Macha a beaucoup de mal à réprimer la bestialité de sa nature de lycan. Ayant vécu longtemps dans les privations, elle ne s'impose aujourd'hui plus aucune limite. De plus, elle est en pleine crise d'adolescence version lycan sans tuteur. Prête à tout pour un peu d'adrénaline ou de sang, Macha tient par dessus tout à sa liberté, mais pourrait néanmoins accorder son allégeance à une personne puissante si elle avait quelque chose à y gagner. Très à l'écoute de ses instincts, elle est désormais plus à l'aise sous sa forme animale que sous sa forme humaine. Dans toute sa vie elle n'a jamais eu l'occasion de penser à l'avenir et se retrouve donc perdue dans une nouvelle vie dont elle ne soupçonne que peu de choses. Impulsive, violente, cruelle, les faibles feraient mieux d'éviter de la croiser. La fourberie féminine fait également partie de son attirail cruel depuis peu de temps, se révélant particulièrement douée pour amadouer ses proies avant de s'en délecter. Cependant, réfléchissant peu et accumulant les massacres autour d'elle, elle collectionne les ennuis et ne s'en sort toujours que de peu. Etant resté très longtemps sous forme animale, elle fuit le contact avec les humains consciente qu'elle a gardé des tics animaux qui pourraient révéler sa véritable nature.

Histoire Macha ne se souvient plus ni de son nom ni de son prénom. Elle est née dans une famille d'esclaves, et dès qu'elle fut en âge de pouvoir tenir debout elle travailla aux champs. Son destin avait commencé comme des centaines, voire des milliers d'autres, et il était aisé de savoir comment sa vie finirait: comme celle de ses congénères, tuée par un accès de rage d'un maître, ou usée par le travail son cœur s'arrêterait finalement de battre. L'avenir? Le mot lui était inconnu, chaque jour ressemblait au précédent, chaque jour le travail semblait plus dur encore que la veille, et la vie sans intérêt. Tout autour d'elle, de nombreux esclaves profitaient d'un moment d'inattention de leurs maîtres pour mettre fin à leurs jours et ainsi se libérer d'une vie insipide et douloureuse. Elle ne pouvait se faire à l'idée, peut-être était-ce son jeune âge, ou peut-être simplement un furieux désir de vivre qui chaque jour l'aidait à ouvrir les yeux, à manger pour simplement survivre. La politique, les guerres, les religions...qu'en aurait-elle eu à faire? Qui s'intéresserait au sort d'un être transparent, juste là pour effectuer les corvées des autres? Elle ne comprenait rien au monde qui l'entourait, et ne cherchait pas à le comprendre: bien obéir aux maîtres était la seule chose qu'il y avait à savoir.

Un jour cependant, alors que des années de labeur déjà étaient passées, un événement faillit mettre fin à cette vie misérable définitivement, et elle aurait disparu des esprits, sans une trace...Un seigneur adverse au sien, pour une raison qu'elle ignorât toujours, décida de se venger de son maître. Introduisant des hommes d'armes dans le lieu où les esclaves étaient regroupés pour dormir, ils se mirent à tous les exécuter un par un, dans un bain de sang. L'affolement monta d'un coup tandis que les esclaves hurlaient de terreur, cherchant à s'enfuir, tandis que les grilles restaient horriblement closes les condamnant à leur funeste sort. Elle aurait pu chercher à se défendre, mais à quoi bon? Elle savait sa faiblesse, elle connaissait leur force, elle voyait leur nombre: elle n'avait aucune chance. Impuissante, elle les regarda massacrer tous ceux qui avaient partagé son quotidien, les égorgeant, les mutilant. Dans la panique, elle fût propulsée contre un mur. Sa tête heurta la surface dure et elle perdit connaissance, tombant inerte sur les corps de ses congénères.

Ce n'est que bien plus tard qu'elle se réveilla, poisseuse de sang, transie de froid et affamée. Son corps avait été jeté parmi les cadavres dans une fosse commune. Elle avait enfin obtenue sa liberté, celle qu'elle n'avait même pas osé espérer durant sa vie entière. Et maintenant, qu'en faire? Elle était faible, elle était seule, et si la vie au dehors était la même que celle qu'elle venait de vivre ce soir là, elle se savait désarmée pour en faire partie. Alors elle resta allongée sur ces corps qui ne tarderaient pas à devenir une infâme puanteur, et attendit patiemment que la faim la tue, ce qui lui semblait encore le choix le plus digne qu'il lui reste à faire. La faim et le froid aidant, le sommeil ne tarda pas à l'emporter.

