Le regard perçant et les cheveux au vent, Altaïr marchait. Sans penser, sans se préoccuper de ce qui l’entourait, il se contentait d’avancer droit devant sans s’arrêter, des première lumières du jour jusqu’au derniers rayons du jour où la visibilité devenait nulle.
Bien qu’il tentait de chasser toute pensée de son esprit, une image revenait sans cesse. Celle d’Aille Ténébreuse lui perforant l’abdomen d’un coup d’épée, et le regardant agoniser au milieu des autres cadavres dans les ruines d’une citadelle en flamme…
Ce n’était pas possible. Il ne pouvait pas se faire tuer comme un vulgaire gibier ! Altaïr en était persuadé, dans cette vision, les rôles étaient inversés. Il savait très bien que si la situation ne changeait pas, sa première rencontre avec le démon suprême serait sa dernière. Après cela, il fermerait les yeux à jamais. Les vieillards racontent que bien des jeunes ont tenté par abus de confiance de s’opposer à Aille Ténébreuse et tous ont subis le même sort.
L’idée de ne pas entrainer dans sa chute mortelle l’être qui était la cause de toutes ses souffrances rendait Altaïr fou de rage. Son visage s’assombrissait progressivement au fil de sa marche et son poing droit se resserrait au point que les veines dessinées sur son avant-bras menaçaient de rompre.
Soudain, une voix stoppa net l’avancé du démon pyromane en prononçant une phrase des plus évocatrices.
« N’OUBLIE JAMAIS QUE LES ECAILLES D’UN DRAGON SONT PLUS RESISTANTES QUE N’IMPORTE QUELLE PROTECTION ENSORCELLEE !!! »
Altaïr commençait à bouillir. Son teint s’assombrissait et ses pupilles tournaient au pourpre. Une légère fumée noire apparu, comme si elle sortait des pores de ses mains.
« Je sais ce que j’ai à faire! Je n’ai besoin de personne… Retournez tourmenter les macchabés qui vous servaient de marionnette… »


Altaïr n’eut pas le temps de calmer ses nerfs qu’une autre voix se fit soudain entendre sur sa droite à quelques dizaines de mètres.
« Eh toi ! Viens par ici !! » lui ordonna un soldat au visage déformé par les marques de combat.
Le ton qu’avait emprunté cet énergumène à l’encontre du jeune pyromane n’était pas du goût de ce dernier qui lui jeta un regard glacial plein de mépris.
« Ramène-toi gamin ! Ne défie par un légionnaire d’Aille Ténébreuse ! » continua-t-il d’un ton hostile et irrespectueux en crachant sur le sol.
Laissant parler ses nerfs et ressentant le besoin de se défouler, Altaïr marcha agressivement jusqu’à l’homme qui l’avait abordé.
S’arrêtant à quelques centimètres de son visage, il lui glissa quelques mots afin de lui faire comprendre que ce ne sont pas des façons d’aborder les honnêtes gens dans l’exercice de leurs fonctions.
« Immonde ramassis de pu, raclure d’égout, ne t’avise jamais de me reparler sur ce ton ! »
Les deux autres soldats présent en ces lieux se retournèrent rapidement et dégainèrent leurs armes suite à cette provocation.
« Un rebelle… Et bah les gars vous voyez, c’est notre jour de chance ! Une famille de fuyard qui se dit partisans de notre seigneur mais qui en réalité n’est rien d’autres qu’un infâme groupe d’hérétiques! Et maintenant un vrai rebelle, un pur, qui ne cache même pas ses convictions » ricana le chef en se moquant sans retenu d’Altaïr.
« Dommage pour toi mon gars, mais nous on n’aime pas beaucoup les infidèles comme vous dans le coin ! » lança le balafré pointant sa dague sous le coup. « On voit bien dans ton regard que tu es un vrai dur ! Vas-y ne te gêne pas, frappe ! » enchaina le soldat d’un ton lent et arrogant.
Le charisme et l’impressionnante stature d’Altaïr changeait les règles de cet affrontement pour le moins déséquilibré. Si les adversaires du démon pyromane n’avaient pas été un minimum troublé face à lui, nul doute qu’il aurait eu la gorge tranché dès ses premières paroles. Toutefois, il en fallait bien plus pour abattre un démon de sa trempe.
Le jeune homme défiait du regard son interlocuteur avant de lui envoyer un message très clair, accompagné d’une gifle violente faisant choir son adversaire.
« Je suis Altaïr Naarashi ! »
La gifle avait autant surpris le soldat que ses confrères et la famille, paniquée, qui se tenait derrière cette agitation.


