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 J'entends déjà sur la plaine, le vol noir de jais...

 
J'entends déjà sur la plaine, le vol noir de jais... Sand-g10Lun 19 Jan - 21:12
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Entendez vous sur la plaine, le vol noir de jais ?

Citation :
Hëryn décide de rentrer chez elle, dans les Glaces. En survolant les mers, elle pourra constater le déploiement des flottes des factions en guerre et s'interroger sur le rôle qu'elle va vouloir avoir dans les évènements futurs. Plus que jamais, on surveille tout en Glaces, et elle devra redoubler de vigilance si elle ne veut pas s'attirer des ennuis, bien que les forces armées du continent ne soient pas portées sur la chasse. Où se dirige-t-elle en arrivant ? Que décide-t-elle de faire ?


Hëryn volait déjà depuis plusieurs jours, à vive allure, selon la direction Sud, Sud-Est dessinée par les cimes de moins en moins élevées des crêtes des Montagnes. Et bientôt, comme elle l’espérait, se profila la ligne sombre de la mer. Les vents se chargèrent d’un fort parfum iodé et la blanche ne prit qu’une courte pause avant de se lancer à l’assaut de l’étendue noire. Maigre bagage, le petit sac de cuir renforcé qui pendait à son cou venait heurter ses écailles avec un léger tintement métallique. En regagnant l’abri de la couche nuageuse à quelques kilomètres de la côte, la dragonne avisa, au loin, une ligne de tâches indistinctes, alignées sur l’horizon maritime. Elle emprunta un courant ascendant et vira de bord, curieuse de constater par elle-même le pourquoi d’une telle agitation sur l’eau. Après seulement quelques minutes, ses yeux purent s’ajuster sur de gros navires grouillants de silhouettes affairées. Des navires. Elle put même émettre un nouveau constat en les survolant : des navires de guerre. Des soldats, des armes, tout ce petit monde rutilant de métaux divers. Que de formes aux contours agressifs, pointes, lames, masses, boucliers, canons. Et le roulement réguliers des tambours, le martèlement des bottes renforcées sur le bois des ponts se mêlaient étrangement au roulis des vagues sur les coques.


La guerre. La guerre. La guerre.


Les Humanidés n’ont que ce mot à la bouche.

Hëryn renâcla bruyamment avec un regard dédaigneux sur la flotte armée qui s’éloignait déjà. N’avaient-ils donc rien de mieux à faire que de s’étriper les uns les autres ? Par les os des grands ancêtres, qu’ils s’éradiquent donc, au moins ceux qui n’aspirent qu’à vivre auront-ils enfin la paix !
Même son esprit brut des forces de la nature ne pouvait envisager sereinement ces batailles qui n'étaient en réalité que boucherie absurde, où ni l'honneur, ni la vertu n'avaient leur place. Mourir pour mourir ? Très peu pour elle. Ses ancêtres lui avaient légué un héritage, Mère était morte pour qu'elle vive et grandisse, elle n'allait pas gâcher cette chance inestimable que bien peu des siens avaient en ces temps obscurs.

Elle accéléra, brassant l’air avec plus de force, pressée au final d’en finir avec ce spectacle affligeant. La côte des Glaces était encore loin.

Sa queue en gouvernail, Hëryn se laissa planer négligemment sur quelques lieues. L’image de la flotte belligérante continuait de tourner en son esprit, et avec elle les paroles disparates qu’elle avait depuis longtemps récupéré, à Tilamus et ailleurs. Le démon et ses acolytes débarquant d’un autre monde avait mis Terra à genou. Ce n’était pas la première fois dans l’histoire du monde qu’une guerre décimait tant de monde. Et certainement ne serait-ce pas la dernière. Mais les éphémères en faisaient tout un plat. Les nains, eux, y avaient vu une opportunité en or… comme toujours, ou presque. Et elle dans tout cela ? Elle se sentait plus que jamais en marge du monde, lassée d’entre parler à droite et à gauche de batailles, échauffourées ou autre massacres. Elle en était même venue à envisager d’abandonner son travail au Dragon d’Argent, pour retourner au fin fond de sa Toundra natale et s’y laisser dormir, comme jadis le patriarche, en attendant que le monde change, et change encore. Mais le joailler avait coupé court à toute velléité de sa part en jouant sur la corde, encore sensible sous forme humaine, de ses sentiments. Et la voilà donc partie en quête d’acheteurs potentiels.

