- Citation :
- Trop obnubilée par la recherche de Lysandre et de Kyrseï, tu laisses échapper que tu voudrais retrouver ces deux personnes. C'est alors que quelqu'un se présente à toi et prétend pouvoir te guider à eux, dans un coin de Terre qui te semble fort désaffecté et désert... Car il s'agit en fait d'un piège tendu par un groupe de malfrats que ta beauté aura appâté. Raconte cet épisode ainsi que la manière dont tu t'en sors.
Déjà trois longues heures qu’elle était assise à cette table vide, une chope de bière sur laquelle elle n’avait même pas posé les lèvres entre les mains. Le vacarme qui régnait dans la taverne ne semblait pourtant pas l’éteindre alors que, d’ordinaire, elle aurait déjà fait savoir au monde entier que tout cela l’agaçait… Elle semblait lointaine, absente. Et pour cause ; une seule chose occupait son esprit, une seule chose l’obsédait, l’obnubilait au point de lui en faire perdre le sommeil : Lysandre et Kyrseï. Depuis leur disparition, elle n’avait jamais réussit à mettre la main sur ces deux là. Même une toute petite piste… Ils pouvaient être n’importe où, peut-être mêmes là où elle ne pourrait pas les trouver. Ou alors tout près d’elle. Et ne rien savoir de leurs agissements ou de leurs déplacements la rendait folle. Tellement folle qu’elle passait ses nuits à étudier les cartes de Terra en se torturant l’esprit en essayant de deviner où aurait été sa sœur alors qu’elle était en fuite… Peut-être même que sa sœur n’avait pas fuit… Lysandre était capable de l’enlever, de la garder près de lui comme monnaie d’échange… Tout ce que savait Hélionoir, c’était que Kyrseï ne l’aurait jamais trahie. Si seulement…
« Eh bien… Que fait une damoiselle dans une taverne pareille ? Et seule, qui plus est… » Un homme venait de prendre place en face d’Hélionoir dont les yeux semblables au plus profond des abysses le fixèrent longuement d’un air à la fois menaçant et ennuyé. Qui donc osait la déranger ?
« Je ne suis pas seule. La preuve, vous êtes actuellement assit à la même table que moi. », lui répondit-elle sur un ton distant, presque froid. L’homme assit en face d’elle se redressa légèrement, avalant une gorgée de son alcool avant de reposer avec brusquerie sa chope sur la table, étirant ensuite ses lèvres en un grand sourire édenté et pourri.
« Soit. Mais sans moi vous êtes seule. » Hélionoir ne pu réprimer un claquement de langue agacé tandis que ses sourcils se fronçaient et que ses lèvres entrouvertes et, elles, peu souriantes, laissaient apparaître ses canines pointues.
« Vous me dérangez, monsieur. » Ledit monsieur –quoique cette appellation soit sûrement trop distinguée pour lui– lâcha un soupir vaincu. Hélionoir crut d’ailleurs qu’il allait enfin la laisser tranquille et qu’elle n’aurait pas à le dévorer, mais il ne fit pas un geste et resta à sa place, se contentant simplement de l’observer de la tête aux pieds, un sourcil haussé.
« C’est rare de croiser une si belle créature dans des endroits aussi miteux… Y a queque’chose qui va pas ? » La Veuve Noire roula des yeux en dissimulant un grognement dépréciatif et tapota le bois vermoulu de la table de ses ongles soignés d’un air profondément agacé. Ne lui lâcherait-il jamais la grappe, celui-là ?
« Tout va bien, merci, j’essaye juste de réfléchir à une chose et vous m’en empêchez, voyez-vous. » Le ton d’Hélionoir était brut, sec, presque violent, mais elle s’efforçait de garder contenance et de refouler ses envies de meurtre.
« Oh… Et à quoi réfléchissez-vous ? », fit l’ivrogne au sourire troué d’un air faussement intéressé.