L’incompréhension gagna les lieux. Pourquoi avoir giflé un légionnaire d’Aille Ténébreuse alors que tout le monde était parfaitement conscient de ce qu’il encourait si on s’en prenait physiquement à un soldat. Le plus étrange restait tout de même le comportement des deux autres gardes qui, pendant que leur chef se relevait, n’avait pas daigné répondre à l’écoute du nom de la personne qui osait leur tenir tête.
L’un deux prit tout de même l’initiative de demander si Altaïr était bien partisan d’AT.
« Ne me forcez pas à vous prouver ma vrai nature ! » rétorqua Altaïr qui trouvait que cette entrevue commençait à s’éterniser.
De nouveau sur pied, le chef lança un dernier regard réprobateur à Altaïr avant de se retourner vers ses comparses et de leur annoncer qu’ils avaient ordre de ne pas toucher à Altaïr. En effet, la décision venait d’un des conseillers personnels d’Aille Ténébreuse, le Capitaine Holl, mentor et garant de la sécurité d’Altaïr, lui qui l’avait formé durant bien des lunes à la maitrise de ses pouvoirs.
« Il est hors de question qu’on t’égratigne. Ordre d’en haut ! Mais je ne peux laisser un tel affront impuni ! Et comme je suis légalement ton supérieur dans la hiérarchie, je t’ordonne de faire couler le sang de cette famille ! Tu en as bien l’habitude de tuer du rebelle non ?? Toi le célèbre auteur du massacre de la rue des 14 Roses de Sent’sura ! »

Altaïr releva la tête brusquement et les yeux grand ouvert, rempli de haine, menaça une nouvelle fois ses adversaires.
« Il est vrai que vous ne pouvez me faire de mal… mais moi… Je ne me gênerai pas ! » répondit le jeune homme en matérialisant instantanément et sans que personne ne puis l’en empêcher tant la vitesse d’exécution était importante, deux lances de feu qu’il lança sur l’ennemi, brulant sévèrement le visage des deux soldats à la botte de son adversaire principal.
« Tu viens de cramer le visage de mes deux amis ou je rêve ?? ! » rétorqua le légionnaire rongé par la colère et la surprise.
« C’était un petit cadeau de présentation, et comme je me sens âme charitable aujourd’hui, je ne t’ai pas oublié ! » dit Altaïr d’un ton moqueur en déclinant toute responsabilité et se jouant des nerfs de son adversaire en arborant un large sourire joyeux.
D’un geste rapide de la main droite, Altaïr créa un faible écran de flamme pour boucher la visibilité à son adversaire et préparer son bras gauche pour la création d’une tête de dragon enflammé qu’il envoya sur le légionnaire. Happé par la bête de flamme, le soldat tomba sur le sol, son armure calciné et fumante.
« Je les ai juste mis hors d’état de nuire pendant quelques temps. Vous devriez faire comme moi et partir avant qu’ils ne reprennent leurs esprits » dit Altaïr en direction de la famille, caché derrière une souche d’arbre mort. Infiniment reconnaissante mais terriblement pauvre, elle voulut, en guise de récompense, tout expliquer à son sauveur. Des explications que refusa Altaïr qui leur souhaita bonne fortune et reprit sa longue route vers le sud-est.


Il lui faillait rapidement rejoindre les ruines du temple de Rebena Tera car si la légende disait vrai, des dragons subsistaient à travers ses murs. Altaïr n’était pas du genre à croire aux légendes mais son choix d’option était limité. Soit il tentait le tous pour le tout en récupérant un joyau qui peut-être pourrait lui permettre d’invoquer un être docile d’une puissance comparable à celle d’Aille Ténébreuse … Soit il mourrait dans la boue et l’inoffensivité la plus totale. Son choix était fait, il lui faillait vérifier si l’entité gardienne de ce temple en ruine pouvait être en son pouvoir.