Le plan de voyage fourni par son employeur était simple : Saline était en ligne de mire. Mais la blanche hésitait à gagner Cardrak. Depuis son dernier voyage deux ans auparavant, les habitants bourrus du Sud avait vu leur côte de sociabilité considérablement réduite. Après tout, eux aussi étaient en guerre. Eux surtout. Mais un vieil adage lui dictait aussi que l’œil de l’ouragan était toujours plus sûr que ses bords. Et Malnur lui offrait une assurance qu'elle aurait été mal avisée de ne pas utiliser.

Lorsque les falaises blanches furent sous elle, Hëryn obliqua vers l’intérieur des terres, au-dessus d’une forêt, où elle piqua pour se fondre dans les hautes ombres des sapins.
Elle réapparut quelques heures plus tard. Cette fois, elle était Hëryn la jeune fille blanche, tunique blanche et pantalon de cuir de cerfroid, son sac sur l’épaule. Elle avait pour l’occasion acheté une longue étoffe grise, plus pour dissimuler que pour se protéger du froid. Mais après tout, une jeune fille semblable était toujours plus crédible ainsi que la crinière au vent alors que même les soldats aguerris souffraient de gerçures et de gangrène dans un tel environnement. . L’écailleuse regagna le village le plus proche à pied, prenant soin de ne pas l’aborder par le même côté que celui où elle avait atterri. Savait-on jamais, sa perte d’altitude l’avait certainement rendue visible pour des guetteurs avisés, son armure de petits diamants n’étant pas vraiment d’une discrétion appréciable ici.

Hëryn fut accueilli par deux masses de muscles, emmitouflées dans leurs manteaux de fourrure.

« Bonjour, sentinelles, leur dit-elle dans un parler des Glaces impeccable, je suis marchande itinérante, et je souhaite exercer mon commerce chez vous. Puis-je prendre abri en ce village ?

-Seule et sans escorte à travers la campagne ? répondit le garde de droite, vous n’avez vraiment pas froid aux yeux, mamzelle. Faites tout de même attention par ici, les tavernes peuvent être aussi dangereuses que les routes, voire plus.

-Je voyage en Glaces depuis déjà plusieurs années, sourit-elle en montrant avec naturel la paume vide de sa main libre pour détendre les humains, je suis plus discrète seule à pied qu’avec un convoi marchand, Du reste, eh bien, je me débrouille.

-Certes, c’est pas faux, souligna le garde de gauche, cependant, vous savez en ce cas que les temps sont troubles. Saline est en guerre, comme les autres. Faites attention à vous. »

Un échange de sourire et un jeu de regards plus tard, elle était entrée. Elle se retrouva à déambuler entre de larges maisons grises et austères, d’où filtraient une myriade d’odeurs diverses et variées.
Le sol gelé se transformait par endroit en une bouillie infecte, alors que les quelques feux présents faisaient fondre localement la croûte de glace. Hëryn évita la mélasse de quelques petits bonds, passa la tête par une fenêtre, par une porte. Les humains du Sud avaient des habitudes bien à eux, des odeurs caractéristiques et un franc parler qui n‘avait pas d’égal.
Pourtant, l’atmosphère, même en ce village près de la côte, semblait lourde et noire. Peu de badauds dans les petites rues étroites, peu d’expressions sur les visages. Hëryn darda sa langue une petite seconde dans l’air enfumé.

Dans le chemin encaissé qui menait à la place centrale, elle s’aperçut que plusieurs hommes armés patrouillaient aux alentours, haches et masses à la ceinture, l’air peu avenant. Elle les contourna calmement, toujours sous son fichu terne. En sens inverse venait un personnage à la tenue détonante : plutôt richement vêtu, même si sobrement, il ressortait sur les tons grisâtres et ternes de son environnement. Une fourrure abondante grimpait le long de son manteau brodé, en dessinait les bords et lui mangeait la partie inférieure du visage. Un chapeau à large bord, peu usité dans ces contrées, venait parfaire son équipement. Ils se croisèrent, l’homme souleva légèrement son chapeau, révélant une chevelure grise éparse. Hëryn inclina légèrement la tête, sans vraiment le regarder.