« Je peux peut-être vous aider… », continua-t-il avant qu’Hélionoir ne puisse lui clouer le bec définitivement. Parce que, oui, durant quelques secondes, elle avait pensé le dévorer en ne laissant que le plus mauvais aux chiens galeux qui passeraient mais, à cette dernière phrase, elle s’était ravisée. Et s’il connaissait Lysandre ? Après tout, ce Vampire passait autant de temps dans les tavernes que dans les bordels, alors son visage d’ange rebelle devrait être familier à quelques débauchés du coin…
« Eh bien, sauf si vous connaissez un certain Lysandre, un Vampire, et que vous savez où il se trouve, je doute que votre aide me soit précieuse ou utile. » L’ivrogne paru bien silencieux pendant un instant et il se retourna plusieurs fois vers un groupe de deux autres hommes sans qu’Hélionoir ne sache ou ne devine pourquoi. Puis il lui fit face de nouveau, son horrible sourire de paysan ruiné lui fendant le visage.
« Lysandre ? Un Vampire ? Un peu que je le connais ! C’est même un ami. C’est bizarre, il ne me semble pas qu’il m’ait un jour dit qu’il avait une amie d’une beauté aussi éblouissante… » L’homme fut coupé net dans sa phrase par Hélionoir.
« Je ne suis pas son amie. » Ses yeux noirs lançaient des éclairs, ils semblaient vouloir tuer l’homme se trouvant en face d’eux. [b ]« Soit… Je disais donc : oui, je connais Lysandre. Vous dîtes vouloir des renseignements sur son lieu de séjour actuel ? Il m’a dit il y a moins de trois jours qu’il partait pour Dryar, un petit village en ruine sur les territoires de Terre. J’peux vous y emmener, même, je sais exactement où c’est ! »[/b] Hélionoir garda le silence, analysant la situation. Elle était méfiante. Cet homme ne lui disait rien qui vaille mais, d’un autre côté, il prétendait savoir où se trouvait Lysandre en ce moment même… Et il venait même de se présenter pour l’y escorter. Pour une fois, cela suffit à la jeune femme pour qu’elle donne son accord aveuglément.
« Très bien. » Hélionoir se leva ensuite, prenant appui sur ses mains pour s’écarter de la table, et, sans un regard pour l’homme, quitta la taverne dans un roulement de hanche presque parfait.
« Je vous attendrai ici au coucher du soleil. », l’entendit-elle dire d’une voix assez forte pour couvrir le bruit. Elle pu même deviner qu’il souriait encore…
Le ciel auparavant bleu de Terra venait de revêtir son manteau orangé du crépuscule et, sous sa lune doucement apparente, Hélionoir marchait d’un pas actif jusqu’à la taverne où elle avait rencontré cet homme étrange dans l’après-midi et qui s’était proposé de la guider jusqu’à Lysandre. Pour ne pas se faire trop remarquer, d’ailleurs, elle qui était toujours vêtue d’une façon aussi sensuelle que pratique, était dissimulée presque entièrement sous une cape d’un marron délavé et usé, une grande capuche cachant son visage. Une fois arrivée devant la taverne, elle reconnut immédiatement l’ivrogne qui semblait ne pas s’être arrêté de sourire depuis leur discussion et qui sourit d’autant plus en la voyant arriver. Cependant, il n’était pas seul mais flanqué de deux autres hommes qui puaient tout autant l’alcool.
« Ils nous accompagneront. Pour plus de sûreté… » Ce fut un haussement d’épaules qui lui répondit, Hélionoir étant trop pressée pour se rendre compte que cela était plus suspect qu’utile.
« Allons-y, maintenant. » C’est elle qui prit la tête de la marche avant d’être rattrapée par l’ivrogne qui lui passa devant le nez, disant être le guide, et les deux autres fermèrent la marche en ne marchant non pas à ses côtés mais bien derrière elle, dans l’alignement de ses hanches. Mais Hélionoir ne fit aucun commentaire, elle avait finit par prendre l’habitude.
