- La visite du « Dard Scintillant » dans une vingtaine de minutes.

- Annulez-la.

- Huuum… Une rencontre avec la famille de notre Chef-cuisinier, cet après-midi même ?

- Très peu pour moi.

- Et bien euh… Un petit discours d’inauguration de notre Réserve de Poros, d’ici une heure…

Mysora s’interrompit et tourna fébrilement la tête, sceptique quand à cette dernière proposition.

- Depuis quand avons-nous une réserve de Poros ? demanda t-elle, légèrement intriguée.

- Euh non, veuillez m’escusez. Je pensais en toute honnêteté qu’une petite touche d’humour calmerait votre nervosité, vous qui aimez tant rire habituellement. Vous voyez, un Poro c’est tout mignon, tout froufrou : vous qui êtes une femme, je pensais que vous auriez sourit ou eu une réaction comme sautiller sur place à la manière d’une petite enfant…

- Je vois… Pourrais-tu me rappeler ton salaire ?

Le conseiller gloussa, se rendant compte qu’il parlait un peu trop au goût de sa Reine. Le Duo se remit donc en route en « Silence », avec pour seul accompagnement sonore le bruit de leurs pas et le frottement de la paperasse dont l’homme était responsable. Celui-ci, après une longue recherche, finit par extraire une mince feuille calligraphiée au nom de la Confrérie des Brumes…

- Ah ! Voilà ! Le voici… S’exclama t-il, fier de sa trouvaille.

En trottinant, il vint se placer devant Mysora et lui tendit le document, un sourire radieux aux lèvres.

- Je sais parfaitement que ce genre de choses vous passionne, alors j’ai intercepté l’un de ces courriers adressé au gestionnaire des ressources de la ville… La Confrérie des Brumes est ici. Parfaite occasion pour un entretien avec leurs dirigeants, n’est-ce pas ?

- Luz…

- Pardons ?

Mysora releva la tête, brutalement sortie de ses songes. Elle se retourna sans un mot et se remit en marche à vive allure, préférant prendre de la distance tant qu’elle le pouvait encore.

Il acquiesça à son tour, bien plus rassuré que les précédentes minutes. Un marché conclu était source d'apaisement, les transactions étaient fin prêtes et plus rien ne risquait d'arriver à sa précieuse marchandise... Luz désigna ses deux subalternes et expliqua à l'intention de son client :


Elle lui offrit un sourire affable, inclinant sensiblement la tête en guise de salut dû à son rang. Puis elle reprit d'un ton plus chaleureux cette fois-ci :


Il parut surpris l'espace d'un court instant, mais se remit bien vite. Et pour la première fois depuis le début de cette entrevue, un lent sourire arqua ses lèvres en une tendresse gênée qu'elle ne lui aurait pas connue :


Luz eut un rire amusé, compatissant à l’esclavagisme d'un pauvre père exploité... Elle n'avait probablement jamais eu de famille. Avoir des enfants ne lui manquait pas outre mesure, la reproduction de l'espèce et tout ce barda étant à des années lumières de sa véritable vocation dans la vie...


Elle attrapa la lourde et chaude cape bordée de fourrure soigneusement pliée sur l'une des chaises, et l'enfila avec l'aisance née de l'habitude. Les températures étaient polaires dans les environs, mieux valait s'habiller que de déambuler dans cet immense palais en simple tunique... Ils échangèrent les derniers gestes et paroles de convenance, et Luz tourna tout bonnement les talons. Elle referma calmement la porte derrière elle, et rabattit sur ses longs cheveux roux la grande capuche de son manteau par soudain accès de frilosité. Diable, comment un dragon pouvait-il supporter cela ? Espérant de tout cœur que son sang n'aurait pas la bonne idée de geler dans ses veines, elle tapa ses mains l'une contre l'autre dans l'espoir de se réchauffer. Maudit soit ces grands palais dont les couloirs dénués de cheminé par économie atteignaient toujours des températures inconcevables...
Elle rabattit donc les pans de sa cape de part et d'autre de son corps et s'élança à grands pas dans ces interminables couloirs, la semelle de ses talons claquant sur le dallage en une démarche élégante...

