L'activité marchande battait son plein en cette fin d'après-midi. Les matériaux et les objets les plus rares et précieux de la Montagne s'achetaient et se vendaient en quelques secondes dans la place centrale de Coeur-de-Granite. Plusieurs convois logistiques remontaient également des mines d'argent et d'or, et un convoi hautement gardé de Stratium revenait de la Voie de Modan.

Avec la fin de la guerre, le Conglomérat a assit son étreinte hégémonique sur l'économie de la Montagne. En recrutant à tout-va tous les meilleurs talents, de Tilamus aux portes de Sola, mais aussi en se diversifiant. Anticipant bien que la demande en arme risquait de chuter, Alaric prit la décision en amont de racheter plusieurs petites corporations d'artisans et d'orfèvres, afin d'approvisionner les nobles impériaux en produits de luxe.

Chandeliers en cristal, horloge finement ouvragée, et autres arbalètes de chasse runiques, voilà ce que le Conglomérat exportait également désormais. Le commerce avec les Glaces restait infiniment moins profitable que celui avec l'Empire, et si les Nains n'avaient pas encore renoncé à commercer outre-mer, c'est parce qu'ils comptaient négocier avec les impériaux les conditions de la fin des échanges avec les anciens Rebelles. Pragmatiques, les Nains comptaient obtenir de nouvelles concessions commerciales.

Il était depuis de coutume de dire que la Montagne était l'atelier de l'Empire. Ceci n'était pas entièrement vrai, même si une grande partie des produits les plus techniques ou les plus luxueux provenaient des Nains. En cette période de prospérité sans précédent, la Montagne attirait bien des envieux. Si l'Empire était le grand gagnant politique et militaire de la guerre, il ne faisait aucun doute que la Montagne en était le gagnant économique.

Aussi, la production d'armes et d'armures ne chuta pas, bien au contraire. Mais au lieu d'aller alimenter les armées de l'Empire, ces équipements d'élite servirent à renforcer les forces du Conglomérat et l'armée de la Montagne. Plusieurs armures intégrales en Stratium furent même échangées à la Corporation de la Terre et du Bois, en échange de plusieurs experts runemanciens qui vinrent travailler sur les Golems du Conglomérat.

Rägmor ne connaissait bien entendu pas tous ces détails, bien entendu, mais il remarqua évidemment la bonne humeur ambiante. S'il existait d'autres cités "libres" en dehors de l'Empire, elles étaient pour la plupart sous le déclin. La Cité des Arbres se remettait à peine de l'assassinat de sa reine. Le peuple des Glaces pleurait ses nombreux morts. Même Tilamus, capitale politique de la Montagne, désespérait de voir peu à peu son pouvoir et sa population partir vers Cœur-de-Granite.

Aussi, dans la cité du Conglomérat, les gens n'étaient pas seulement pleins d'espoirs. Ils étaient véritablement euphoriques. A chaque semaine, la ville s'enrichissait davantage, et ses habitants étaient emplis d'une confiance inébranlable en l'avenir. Une vision bien rare en ces temps troublés pour Terra Mystica. Si le sérieux légendaire des Nains empêchait toute manifestation trop vive au travail, Rägmor devait certainement connaître suffisamment cette race pour s'apercevoir que Cœur-de-Granite étai un véritable oasis de paix, de prospérité et de bonheur dans un monde en pleine tempête.

Si les gardes étaient toujours vigilants, personne ne vint intercepter l'improbable duo. En effet le Capitaine de la Garde, un certain Tarkas, était grand amateur du breuvage que produisait Thondir. Un de ses assistants allait très régulièrement en acheter pour lui, d'ailleurs. Aussi, il se contenta d'envoyer un messager alerter Alaric qu'il risquait d'avoir de la visite, tout en offrant une escorte à Thondir.

Le Duc-Directeur du Conglomérat était en pleine séance publique dans la toute nouvelle salle du trône. Les réunions du CMKM se passait jusqu'à présent dans des salles de conférences sobres et insonorisées, mais avec l'accession d'Alaric comme membre du Conseil de la Montagne, il fallut revoir certains protocoles. Ainsi, si les décisions affectant directement le Conglomérat se prenait toujours derrière des portes closes, la vie du "Conseiller Alaric" se déroulait devant une foule composée d'au minimum six douzaines d'observateurs.