Le petit groupe arriva à l’endroit voulu en beau milieu de la nuit. Dryar était un village qui avait subit une guerre civile il y a de cela plusieurs années et tout ce qu’il en restait étaient des bâtisses à moitié effondrées, des cendres, du bois noir et des ossements. Hélionoir ne pu d’ailleurs s’empêcher de douter sur la fiabilité de l’homme qui la guidait… Lysandre avait beau être bizarre et même fou, il n’avait aucune raison de se trouver là à moins d’y avoir un QG ou quelque chose comme ça. Or, dans ces ruines, il semblait difficile d’établir un quartier général étant donné que tout ce qui était habitable était réduit en un tas de débris… Ce coin était tout simplement désert, il n’y avait même pas l’ombre d’un chat ou d’un rat.
« Êtes-vous sûr que Lysandre vous a dit qu’il séjour… » Hélionoir fut coupée par l’un des trois hommes présents, se retrouvant poussée à travers une vieille bergerie dont le bois céda sous son poids à cause de l’usure. Elle n’eut pas le temps de se relever que le deuxième homme la pressa contre le sol par son propre corps, s’allongeant littéralement sur elle en lui tenant les poignets d’une main et en bloquant ses jambes grâce aux siennes. Hélionoir se tordait dans tous les sens, elle essayait de donner des coups, de dégager ses mains mais rien n’y faisait, elle n’y parvenait pas même un tout petit peu. Soudain, elle sentit la main froide et rêche de l’homme qui se trouvait au dessus d’elle se frayer un chemin sous sa cape et sous sa chemise, un sourire dégoûtant accroché aux lèvres.
« Igor ! Tu prends toute la place, laisse nous-en un peu, vieux pervers. » Ledit Igor fut poussé par l’homme qui avait prétendu tantôt conduire Hélionoir jusqu’à Lysandre et celui-ci prit sa place, rapprochant son visage aux traits similaires à ceux d’un vieux crapaud de celui de la Veuve Noire, lui faisant sentir son haleine alcoolisée.
« On ne t’as jamais appris à ne pas suivre les inconnus ? » Le ton moqueur de l’homme fit bouillir le sang d’Hélionoir dans ses veines qui se débattit encore plus alors que des mains l’attrapaient de partout, venant saisir ses cuisses, parfois ses chevilles, ses cheveux, et tentaient de la défaire de ses vêtements. Un cri de dégoût résonna dans la bergerie tandis que l’un des trois hommes avait tenté de faire au corps d’Hélonoir ce que seul elle s’autorisait de faire si elle en avait envie. Mais il fut encore plus dégoûté qu’elle lorsqu’il se rendit compte qu’il était tenu contre elle par huit pattes poilues et que ce n’était plus deux canines relativement pointues qui étincelaient entre ses lèvres mais des mandibules effrayantes. Ce fut au tour de l’ivrogne de gesticuler dans tous les sens pour se dégager mais la seule chose qu’il parvint à faire, c’est d’énerver encore plus Hélionoir qui, de son fil de soi, l’enroula dans sa toile pour l’empêcher de faire un geste de plus. De là, la Veuve Noire se releva habilement et se mit à rire de façon désinvolte en voyant les mines déconfites, dégoûtés et horrifiée des deux autres hommes. Elle fit subir le même sort à l’un d’eux qu’au premier, le gardant pour plus tard, tandis que celui qui essayait de s’enfuir mais, qui, maladroit comme un arriéré, s’était coincé le pied entre deux planches de bois, ne pu que hurler d’effroi alors que la peau de sa gorge fut séparée de sa chaire par Hélionoir qui, ensuite, n’en fit qu’une bouchée en un rien de temps. Inutile de préciser que les deux autres hommes ont finit eux aussi en pâtée pour Veuve Noire furieuse… Au moins, même si elle n’avait pas retrouvé Lysandre et qu’elle avait risqué de subir on-ne-sait-quelle ignominie, elle avait eu son repas.