Il faisait toujours froid, mais dernièrement le climat avait été plus rude que jamais. La famine régnait tant qu'on les nourrissait à peine. Un bruit non loin, puis le choc d'un coup la réveillèrent: un bras venait de s'abattre sur son visage. Elle réouvrit les yeux pour découvrir ce qui lui sembla être un animal qui fouinait parmi les corps. Tandis que ses yeux lentement s'habituaient aux ténèbres, elle distingua plus nettement les contours de la créature et faillit hurler d'effroi. Le cri resta étranglé au fond de sa gorge. La bête, qu'elle avait au premier abord prise pour un loup, se repaissait des cadavres, arrachant les membres et les dévorant avec avidité. La peur s'empara d'elle. Elle imagina d'abord fuir ou se cacher, mais ne bougea pas. Ses yeux restaient figés, fixés sur la créature qui dégageait une telle bestialité et une telle puissance qu'elle en était comme hypnotisée. Et soudain, les mots sortirent de sa bouche sans qu'elle n'ait pas les retenir:

"Tuez-moi."

La créature se tourna vers elle, surprise, et elle lut dans ses yeux l'animalité tout autant que la curiosité. Elle sursauta en entendant une voix humaine venir de l'hybride.

"Pourquoi devrais-je te tuer? Tu étais esclave non? Tu es libre maintenant, alors profites-en, cours."

La jeune femme fronça les sourcils répliquant:

"Jamais je ne serais libre. Je suis faible. Je suis affamée. Je n'ai jamais connu le monde au dehors que lorsque mes yeux l'ont caressé. Je préfère mourir que de devoir à nouveau obéir, et de toutes les façons de mourir, être dévorée par une créature aussi puissante que vous me semble être la meilleure de toutes. Vous ne répugnez pas à vous attaquer à la chair des cadavres non? Pourquoi ne pas préférer une proie bien vivante?"

Le lycan s'approcha, semblant être tenté par la proposition. Poussant un soupir elle s'allongea alors et tenta de se détendre, essayant de réprimer sa peur. La bête s'approcha d'elle et la renifla.

"Tu pues la peur, tu n'as aucune envie de mourir. Celui qui souhaite réellement mourir ne craint pas la mort. A moins que tu ne sois une adepte..."

Il la regarda intensément, avant de chasser l'idée de son crâne.

"Et si je te donnais la puissance? Si tu pouvais devenir comme moi? Préfères-tu vraiment la mort, ou rejoindre les rangs des notres, les lycans?"

Macha ouvrit de grands yeux stupéfaits, jamais une fois elle n'avait ressenti l'espoir, jamais une fois elle ne s'était permis de vouloir quelque chose. Et aujourd'hui plus que jamais, elle désirait. Vivre, et acquérir la puissance. Alors d'une voix légèrement tremblante mais décidée elle annonça:

"Faites de moi l'une des vôtres."

