Epreuve de Sioban

«Ma première expédition en mer ? Eh bien...»

La pirate prit une nouvelle gorgée de sa chope et réfléchit, réunissant ses souvenirs. Sa première expédition en mer, ca concernait la première fois qu'elle était allée en mer avec son père pour pêcher, ou son premier voyage en tant que pirate ? Considérant le mot «expédition» on pouvait penser que ca concernait la seconde option... Soit... Ce n'était pas le genre de choses qu'elle racontait habituellement, elle préférait les anecdotes amusantes mais la, elle n'avais pas vraiment le choix... Alors elle se replongea dans ses souvenirs.

*

...Le départ d'un bateau était un événement, surtout lorsque c'était la première fois que l'on y assistait. Et encore plus lorsqu'on y participait ! Le travail ne manquait pas. Chaque cordage, chaque voile devait être vérifiée, il fallait vérifier aussi que tous les canons et les barques étaient a bord. Puis le largage des amarres...
Sioban était au beau milieux du pont du bateau, sans la moindre idée de ce qu'elle pouvait faire pour aider. Les marins courraient partout, grimpaient dans la ramure du bateau, et elle, elle observait, désoeuvrée. A un moment, elle essaya de faire un pas en avant, mais faillit rentrer dans un des marins.

«Fais donc attention, la nouvelle !»

Puis il était parti. Sioban avait reconnu en lui l'un des deux pirates qui l'avait guidée a leur capitaine. Un de ses camarades l'avait appelé ''Le roux'', certainement en raison de sa tignasse couleur carotte. Dans tous les cas, la maigrichonne se retrancha contre le mât le plus gros du navire et y resta collée en observant les préparatifs d'un oeil intimidé et concentré. Elle s'était engagée pour ses capacités sur l'eau et le vent, mais elle ne voulait pas être inutile le reste du temps, et pour cela le meilleur moyen était d'apprendre ce qu'il fallait faire pour aider au bon fonctionnement du navire. En tout cas, retrouver sous ses pieds le roulis d'un sol non stable lui faisait du bien. Dans son village natal, les passerelles entre les maisons avaient un peu le même genre de mouvements avec le courant de la rivière en dessous... Si bien que si un des problèmes des nouveaux marins était de trouver leur équilibre sur le sol instable, c'était au contraire une source de confiance en elle pour la jeune fille. Déjà elle se sentait mieux de ne plus avoir les pieds sur terre.

Un cri se fit entendre par dessus le capharnaüm, et les amarres furent balancés sur le port ou les personnes y travaillant les enroulèrent autour des bornes d'amarrage. Et le bateau s'éloigna du port, les voiles gonflées par le vent... Emplie d'excitation, Sioban courut presque vers le bastingage pour s'y pencher vers le port et se régaler les yeux de le voir ainsi s'éloigner, avec toute la masse des gens fourmillant dessus, coincés a même le sol tandis qu'elle s'en allait enfin sur la mer... Il y avait les marins encore a terre, les simples passants, les commerçants (qui étaient en majorité des pirates monnayant leur butin) ou les employés du port... Tout cela, elle le laissait derrière elle le temps d'un voyage. Plus besoin de servir dans cet auberge miteuse. A présent, elle était libre !...

*

«Et il ne s'est rien passé de plus intéressant que cela durant ce voyage ?»

Sioban prit encore une gorgée dans sa chope et la posa sur la table. Oh oui, il s'était passé des choses durant ce voyage, une en particulier... Elle se souvenait qu'elle avait, a force d'observer les autres travailler, réussi a aider un peu après les premiers jours. Elle portait un truc par-ci, par-la... Aidait a faire un noeud un peu compliqué... Enfin, des trucs du genre quoi... Elle faisait connaissance avec les membres de l'équipage aussi, petit a petit... Il y avait Le Roux, qu'elle avait heurté lors du départ, et qui était un buveur invétéré. Il y avait aussi Marcan, surnommé affectueusement ''Vérole'' car dans sa jeunesse cette maladie l'avait marqué de façon indélébile. Et tant d'autres...Peu a peu, elle s'était faite a cet équipage, s'y était intégrée... Sa bonne humeur perpétuel avait beaucoup aidé dans ce sens.

