N'oublions jamais nos chers amis les pendus [PV Gris Baron] | |
| Dim 17 Fév - 15:21 | | | | Douce musique funeste pour accueil en cette nuit à l’atmosphère lourde. L’air léger qui fit voleter la chevelure blonde d’Aerinaël ne soulageait point cette pesanteur restante après une journée à la chaleur massacrante du soleil. La fraîcheur nocturne commençait à peine à s’installer alors qu’elle se tenait au bord de ce canyon désertique à l’ornement quelque peu… original. Chaque courant d’air s’accompagnait de cliquetis osseux plaintifs qui la laissait à vrai dire totalement insensible. Le ciel dégagé lui permettait de distinguer sans problème les contours rocailleux du canyon à la lumière lunaire, et elle décida alors de s’avancer un peu plus du bord de la demeure des locataires de ce lieu. Avoir des sens un peu plus développés était certes un avantage mais ceci se révélait parfois désavantageux quand l’odeur pestilentielle venait chatouiller ses narines, mais en réalité, personne ne pouvait ignorer ce parfum désagréable. Bien qu’une moue dégoûtée se dessina un instant sur son visage, l’elfe reprit un total sérieux, elle n’était pas là par hasard et certainement pas pour une promenade anodine. Elle était venue récupérer un vieux document promis à la Confrérie par une tribu de Sawahi. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’était pas allée en Terre du Feu mais les derniers évènements n’avaient rien enlevé de la chaleur humaine de la tribu à laquelle elle s’était alors mêlée.
En un rien de temps, elle avait été invitée chez le Chef, se retrouvant assise par terre pour partager un repas local. Sa curiosité gustative atteignait parfois ses limites face à d’étranges mets et si les petits potins de la femme du chef n’avaient pas finit par retenir réellement son attention, elle aurait écourté rapidement le repas pour s’en aller, le document étant déjà en sa possession. Un traître avait été pendu il y a une semaine suite à un assassinat, une histoire sombre et la femme du chef était fière d’avoir été la dernière à l’avoir aperçu avant son méfait. Retenant tout d’abord un petit sourire méprisant, la princesse perçut le changement de ton de la femme, plus excitée, plus dans la confidence alors que cette dernière se penchait vers elle pour lui servir de la purée aux ingrédients indéterminés. Ce qu’elle allait lui dire, il était évident qu’elle n’en avait pas parlé ou alors très peu et qu’elle voyait là un moyen intéressant de se faire bien voir. Qu’est-ce que cela aurait été si elle avait révélé qui elle était, enfin, les mots de la femme l’interpellèrent. « Il tenait une de ces montres de mage, pour le soleil. Toute en or, elle brillait ! Et il y avait de drôles de dessins dessus ! » Aerin avait appris qu’il fallait toujours s’intéresser aux drôles de dessins vus par les gens mal instruits. Et c’est qu’après avoir demandé un peu d’informations sur les fameux dessins, n’ayant pas droit à une bonne description, qu’elle décida de faire tout de même un détour au Gouffre des Traîtres. Le bonhomme avait été pendu sans perte de temps dans l’heure suivant son méfait et de toute évidence, il n’avait pas été fouillé puisque son arme lui avait été arrachée des mains. Ça faisait aussi qu’une semaine, qui sait, personne n’avait peut-être encore songé à voler son cadavre et que l’objet était resté dans sa poche. Ça ne lui coûtait rien et elle n’était jamais allée là-bas, il était vrai que ce n’était pas un endroit touristique.
Voilà donc la raison de sa présence ici. Et même si elle n’était pas non plus tout à son aise alors qu’elle se penchait à chaque pic tenant une corde pour observer la silhouette cadavérique se balançant au grès des courants d’air, elle n’en montrait absolument rien. Qui sait quels secrets pouvaient peut-être encore cachés ces macchabés ? Chacun son tour, elle en avait déjà un dans sa liste, le dernier en date et donc de la file mortuaire, et elle finit par s’arrêter juste devant le pic du pendu qu’elle cherchait. Bon, et bien, il allait falloir le remonter. Au bout d’une semaine, il avait déjà du commencer à se putréfier mais cela n’allait pas tant enlever de son poids. Un peu d’exercices en perspective, elle s’agenouilla pour prendre entre ses mains la corde rêche et elle sut déjà que ses mains porteraient quelques traces de brûlures. Elle n’avait pas de gant avec elle, avec ce temps, elle avait limité au maximum les couches de vêtements, un short gris, un haut bleu découvrant le haut, des chausses montant jusqu’à mi-cuisse, protégeant n’empêche ses genoux du contact dur de la pierre. Ainsi vêtue, elle s’était bien intégrer à l’environnement de Sawahi. Aerinaël resserra un peu la ceinture entourant son torse et maintenant son arc dans son dos pour que ce dernier ne la gêne pas et elle se redressa sur ses pieds, consolidant bien ses appuis pour se pencher pour attraper alors la corde.