Cette grande salle avait été construite sans faire attention à la dépense. Une immense fresque recouvrait le plafond voûté, avec plusieurs milliers de runes. Celles-ci se déplaçaient en permanence, altérant les couleurs de la peinture environnant. Le résultat était proprement stupéfiant : Il s'agissait d'une reconstitution de la fameuse peinture "La déception de Modan", représentant la déesse des Nains, la "Terre-Mère", quittant la Montagne pour les Steppes orientales, laissant derrière elle ses créations qu'elle jugeait indigne. Au premier plan, plusieurs milliers de Nains regardent partir l'immense béhémoth de pierre et de roche, certains pleurant à genoux, d'autres tentant de réconforter leurs enfants en leur jurant qu'elle reviendra un jour.

Et grâce aux runes enchantées, il ne s'agissait pas d'une simple peinture. La scène prenait littéralement vie, certes au ralenti. La peinture changeait à chaque instant, et on pouvait voir la créature arachnoïde colossale s'éloigner peu à peu, tandis que certains Nains agitaient leurs bras comme pour un dernier au-revoir. Ce n'était plus une oeuvre artistique, c'était une véritable fenêtre ouverte sur un autre monde. Pour renforcer au côté poignant de la scène, chacun des pas de Modan résonnait dans la salle, une immense enclume étant installée au-dessus de la salle du trône. Elle tonnait de telle façon que le choc de l'acier soit synchronisé avec le moment où une des pattes de Modan percutait le sol des Steppes.

Nombreux étaient les Nains et Gnomes dans la salle. Alaric venait de débattre pendant plusieurs heures quant au partage -ou non- de la technologie de création des Golems avec le reste de la Montagne. Finalement, un compromis fut trouvé avec les représentants des deux autres Conseillers. La fabrication du corps des Golems serait un travail conjoint entre le Conglomérat et la Corporation, les premiers ne gardant l'exclusivité que sur la technique permettant d'insuffler la vie aux créatures de pierre.

Le silence se fit cependant lorsque Rägmor et son compagnon nain pénétrèrent dans la salle, toujours escortés par de nombreux gardes. Le nom de Barbe-d’Écume fut murmuré par quelques connaisseurs dans l'assemblée, et Alaric se releva de son siège incrusté de Stratium pour observer les nouveaux arrivants. Il avait revêtu son armure de Conseiller, en Stratium pur et Stratium plaqué or. Sa barbe excessivement longue et finement tressée, ainsi que sa cape rouge de commandement ne laissaient guère de doute quant à son identité. Il ferma le Livre des Affaires du Jour qui pendait sur sa hanche droite, tout en poussant un soupir. Il était déjà si tard, et seulement la moitié des Affaires du Jour avaient été traitées. Le fait de combiner le rôle de Duc-Directeur et celui de Conseiller pesait lourdement sur ces épaules. Il comprenait désormais les épaisses cernes qu'il voyait souvent sur le Général Gralghast, un autre Conseiller. Le Représentant Tilus, politicien de carrière, n'avait pas à ce soucier de ce problème. Malgré cette fatigue chronique, Alaric avait encore une présence indéniable.

Alaric - Tenue de Commandement:

- On m'a effectivement raconté à plusieurs reprises des aventures et exploits de Rägmor Crocs-d'Acier, fondateur de l'Aurore, et dernier des Giguêtres. Des sources sûres m'ont également informé que Rägmor était mort dans l'arène de Sent'Sura, sans l'ombre d'un doute. Je ne sais qui vous êtes, étranger. Nous recevons tout le monde ici, à Coeur-de-Granite, vous n'avez pas à vous cacher derrière de fausses identités. Même si vous ressemblez fort à ce que serait un Giguêtre. Prouvez-nous que vous êtes Rägmor, ou déclinez votre véritable identité, puis parlez. Je n'ai jamais reçu la visite d'un partisan de l'Aurore.

Lorsqu'Alaric s'était levé, ses douze Brise-Acier s'étaient rapprochés lentement du trône, au cas où le colossal guerrier soit un assassin. Sait-on jamais. L'assassinat n'existait plus entre les Nains depuis des siècles, mais restait encore très en vigueur en territoire impérial, auprès des ex-Rebelles, mais aussi des Adorateurs.

