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 Scedre Maun, l'esprit de confusion

 
Scedre Maun, l'esprit de confusion Sand-g10Jeu 7 Mai - 13:37
http://www.terramysticarpg.com/t7144-scedre-maun-l-esprit-de-con
Scedre Maun

Fantôme. Triste. Mélancolique. Confus. Naïf. Ignorant. Fou. Gentil. Musicien. Pacifiste. Spectateur.
Information
Surnom
Âge : 111 ans. Cependant il est décédé à l'âge de 19 ans, ce qui explique son apparence juvénile. Cela fait donc 92 ans qu'il est mort.
Nationalité : Terre
Profession : Il fut musicien, joueur de flûte, avant sa mort
Camp : Neutre
Noblesse : Aucun
Croyance : Aucun à la base, cependant il tend à vénérer Yehadiel, sans y croire profondément
Famille :
Race
Fantôme
Caractère

D'origine très intelligent, assez timide, discret et aimable, Scèdre est, actuellement, un fantôme très étrange. Ses propos sont souvent sursautant, gagnés par une forme d'absurdité, comme si le fantôme était lunatique. Il peut paraître sensé, la plupart du temps, et tenir un discours tout à fait cohérent, puis se contredire quelques instants après en tenant un thèse contraire à celle qu'il venait de mentionner. Globalement, il est perdu. Et il cherche sans cesse la lumière, un élément, un être qui pourrait lui faire croire en quelque chose. Torturé par sa propre vie, débordant de questions auxquelles il n'arrive décidément pas à répondre, il est curieux, pose sans cesse des questions, à tout et n'importe qui, à propos de tout et n'importe quoi. Il se soucie de la vie des autres, mais ne cherche pas à trop s'y impliquer. Éternel non-violent, son combat est plutôt tourné contre les combats que pour une cause quelconque. Sa mélancolie et sa tristesse le rendent parfois assez dur à fréquenter, il peut être amené à crier sans raison sur une personne qui ne lui aurait rien fait, et à tomber dans un silence profond sans raison alors qu'il parlait joyeusement. Il s'agit également d'un philosophe, se questionnant beaucoup sur des questions profondes, abstraites, sans doute davantage que sur le reste. Scedre observe les gens, il observe beaucoup, énormément, et n'agit presque jamais. Il est une sorte de spectateur, là uniquement pour en apprendre davantage sur les relations, les vies, les autres. Parfois il s'intéresse à un rien, en ignorant l'important. Son être entier est dominé par une confusion constante, un scepticisme, venant de son passé, qui le mange de l'intérieur, le rendant de plus en plus ignorant. Tant que cette confusion dominera, il ne pourra partir de ce monde.

Physique
Scedre est assez grand, plus que la moyenne, si bien que cela lui donne un apparence souvent très impressionnante lorsqu'il se matérialise devant les autres, faisant souvent très peur. Pâle, les yeux bleus et les cheveux sombres dont certaines mèches sont claires, on le trouve souvent d'une beauté glacée. Distante. Il donne l'impression de regarder dans le vide, au loin, comme si sa mélancolie ne pouvait jamais s'en aller.
Malgré sa taille, il reste fragile d'apparence. Malade presque toute sa vie, il en garde des séquelles : ses muscles sont inexistants, sa peau est pâle et son corps est maigre.
Bien entendu, à chaque fois qu'il se matérialise, il a les mêmes habits, ceux qu'il avait avant de mourir. Relativement sobres, simples, mais troués et mal-menés, ils sont globalement sombres et pauvres. Sa flûte, qu'il garde toujours sur lui, dans ses vêtements, lui permet par moments de jouer quelques airs de son invention.
Capacités
Armes : Aucune
Pouvoirs : Etant fantôme depuis un certain temps, et s'étant entraîné à se matérialiser, Scedre peut réussir à avoir une apparence presque identique à celle qu'il avait avant sa mort (un peu plus pâle cependant), et réussir à converser pendant une demi journée avant d'être épuisé. Cependant, il est encore très dur pour lui de soulever des objets, même légers. Ecrire avec sa plume lui demande tant d'énergie qu'il ne parvient pas à marquer plus de dix mots avant de tomber de fatigue. Ainsi il ne peut pas se battre. En revanche jouer de sa flûte lui demande moins d'énergie, l'instrument faisant partie du fantôme lui-même, au même titre que ses vêtements.
Familier : Aucun
Artefact : Aucun
Autre : L'objet qui le raccroche au monde est une petite boite, cachée sous les racines d'un arbre, contenant un minuscule livre presque entièrement vierge, une plume et de l'encre.
Histoire