- J’espère que tu ne me fais pas faire ça pour rien.
C’était presque comme un avertissement murmuré à l’encontre du cadavre dont elle tira la corde, faisant un premier pas en arrière pour le remonter un peu. Oh, elle pourrait utiliser sa magie, s’enfoncer dans la terre pour ressortir à moitié à la bonne hauteur dans le canyon mais la facilité pouvait être bien trompeuse. Fouiller un cadavre pendu dans le vide comportait le risque de chute de ce qu’elle recherchait et qu’elle ne voulait pas casser.
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| | Mer 20 Fév - 15:48 | | | | La caravane bringuebalait, ses fines roues de bois peinaient à avancer dans le sable, s’enlisant de temps à autre. Entre les rideaux qui servaient de porte à l’arrière du véhicule, on pouvait y voir le paysage orangé et désertique. A l’avant une pauvre canaille maniait avec un piètre talent ses deux chevaux éthiques. L’un crèverait certainement en route. Voire les deux, si la chance ne leur souriait pas. La voix étouffée du chauffeur au travers du tissu de la capote de la caravane ne cessait de harceler son voyageur, avec un accent du Sud à couper au sabre.
« Z’avez pas l’air du coin M’sire d’écailles. »
Le Mille-Casaque soupira. Après une éternité de traversée, l’homme du désert n’était toujours pas capable de l’appeler par son nom ni de se taire surtout.
« Seuls des barbares et des gitans vivent d’ici. Vous m’offensez. - V’nez d’où alors ‘vec ce teint peu commode ? »
La question mourut sans réponse sur les lèvres du cocher. Le Baron toucha alors son visage à la peau tannée. Il était vrai qu’il ressemblait à un serpent, avec ce vert ignoble. Mais au lieu de porter cela telle une cicatrice de honte, il en faisait une fierté. Sorte de couronne pour son exploit d’apatride. L’homme au grisâtre pseudonyme se leva du banc, les fessiers douloureux, et sauta à bas du véhicule. Ses pieds heurtèrent la mer de sable, bouillante et aveuglante. Il attendit quelques minutes et la caravane disparut au-delà d’une crête sablonneuse, ne sachant pas qu’elle s’était délestée de son passager. Aussi détestable qu’avait pu être le gaillard, il lui avait rendu un précieux service en l’amenant à cet endroit désolé. Les souvenirs d’enfance revinrent titiller l’esprit du corsaire. Son chez lui n’avait pas changé. Toujours autant de chaleur, toujours ce damné paysage sans poésie. Connaissant plus ou moins les lieux, il se dirigea vers l’endroit où il aurait normalement dû mourir. Le mortel échafaud naturel où pendouillaient les bougres et les voleurs s’illustrait sombrement sous le soleil couchant. Le Gris Baron pénétra dans la faille. Puanteur et charognards s’y disputaient la palme de l’horreur. Entre le parfum de la pourriture et les volatiles picorant les yeux gonflés des condamnés, il vota sans hésitation pour ces derniers. Malgré ses années de piraterie, le spectacle du repas funèbre des vautours faillit le faire vomir. Avait-il eu raison d’écouter les ragots des tribus alentours, disant que le dernier pensionnaire de Sahawi possédait quelque trésor inestimable ? Avant d’hésiter plus avant, le Gris Baron commença à inspecter les macabres lieux. Il remonta la file des morts. Il avait l’impression de contempler un buisson gigantesque aux fruits pourrissants. Le pirate constata que plus il avançait, plus la décomposition des pendus était révulsant. Il décida de rebrousser chemin en quête d’un criminel plus frais.
C’est une silhouette gracile et aguicheuse qu’il vit d’abord, en pleine exercice de remonté de cadavre. Il l’interpela, craignant qu’il s’agisse d’un détrousseur peu glorieux.
« Olà ! Veuve éplorée ! Laissez donc votre mari reposer en paix. »
Avant que la demoiselle ne puisse voir le visage du Gris Baron, en habile menteur, il chaussa son chef d’un turban épais. Il sortit de même son sabre et adopta une démarche agressive, à la manière d’un bourreau défendant l’intégrité de ses chères victimes.
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