C'est au détour d'un corridor qu'elle percuta soudainement une personne visiblement très pressée qui venait en sens inverse. Elle recula de plusieurs pas en un « Aïe » sonore, portant une main vive à son épaule meurtrie, faux mouvement qui tira le tissu et rabattit brutalement sa capuche en arrière. Ses cheveux roux s'envolèrent en une multitude de mèches, se libérant du vêtement qui les avait alors retenus...


Elle ouvrit les yeux. Les posa sur la personne en face d'elle, de toute évidence aussi surprise qu'elle. Ses prunelles vairons si déroutantes s'écarquillèrent lorsqu'elle reconnut la jeune femme entre toutes, et Luz ne parvint qu'à murmurer fort bêtement :

- Mysora, attendez ! Où allez-vous ? Aurais-je dis quelque chose de déplaisant ?

Le conseiller tentait tant bien que mal de suivre le rythme imposé par la jeune Reine… S’il avait été plus proche d’elle, sur un plan relationnel, il aurait sans doute eu l’audace de l’attraper par le bras pour l’empêcher d’avancer. Cependant, dans cette situation, il craignait qu’elle ne se fâche s’il osait commettre un tel geste... Ce n’est qu’au hasard de l’une des innombrables galeries du Palais que Mysora fut stoppée dans sa course, plutôt violement d’ailleurs ! Elle n’évita de chuter que grâce à la subtile intervention de son « ami », qui eut le sage réflexe de se positionner derrière elle pour la réceptionner. La Dragonne souffla un bref merci à demi-sincère ; elle restait de marbre face à la personne en face d’elle.

- Lu… Hum, que faites-vous ici ? Vous devriez faire un peu plus attention, maugréa-t-elle.

Bien entendu, nul besoin de préciser qui était la plus fautive d’entre elles ! La Silénaste rejetait volontairement la faute sur autrui, abusant comme il se doit de son titre pour éviter de converser avec sa jeune sœur : montrer tout ses mauvais cotés semblait la chose la plus logique à faire s’il elle souhaitait demeurer pour Luz l’éternelle inconnue qu’elle se devait d’être… Malheureusement, cela ne semblait pas clair pour tout le monde !

- C’est elle ! Nous parlions justement de vous, Madame ! Je suis honoré de vous rencontrer, je suis Hess Heyfer, conseillé de notre bien aimée Reine. Permettez-moi de vous dire que je vous trouve ravissante ! Ah, euh… Ne prenez pas cela comme un manque de respect ! J’adore simplement ce que vous faites et d’après ce que je vois, votre réputation n’a d’égale que votre beauté…

Les joues teintées d’un rouge pivoine, le conseiller affichait un sourire radieux adressé à la Dragonne de Feu. Il changea bien vite d’expression sous l’effet d’un étirement d’oreille que sa Reine prenait plaisir à lui administrer…

- Restez à votre place je vous prie, soupira-t-elle avant de fixer attentivement sa charmante moitié. Je suis bien la Reine, et je suppose, au vu de la réaction de mon conseiller, que vous êtes la dirigeante de la Confrérie des Brumes ? Je suis enchantée, et croyez bien que j’aurais aimé avoir une plus large conversation avec vous mais, je suis actuellement occupée.

- En réalité Madame, nous n’avions pas enco…

- N’en rajoute pas, s’il-te-plaît.

Mysora n’attendit pas de réponses et salua brièvement la fausse inconnue, mais tandis que leurs regards se croisaient, elle ne pu empêcher sa pupille de révéler sa vraie nature. Sa main vint recouvrir son œil et elle dépassa Luz rapidement, reprenant la même allure que précédemment. Son conseiller s’inclina poliment et trottina pour rejoindre la Reine.

- Madame Weiss, attendez-moi ! Où allez-vous encore ?

Retenir ainsi une personnalité Royale aurait pu lui être fatal si elle n’avait pas eu affaire à Mysora - non pas que celle-ci soit trop clémente ou trop peureuse pour réagir, mais parce qu’elle avait conscience du lien les unissant et elle ne pouvait s’en détacher malgré tout les efforts possibles… Elle se contenta de dévisager sa « bien-aimée » Sœur, cachant comme toujours son envie de la prendre dans ses bras derrière un regard neutre au possible.