«Alors ?»

«Ah ! Désolée !»

Elle ressortit de ses pensées et reprit son récit. Elle ne raconterais pas tout dans les moindres détails, mais elle avait bien un ou deux événements marquants...

«Par exemple, ma première participation a une attaque...»

*

Ce jour la était tout à fait calme, dans le sens qu'il n'y avait pas beaucoup de vent. Une mer d'huile, comme ils disaient... Le bateau n'avançait pas, et c'est dans ces circonstances que l'on avait besoin de ses talents. Seulement, cela faisait bien deux jours que cela durait, et elle avait bien besoin de repos, comme tout le monde... Alors le capitaine, la voyant a moitié endormie sa flûte en bouche, l'avait envoyée se coucher quelques heures plus tôt après deux jours de veille. Elle était donc installée dans son hamac, enroulée dans sa couverture rêche. Le balancement du hamac la berçait, et elle dormais déjà depuis un moment lorsque la porte s'ouvrit a la volée. C'était un jeune, mais un peu plus grand qu'elle... Elle ne se souvenait jamais de son nom. Elle cligna des yeux une, deux fois... Puis resserra sa couverture autour d'elle en se retournant dans son hamac.

«Laisse-moi dormir... chuis encore fatiguée.»

Elle avait la voix pâteuse, et ses yeux se fermaient tous seuls quand elle les ouvraient, elle estimait donc légitime qu'on la laisse dormir... Mais non, il fallait absolument qu'on vienne l'embêter alors qu'elle dormait ! Quel bande de...

«Mais c'est le capitaine qui te demande, il y a un navire au large !»

Ah, un navire... Sioban grogna un peu, prit une grande inspiration et se redressa dans son hamac en se frottant les yeux avec les poings. Ils se fermaient encore tout seuls, c'était vraiment agaçant... Mais elle avait enfin un travail important a faire, elle allait vraiment servir a quelque chose... Elle laissa donc ses jambes tomber du hamac et se mit debout, prenant sa flûte dans un tiroir. Par contre, il faudrait pas venir lui chercher des poux dans la tête, elle était rendue très irritable par le manque de sommeil.

Quoi qu'il en soit, elle suivit donc le marin sur le pont, ou chacun s'affairait. Même avec un bateau pirate au loin, le navire ciblé ne devait pas se méfier d'une attaque, avec le peu de vent qu'il y avait... Ils avaient donc l'effet de surprise avec eux. Le capitaine lui-même s'affairait sur le pont avec son équipage, et lorsqu'il la vit son expression se fit presque exalté.

«Ah, te voilà ! Il faut qu'on puisse le surprendre, je sais que tu es fatiguée mais tu va gonfler les voiles, après tout c'est pour ca que tu es ici non !? Alors au boulot !»

Apparemment, il se réjouissait de pouvoir attaquer un navire malgré le peu de vent, et de plus un navire qui laissait présager une bonne prise au vu des dorures qui ornaient la coque ! Sioban, pour sa part, soupira et se plaça a nouveau contre le mât, ou elle gênerait le moins les déplacements des autres lors de l'attaque, avant de porter sa flûte a ses lèvres.
Elle était fatiguée, ses jambes avaient encore du mal a la porter et elle baillait a s'en décrocher la mâchoire. Cependant, elle joua. Elle laissa sa magie s'entrelacer aux notes qu'elle produisait avec son instrument, les notes s'envolaient... Peu a peu, une brise se fi entendre aux oreilles des pirates qui exultaient contre le bastingage, qui armant les cannons, qui brandissant un sabre, l'écume aux lèvres... Quelques uns s'apprêtaient a lancer les grappins vers le bateau marchand, d'autres enfin tenaient les planches prêtes pour passer d'un pont a l'autre. Tout en jouant, Sioban s'émerveilla de l'organisation et de l'enthousiasme des pirates, qui semblaient avoir hâte d'en découdre. Elle-même resterait sur le pont, car elle n'avait aucune compétences guerrières.
Les entrailles nouées par l'appréhension et l'excitation de vivre sa première bataille navale, elle faillit laisser retomber le vent, mais le maintint in-extremis. Alors elle raffermit sa prise sur le tube de bois et souffla plus fort, produisant une musique plus audible. Le vent se leva pour de bon, gonflant les voiles, et le bateau avança... Et bientôt tout devint le chaos.