Que pouvait bien être une "pierre de vie" ? Alaric avait certes entendu des rumeurs stipulant que certains avaient pût revenir d'entre les morts, mais il n'y avait jamais vraiment prêté attention. Cela était-il seulement possible ? Un simple coup d'oeil à l'assemblée de Runemanciens lui confirma que oui. Ces derniers ouvraient des yeux si écarquillés que le Duc-Directeur craint un instant que leurs têtes n'explosent. Ainsi, il s'agissait vraiment du fameux Rägmor Crocs-d'Acier ?

- Les Nains ne pratiquent pas la magie, Crocs-d'Acier. La Runemancie nous suffit largement. Je vous crois, cependant. C'est un honneur de vous rencontrer, Guiguêtre. L'arrière-arrière-arrière-arrière-petit-fils du fondateur du Conglomérat, Alaric VIIe du nom, a rédigé un traité sans équivoque sur les qualités intrinsèques de votre race. C'est dire si l'amitié entre nos deux peuples est ancienne. Nous regrettons tous ce qui est arrivé à vos semblables...

Un murmure parcourut les Nains présents, suivi d'une dizaine de secondes de silence. Était-ce un moment de recueillement ? Un signe de respect envers l'invité ? Difficile à dire. Toujours était-il qu'Alaric reprit la parole.

- Vous êtes un fils de Modan, au même titre que les Nains, les Gnomes, les Elémentaires de Terre et les Géants de Pierre. Vous avez toute notre attention, Crocs-d'Acier, porte-parole de l'Aurore. Nous vous écoutons.

Plusieurs personnalités naines, attirées par la rumeur de la venue du Guiguêtre, rentrèrent à leur tour dans la salle. Lorsque celle-ci fût presque pleine (chose rare, du fait de sa taille gigantesque) les grandes portes furent fermées. C'était près d'un millier de Nains, de Gnomes et autres créatures de la Montagne qui attendaient désormais d'entendre ce que Rägmor avait à dire. La légende de son discours à la foule de Sent'Sura, suivie de sa mort violente, avait fait son chemin jusque dans la Montagne. Restait à vérifier qu'il était vraiment un si bon orateur que ce qu'il se racontait. En tout cas Alaric, en ayant échangé un seul regard avec le Guiguêtre, fût convaincu de le laisser s'exprimer devant la foule. Cela en disait déjà long sur le respect qu'imposait Rägmor.

Le Guiguêtre était plein de fougue et de passion, comme les rumeurs le laissait entendre. Et, contrairement à ce qu'Alaric aurait pensé, Rägmor n'était pas venu convaincre les Nains d'adhérer aux principes idéologiques de l'Aurore. Non, il était venu pour proposer la création d'une "nouvelle puissance" d'ampleur mondiale. Un argument percutant pour Alaric, qui considérait l'Empire non pas comme un maître ou une menace, mais comme un allié avec qui il pouvait converser d'égal-à-égal. D'autant que le Guiguêtre avait déversé sa rhétorique avec conviction et talent,

- Je parle au nom du Conglomérat, et je pense pouvoir le faire au nom de la Montagne toute entière, Rägmor Crocs-d'Acier. J'entends bien vos arguments. Les Adorateurs, notamment, sont un danger pour tout Terra Mystica, et il suffirait d'un moment d'égarement, d'une seule seconde d'hésitation pour qu'ils nous conduisent tous à la ruine et la mort.

Effectivement, le Duc-Directeur du Conglomérat était l'un des plus grands partisans de la traque et l'extermination des Adorateurs. Il savait bien qu'en politique, il fallait user de peur plus que d'espoir. Et l'espoir était déjà là, grâce à la réussite économique formidable du Conglomérat, qui rejaillissait sur toute la Montagne.

La peur devait en revanche être distillée. Maintenant que le spectre de la guerre Empire-Rébellion s'était éteint, et qu'une invasion impériale n'était plus à redouter, Alaric avait fait sien le combat contre les Adorateurs. Le risque de fin du monde était en effet idéal pour unir les foules. En créant cette crainte -justifiée au demeurant-, il se rapprochait peu à peu de son objectif final.

