire sibyllin du vétéran laisse place à une mine de méditation. L’homme chasse l’agitation de son esprit, agitation née des récentes consommations douteuses. Puis il rouvre les yeux, lentement. Du caveau de ses souvenirs surgit un récit d’aventure, de ses aventures. Il décida de dépoussiérer cette page ancienne de son existence et de la refaire surgir.

« _ Je vais vous raconter, pour votre bon plaisir, l’une de mes aventures dans le grand océan qui sépare les Glaces de Terre. Cela remonte à fort longtemps, quand j’étais capitaine d’un navire de guerre … »

Mais avant de poursuivre son récit, il prit une initiative qu’il jugea amusante. Après avoir gardé une petite distance avec elle, il finit par attirer Messaline jusqu’à son sein, lui faisant profiter de la chaleur de son corps et du plaisir du contact. Son étreinte autour de la dame se fit légère et innocente, avec l’intention de protéger la demoiselle de la morsure du froid. Il garde une certaine pudeur dans son geste, comme s’il ne souhaitait que montrer son affection. Après la joute verbale, c’était désormais l’échange d’invitations complexes et savoureuses. Par ce simple geste, il laissait courir dans l’esprit de la femme de nombreuses promesses nocturnes.

Ainsi, il put profiter plus pleinement de la douceur de sa peau, du parfum de ses cheveux, de la lueur de ses prunelles. Le chat se blottissait contre le tigre. Les deux félins unissaient leurs fourrures, faisant rempart au traître froid qui venait de temps en temps s’infiltrer dans la chambre en des coups de vents insidieux, luttant contre l’ardeur du feu.

Puis notre charmant aventurier commença à raconter le récit de son voyage dans l’océan. Il parlât de son expérience de marin, de la bravoure de ses hommes, des risques qu’ils affrontaient et des trésors qu’ils amassaient. Il décrivit aussi les nombreux abordages de pirates, toujours mis en déroute par d’habiles manœuvres. La façon dont racontait Lucius ses aventures était si bien décris et tellement énergique qu’il serait abusif de croire qu’il mentait ou racontait des chimères. Lorsqu’il termina son récit, il baissa la tête pour contempler le dos gracile de la dame, le contour parfait de ses épaules et son jolis minois. Le félin avait au creux de ses mains une perle unique, brillante de milles-feux. Cette perle se manifestait en Messaline. De tous les trésors qu’il avait amassé, elle surpassait largement la beauté des rubis et des émeraudes, et rivalisait avec l’éclat de l’or et de l’argent.

Quelle belle rencontre, vraiment. Lucius n’aurait put espérer mieux après avoir accomplis sa mission. Décidément cette journée semblait être faîte pour lui.

Lucius Van Horrificus

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Sam 1 Mar - 14:22
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Messaline eut un petit rire en réponse à ses paroles et s'empressa de remplir son verre.

-La métaphore est plutôt parlante, dit-elle avant de le vider aussitôt.

Lovée sur les coussins comme un serpent de soie rousse, Messaline, le verre à la main et la fumée à la bouche, commençait enfin à être confortablement ivre, à mesure que la bouteille se vidait à un rythme soutenu. Doucement, sombrer dans la léthargie confortable qui la faisait flotter entre deux os et oublier les courbatures et la lassitude, oublier que ce jour trop long se répéterait demain, et après encore, indéfiniment. Oublier tout ce qui était superflu, secondaire. Se concentrer sur l'instant? L'alcool avait cela de bien qu'il laissait à la porte tout ce à quoi elle ne voulait pas penser, qu'il rétrécissait l'univers à presque rien. Tout le reste, effacé. C'était mieux ainsi.

Son champ de vision se rétrécissait peu à peu, de plus en plus flou, préférant se focaliser sur son interlocuteur que sur le reste, ne serait-ce que parce qu'il y avait là des choses plus agréables à voir tandis qu'il s'offrait à son regard. Ses pensées n'étaient peut-être pas perceptibles ni dans son regard ni dans l'expression de son visage, mais ses yeux sombres, qui ne le quittaient pas d'un pouce, se régalaient en secret. C'était peut-être sa nature de étrange, c'était peut-être son sourire, son assurance insolente, un peu de tout, mais il exerçait sur elle une sorte de fascination curieuse qui allait grandissant à mesure qu'ils discutaient -un peu- et buvaient -beaucoup. Difficile de savoir si l'impression était dûe à au charme qui émanait de lui, ou bien réelle, mais elle le trouvait décidément très attirant. C'était physique. Avec certains, la répulsion était immédiate, quelle que soit leur apparence, quelle que soit leur personnalité; là, c'était tout le contraire, et c'était tout aussi soudain.