La confusion est ma voie, ma mère et ma raison, ainsi qu'elle l'est, j'en ai le sentiment profond, pour tous les êtres pensants. Ils s'élèvent d' "idées", de "foi", de "certitudes", ils s'élèvent par bien des manières pour convaincre leur orgueil. Mais s'ils étaient francs, ils reconnaitraient que leur savoirs n'en sont jamais, et que les bases profondes de leur pensée, les racines mêmes de tous leurs actes, ne sont régies que par leur immortelle confusion. Reine du psyché.
Du moins, c'est ce que mon impression confuse me porte à croire. Mais je suis pessimiste. Je le sais. Je ne demande qu'à comprendre, moi. Je ne demande qu'à croire, à espérer. Et il est moins fatiguant de se dire que l'on y parviendra jamais, que de continuer à ramer dans le vide.
Pour moi ma vie n'est rien d'autre que des images superposées, qui se succèdent sans raison. Rien que ma mémoire. Rien d'autre. Je cherche à sortir de cette subjectivité, à deviner les enjeux, à comprendre le sens, à mettre des mots sur ce qu'il m'est arrivé. Et je ne quitterai pas cette terre avant d'avoir une forme de certitude, une croyance, sur ce que j'ai été, ce que j'ai vécu.
Je nage, dans des eaux noires et glacées. Aucune terre en vue. Rien que des horizons plats. Mon passé me guette, quelque part, moi, je n'en vois que des bribes.

Mon premier souvenir déformé se passe sur la falaise.
J'étais jeune, très jeune. Enfant. Messine me regardait courir, les cheveux dans le vent. Le soleil montait encore, entamant une matinée douce. Les odeurs de sel, de vase et de pins m'envahissaient, je riais beaucoup, sans raison aucune. Prendre les cailloux dans ma main, les jeter de la falaise, et les regarder tomber avec admiration.
"Fais attention à toi." me prévenait Messine, la voix douce.
Je ne pourrais dire avec certitude ce qu'était Messine pour moi. Sans doute une mère ? Une sœur ? Ou plutôt une amie ? D'après ce que j'ai pu voir, dans mon observation des autres, c'est ainsi qu'ils ont tendance à qualifier ce type d'individus.
Quoi qu'il en soit, je ne connaissais qu'elle, même si elle n'était certainement pas de mon sang. Je la suivais partout, et elle me nourrissait, m'apprenait des choses, et prenait soin de moi.
"Ca peut faire mal le cailloux si il tombe sur quelqu'un ?" demandai-je, intrigué.
"Oui."
"Et les poissons je leur fais mal en lançant le cailloux ?"
"Non."
"Pourquoi ?"
"C'est comme ça."
J'étais très curieux et très bavard. Messine, elle, elle ne l'était pas. A cette époque, elle devait avoir quatorze ou quinze ans. Pourtant, elle savait déjà presque tout, du moins c'était mon impression.
Elle pouvait lire, écrire, savait le nom des plantes, des animaux, des lieux et pouvait dire avec précision leur caractéristiques. Mais elle restait souvent muette, et se contentait de m'apprendre ce que j'avais, selon elle, besoin d'apprendre.
Elle me transmit la lecture et l'écriture, par exemple, elle me transmit le fait que je m'appelais Scedre Maun, ainsi que d'autres connaissances générales, au cours de notre périple. Oui, car nous ne restions jamais au même endroit. Nous n'avions pas de maison. Allant de ville en ville.
Le soir. Vision de Messine, jeune, souple, montant sur de hautes échasses, jonglant. Marchant sur une corde, à une hauteur vertigineuse. Et moi j'avais peur, et le public riait, applaudissait. Je devais passer, avec le chapeau, dans la foule moite et hurlante. Quelques pièces tintaient au fond. Je paniquais, dès que mon regard perdait la silhouette de Messine, j'en voulais terriblement aux gens de se mettre devant moi, de ne pas se pousser. L'abandon m'effrayait plus que tout au monde.

Il est certain que ce dont elle ne parlait jamais, je l'ai remarqué après ma mort, c'était tout ce qui avait un rapport plus ou moins proche avec les êtres.
"Qui sont ces gens ?"
"Tu n'as pas à le savoir."
"Pourquoi font-ils du bruit ?"
"C'est comme ça."
"Le boucher est gentil ! Il est rigolo !"
"Il ne l'est pas."
Misanthrope ? Je ne crois pas. Elle était incroyablement gentille, serviable. Le cœur sur la main. Probablement la meilleure personne que j'ai pu être amené à connaitre.

