C’était la première fois qu’Arius venait en Terre.

C’était aussi la première fois qu’Arius sortait des Glaces. Le soleil tapait bien trop fort pour un siphilien et Arius avait dû abandonner ses peaux et ses fourrures. La terre était fertile et à certains endroits l’herbe était jaunie, cuite par le soleil ; s’en était trop pour Arius. Il ne comptait pas rester très longtemps, une fois le travail pour lequel il était venu achevé, il retournerait dans son lointain pays enneigé. Ici tout semblait aller beaucoup plus vite, Arius apprit beaucoup de choses sur le monde, sur les récents événements.
Il remarqua aussi à quel point l’Aile Ténébreuse pouvait bouleverser la vie des petits gens, et quand les gens sont bouleversés, ils ont peur et alors tout devient cher. Cette guerre intestine était très, voir trop mauvaise pour faire des affaires tranquillement, et c’était justement ce qu’Arius était venu faire, bien que pour l’instant elles étaient au point mort. Cela faisait déjà deux jours qu’Arius attendait son client, et surtout il fallait voir où il attendait. Le lieu de rendez-vous était une auberge immense, une ancienne grange reconvertie en salle de boisson. Le lieu était pauvre et délabré, des planches de bois étaient en morceaux, les murs laissaient place à des trous béants à certains endroits, on voyait des taches vertes de moisissures et une bonne partie du sol de l’auberge était à l’état de boue.

Arius était venu de Selian en louant un vieux carrosse délabré par le temps à une très ancienne famille de nobles déchus, les chevaux étaient vieux et un était mort de fatigue en chemin. Arius s’était bel et bien pour la première fois de sa vie, fait avoir ; il avait perdu une belle bourse dans cette antiquité à roulettes qui tenait à peine debout. Le cocher quant à lui était un alcoolique qui finissait ses fins de mois dans la boisson, et qui plus d’une fois avait failli renverser le carrosse.

Mais pour l’instant Arius était depuis trois jours dans ce lieu miteux où les lits n’étaient que des bottes de foin et, où les rats du voisinage élisaient domicile. Arius n’avait pas dormi depuis son départ de Selian ; il était, lui et son singe en perpétuel combat pour ne pas s’endormir de peur de se faire voler par un stupide paysan illettré qui utiliserait son or pour la boisson ou pire encore les jeux d’argent humains. Que les hommes étaient stupides en ces régions.

Malgré tout Arius n’avait pas perdu son sens des affaires et il fallait que quelqu’un lui rembourse le cheval mort et l’argent qu’il avait mis dans l’affreux carrosse. C’est pourquoi depuis hier Arius et son singe se renseignaient et observaient les allées et venues des gens, car voler était facile ; mais le siphilien comptait rester ici à attendre son client encore quelques temps et donc il lui fallait ne pas se faire prendre ni se faire remarquer.

Urus son singe ne pourrait l’aider, si certains voyaient l’animal en train de voler, on saurait qui avait usurpé l’argent.
Mais Arius avait appris d’une source à peu près sobre que le collecteur d’impôts passerait dans l’après-midi.
Le travail était tout à fait simple : il fallait s’habiller comme un poivrot si possible et voler des vêtements de grandes tailles, s’attaquer au collecteur d’impôts une fois qu’il serait sorti de l’auberge l’argent en poche. Bien sûr qu’il serait suivi d’un garde ou deux ; mais pour la dague et la force d’un siphilien comme Arius, ce n’était rien.
Arius Tomore avait observé les personnes présentes ce matin-là ; Trois personnes avaient à peu près sa taille : la première personne était l’aubergiste mais il serait au comptoir au moment du vol. Ensuite venait  un jeune paysan très stupide mais bien formé par la nature et enfin une sorte d’immense colosse brun qu’Arius ne voulait se mettre à dos.

Arius s’attaquerait donc à ce jeune paysan illettré. Quand l’homme de ferme choisit de monter au premier étage de l’auberge, Arius le suivit discrètement montant les marches à pas de loup, suivant de loin le stupide garçon de ferme. Quand celui-ci fut devant la chambre qu’Arius avait louée, le siphilien prit un tabouret en chêne qui traînait dans le couloir et sans que le jeune homme le vit il lui porta un puissant coup derrière le crâne, faisant tomber le paysan à ses pieds, un deuxième coup sur la tête finit par assommer ce garçon de ferme. Arius avait sous-estimé ce fermier et avait dû s’en prendre à deux fois. Sans prendre le temps de regarder autour de lui il déplaça le corps inanimé du jeune homme dans sa chambre, puis poussant la porte derrière lui, Arius attacha le garçon de ferme à son lit, lui banda les yeux.
Alors qu’Arius s’apprêtait à lui prendre ses vêtements, il lui vint l’idée qu’il aurait sûrement besoin du nom du jeune homme pour l’accuser à tord, ou faire porter le doute sur lui.
Arius réveilla donc le paysan à grands coups de baffe. Pour lui aboyer à la figure :
« Quel est ton nom, ignare ?! »
« Igar ? » Demanda le pauvre jeune homme pile au moment où la porte de la chambre d’Arius grinça.

