Je ne comprends pas, je crois que je ne te connais pas.
Non, personne ne connait vraiment cette jeune femme. Glissant entre les analyses, s'échappant comme de l'eau entre les doigts. Tyssania ne pensent sincèrement pas qu'on gagne à être connu, ni elle, ni les autres. Alors elle ne s'attache pas, à personne. Pas plus dans sa véritable identité que dans ses multiples elles qui ont laissé un souvenir amer de secret dévoilé à travers le pays. Ce ne sont que des visages, parfois même des êtres entiers destinés à disparaître aussi vite et facilement que l’espionne les a créer. Des masques dont elle ne voit pas l’intérêt de s’encombrer. Et comme on referme un livre, on oublie aussi bien les personnages que leurs relations.

Malgré qu'elle aime passer du temps avec ces autres qu'elles croisent, il ne faut donc pas compter sur elle. Ni pour un rendez-vous, ni pour accourir au milieu de la nuit si vous êtes en danger de mort. Elle a simplement mieux à faire de ses épaules que de les mettre à disposition pour que quelqu’un ou quelqu'une puisse pleurer. Tactile, ne vous fier pas à ses caresses ou ses embrassades qu'elle donne sans trop y penser, perturbante de naturel parfois, mais un naturel si éphémère que sa tendresse disparaitra à la seconde où elle se sera détachée de vous. Ils ne sont que ça, des peluches dont elle dispose avec caprice, comme une enfant. Curieuse des secrets qu’on pourrait lui dévoiler mais avare de cette affection qu’elle ne dispense presque jamais plus que physiquement.

Pourquoi tu nous a trahit ! Je tenais à toi.
Oui, on croit en elle quand elle en a envie. Ce boulot lui permet d’assouvir tellement de ses envies en même temps. Cachée derrière ses masques ou ses visages, elle peut s’amuser, attirant les autres dans ses filets comme elle aime le faire, découvrant tout ce qu’il y a à savoir et creusant même un peu plus pour se distinguer. Elle fascine et adore cela. Parce que les hommes aiment jouer avec le mystère, prêt à se bruler du moment qu’on les fasse toucher le feu.

Elle n’est pas sure de les comprendre. Tyssiana, si défiante que même son corps refuse de lui révéler sa vraie forme. Un signe qu’elle prend comme celui des Dieux. Une confiance tellement inexistante que seule sa colombe connait les questionnements de sa maîtresse. Parce qu’elle n’a pas la parole ou peut-être pas la capacité de comprendre, l’espionne aime à discourir seule en lissant les plumes du bel oiseau à chaque occasion. Elle ne la trahira jamais, les animaux ne sont pas si bêtes que les humains et autres formes humanoïdes. Quand on ne croit qu’à l’immatériel, au moins est on sure de ne pas être déçu.

Ce n’est qu’un feu de bois…
Une lumière qu’elle ne supporte pas. Les flammes rougeoyante ou bleue, peu lui importe, elle ne veut pas les voir. Peur irrationnelle, la seule qui pourrait lui faire perdre de vue l’un de ses objectifs. Tant que rien d’incandescent ne se dresse sur son chemin, elle continuera. De préférence à la faveur de la Lune qui rend les chats effrayants et transforment chaque ruelle en cachette de fortune. Une faiblesse qu’elle déteste, une chose qu’elle ne peut pas contrôler dans sa vie. Et c’est peut-être cela le pire.