Elle rit de nouveau quand il lui proposa de raconter quelques-unes de ses aventures; il avait une telle manière de présenter les choses, avec cette emphase théâtrale qui semblait accompagner chacun de ses gestes, que ç'en devenait parfois amusant tant c'était exagéré. Elle hocha gracieusement la tête en réponse. Après tout, il lui avait promis du divertissement, n'est-ce pas?

La jeune femme fut toutefois surprise par son geste, quand il l'attira doucement à lui. Ce n'était pas tant l'acte en lui-même que la précaution et la délicatesse dont il usa qui la surprirent. Elle n'était pas vraiment de celles à qui l'on fait la cour, comme on dit poliment, et la plupart des gens se passaient avec elle de ces prévenances qu'elle sut apprécier à leur juste valeur, non sans toutefois nourrir d'autres idées un peu moins chastes. Messaline se laissa faire, et s'allongea auprès de lui, comme un chat qui daignerait bien accepter les faveurs qu'on lui fait. La tête posée contre l'épaule de Lucius, elle ferma à demi ses longues paupières et l'écouta discourir sur ses exploits. Il avait l'art de la parole, c'était indéniable, et cette manière de raconter propre à susciter la rêverie qui est la marque des conteurs et des grands orateurs. A l'entendre, Messaline se souvenait des ports qu'elle avait fréquentés, des rares fois où elle avait elle-même voyagé en bateau, et des évocations d'horizons bleus d'infini traversaient son esprit engourdi par la drogue.
Elle était à son aise, ici, blottie dans la chaleur qu'il dégageait, emplie de son parfum envoûtant qui lui troublait les sens et faisait comme un nuage invisible qui les enveloppait tous les deux d'un voile odorant. Lucius avait baissé la tête vers elle alors qu'il achevait son récit, et elle lui répondit par un sourire, tandis que l'une de ses mains, restées jusque là fort sage, s'égarait le long de son col dans une douce caresse. Goûtant la chaleur de sa peau, il y avait au fond de ses yeux comme des promesses dansantes, des lueurs comme on en voit dans les yeux des félins en chasse.

-On pourrait écrire des épopées entières de vos exploits, dit-elle d'un ton feutré tout en laissant ses doigts s'égarer sur sa nuque, soulevant ses cheveux dans un frôlement délicat. Vous avez un don certain pour raconter, ce n'étaient donc pas seulement des vantardises de votre part, tout à l'heure.

Et tandis qu'elle disait cela de la manière la plus innocente du monde, il y avait autre chose au fond de ses beaux yeux, comme si elle espérait qu'il tinsse d'autres promesses, peut-être non-dites, ou à peine exprimées.

Messaline

Messaline


Liche

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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 2 Mar - 0:37
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Ainsi rapprochés, les deux amants pouvaient chacun entendre le doux battement de cœur de l’autre, dans une synchronisation et une harmonie parfaite. L’homme aux cheveux immaculés contemplait doucement sa tendre amie, à mesure que celle-ci passait sa délicate main sur sa nuque sensible. Sa peau, unique, ressentait le moindre contact avec un intense plaisir. Aussi ce simple contact chaleureux lui eut l’effet d’une douce sensation de quiétude, lui soutirant un imperceptible frisson de bonheur. Notre homme répondit à cette charmante invitation en passant à son tour sa main non pas sur le cou raffiné de la dame, mais sur son doux visage. Ses doigts experts venaient caresser les traits de son joli minois, comme un sculpteur caressant son œuvre achevée. L’ombre et la lumière venaient jouer sur ses joues parfaites, et des mèches baladeuses de ses cheveux flamboyants lui donnaient un air d’amazone, ravissante et délicieuse.

Les habits de Messaline étaient un appel à la luxure, et la rendait très désirable. Le moment ne tarderait pas ou’ le chasseur de primes allait pouvoir découvrir les merveilles que cachait le doux tissu. Lucius sourit de nouveau, approcha lentement son visage de celle de son hôte, et lui souffla élégamment dans l’oreille :

« _ Ma tendre amie, j’ai toujours envie de me montrer reconnaissant envers votre chaleureux accueil. Aussi vais-je vous offrir un nouveau cadeau, ou plutôt une invitation : J’aimerais vous faire découvrir un peu plus le monde qui nous environne, se paysages, ses merveilles. Avec moi, vous aurez l’occasion de goûter au parfum épicé de l’aventure, à la douceur des nuits étoilées en pleine campagne, aux insolites créatures des bois. Sur mon destrier, nous irons faire un grand tour sur Terre, avant que je ne vous dépose de nouveau chez vous. Êtes-vous intéressée, belle enfant ? »

Son index vint écarter quelques mèches rebelles du visage de sa compagne, épanouissant la blancheur de cette belle-de-nuit. Ce fut comme si les flammes ardentes d’un chaleureux soleil venaient d’abandonner leur place pour mettre à nue une terre pâle et tendre, fertile, prête à recevoir les soins d’un habile agriculteur. Puis son pouce vint en renfort et s’empara délicatement du menton de Messaline, la soulevant légèrement pour mieux admirer la clarté mystique de ses yeux pétillants. Pétillement résultant d’un effet de lumière des plus curieux.