«Madame. »

Elle le dépassa, tout à ses pensées, quand soudain elle entendit une exclamation.

« Mais… attendez… je vous connais ! »

Le bourgeois en voyage venait de faire volte-face et la dévisageait sans gêne. Il dévoila une dentition bien moins soignée que son allure et lui tendit une main gantée.

« Vous faites certainement erreur, ami, répondit Hëryn,

-Peut-être, acquiesça l’homme toujours en souriant, néanmoins laissez-moi ma chance : ne seriez-vous pas la jeune seconde de ce nain de Tilamus … ? Oui, Au Dragon d’Argent, c’est bien ça ? »

Surprise, Hëryn ouvrit la bouche, la referma, avant finalement de la rouvrir. Un temps infiniment court, pourtant infiniment long, la vit hésiter. Mentir. Non. Non, aucune utilité... Au contraire, peut-être peut-elle... faire affaire ?

« En effet. Comment… ?

-Oh, je suis un grand voyageur, voyez-vous. J’étais encore récemment à Luütra. J’ai quelques facilités, qui me permettent de voir du pays ! Il y a quelques mois, j’ai acheté un collier pour ma femme dans votre boutique, voyez-vous ? Et vos yeux sont de ceux que… hum, que l’on n’oublie pas facilement ! »

Il eut un petit rire faux, avant de se reprendre, un peu plus sérieux.

« Mais dites-moi, que venez-vous faire ici, si loin des fastes magasins où vous devriez officier ?

-La maison mère exporte volontiers ses créations, et je suis chargée de voyager en ces contrées pour faire fructifier notre commerce.

-Oh ! Je vois, oui, excellent ! Ces nains sont des génies. Ma foi, une fois qu’on s’est accoutumé à la rusticité locale, les Glaces sont un endroit bien fascinant ! Je vous assure !

-Je vous crois, je m’y rends régulièrement.

-Hum, à ce que je vois je n’ai rien à vous apprendre. Ah, ce que j’aime les voyages, le monde est à la foi si grand… et si petit ! Ha ! »

Il sortit un mouchoir blanc de l’une de ses poches et s’essuya la figure. Hëryn tentait de se souvenir de lui, mais le souvenir se télescopait avec tant d’autres qu’elle renonça au final. Quelle importance ? Lui ou un autre…

« Je me demande également ce qu’un homme de votre statut fait en ces lieux seul et sans arme.

-Mes armes sont invisibles, jeune fille. Et j’espère ne pas avoir à en user sur les braves gens de ce pays, ce serait fâcheux. Quand à ma venue, une simple visite à un membre éloigné de notre famille. Rien de bien important cependant.

-Dans ce cas je vais vous laisser à votre affaire, les miennes doivent être rentables. »

Il lui sourit, et d’un hochement de menton entendu, lui demanda avec cette pointe de fausse complicité :

« Et où comptez-vous vous rendre dans l’immédiat pour ces… affaires ? »

Hëryn réajusta la besace à son épaule et lui répondit sans lever les yeux :

« A Cardrak. »

Elle l’entendit s’extasier sur la capitale de Saline, mais elle lui avait tourné le dos, et jamais elle n’aurait su ce qu’il avait à lui dire si sa main ne l’avait retenue par l’épaule.

« Au fait, un voyageur averti en vaut deux : il m’a semblé voir voler un dragon dans les parages en venant. Méfiez-vous, car s’il vous venait de croiser l’une de ces horreurs, vous n’auriez pas assez de vos colliers pour négocier. Les gens du pays ont beau les chasser, ces saletés reviennent toujours ! Bon vent tout de même ! »

Le bourgeois s’éloigna dans la rue, laissant une Hëryn sur place, une expression indéchiffrable sur ses traits. Et le regard lourd de sens.




Hëryn

Hëryn


Dragon

Partie IRL
Crédit avatar : vinogradovalex & dloliver
Double compte : Arnast'Arr Etherninmion
Vitesse de réponse : Variable


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