Spoiler:

Demerian ramena sa lourde hache dans son dos, l’air perplexe devant l’homme qui s’était arrêté devant lui. Un fermier, dont il avait oublié le nom, mais à qui il prenait régulièrement quelques sacs de blé. En échange, il lui avait promis une protection contre les pillards que l’on pouvait rencontrer. L’homme, comme tous ceux qu’il avait abordé avant, avait d’abord refusé, mais il avait envoyé quelques uns de ses hommes mettre le feu à sa grange pour le convaincre que le danger était réel.

Sauf qu’il se retrouvait maintenant face à un problème. Les environs, en fait, étaient plutôt calmes, si l’on excluait sa petite bande. Il n’y avait jamais eu beaucoup de problèmes- à part maintenant. L’homme était venu le retrouver dans la grande salle qui leur servait de quartier général, le suppliant de lui rendre justice. Et Demerian de se retrouver fort embêté : il n’avait aucune envie de se déplacer. Mais s’il ne le faisait pas, il risquait de perdre en crédibilité, et surtout en gains. Si les fermiers et villageois qui lui reversaient des tributs décidaient qu’il n’était qu’un menteur, son petit confort de vie risquait de s’en trouvait déranger. Et de ceci, il en était hors de question.

Le colosse se leva péniblement de son siège. Il était grand, le crâne complètement rasé, et arborant une longue barbe tressée. En guise de vêtements, il portait un pantalon, des chausses de cuir et une peau d’ours jetée sur son torse dénudé. Sa seule véritable possession était une hache à double tranchant, presque aussi grande que lui. Il avait dût s’entraîner durant des années pour la manier convenablement, et ses exercices avaient finies par lui donner une musculature impressionnante.

- Je vais t’aider, petit homme, fit-il.

Quelques minutes plus tard, il arrivait dans l’auberge dont on lui avait parlé. Lorsqu’il entra dans la grande salle, il jeta un coup d’œil, cherchant les deux hommes qu’on lui avait décrit. N’en voyant pas un seul, il entreprit de gagner la chambre de laquelle son protégé s’était enfui. Il sourit- il était malin, il avait pensé à lui demander précisément de quelle chambre il s’agissait.

Lorsqu’il s’approcha, il entendit des voix d’hommes.

- Le quartier général de l'Aurore n'est actuellement qu'une grotte grotesque située en plein cœur d'une forêt. Nous ne sommes que deux membres. Un guerrier vaillant, croyant fièrement aux valeurs de la liberté. Mais l'Aurore n'est qu'à ses débuts et ne cessera de s'agrandir, à n'en pas douter.

Il se mit devant porte ouverte.

- Oui ? He bien, dommage que l’un d’eux doive mourir aujourd’hui ! Lequel a bousculé un de mes amis ?

Il ne se rendit compte que trop tard que l’homme qui venait de se lever de la chaise faisait une bonne tête de plus que lui, et était bien plus musclé. Ca, le paysan avait omis de le lui dire…

Rägmor allait entamer la suite de son discours qui commençait à prendre des ampleurs assez impressionnantes. Cependant, quand quelqu'un est concentré à faire l'éloge de ce qu'il aime, il ne se rend pas bien compte des proportions que prennent ses paroles.. Mais, et ce n'était peut-être pas plus mal, un homme dans une optique meurtrière le coupa juste avant qu'il ne redémarre sa phrase.


Rägmor se leva soudainement. Sa carrure et son imposante musculature firent baisser l'orgueil de ce guerrier. Puis, assez frustré d'avoir été coupé, le barbare laissa son irascibilité prendre le dessus. Il expira de l'air par le nez afin de montrer sa frustration. Mais Arius fut plus rapide que lui, et quand Rägmor se tourna pour le regarder s'exprimer, c'était un autre homme qu'il vit à ce moment là. Il semblait plus hargneux, comme s'il sentait l'appel proche du combat et que sa rage grimpait petit à petit. Par ailleurs, il avait déjà son marteau qu'il astiquait avec frénésie, comme le ferait un fanatique de la guerre qui serait impatient de fracasser des crânes.


Rägmor en perdit sa colère. Il revoyait en ce Siphilien le barbare qu'il était jadis. Rustique, plus animal qu'humain, et dont la rage le surpassait dans toutes les situations à tel point qu'il ne pouvait s'empêcher de faire des dommages conséquents. Là, il préférait calmer le jeu des deux guerriers. Car si l'un s'énervait et provoquait, l'autre répondrait avec plus de virulence.. Et alors, Rägmor n'osait espérer ce que deviendrait l'auberge avec un carnage de hache et de marteau entremêlés !