Le bateau des corsaires était a présent suffisamment proche du navire marchand, les premiers sons de cannons déchirèrent l'air marin tandis que les premiers boulets filaient vers les voiles du bateau ennemi. Ne s'attendant pas du tout a un son si puissant, Sioban faillit en lâcher sa flûte. Son coeur cognait dans sa poitrine a mesure que le bateau s'approchait encore, jusqu'à-ce que le capitaine lui crie de cesser de jouer car ils étaient suffisamment proches pour l'abordage. Dans la confusion, elle faillit ne pas l'entendre. Elle baissa sa flûte et observa donc avec attention la suite des événements.

Les grappins furent lancés, les bateaux furent donc presque l'un contre l'autre, et les pirates commencèrent a envahir le pont du navire marchand. Ces derniers n'étaient pas des combattants, mais ils étaient loin d'être sans défense... Sioban le savait, les navires engageaient parfois des gardes pour les traversés, elle l'avait entendu dire par Gerrie, l'un des pirates de l'équipage, un grand baraqué avec une barde très fournie, qui lui avait fait un peu peur au début. Les pirates ne se retrouvèrent donc pas face a des ennemis sans défense, bien que celle-ci comprenne biens moins d'effectifs que les attaquants, qui étaient bien plus habitués aux combats navales... Plusieurs fois, Sioban craint qu'un coup d'épée ne touche l'un de ses camarades, mais seul quelques blessures légères furent a déplorer, et a chaque fois elle poussait un soupire de soulagement.
Bien qu'elle ne participât pas directement a l'attaque, l'excitation et la tension l'atteignait même sur le pont et elle ne pouvait qu'observer avec inquiétude... Quand le combat fut enfin achevé, elle observa l'investissement du pont par les forbans. Puis ils disparurent dans les cales, et bien qu'elle sache qu'il se passait encore des choses elle ne voyait plus rien. La tension retomba peu a peu, et la fatigue reprit le pas... Elle s'écroula finalement, mais elle était toujours penshée par dessus le bastingage, et elle chuta dans l'eau...

Quand elle se réveilla, elle y était encore. Mais qu'est-ce qu'elle y faisait ? Quelqu'un l'y avait-il jeté ? Elle tâcha de se remémorer ce qu'il s'était passé... Ouais, elle était simplement tombée a la flotte, comme une idiote... Cela l'agaça. Et dans la confusion de l'attaque du bateau, personne ne l'avait remarqué. Ou alors ils l'avaient considéré comme morte et n'avaient pas chercher a venir la repêcher. Bon, a la limite ca ne lui posait pas trop de soucis, elle respirait sous l'eau... Mais elle allait devoir rattraper le bateau a la nage, plus qu'à espérer qu'il ne soit pas trop loin...
Bon dieu, elle n'avait jamais imaginé que la mer puisse être aussi profonde ! Heureusement, elle était bonne nageuse... Il lui fallut néanmoins quelques minutes pour crever la surface... La, elle constata avec bonheur que le vent ne s'était pas levé, et que le bateau n'était pas si loin que ca... Alors elle prit son courage a deux mains et commença a nager vers le navire. A chaque brasse, elle se demandait ce qu'elle fichait dans cette galère. Mais elle était dans l'eau comme chez elle, et elle arrivait a garder sa sérénité. Au bout de presque une demie-heure de nage, elle arriva au bateau.
De forts éclats de vois s'élevaient du pont, et les lanternes étaient allumés, éclairant l'eau sombre de lueurs rouges et oranges. Elle appela mais personne ne semblait l'entendre... Alors elle prit son courage a deux mains et entreprit d'escalader. Et c'était dure... Elle tomba biens deux-trois fois dans l'eau, mais elle finit par arriver en haut, les doigts en sang. Elle ne put s'empêcher de les porter a la bouche... Avant de secouer la tête et de marcher d'un pas passablement énervé vers la ou tout le monde était réuni.
elle découvrit tout le monde assis autour d'une grande table dressée sur le pont pour l'occasion. Apparemment, ils avaient improvisée une fête. Ils avaient ouvert quelques tonneaux de rhum, et les chopes circulaient de main en main dans de grands éclats de rire et les cris de joie. A un coin de la table, quatre pirates avaient entamées une chanson paillarde, applaudis par leurs camarades déjà ivres. Sioban courut vers la table.

