Enroulée dans une longue cape de fourrure grise, un ange s'était installé dans les épaisses racines d'un arbre. Le seul de cette colline qui surplombait la plaine. Elle avait bien l'intention de dormir à la belle étoile, cette nuit là, et de profiter aussi bien du couché que du levé du soleil sur ce paysage magnifique, dans le calme que les turbulences de Sen'tsura lui faisait savourer.

Alors qu'Inadel commençait à somnoler, des rires roques la réveillèrent. Sereine et loin de s'imaginer sur quoi elle allait tomber, elle se leva pour regarder ce qu'il se passait derrière le tronc qui la maintenait à l'abri des regards.

La nausée la prit et elle tomba à genoux.

Une nuée de brigands venait de passer avant de s'engouffrer joyeusement dans une petite caverne. Ils étaient trop obnubilés par des pensées des plus malsaines pour faire attention à elle qui, si elle était d'une tolérance sans pareil, ne supportait pas la violente perversité provoquée par les besoins du cinquième membre des mâles humains. Son teint devint encore plus blanc que d'habitude et ses traits se crispèrent, pendant qu'elle reprenait sa place initiale, décidée à ne pas regarder de nouveau les visages de ces engeances. Ceci la conforta dans l'idée que les Hommes mériteraient d'être exterminé au même titre que les démons ; et que seule les femmes animées par l'amour maternelle méritaient de prospérer dans ce monde. D'autant plus lorsqu'elle ressentit une vagues de sentiments aussi puissants que dégoutants derrière son dos. Malgré qu'ils soient entré dans leur trou, elle réussissait à les ressentir et s'en était affligeant ! Dieu n'aurait jamais dû lui donner un tel pouvoir.
Malgré les tortures que lui infligeait son ventre dans le désir de lui faire cracher son contenu, elle dégaina son katana, prête à trancher la tête du premier qui viendrait l'envahir de sa perversion par sa présence dans son champs de vision.

"Troubler un repos qui s'annonçait si beau...", pensa l'ange. Elle n'eut pas le temps de s’apitoyer davantage que la terre frissonna au rythme de pas lourds. Lorsqu'ils passèrent derrière elle, un sentiment de haine l'envahi, disparaissant aussitôt, lorsque la source sembla entrer dans la grotte.
Que cela pouvait-il bien être ? Elle s’apprêta à se lever, quand des cris retentirent et la figèrent :
- L'AURORE !!
La perversité fut troublée par la peur et une course de jambes paniquées ne tarda pas à se faire entendre et entamer la descente de la colline.
L'un des malfrats devaient avoir été particulièrement essoufflé par son obsession, car il ne trouva pas la force ni le courage de suivre ses compagnons, préférant s'accroupir à quelques mètres de l'ange sous un autre gisement de racine noueuse. Ses fantasmes trouvaient encore le moyen de perdurer malgré sa peur et donnait envie à Inadel de fuir. Mais un autre sentiment prit le dessus, l'envahissant d'un désir de protection étrange. Étrange, car loin d'être doux comme celui que l'on pouvait trouver dans la féminité, mais dur et paternel. Un peu bourru.
- Tu dois faire attention. Je ne serai pas toujours dans les parages pour te protéger, mon enfant. Ce monde abrite des ennemis dont tu devras savoir faire face à tout instant. Ne grimpe plus ici seule, ou bien ne viens pas la nuit. C'est bien trop risqué, dit la chose dont ces sensations semblaient provenir.
Puis une âme qu'elle sentit paniquée s'éloigna, atténuant peu à peu également l'aura que dégageait la chose.
Inadel s'appliqua alors à percevoir ce que fabriquait l'homme entre deux racines.
"Elle-elle-elle repart sans lui ! L'idiot ! Je vais la prendre par derrière, par tous les sens du terme, ahah ! Alors qu'il aura le dos tourner. Les pauvres cons, ils auraient dû attendre avec moi, mais tant pis. Je l'aurais pour moi et moi seul !" étaient les pensées qu'elle perçurent.
Son ventre se contracta alors une derrière fois. Une dernière fois avant que toute source de perversion soit happée par le néant de la mort. Dans un mouvement, sans l'ombre d'une hésitation, elle bondit sur lui et lui enfonça sa lame dans sa gorge.
- Épargne moi tes viles pensées ! Malfrat ! Hurla-t-elle avec rage.
Dans son élan de colère, elle eut envie de lui arracher les paupières de ses yeux désormais vitreux, afin qu'il ne puisse jamais trouver le repos, et en approcha la pointe tremblante de sa lame.
Enfin, elle se ressaisie. Elle ne devait pas se plier à une telle violence et se força à se mettre à genoux pour les fermer.
- Aussi malsaine soit ton âme, puisses-tu partir en paix, et la laisser être purifiée.
Puisse-t-elle revenir sur Terre, se faire pardonner les pêchés de son passé, chantonna-t-elle.
Son regard fut ensuite attirer par un colosse recouvert de muscles et de cuirs.
Elle demanda :
- Vous nommez-vous Aurore, Messire ?
En l'observant davantage, elle perçu une force effrayante, mais reposante. Et surtout dénudée de toutes mauvaises pensées, ce qui lui fut agréable, relativement à sa précédente expérience.
- Nul impuretés, dans vos idées. Sachez que j'en suis heureuse.