Je me mis à grandir un peu, gagner en sagesse, dans ce monde en paix qui, je le sus après ma mort, venait de sortir de l'hiver éternel. J'avais dix ans alors.
Un matin, je me réveillai dans une auberge. La lumière blanche du soleil passait entre les rideaux. Et alors que je portais ma main à ma bouche, pour bailler, j'y sentis une substance visqueuse. Regardant mes doigts, je vis qu'il s'agissait de sang. J'essayai d'appeler Messine, et, au lieu de cela, je me mis à tousser. Secoué par les convulsions, ma toux rauque, profonde, je m'assis sur le lit, continuant à cracher l'air. Les draps blancs se couvraient, je me souviens, d'une myriade de points rouges, alors que ma main, elle, dégoulinait de pourpre.
Personne ne sut dire ce que j'avais. Et Messine, elle, ne semblait pas vraiment en être préoccupée. Elle n'agit qu'en me demandant de moins courir, de dormir davantage et de mieux manger. Cette maladie, qui me faisait cracher du sang, elle continua de me hanter. Comme collée à moi. Comme à l'intérieur de moi, depuis toujours et à jamais. Elle me rendait plus livide qu'avant, plus faible, et me rappelait à l'ordre dès que j'en faisais trop.

Messine avait eu pour projet de me faire devenir acrobate, comme elle. La maladie empêcha cela.
Un soir, alors que je m'ennuyais, assis sur une chaise, Messine s'approcha de moi.
"Cadeau." dit-elle, en me tendant un petit objet de bois, allongé.
J'haussais les sourcils, étonné. Je pris l'instrument entre mes deux mains.
"Qu'est-ce que c'est ?"
"Une flûte. Je vais t'apprendre à en jouer." m'affirma-t-elle en souriant.

Comme si Messine avait lu ceci en moi, je me montrai rapidement très doué pour la musique. Mes mains se mirent vite à galoper sur le bois, faisant virevolter des sons étranges, qui me plaisaient. En un ou deux ans je fus un flûtiste convenable. J'improvisais tous mes morceaux, me faisant mon propre répertoire, d'inventions. Messine m'y encourageait beaucoup, me disant que ce que je faisais était très beau. Et je débordais de joie.
Elle m'invita, bien vite, à jouer pour accompagner ses acrobaties. Ce que je fis sans broncher, voulant me montrer utile, malgré ma maladie.

Les gens nous appréciaient.
"Et voici la belle Carlen et son petit frère, Scedre, applaudissez les !"
Scandaient les aubergistes, taverniers, amuseurs de foules. Et nous entrions en scène.

Oui. Carlen, parfois elle se faisait appeler comme cela. D'autre fois, ce fut Fedila, ou encore Lula. J'étais le seul à l'appeler Messine, et elle ne voulait pas que je l'appelle autrement.

Nous marchions beaucoup, surtout en Terre, dans les plaines mystiques. Parfois, nous allions à l'ouest, près de Sen'tsura, et alors je demandais à Messine si nous pouvions aller à la falaise. Celle de mon plus vieux souvenir.
Elle acceptait à chaque fois. Et j'avais toujours le même plaisir de retrouver cet endroit. Dans l'extrême ouest, pour admirer l'océan.

Une nuit, que nous étions assis, à côté l'un de l'autre, à regarder l'horizon et les étoiles, sur la falaise, Messine m'adressa la parole.
"J'aimerai bien écrire. Parfois."
Je tournai la tête vers elle, la trouvant incroyablement belle, proche d'un ange, dans la lueur froide de la lune. Me taisant.
"Pouvoir avoir un petit carnet, et y coucher mes pensées, mes idées. Cela me plairait." reprit-elle.
J'hochai la tête, souriant.

J'avais quinze ans. Messine, je crois, en avait vingt cinq.
J'avais grandit énormément en quelques mois, la dépassant, elle ainsi qu'un bon nombre de gens. Mais je me sentais toujours petit. Petit, surtout face à Messine.
En fait, je l'admirais tellement, l'aimais tellement, qu'elle prenait la place centrale dans ma vie. Bien au delà de ma propre place. Je ne pouvais imaginer ma vie autrement qu'à ses côtés, qu'elle soit ma sœur, ma mère, mon amie ou ma femme. Je n'avais d'yeux que pour elle, et pour rien d'autre, elle était ma seule passion, je ne désirais qu'elle. Et entre mes quinze et mes seize ans, je commençais à avoir envie, cette envie intense, dévorante, de lui dire que je l'aimais. Que je ferais tout pour elle. Qu'elle était ma seule et unique force. Qu'elle pourrait me demander le monde. De lui parler, comme je savais si bien le faire, pour briser son silence. Mais je ne savais pas comment le faire. Je ne savais pas comment m'y prendre.