«Et alors, on fait une fête et on m'attend même pas ? Bande de rustres !»

Quelques uns se tournèrent vers elle, visiblement incrédules. Etais-ce qu'ils l'avaient cru morte, ou qu'elle était trempée ? Elle croisa les bras, essayant de ne pas faire attention a ses doigts.

«-Bah, Sio, on te croyais en train de pioncer ! Pourquoi t'es trempée ?
-Pourquoi ? Parce-que je suis tombée a la flotte, espèce de débile ! Y'en a pas un qui serait venu me repêcher, hein, j'pouvais toujours crever ! En plus c'est la merde à escalader, ce rafiot ! Surtout quand on glisse de partout !»

Ouais, elle était passablement énervée... Le type leva les mains dans un geste de défense et recula un peu sur sa chaise. Sioban, elle, lançait des éclairs avec les yeux.
Soudain, elle sentit une tape dans son dos et se tourna pour voir Gerrie qui lui souriait de toutes ses dents. Il la poussa jusqu'à une place libre sur le banc et la fit quasiment s'asseoir dessus de force.

«Hey, petiote ! On croyais que t'étais allés te coucher, vu comment t'étais fatiguée... C'est un vrai miracle que tu te soit pas noyée ! Tiens, bois un verre, pour te requinquer...»

Elle voulut protester, l'agonir d'u=injures, mais elle ne refusais jamais de boire un coup, et en plus il n'avait pas cherché a la mettre dans l'embarras en l'interrogeant sur la manière dont elle avait réussi a ne pas se noyer... Et elle lui en fut reconnaissante.
Une heure passa, peu a peu la colère laissait place a la bonne humeur de circonstance pour une fête... Elle en était bien a son troisième verre, et l'ivresse la rendait joyeuse, le rire lui vint plus facilement...
Elle se tourna vers Gerrie.

«-Alors, qu'est-ce qui s'est passé finalement, pour l'attaque...
-[color=yellow]On a gagné un joli butin ! Du coup, comme le capitaine est sûr de pouvoir remplir les stock a notre prochaine escale, il a autorisé une fête ![/i]»

Il avait la barbe dégoulinant de rhum renversé et un immense sourire aux lèvres. En le voyant ainsi, Sioban ne put s'empêcher d'éclater de rire et attaqua sa nouvelle chope par une grande gorgée. Puis elle lui donna un coup de coude.

«-Comment ca s'est passé précisément ? J'ai regardé depuis le pont, mais y avait beaucoup de confusion...
-On avait l'effet de surprise, et ils étaient franchement pas doués sur un sol instable. Certains avaient l'air balaises, mais le manque d'expérience leur a coûté cher ! Du coup ca a été assez facile en fait...»

Elle le poussa quand il chercha a lui ébouriffer les cheveux, puis continua de plaisanter avec les autres... Elle avait beau avoir nagé pour regagner le bateau, restait qu'elle avait dormis un moment dans l'eau, les autres avaient la journée et l'attaque derrière eux, et l'alcool n'arrangeait rien... si bien qu'au bout de quelques heures, tout le monde se retrouva affalé sur la table, a moitié endormi. Bon, Sioban n'avait pas sa jeunesse pour elle, elle était au moins aussi torchée que les autres... La voilà donc affalée sur la table, comme les autres, une chope encore au bout des doigts, quelques mots échappant parfois a ses lèvres. Ouais, ca promettait d'être amusant comme vie...