Pour tout le reste, elle fonce. Une idée bien ancrée dans son esprit y restera, le temps qu’il faudra. Relevant régulièrement les yeux, elle vérifie les pièges, le déroulement mais jamais « Pourquoi » ne lui vient à l’idée. Elle sait simplement qu’elle doit le faire. Pourquoi cette place d’espionne contre la rébellion ? Pourquoi eux ? Simplement parce qu’elle en avait envie, et que c’était la plus convoitée…

Vous croyez que la pyrophobie vient de l’enfance ? Pourtant une enfant du pays du feu ne devrait pas avoir peur. Malgré cela, c’est bien ce qui les a tous tué. La seule chose dont elle se souvient en réalité, c’est de ce grand feu et d’une enfant qui tient contre elle une poupée aux longs cheveux noirs et aux yeux en forme de gros bouton. Elle est là, devant cette maison qui brûle, des cris inhumains sortant des fenêtres et de la porte où les flammes lèchent avec envie le chambranle. Immobile, terrorisée par l’inconnu. C’est comme ça que sa vie commence dans sa mémoire et Tyssiana ne tient pas à chercher ce qu’il s’est passé avant. De ses parents et possible autre famille, elle ne se souvent que de ces voix à l’agonie. Et d’elle, à peine plus vieille qu’elle.

« Viens, ils sont partis… »

Le petite se met en mouvement, suivant cette voix ferme d'enfant. Une fille qui devait avoir, quoi ? 7 ans à l’époque et qui l’avait invitée à la suivre. En même temps quel choix lui restait-il ? Tyss ne savait ni qui elle était, ni pourquoi elle était venue la chercher, mais elle savait que ce serait la seule à venir. Quelques mètres plus loin, elle s’était retrouvée face à un grand homme mince, le visage caché par une grosse écharpe en lambeaux. Ses yeux noirs l’avaient jaugée un long moment. Une éternité au bout de laquelle elle lui avait tendu sa poupée comme une offrande pour l’aider à quitter ces lieux. Lui ne lui avait demandé que son nom et celui de l’être de chiffon avant de la mettre sur son cheval.

Comment ils avaient su qui elle était et ce qu’elle était ? Ce n’est que bien plus tard qu’elle se posa la question. Des informations qu’elle sut rassembler, il était un vieil ami de son père. Il lui avait promis de prendre soin d’elle s’il avait fallu. Et elle en avait eu ô combien besoin. Le feu avait été déclenché par un assassin dont elle ne retint pas le nom tant il était médiocre en réalité. Tyssania ne chercha jamais à se venger ou venger sa famille. Ces voix qui hurlaient pouvaient elles d’ailleurs être une famille ? Elle préférait de loin celle qu’elle s’était choisie, ce vagabond et cette fille de gitan qui l’accueillirent et lui apprirent à mentir aussi surement qu’eux-mêmes à chaque fois qu’ils arrivaient dans une nouvelle ville, lui qui lui montra avec patience comment dompter un cheval ou préparer un poison et elle qui lui avait montré le lancer de couteau auquel elle avait préféré l’arbalète plus sure à son goût.

C’était une existence faite de rien. Des joies de se baigner dans un frais ruisseau, de courir avec sa poupée sous les étalages du marché, chapardant à l’occasion une pomme ou une grappe de raisin, ou de rire en voyant passer des gardes qui les regardaient l’air dédaigneux. Plus tard, elle se rendit compte qu’il leur avait fait traverser tous les pays du feu, de la montagne et l’air ainsi qu’une partie de la forêt de Drayame. Sa façon à lui de les instruire sans vraiment les en informer. Elle, elle lui appris aussi à lire, écrire et compter un minimum et plus tard à plaire aux hommes quand elle en aurait besoin.

Ce n’était pas une vie compliquée, pas une vie de rêve non plus, et elle était même jalouse de ces moments où il la prenait dans ses bras, elle l’humaine comme lui et pas la petite métamorphe qu’elle était mais cette jalousie capricieusemis à part, c’était parfait à ses yeux. La vérité c'était que le petit trio était en fuite. Elle n’était pas sure que sa « sœur » s’en soit rendue compte. Pour elle qui aimait réfléchir c’était devenu une évidence. Le masque de l'écharpe, les départs précipités, parfois en pleine nuit sans aucune explication, les différents noms qu'ils donnaient à chaque étape. De plus en plus, souvent à mesure que les filles finissaient leur adolescence.