« _ Il y’as tant de choses à découvrir, derrière ces imposantes murailles. La pierre cache aux citoyens l’immense beauté de la nature. Pour ma part, il n’y’a pas de plus beau moment que de contempler les merveilleux paysages de Terra. Aujourd’hui encore, je me rappelle de la caresse du vent, de l’odeur particulière de la mer montante, du bruissement des arbres, du murmure des montagnes paisibles, de la chaleur du sable des déserts, de la douce sensation d’herbes tendres sur votre peau … Pourquoi demeurer dans des quartiers ennuyeux et sombres, dans la monotonie et l’ennuis, quand on peut voyager à travers le globe ? Rejoignez-moi, Messaline … l’aventure nous tend les bras. »

Certes, notre incontrôlable dragueur ne pouvait s’empêcher de s’attirer des conquêtes féminines particulièrement charmantes. Mais la douce (et peut être sulfureuse) dame aux cheveux de braises avait un effet plus puissant sur lui. Curieusement, il ne voulait pas que leur relation soit purement physique, rapide et sans suite. Il souhaitait garder un peu plus ce contact si alléchant que constituait cette friandise humaine. Pourquoi laisser tomber une sucrerie sans en lécher encore le sucre qu’elle renferme ? Il fallait qu’ils se lient d’une relation plus intéressante, plus passionnée. Non pas atteindre le mariage, ennuyeux et si risqué, mais plutôt une relation « d’attirance ». Ils se ressemblaient, c’était indéniable, comme deux félins. Tout ce qui se ressemble s’assemble. Le destin, capricieux et imprévisible, a décidé, en cette douce nuit, de rassembler sous le même toit deux personnes à caractère très proche, et dont les intérêts semblaient plus ou moins similaires. Tout deux discutaient de manière forte polie, adroite et soutenue. Tout deux semblaient être de vrais nobles de par leurs gestes et leur retenue. Mais chacun nourrissait derrière la barrière de son esprit des idées bouillantes, aventureuses, peu chastes, mais très tendres. Le temps s’était figé autour d’eux, à l’attente de la suite, cette suite qui prenait sa source de la nature même des hommes. Tôt ou tard, le mâle et la femelle s’abandonnaient peu à peu à des activités plus … mouvementés, plus passionnées.

« _ Belle enfant … laissez moi, avant tout, vous réconforter pour cette froide nuit. Je pense que j’ai encore une dernière carte à jouer, pour votre plus grand plaisir … »

L’idée était claire, l’invitation, flagrante. Même le plus simple d’esprit aurait compris ce que cachait cette phrase habilement modelée. C’était sa dernière botte, l’ultime assaut venant clôturer le duel des mots et des verbes pour laisser place au jeu tant attendu par les deux passionnés. Lucius préférait laisser ses amantes débuter en premier le bal, mais pour une fois, il voulait bien offrir un petit réconfort à la belle chatte pelotonnée sur sa poitrine. Alors, attirant à lui son visage angélique, il l’embrassa lentement, légèrement, effleurant presque à peine les lèvres douces et généreuses de Messaline.

Petit coquin, même ce cadeau était piégé. Ce n’était pas une retenue prude, mais une sournoise et galante invitation, cherchant à faire craquer la dame pour qu’elle s’empare complètement des lèvres du capitaine dans un ardent baiser. Au fond de lui, ce n’était pas de la cruauté, du plaisir à torturer psychiquement ses campagnes. Non, ce n’était qu’un jeu. Et dans chaque jeu, on ne cherchait pas à gagner, mais à s’amuser. Il voulait juste être sûr que la tendre femme allait aussi répondre à cette naturelle déclaration.

Pendant son geste amoureux, il raffermit un peu plus son étreinte autour du corps désirable de la jeune demoiselle, laissant une main aventureuse venir caresser les épaules de la belle, puis son cou, son dos, ses hanches … sans jamais trop s’aventurer. Petite caresse innocente, pleine de tendresse et d’expertise. Il sourit encore, humant savamment le parfum de sa campagne, mêlé à celui de la fumée et de son propre musc qui faisait encore ses effets si agréables sur les sens.