*

«Et le lendemain, tout le monde se payait le mal de crâne du siècle ! Mais le vent s'est levé dans l'après-midi, et on a pu faire voile vers le port. Le capitaine disait que le butin avait été assez conséquent pour qu'on gâche des vivres a chercher un autre bateau, et en plus on avait pas mal bouffés, il restait pas grand chose.»

Elle en était a sa troisième chope, et elle commençait a être un peu ivre. Le rire lui venait plus facilement, et elle avait chaud, alors elle enleva son gilet. Même s'il ne la couvrait pas beaucoup, c'était déjà ca de moins... Elle se souvenait de la tête du capitaine lorsqu'il avait décrété qu'ils rentraient au port. Il avait la tête dans l'cul, c'était le moins qu'on puisse dire... Grognon, et la voix cassé par le mal de tête. Il ne s'était pas montré plus modéré que son équipage, et cela la fit sourire.

«-Qu'est-ce qu'il y a ?
-Rien, je repensait a la tête du capitaine quand il se lève, un lendemain de beuverie, ca vaut le coup d'oeil !»

Un silence passa...

«-Et après, il s'est passé quoi ?
-Bah on est rentrés au port...»

*

Comme a l'accoutumé, le port était bouillant d'activité. Sioban le voyait, alors qu'il était a peine en vue. Elle appréhendait ce retour a la terre, et déjà se sentait presque mal a l'aise... Non, elle n'était pas faite pour vivre comme les terriens, sur le plancher des vaches. Elle, c'était les pieds dans l'eau et la tête dans les étoiles ! Elle aimait bien cette phrase... Quoi qu'il en soit, le port approchais... Peu a peu, les points qu'elle voyait fourmiller sur la pierre du quais prenaient forme, devenaient des silhouettes vagues, puis des gens... Soupirant, la pirate changea de bord pour mater la mer. Les flots bleus, qui s'étendaient a l'infini... Un sourire s'étala sur ses lèvres. Elle avait beau scruter les vaguelettes, pas une forme humanoïde ne venait briser la monotonie de la mer. Ce ne serait pas pour cette fois... En même temps elle s'y attendait, ca aurait été trop facile... Mais elle ne pouvait s'empêcher d'éprouver une pointe de déception. Un jour, elle verrait une sirène, une vraie. Et elle lui poserait la question. ''connais-tu une sirène qui ait eu une fille, il y a 15 ans, et qui aurait laissé l'enfant chez les humains ?'' Après, on verrait la réponse... Mais rien que poser la question la soulagerait.

«Sortez le pont !»

Le cri, l'ordre de son capitaine, lui fit lever les yeux. Ca y est, ils étaient amarrés, il était temps de descendre pour retrouver la terre ferme et laisser tracter le capitaine pour écouler sa marchandise... C'est d'un pas traînant qu'elle descendit du bateau, son coeur devenant plus lourd a chaque pas. Elle avait déjà hâte de retourner en mer...

*

«Et voilà ! Fin de l'histoire !»

Sioban finit sa quatrième chope, puis la posa sur la table. L'air de rien, elle était bien bourrée maintenant... Si bien qu'elle se laissa aller sur la table. Elle n'avait pas l'habitude de raconter sa vie comme ca... Mais ca avait quelque chose d'amusant. Cela faisait des années qu'elle n'y avait pas repensé.

«-Tu ferais mieux de monter te reposer, je crois...
-Ouais...»

Sioban sentit un bras passer sous le sien, et se sentit soulevée. Pour aider, elle poussa elle-même sur ses jambes. Puis elle marcha jusqu'à l'escalier, guidée par sa compagne de beuverie de la soirée, qui lui avait demandé ce récit, et était plus sobre qu'elle. Chaque marche de l'escalier lui parut un long moment, mais elle finit par le gravir en entier et fut guidée ainsi jusqu'à sa chambre. La, elle s'écroula comme une masse au milieux des couvertures et se mit immédiatement sur le côté, comme a son habitude pour dormir lorsqu'elle était sur terre. Puis elle replia les jambes contre elle, se blottis entre les couvertures. Elle n'eut que le temps de sentir que l'on les remontaient sur elle, puis elle ferma les yeux...