« Votre Altesse » ? Ces deux simples mots agirent comme un coup de poignard dans la poitrine de la Dragonne ! Être ainsi appelé par un être à la fois si proche et si distant n’était pour Mysora qu’une torture supplémentaire… Pour autant, elle en fit abstraction le temps d’une réponse, car elle ne pouvait pas échouer… Non, certainement pas ! Elle n’échouerait jamais !

- Beaucoup de gens prétendent me connaître, ce doit être une impression commune.

La jeune Reine sembla pourtant hésiter quelques secondes durant lesquelles elle resta droite, immobile, un vilain tic de sa main droite soutenant son coude gauche... Sa façon d’agir lui semblait à la fois cruelle et parfaitement humaine (Dragonne). En cet instant, elle se sentait presque prisonnière de sa cadette, otage de ses sentiments, perdue entre mensonges et fausses vérités…

- Ecoutez, je suis… Je ne suis pas ce que vous croyez, bien que je ne puisse pas lire dans vos pensées. Nous n’aurions jamais du nous rencontrer, tout cet échange n’aurait ainsi jamais eu lieu. Je pense d’ailleurs que vous avez d’autres chats à fouetter, n’est-il pas vrai ?

Elle dévia son regard, impolitesse involontaire, ne se rendant pas compte que la main furtive de son conseiller allait changer son destin du tout au tout. En effet, la « jeune » femme sentit un pincement lui tirailler le fessier, et elle sursauta de surprise avant de dévisager d’une vive gifle le visage de son compagnon. Un mélange de frustration et d’énervement fit alors tomber son plan à l’eau, l’ayant fait adopter malgré elle une forme hybride située entre le Dragon et l’Humain : de longues oreilles, quelques écailles dissimulées sur son visage, des yeux à l’Iris fendus, bleus à en faire rougir le ciel…

Malgré la douleur, l’homme semblait, quant à lui, avoir réussit sa manœuvre : ayant attentivement observé l'échange, il connaissait la vraie nature des deux femmes, et avait subtilement conclu que ces deux charmantes demoiselles devaient très certainement posséder un lien, proche ou non. Qu’une personne lambda agisse comme avait fait Luz ne l’aurait pas choqué habituellement, mais connaissant la réputation et le célèbre sang-froid de la Dirigeante de la Confrérie des Brumes, il avait été légèrement troublé par la façon d’agir de celle-ci.

Mysora mit un temps à se rendre compte de son changement physique, et lorsqu’elle comprit enfin, il était déjà trop tard pour trouver une quelconque excuse. Dos à sa sœur, elle n’osa pas se retourner.

- Je… Je crois que je vous dois quelques explications…

Luz eut un imperceptible mouvement de recul. Elle ne se comprenait plus depuis que cette étrange iris avait rencontré son regard, ses réactions d'ordinaire calmes étaient désarçonnées par un sentiment diffus qui la tiraillait de tous côtés... A vrai dire, elle se sentait clairement perdue entre une émotion ancienne qu'elle ne se souvenait même pas avoir un jour connue, et sa perplexité face aux réactions anormales de la Reine. C'était chaud et... Là, auprès de son cœur. Une conscience repliée, une ombre protectrice floue comme cachée au travers d'une fine paroi, veillant sur elle depuis la nuit des temps... Sa nuit des temps. Elle ne savait guère pourquoi ces étranges souvenirs qu'elle ne reconnaissait pas remontaient aujourd'hui en sa mémoire, mais ils étaient assurément anciens, marbrés de poussière et d'oubli comme s'ils venaient de son inconscient et non d'un réel vécu.
Tout cela était terriblement déroutant. Luz n'était pas femme à se laisser décontenancer pour si peu -et par Yehadiel, il en fallait même énormément pour que son éternel maintien ne se brise un tant soit peu ! Et là, en seulement un regard échangé, une impression aussi fugace qu'un battement d'ailes de papillon et quelques paroles brutales volées, son monde s'effondrait.
Et Luz comprit soudain que plus rien ne pourrait jamais plus l'éloigner de cette Reine inconnue. Qu'elle ne pourrait vivre sans elle. Sans réponse. Son monde effondré -elle ne savait comment- s'était reformée plus vital que jamais autour de cette simple et unique personne, comme si son être, son existence, était soudain devenu l'origine de tout, la tension infime qui la maintenait en vie au point qu'elle n'osait plus respirer...