Cette nuit-là, comme ça devait finir par arriver, ce fut la fin du rêve. Ne soyons pas mélodramatique non plus, Tyss a horreur du sentimentale. Rattrapés, ils se sont juste séparés. Bêtement... pas d’au revoir ou d’adieu, ni de lieu de rendez-vous ; aucun n’aimait les effusions, on n’a pas besoin de grande phrase dans une véritable famille. Une simple façon de survivre, de se quitter. Et pourtant, elle avait été plus faible qu’elle l’avait cru. Elle avait fait demi-tour au bout d'une nuit entière. Pour savoir si les autres s’en était sorti, les retrouver, peut-être… Et en effet, elle l’avait retrouvée. Etendue sur le sol, au milieu de trois autres corps. Elle avait dû se défendre comme une tigresse, mais ils avaient gagnés. C’était la première fois qu’elle pleurait depuis la mort de ses parents. Sa sœur s’était retournée vers elle. Elle s’était moquée de ses larmes, après tout ça ne servait à rien.

« Tu n’as qu’à me maintenir en vie avec ton don. Toi qui t’es échappée. Je croyais que je pouvais revenir le chercher, comme si l’amour avait pu être plus fort que l’acier… »

Alors elle avait fait ce qu’elle disait. Elle l’avait laissée partir. Prenant son sang et en remplissant sa gourde. Elle avait immédiatement pris son apparence avec une seule goutte. Et la tzigane était morte ainsi, son nouveau double lui tenant la main le cœur serré. Elle se leva ensuite. On entend souvent des histoires de chevaliers nobles qui enterrent leurs amis tombés au combat. Mais Tyssiana n’était ni chevalière ni noble et sa sœur se serait encore moquée du royaume de Nayris.

Ce qu’elle devait faire maintenant ? La même chose qu’avant ; à 20 ans elle erra sur les routes comme elle en avait l’habitude. Pas plus malheureuse qu’une autre et pas plus seule que ces femmes qui changent de lit toutes les nuits. Pourtant,, même une légère solitude n’est pas supportable pour ceux qui ont vécu en famille. Alors elle entra dans l’armée d’Aile Ténébreuse en tant qu’espionne. Pas si facile ? Un espion venu débusquer du rebelle de petite envergure à la frontière du territoire de l’air l'avait repérée. Méfiante, elle avait laissé sa curiosité l’emporter, et ses recherches l’avaient amusé. Lui, le petit espion l’avait recommandé. En fait, elle lui avait fait forte impression.

En réalité, il n'était pas si petit que cela. Et il avait compris qu'elle avait ce besoin de faire partie d’un groupe dont tous les membres se tenaient pourtant à distance d’elle. Des entraînements, des missions, des rencontres, des réussites et des soirées. Ils rythment sa vie, le danger la faisant frissonner et les relations lui donnant de quoi réfléchir. Elle aiguisa son esprit, elle qui avait toujours aimé réfléchir et trouver le sens de la vie des gens, elle était plutôt douée, peut-être trop méfiante pour un travail plus normal de toute façon.

Tyssiana découvrit avec sa vie dans l’armée, la discipline et l’ambition dont elle n’avait jusque-là jamais eu besoin de s'encombrer. Pourquoi porter son soutien à un démon ? Pourquoi pas ? Elle n’y voyait ni inconvénient pour elle, ni problème pour sa colombe, unique cadeau qu’elle ait jamais reçu de cet espion soit disant sans cœur qui l'avait ramenée. On la reconnait pour ce qu’elle est et ce qu’elle sait faire, et personne ne se met en travers de sa route. Une vie qui n’est ni réglée, ni monotone; où elle se complet dans les jeux et les intrigues, si elle a postulé dans la Milice de l’Ombre il y a quelques mois c’est uniquement pour la pimenter encore un peu plus. Les guéguerres de noble l’ayant déjà lassée…

Citation :

« Lui, le petit espion l’avait recommandé. En fait, elle lui avait fait forte impression. »

Raconte ta rencontre avec l'espion en question, ainsi que la manière dont tu l'as impressionné. Tu insisteras sur tes sentiments et tes propres impressions au cours de cette aventure.