L'homme parlait beaucoup, malgré sa carrure qui tentait à caricaturer la brute vide de réflexions. Ses mots étaient l’écho de ses pensées qui pouvait faire dire à l'Ange qu'il était bel et bien sincère. Elle ressentait son désir d'être entendu comme étant juste. Peu d'humain possédait des convictions aussi fortes que les siennes et elle n’esquissa pas le moindre mouvement de recul lorsqu'il s'approcha. Elle ne se sentait nullement menacée, ainsi emplit de cette puissance.
Était-il vraiment possible que cet être soit plus tolérant qu'elle ? Apparemment. Tolérance résulta d'expériences intenses qui lui avait montrer leurs relativités sur la vie d'une personne ; et qui l'avait pousser à accepter les faits plutôt qu'à les refuser et sombrer dans les ténèbres de la négation. Et selon lui, cette tolérance était bel et bien ce qui devait être la racine d'un monde meilleur.

L'ange se laissa emporter par ses idées et balbutia :
- Je... je suis confuse... Désolée...
Les traits de son visage s’effondrèrent en une expression gênée. Elle se sentit désormais mal-à-l'aise, en voyant le sang du brigand s'écouler sur la lame de son katana et elle s'empressa de la secouer avant de la ranger dans son fourreau, comme pour faire disparaître les preuves d'une erreur honteuse.
Elle sentit un besoin pressant de se justifier et s'essaya à une argumentation personnelle, malgré l'empreinte qu'avait laisser les paroles de ce dénommé Rägmor :
- Je me nome Inadel... Je suis un Ange Elohim-Malkhi, de la voie des messagers. Pour arriver à mes fins et pour que je puisse réussir à amener l'harmonie sur cette terre, on m'a fait assister à sa déchéance et on m'a offert le don de lire les esprits. Ce brigand... ce brigand... avait des pensées horribles... Trop horribles... Peut-être sa vie la t-elle menée à ces atrocités, sans qu'il le veuille. Oui... Ce doit-être le cas et vous devez avoir la raison. Personne ne peut choisir les influences de sa destiné. La vie est ce qu'elle est et doit être vécue pour que son résultat puisse être constaté... Je suis tellement désolée...
Peu à peu, sa confusion s'en alla, relativement à l'influence du discours de Rägmor qui s'atténuait.
Elle se massa les tempes de ses doigts, comme d'habitude, lorsqu'elle se trouvait face à un dilemme. La multitude de convictions qu'elle avait rencontrer jusqu'à maintenant essayèrent d'apporter leur jugement.
- Pourtant... comment la tolérance même peut-être tolérer, lorsqu'elle meurtrie les corps et les âmes de ceux qui la subissent ? Cette tolérance amène l'intolérance, des oppositions et des désirs de destruction. Des Hommes meurent pour être tolérant. Pendant que d'autre meurent pour leurs convictions... Doit-il y avoir un juste milieu ? L'un et l'autre sont mauvais... La vie est certainement de nature mauvaise également. Les hommes devraient peut-être être supprimer.
Non... non...
L'humanité tend à s'uniformiser... les plus convaincus imposent ou transmettent leurs idées. Les hommes créés ainsi des sociétés. Celles-ci se battent entre elle, pour leur différences. Cela jusqu'à ce qu'une seule persiste. Jusqu'à ce que les Hommes aient tous la même perception. La paix doit-être la guerre... la destruction... et la reconstruction... puis la reconstruction de la destruction.
L'ange se perdit dans ses idées et secoua la tête avant de reprendre, la tristesse s'emparant d'elle.
- Peu importe que l'humanité tende à s'uniformiser. Que l'influence que ses membres se partage. Il y aura toujours un différent. Il doit y avoir un différent... celui qui permet de savourer la similitude. Le mal qui fait souffrir, pour que l'homme puisse prendre conscience du bien-être. Ce qui fait que les mots on un sens, par leur contraire. Qui souhaiterait avoir des amis... s'il n'y avait pas d'ennemi qui nous forcerait à considérer la valeur d'une personne, au milieu de tant d'autres...
Après tout, la vie s'équilibre probablement d'elle même. Pourquoi suis-je donc ici ? Que dois-je apporter ? Je ne sais plus ! Je ne sais plus ! Que doit bien pouvoir faire la justice !? Et laquelle...
Inadel retomba a genou et ses mains se crispèrent sur les replis de sa cape.

L'homme avait conservé un calme contagieux tout le long de son discourt. Lorsqu'il tendit la main à l'ange, pour l'aider à se relever, c'est sans réfléchir qu'elle l'accepta, manipulée par la bonté que son être dégageait. Elle se laissa entrainer jusqu'au bord de la colline, où ils observèrent la douceur des courbes du paysage, soulignée par les reflets de la pâles lueurs de la lune. Il lui semblait triste, en ce moment de turbulence dans son esprit. C'est quand le géant reprit la parole, que l'étincelle de la paix intérieure se remit à briller dans ses ténèbres.