Le Giguêtre laissa son sens de la diplomatie prendre le dessus. Il se tourna vers le manieur de hache avec un sourire aux lèvres, et lui tint ces quelques mots.

Il se retourna discrètement vers Arius et lui fit signe avec la main de ne rien dire. Rägmor souhaitait qu'il n'y ait pas plus de conflits qu'il n'y en avait déjà, et il ne fallait pas que le Siphilien rétorque quoi que ce soit s'il ne voulait pas se retrouver avec une hache plantée dans le crâne.

Demerian passa la langue sur ses lèvres. Des deux individus, il ne savait dire lequel était le plus dangereux. Le colosse, qui semblait pouvoir le briser comme une brindille, mais qui pourtant tentait d'user de diplomatie, ou bien son compagnon, presque aussi grand, qui lui promettait une mort certaine.

De toute sa vie, jamais il n'avait été un homme courageux. Sa réussite, il la devait à son apparence, qu'il prenait soin de cultiver, et à sa réputation. Il avait toujours joué les durs, avait toujours réussi à se faire passer pour quelqu'un à qui on obéissait. Ca, et la violence gratuite qu'il exerçait souvent.

Mais il était mauvais combattant. Oh, certes, il avait déjà eu à se battre, il avait déjà tué, cependant, sa couardise naturelle le poussait à éviter les ennuis dans la mesure du possible, et il préférait envoyer ses hommes de main à l'attaque, ou s'attaquer aux faibles uniquement. Il savait manier son arme, indéniablement, mais qu'un homme en face de lui s'y connaisse également, et il restait pétrifié de peur. Et il n'allait certainement pas risquer sa peau pour un misérable paysan.

Il se dégagea de la porte, croisa les bras, prenant une attitude détendue. S'il était pleutre, il était bon pour le cacher, et il n'avait jamais laissé transparaître l'anxiété qui le rongeait dans ce genre de situation. D'une main discrète, il tâta la bourse qu'il avait à la hanche, faisant mine de se gratter pour camoufler le geste. Il avisa qu'il avait suffisamment d'argent.

- L'homme que vous avez malmené était un ami proche.

Mensonge évident, mais il espérait que les deux hommes l'avalent sans trop d'histoire.

- Il mène une vie paisible, loin de tous tracas, et j'ai juré, par bonté, de le protéger au péril de ma vie.

Autre mensonge. Il fixa le colosse droit dans les yeux.

- He bien, il faut que justice soit faite. Et bien que cela me chagrine, je vois, mon ami, que tu es capable de gérer la situation. Crois bien que j'aurais préféré le faire moi-même, mais on n'interrompt pas un homme qui rétablit l'ordre. Ainsi soit-il.

Il décrocha un regard hautain à l'autre homme avant de tourner le dos et de s'en aller. Quelques pas plus loin, il marqua une courte pause.

- ET QUE JE NE VOUS Y REPRENNE PLUS ! ICI, C'EST MOI QUI FAIS LA LOI !

Il l'avait crié, afin que les individus de la salle commune l'entendent clairement. Il reprit alors sa marche. Maintenant, direction le quartier général, afin de donner quelques pièces de sa bourse au paysan, en lui faisant croire qu'elles venaient de ses agresseurs.

Spoiler:

Arius prit la bague dans sa main, l’artiste avait fait d’une vulgaire chevalière de bronze, un objet d’art unique. Quand le siphilien la mit à son doigt il éprouvât un contentement, il était désormais un membre de l’Aurore, et pourrais aspirer à un destin de gloire.
Rägmor quittas le village sur les promesses d’une vague rencontre dans le QG provisoire de l’Aurore, QG qui aura besoin d’Arius pour s’agrandir. Bien sur que le siphilien faire cadeau de ses dons à l’Aurore c’était certain, et il savait qu’un jour cela lui serais rendu.

Arius Tomore admiras sa main, la chevalière qu’il portait était une porte qui s’ouvrait, une nouvelle porte de sa vie qui ouvrait un passage vers une autre éthique, une autre classe.
Il serrait le premier siphilien à marqué l’histoire de Terra. Arius retournas à l’auberge chercher ses affaires et son singe, son client ne viendrais pas, il en était sur.
Mais ce qui était réconfortant c’est que dans des contreparties Arius pourrais gagner plus gros que cela.
Il fallait maintenant se préparer à retourner dans les Glaces, à Selian ou son travail de comptable au nom de l’Aurore allait commencer.
Peut être serait-il plus utile et pourrait-il devenir plus riche de cette manière ?
L’avenir qui auparavant n’était qu’une vague impression floue pour semblait aujourd’hui être dessiner méticuleusement par un orfèvre.

« Arius Tomore te voilà bientôt riche et puissant ! Et de manière légale ! »
Ses paroles il les jetas au vent en regardants ça chevalière d’un œil avare.
Voilà des actes qui resteraient gravés dans les souvenir du siphilien pendant de longue années. C'était la fin d'une rencontre mais le début d'une histoire.