- Vous avez entièrement raison. Nous nous devons de former une faction entièrement indépendante et vierge de l'influence des autres puissances. Cependant... C'est déjà le cas. Ensemble, nous avons refait de la Montagne une puissance qui compte dans le monde. Nous ne craignons ni l'Empire ni Nayris, pas plus qu'aucune autre force. Même les Dragons n'osent plus venir s'en prendre aux Nains !

Des applaudissements timides mais unanimes résonnèrent à travers la salle. Personne ne voulait déranger le Duc-Directeur, mais nombreux étaient ceux à voir en lui le symbole de l'indépendance incontestée de la Montagne. Le Stratium, les Golems, les Fauches-Dragons, les Armes de l'Effroi... Tout ce qui avait fait la grandeur de la Montagne ces dernières années était associé avec le nom d'Alaric. Il avait même donné son nom au grand Mur qu'il avait fait construire à l'entrée de la Montagne, et qui pouvait théoriquement tenir en respect même l'armée impériale.

- Tous les peuples libres sont bienvenus dans la Montagne. Nos frontières ne s'arrêtent pas directement à la Montagne. Si les Humains, Elfes et autres races ne peuvent émigrer en masse dans les hauts-cols, ils sont libres de s'installer en périphérie. Les Piémonts de Kargrad du Conglomérat, ou encore les Hautes-Plaines de Badok appartenant à la Corporation... Nombreux sont les gens libres à s'y installer pour chercher fortune, ou pour s'éloigner de l'Empire.

Effectivement, sur ces territoires, les Nains et autres peuples de la Montagne étaient minoritaires. On y comptait principalement des Humains, mais également d'autres races plus exotiques comme des Elfes, des Orques ou encore d'occasionnels Anges et Démons. Tous étaient les bienvenus, bien que la contrepartie de ce multiculturalisme exacerbé soit un nombre de garde que certains qualifiaient de "déraisonnable", juste pour maintenir une relative paix civile.

- Aussi, Crocs-d'Acier, je vous demande de reconsidérer votre proposition. Vous ne pouvez nous recommander de faire ce que nous avons déjà fait. La nation de la Montagne est puissante et souveraine, et elle ne reconnaît d'autre influence que la sienne sur son territoire. N'ayez crainte, l'Empire n'exerce nullement son pouvoir par ici. Bien que l'Empire soit et reste toujours l'ami et l'allié privilégié de la Montagne.

Cette dernière phrase était tout particulièrement à l'attention de la foule. Il était important de rappeler en permanence au peuple Montagneux que les Rebelles (pour qui certains s'étaient pris de sympathie) n'existaient plus désormais, et qu'il fallait regarder de l'avant. Aussi, nul doute que ce qui se disait ici arriverait aux oreilles des impériaux. Il valait mieux prendre des gants pour choisir ses mots. Affirmer la puissance et l'indépendance de la Montagne, oui. Le faire sans froisser l'Empire était encore mieux.

Décidément, ce Rägmor savait ce qu'il voulait. Malheureusement pour lui, ses désirs n'étaient pas en adéquation avec ce qu'Alaric avait prévu dans un proche avenir pour le Conglomérat. Il souhaitait protéger les montagnes et les forêts ? Le Nain n'avait d'intérêt que pour les montagnes.

- J'ai eut vent de l'assassinat de la Reine des Elfes. Soutenir aussi ostensiblement la Rébellion dans un pays contrôlé par Aile-Ténébreuse était une faute politique inconcevable. J'ai été attristé pour le peuple elfique, mais pas surpris.

A dire la vérité, il avait même été relativement réjouit. Les Nains en général, et le Conglomérat en particulier se rappelaient d'anciennes rancunes visant l'ancienne reine. Et nulle autre race n'a la rancune plus tenace que les Nains.

- J'ai aussi entendu dire que la nouvelle Reine était clairement favorable à l'Empire. Tant mieux. Vous me parlez de neutralité, mais les Elfes n'en veulent pas. Ils se sont rapidement soumis aux Démons lors de l'invasion de la Terre. Ils ont rapidement signé un traité de paix désavantageux sans même chercher à combattre. N'allez pas me traiter de raciste, j'ai moi-même des amis Elfes... Mais leurs instances dirigeantes sont lâches et indignes de confiance.