...Vous laissez partir. Le pouvait-elle ? La Dame était Reine, on ne retient guère une altesse. Tant d'impuissance à comprendre... Était-elle redevenue une enfant ? Fébrile et soumise au destin, à ces adultes qui décidaient pour elle ? Elle qui ne s'était jamais pliée à aucune autorité, se retrouvait soudain petite, si petite devant ce charme vibrant et si proche de cette Reine magnifique, comme une dragonnette devant des parents en colère... !
Je suis une adulte bon dieu...
Elle s'apprêtait à s'excuser pour de bon et abandonner la partie lorsque ce bon vieux Hess Heyfer refit des siennes. Sans lui cet incident se serait sans doute conclu ici, mais il en fut tout autrement... Car la Reine apparut enfin sous son véritable jour -beaucoup plus nettement que cette première pupille qui l'avait trahie ! Et Luz ouvrit de grands yeux, ses lèvres s'entrouvrirent en une délicieuse surprise, formant un « O » parfait qui semblait traduire mieux que tout les mots du monde ce qu'elle ressentait en cet instant... Raison ! Elle avait raison ! Rien n'était perdu !


Un rire léger teinta sa voix, un rire heureux, instinctif face à cette consœur dragonne, bonheur de ne plus être seule, plus jamais ! Elle franchit l'espace qui les séparait d'une enjambée, se plaça face à elle en la contournant doucement, sans réaliser que ce n'était pas exactement la dirigeante de Silena qui se méprenait...


Luz était passionnée, soudain animée et colorée dans un tourbillon de rouge aux joues, ses yeux pétillants ne quittant pas un seul instant le regard de la Reine, et ses mains s'envolaient en de grands gestes expressifs, désignant ses yeux, sa peau, ses écailles... Elle ne savait plus par où commencer, persuadée qu'elle était qu'il s'agissait d'un problème de race.
Ses prunelles se fendirent à leur tour, ombrées d'un doré sombre qui effaça le bicolore de ses iris... Pareilles. Elles étaient pareilles !

Alors, une chose complètement incroyable se fit dans l'esprit de Luz. Elle réalisa brutalement ce que venait de dire ce cher Hess Heyfer depuis plusieurs secondes déjà. Ses yeux s'agrandirent lentement, très, très lentement, ses lèvres s'ouvrirent davantage encore, sidérée, sans couleur, d'une pâleur de neige...
Elle lui décocha le regard le plus déroutant qu'il fut jamais capable d'exister. Et s'enquit d'une voix blanche :

[Mieux vaut court que jamais ! ... Euh, c'est pas ça le proverbe ? >w<]

Tandis que Mysora reprenait au fil des secondes une apparence toujours plus humaine, sa chère cadette tentait d’assimiler chaque détails, chaque informations qui filtraient à travers ses pauvres neurones… Pas facile, lorsque l’on est « orpheline » et seule représentante de sa Race, d’apprendre l’existence d’un membre de sa famille au détour d’un couloir ! Encore moins évident de faire le rapprochement lorsque cette personne est dirigeante d’une armée, d’un pays, d’un peuple… Il était bien trop tard pour placer ces événements sur le dos de la coïncidence, et Luz était loin d’être assez idiote pour croire à une vulgaire explication qui remettrait en doute ses déductions précédentes.