Sa tolérance et les images qui l'illustrait semblaient être prête à surmonter toutes les épreuves et elle n'avait pu détaché son regard des siens. Les yeux d'Inadel s'embuèrent et se perdirent dans le ciel qui s’éclaircissait. Elle parla à voix basse, comme dans la crainte de faire fuir les flux de la quiétude fragile qui la parcourrait.
- Pourquoi... pourquoi ai-je pensé durant tant d'année que les Dieux m'avait envoyé sur Terre pour modifier ce qu'ils ont créé... Peut-être parce que je suis une erreur, tout comme leurs autres créations... Non... Tout semble si bien se dérouler, dans cette nature. Chacun de ses éléments se soutiennent, s'alimentent mutuellement. Nulle erreur, ici. Peut-être pouvons nous difficilement comprendre les Hommes parce qu'ils sont un monde à part entière. Un monde, cet élément même qu'il faut protéger. Chacun d'eux.
Elle sourit à demie, pleine d'espoir.
- Si je ne trouvais cet ultime sens de la justice, c'est apparemment parce qu'elle ne peut être définie. Tout comme la vie ne peut-être décrite, la justice et l'équilibre ne peuvent-être véritablement perçus. Ce respect et cette liberté, que vous prônez avec toute son abstraction, se résument-ils bien à la vie ? Est-ce bien pour la vie et sa préservation telle qu'elle est que vous œuvrez ? Pourtant, il semble qu'il n'y ait grand chose à apporter.
Cette dernière idée l'affligea quelque peu et elle baissa son regard sur la plaine. Non loin d'elle, un corbeau releva la tête et la fixa, avant de s'envoler en croassant.
Elle frissonna. Les ténèbres de son plumage et les idées qu'apportait son cri, la mort, lui fit penser aux démons. Ces êtres ignobles...
Elle s'emmitoufla avec sa cape et trembla légèrement.
- Votre tolérance est tellement respectable... Mais les démons... ces démons... monstrueux... eux n'ont rien à faire ici. Où font-ils parti des défauts de ce monde à tolérer ?
Elle regarda avec une détresse embraser d'une certaine rage son pédagogue.
- Doivent-ils être tolérer ?!

Inadel était rassurée d'entendre de la bouche de cet homme qu'il avait l'ambition de permettre au peuple de chasser les démons. Même si c'était quelque peu démesuré. C'était une répulsion maladive qu'elle avait contre ces bêtes et aucune conviction, aussi forte soit-elle, ne pouvait perdurer véritablement dans son cœur si elle tolérait l’existence de ces êtres. Mais celle de l'Aurore s'intégrait belle et bien de plus en plus en elle, confortant toutes les contradictions qui la tourmentaient auparavant. Puisse cette paix perdurer !
Elle leva des yeux soulagés et emplis de reconnaissance sur le visage de brute qui lui avait inculpé la sagesse.
- L'Aurore est ainsi un hymne de courage... Les vibrations qu'elle dégage sont enivrantes et c'est un honneur tout autant qu'une libération pour moi que de les avoir entendues. Je ne doute pas que votre voix, ainsi que la voie de l'Aurore, portera. Cela même jusque dans les cœurs les plus fermés.
Si vous avez besoin d'une voix supplémentaire, sachez que la mienne joindra votre cœur. Tout comme s'il vous faut une lame, je me joindrais à votre armée.
Ceci dit, elle se mi à genou dans l'herbe et dégaina son épée. Elle se saisit d'une poignée d'herbe et s'appliqua à nettoyer les restes de sa précédente extermination. Quelque chose lui disait qu'elle allait rapidement en avoir besoin.

Le cœur d'Inadel se mit à battre la chamade et ses yeux ne purent retenir une larme. Depuis si longtemps qu'elle cherchait la gemme de l'harmonie... elle était enfin convaincue de l'avoir trouver. Même si ses derniers mots l'encourageaient à personnaliser sa perception de la justice, elle possédait dorénavant une base stable sur laquelle construire, ainsi qu'une influence suffisamment puissante pour la maintenir. Cette stabilité dont elle avait tellement besoin...
Sa reconnaissance envers Rägmor venait de redoubler et ses mains enveloppèrent celle qui venait de lui faire ranger son arme.
- Le désir de liberté même est une entrave. Nous sommes tous prisonnier de passions, d'envies qui parfois s'opposent. De soit en soit... Cependant, je ne laisserais plus jamais cette entrave être une personne qui ne porte pas de respect à la vie et aux choix d'autrui. Je le promet.
Comment remercier votre attention et votre apport...
Votre proposition, par contre, je sais comment l'honorer. N'ayez crainte. Je ne préserve de la haine que pour les engeances démoniaques, plutôt que pour les Hommes. Mais les personnes que je vois ne peuvent me cacher leur véritable intention. Ainsi, je me garderais la liberté de juger si les membres de l'Aurore se doivent d'être protégés ou non. Je ne tiens point à être aveuglée, si belle soit votre lumière. Cependant, si leurs convictions sont justes, je les aiderais et me dévorait à leur cause tout comme je le ferais pour vous.