Il sourit, d'un sourire assez effrayant en vérité, découvrant ses crocs luisants de sang. Puis il se pencha sur sa nuque. Elle sentit son souffle chaud sur sa peau, elle qui n'avait jamais connu que la présence des autres esclaves à ses côtés, le seul contact des corps entassés les uns contre les autres...Ils étaient morts comme ils avaient vécu: en vain, et entassés les uns sur les autres comme des objets sans valeur. Alors elle sentit les crocs pénétrer sa chair, et son sang chaud qui ruisselait le long de son cou pour venir teinter les loques qui lui servaient de vêtements. Malgré le froid mordant, une grande chaleur l'envahit, un immense bien être et la sensation soudain de s'éveiller au monde qui l'entourait. Tandis que ses crocs perforaient toujours son artère, ses yeux prirent une lueur bestiale et s'éveillèrent à la nuit tandis que ses oreilles percevaient désormais la vie grouillante alentour qui se terrait. Alors d'autres désirs s'imposèrent. La faim. Le sang. Et hurler. Ce qu'elle se mit soudain à faire, sans pouvoir réprimer cette envie, entendant non pas ses cris de douleur comme elle avait l'habitude d'entendre, mais le hurlement puissant du loup annonçant que la nuit lui appartenait, et que les plus faibles devaient regagner leur abri s'ils tenaient à la vie.
Lorsqu'il la lâcha, elle se jeta avec appétit sur les cadavres qui l'entouraient. Elle se rendit soudain compte que sa peau s'était couverte de poils, et qu'au lieu de ses mains abimés se trouvaient d'énormes pattes munies de griffes. Alors qu'elle se repaissait du corps de ceux qui étaient autrefois l'équivalent d'une famille sans pouvoir s'arrêter, sa conscience la suppliait d'arrêter. Mais elle avait faim, tellement faim...Elle ne s'arrêta que quand elle ne fut plus en mesure d'avaler quoique ce soit.
L'autre lycan avait disparu. Elle se mit alors à courir chercher un abri, s'allongeant en lisière de forêt sous un buisson, et s'endormant.

Le lendemain, elle se réveilla sous forme humaine, le sang séché collant ses cheveux à sa peau. Alors la conscience de sa propre puissance l'envahit. Plus jamais on ne lui donnerait d'ordres, et plus jamais elle ne connaitrait la faim...Les débuts furent difficiles, s'habituer à sa nouvelle nature, changer d'apparence comme on change de peau, se dégager des valeurs humaines...L'ivresse du sang, de cette vie que l'on arrache, le combat parfois contre d'autres animaux. Les blessures de guerre aussi, qui se referment si facilement! Elle s'habitua si facilement et si rapidement à cette vie! Sa nature de loup lui plaisait tant qu'elle y passa de plus en plus de temps, jusqu'à oublier petit à petit qu'elle avait pu être humaine. Elle passa de longs mois, peut-être des années, à parfaire sa technique de chasse, à inventer des pièges dans lesquels prendre ses proies, à gagner en vitesse pour qu'aucune vie ne lui échappe...Ivre de puissance, elle se mit à torturer ses victimes, les dévorant membre par membre, jusqu'à ce qu'ils meurent finalement dans la douleur infligée.

Mais elle était jeune, tant humaine que lycan, elle était imprudente. Elle méprisa les autres races, se prenant le luxe de rester au même endroit où elle avait désormais ses habitudes, dévorant quelques habitants avant de retourner dans sa tanière. Jusqu'au jour où la sanction ne se fit pas attendre: les villageois organisèrent une battue. Pour la première fois depuis longtemps, elle ressentit la peur. Elle se sentait prise au piège, de la même façon qu'elle prenait au piège ses victimes. Aujourd'hui, ce ne serait pas elle qui dévorerait la proie: ce serait elle la proie. Soudainement lui revinrent les images de ces peaux de loup qui ornaient le plancher du seigneur...Ainsi c'est comme ça qu'elle finirait finalement? Encore aux pieds du seigneur? Le désespoir l'envahit à nouveau tandis qu'elle se remémorait sa misérable condition humaine. Elle avait envie de hurler, mais ne pouvait même pas le faire sans attirer l'attention sur sa position. Difficilement, elle réussit à reprendre forme humaine, au prix de grands efforts. Elle tituba sur ses jambes tandis que son esprit s'agitait pour trouver un plan. Finalement elle se jeta sur une des personnes effectuant la battue qui semblait plus faible que les autres. Se jetant dans ses bras, elle se mit à pleurer.

"Au secours! Il s'est jeté sur moi, il a tenté de me mordre, sauvez-moi!"

Oui, le coup de la pauvre femme attaquée, ça a toujours son petit effet. L'homme est troublé un moment, baisse sa garde. C'est ce moment que choisit finalement Macha pour relever le visage avec un sourire diabolique. Se transformant sous ses yeux, elle lui ouvrit la gorge férocement, enivrée par la peur et l'adrénaline, se repaissant de son sang. Puis elle prit la fuite, courant à quatre pattes vers le village où elle se cacha. Lorsqu'elle eût l'occasion, elle se lava pour retirer le sang de son visage puis tenta de passer inaperçue dans le village en se réhabituant à sa forme humaine.

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