Hess brisa alors subtilement le silence qui s’était installé en l’espace de quelques secondes. Il fallait lui reconnaître quelques qualités, comme la capacité à décontracter l’atmosphère lorsque celle-ci se voulait oppressante, lourde… Piochant depuis quelques instants dans sa pile de paperasse, le conseiller en ressortit une lettre froissée qu’il déplia, avant de lire à voix haute :

- Un repas avec les représentants des différents hameaux de Silena, dans une vingtaine de minutes, votre Altesse. Puis-je vous conseiller, sans être offensant, d’inviter notre chère rencontre à déjeuner à vos cotés ? Ce n’est pas tout les jours que nous recevons dans notre cité une dame si prestigieuse !

- Pour tout avouer, mon cher Heyfer, je crois avoir eu de votre part assez d’offenses pour aujourd’hui… observa-t-elle.Quoiqu’il en soit, je ne suis pas d’humeur à débattre autours d’une table un instant de plus… Annulez donc cette rencontre, et tant pis pour les râleurs !

Un sourire anima le visage de l’homme, qui ne fut toutefois pas surprit de cette réponse. N’ayant pas obtenu de réponse négative à sa question, il s’enquit donc de prendre les dispositions nécessaires…

- J’en déduis que je prépare uniquement deux couverts, pour vous et votre réputée convive.

- Non. Au risque de vous décevoir, je ne déjeunerais pas avec la dirigeante de la Confrérie des Brumes.

Ses traits mimèrent à merveille l’interrogation, ne sachant pas vraiment ou se situait la pensée de la Dragonne… La curiosité maladive de l’être humain prenant le dessus, il tentait de formuler une question simple qui n’affecterait pas la vision de Luz par rapport à la Reine… Pourtant, il n’eut pas le temps de laisser échapper une parole. Mysora croisa son regard dans celui de sa moitié, et s'empressa de mettre un terme à cette comédie inutile...

- Aujourd’hui, je déjeunerais avec ma sœur.

La charmante Luz avançait un argument réfléchit, pourtant faux. L’une avait apprit à connaître l’autre, ce n’était pas réciproque… Toujours cachée dans son ombre, Mysora avait eu diverses occasions de « surveiller » sa cadette durant leur longue vie : problèmes d’ordre sentimentaux, « bastonnades », joies et pleurs… La dame avait vécu de nombreuses épreuves aux cotés de sa sœur, sans toutefois être réellement à ses cotés !

Que fallait-il dire à cette Dragonne pour lui prouver l’authenticité de cette révélation ? Etait-il finalement judicieux d’insister, au risque de l’énerver, ou pire, la vexer ? La souveraine se contenta de baisser la tête, et s’inclina poliment à son tour en guise « d’excuses ».

- Veuillez me pardonner, je ne pensais pas à mal.

Tandis qu’elle se relevait, Hess fixait tour à tour les deux femmes, l’incompréhension se lisant sur visage. Bien entendu qu’elle ne pensait pas à mal ! Mysora n’était pas du genre à rire de n’importe quoi, avec n’importe qui ! Elle semblait si sérieuse, si sure d’elle, que tout ceci ne pouvait être une mauvaise blague. Un lien existait réellement entre ces deux Dames, le conseiller en était persuadé.

- Oui euh, eh bien. Je ne vole pas, du moins je ne crois pas en être capable, et je… Si vous le souhaitez, nous pouvons justement vous préparer quelques mets qui vous ravirons.

Un sérieux déconcertant avait remplacé l’humour de notre bon Heyfer. Il précéda les deux Dragonnes, sans un mot, et disparut au croisement des cuisines, laissant les deux sœurs en tête à tête. La Reine, très peu surprise, conduit alors Luz jusqu’à la salle de repas, ou elle pourrait déguster la très réputée cuisine Silenienne.

(…)

Arrivées à la table, Mysora proposa à sa convive de s’asseoir d’un geste souple de la main. Une fois installée confortablement, elle tenta du mieux qu’elle le pouvait de fuir le regard de son invitée. L’arrivée des premiers plats lui provoqua un soulagement, caractérisé par un long soupir à peine audible.

- Du filet de Mommath, cuit à point comme vous l’aimez Madame Weiss, assura l’une des serveuses. Quand à vous, Mademoiselle Luz, nous nous sommes permis de vous proposer une cuisson différente. Une viande saignante vous conviendrait-elle ?