Jamais, dans l'histoire naine, les Elfes n'étaient venus au secours de la Montagne. Les Nains, bien que protégeant les nombreuses races mineures des Montagnes, étaient plusieurs fois au cours des millénaires venus soutenir les forêts contre diverses menaces (invasions d'ogres et de centaures, incursions de démons, attaque d'élémentaires de feu...). L'inverse n'avait jamais été vrai.

- Où étaient les magiciens Elfes lorsque les Dragons détruisaient nos forteresses les unes après les autres ? Où étaient leurs armées lorsque nos mines étaient envahies par les drones des Ruches de Feu ? Qu'ont fait les Elfes lorsque la Peste Changepierre a décimé notre peuple ? Rien. Ils sont restés dans leurs forêts, à protéger leur "fragile" écosystème, et à nous regarder mourir. La Montagne n'a besoin que d'elle-même pour maintenir sa survie et sa neutralité.

Il n'y avait que peu de choses qui pouvaient énerver un Nain aussi maître de lui qu'Alaric. Mais repenser aux relations entre les montagnes et les forêts était l'une de ses choses. Sa voix tremblait par moment, lorsqu'il se rappelait que ces événements ne dataient pour certains que d'une demi-douzaine de siècles.

- Et maintenant, même s'ils sont libres et en sécurité au sein de l'Empire, les Elfes voudraient un peu plus de neutralité ? Je vais vous dire ce qu'ils peuvent en faire, de leur neutralité. Barad-Dak-Khazum !

Plusieurs hoquets de surprise se firent entendre, suivis par de timides applaudissements de Nains, mais aussi de Gnomes. Plusieurs fois les Elfes les avaient abandonné également. En revanche, les Élémentaires de Terre restèrent impassibles, certains murmurant même entre eux leur désaccord. Les rares Kobolds, quant à eux, ricanèrent ostensiblement, comme à chaque fois qu'ils entendaient une insulte quelque peu piquante.

- Ils ont choisit de se soumettre à l'Empire. Le Protectorat était leur idée. Qu'ils ne viennent pas nous réclamer un quelconque soutien par votre biais, Crocs-d'Acier. Je ne risquerai pas de me brouiller avec nos amis impériaux pour eux. Si des Elfes veulent émigrer, qu'ils viennent dans les Piémonts, mais pas plus loin. Et qu'ils n'attendent pas un traitement de faveur.

A n'en point douter, le Guiguêtre connaissait deux ou trois choses sur les Nains. En proposant non plus une aide bénévole, mais une activité commerciale classique, alors il pouvait certainement s'attirer le soutien du Conglomérat. Alaric ne pût s'empêcher de retenir un demi-sourire à la perspective de voir un nouveau marché apparaître, au sein même des routes (déjà) sécurisées de l'Empire.

- Voilà qui me semble déjà plus raisonnable et faisable, Crocs-d'Acier. Qu'il ne soit jamais dit que les Nains refusent de commercer avec quiconque n'est pas leur ennemi direct.

Les Nains ne haïssaient pas les Elfes au point de vouloir en voir autant que possible périr sous les assauts de l'Empire. Après tout, ils avaient de l'or. Et le principal était de trouver le moyen d'en récupérer autant que possible, par voie marchande. De plus, le Duc-Directeur se mit à imaginer quelques secondes comment développer le marché de la forêt, et comment les soies elfiques s'arracheraient comme des petits pains ailleurs dans le monde. Mais avant de laisser son esprit divaguer, il poursuivit.

- Alors c'est réglé, Rägmor Crocs-d'Acier. Allez trouver les peuples de la forêt. Assurez-leur d'un approvisionnent constant en armes, armures et équipement de guerre, pour un prix honnête. Ce qu'ils font avec n'est pas le problème du Conglomérat, et ne l'a jamais été.

Si le Guiguêtre voulait vraiment unir toutes les factions un tant soit peu neutres du monde, alors il venait de trouver l'armurier de cette nouvelle alliance. La puissance logistique de la Montagne était énorme. Tant que l'or affluait, il n'y avait aucun risque de voir le soutien des Nains s'affaiblir.