La nuit s’annonçait douce, et la suite de cette aventure nocturne, mouvementée. La nuit, les chats s’adonnaient à des bals et des jeux. La nuit, tout les chats sont gris …

Lucius Van Horrificus

Lucius Van Horrificus


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La nuit, tous les chats sont gris [Lucius] Sand-g10Dim 2 Mar - 16:43
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Messaline considéra longuement Lucius d’un regard vaguement amusé. Il savait se vendre, c’était indéniable, mais tout charmant qu’il fut, et quels que fussent les effets du charme qu’il dégageait, elle n’était pas encore prête à croire les vantardises d’un inconnu. Ce qu’elle avait sous les yeux lui prouvait toutefois qu’il y avait sans doute une part de vrai dans ce qu’il disait, et elle avait déjà pu constater de ses propres yeux qu’il était au moins à la hauteur de ses prétentions. Pourtant, c’était sans doute trop lui demander encore que de croire si vite à ces choses. Elle eut un fin sourire qui fit briller son regard d’une lueur fière, presque un défi.

-Ne croyez pas si vite que je sois capable de me cantonner à une seule ville, Lucius. Je ne suis jamais que de passage, partout où je vais.


Il y avait pourtant quelque chose pour la restreindre dans ses lubies nomades : sa santé ne lui permettait plus, depuis longtemps déjà, de voyager à sa guise. Il y avait quelque chose de tentant, dans la proposition de Lucius, quelque chose qui s’adressait directement à cet irrépressible besoin de découvrir le monde qui ne l’avait jamais quittée depuis le jour où elle s’était enfuie de chez elle. Cela murmurait, au fond d’elle : souviens-toi, souviens-toi de ce dont tu rêvais depuis toujours. Tellement de choses à connaître, à goûter, tellement de manières de s’étourdir, de se perdre, de s’abîmer et d’oublier ses souffrances... Mais chaque fois, il y avait quelque chose pour la rappeler à la réalité, à ces fers qu’on lui avait jetés aux pieds depuis sa naissance, à ce qui l’empêchait de vivre, depuis le premier instant. Et plus encore, elle ne voulait pas qu’il sache, elle ne voulait en aucun cas qu’il la voie s’affaiblir et trahir devant lui le sombre secret qu’elle dissimulait à tous derrière ses voiles et des vapeurs de drogues. Là était sans doute la vraie raison de ses réticences, mais de cela, elle n’en dirait pas un mot.

-Nous verrons bien, reprit-elle à voix basse. Remettons cela à demain, voulez-vous? J’ai d’autres projets, pour l’heure.

Elle avait murmuré ces derniers mots à son oreille, et s’était dérobée tout aussi vite, laissant sa bouche effleurer doucement sa gorge avant de s’écarter un peu, l’air de rien.
Son sourire s’élargit quand Lucius lui promit d’abattre pour elle ses dernières cartes, comme une conclusion à leur joute verbale. Ses intentions se lisaient clairement sous l’apparence presque anodine de ses paroles mais tous les deux avaient très bien compris où chacun voulait en venir, et son traître baiser en fut comme la confirmation la plus claire qu’il eut pu apporter. Elle se laissa emporter dans ses bras, goûtant tout autant la saveur de ses lèvres encore mouillées de vin que la chaleur douce qu’elle sentait émaner de ses doigts experts qui glissaient sur elle en froissant légèrement les replis légers de son vêtement. C’était une provocation, elle l’avait vite senti dans la délicatesse exquise qu’il avait mise dans le moindre de ses gestes et quelque chose au fond d’elle brûlait déjà d’y répondre. Mais ce n’était pas encore le bon moment, et rompre le jeu aussi vite aurait été faire preuve d’un total manque de courtoisie. Elle avait gardé sa main posée sur sa nuque, et d’un geste, l’attira à elle quand il voulut se redresser.

-Ne vous échappez pas si vite, susurra-t-elle alors que ses lèvres frôlaient les siennes dans un souffle léger.

Avec autant de douceur qu’il en avait eue pour l’embrasser, elle déposa un baiser faussement chaste dans son cou, et puis un autre, avant d’écarter lentement le col de sa chemise pour s’attarder juste au creux de l’épaule. S’il voulait la soumettre à la torture voluptueuse de ces tendres caresses, elle pouvait tout à fait lui tenir tête en cela, et ne manquait jamais de répondant en la matière.

Suite ICI

Messaline

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