La seule idée que j'eus, fut d'économiser, un petit peu, sans qu'elle ne le sache. D'acheter une petite boite chez un marchand, contenant un maigre livre vierge, une plume et de l'encre, pour lui permettre de faire ce qu'elle m'avait avoué quelques années auparavant.
"Cadeau." lui fis-je ce jour là, en tendant la boite, essayant d'imiter la manière dont elle m'avait donné ma flûte.
Elle sourit, étonnée, en haussant les sourcils. Prenant l'objet entre ses mains, elle l'ouvrit, et comprit immédiatement de quoi il s'agissait. Ses yeux pétillèrent, de légères larmes, elle sauta de joie, et me prit dans ses bras.
C'était une des premières fois qu'elle me serrait contre elle. Et, alors que mes mains se posaient sur son dos, j'eus conscience de la fragilité de son petit corps. Probablement encore plus fragile que le mien, maladif. Cette constatation me troubla, à cet instant.

Je continuais à jouer de la flûte avec elle. Les années défilaient, nous étions heureux, voyageant comme nous l'avions toujours fait. Les gens nous prenaient de plus en plus pour un couple, cela me plaisait, et Messine ne les contredisait pas, ce qui me ravissait tout en me laissant dans le doute. Que voulait-elle réellement ? Qu'attendait-elle de moi ? Son silence persistait, résistant, et de plus en plus dominant.
Je me rendais compte, en parlant avec les gens de mon âge, que je n'avais que trop peu de connaissances. Comme si mon éducation n'avait jamais été faite.
Alors, je posais de nouvelles questions à Messine, et elle perdait patience.
"Pourquoi tu veux savoir ? Pourquoi ? Hein ?" Avait-elle crié un jour. Ses yeux étaient injectés d'une force profonde, débordants de violence.
"Je ne sais pas." avouai-je, faible, troublé.
"Alors tais toi." ordonnait-elle.
Rares étaient les fois où je l'avais mis en colère. Je ne comprenais pas comment je devais me comporter. Son silence éternel me glaçait. Ne voulant surtout pas la décevoir. Puisque, depuis que j'étais un homme, proche d'un adulte, je devais avoir mon propre avis, être quelqu'un. J'étais davantage en proie au jugement, car il me fallait un esprit critique, une identité.
Moi, en dehors de Messine, je n'étais personne. Et je crois qu'elle ne le comprenait pas, cela. Je crois qu'elle voulait que j'évolue.

"Tu as commencé à écrire ?"
"Pas encore, j'attend d'avoir bien tout en tête, avant de me lancer."
Et elle souriait. Moi aussi.
"Tu me feras lire hein ?"
"Bien entendu. Seulement, je me laisse le temps, tu sais. Je ne veux pas gâcher tes pages."

Lorsque je ne posais pas de question dérangeantes, nous passions de bons moments ensembles. Il nous arrivait de rire beaucoup, de passer des nuits sans dormir, à regarder les étoiles et à écouter les histoires des bardes et des conteurs. Mes dix sept ans, et le début de mes dix huit ans, ce fut probablement le moment le plus heureux de ma vie.
J'en oubliais ma maladie. Je n'étais plus dérangé par le fait de ne pas pouvoir faire quoi que ce soit de physique. Je souriais à la vie, et mon ignorance des choses, dans le fond, me donnait un œil fort enfantin, toujours étonné, toujours émerveillé.
Certains ventaient ma sagesse, ma philosophie, pour mon âge. Mais alors, je me souvenais des propos de Messine : "Quelqu'un qui te fait un compliment veut quelque chose de toi." et je les remerciais avant de passer mon chemin.

Alors vint la rupture.
Sans prévenir.
Dans le bonheur, se cachait une immense bête noire.
Et j'appris que toute la douceur du monde pouvait être brisée en un instant. Et qu'aucun bien ne pouvait se vanter d'être protégé de quoi que ce soit.

Nous avions dormi dans une auberge qui avait été créée quelques années auparavant, près de la falaise. J'ouvrais les yeux, dans un lit, je me levai. J'essayai d'appeler Messine, mais ma voix me fit défaut. Alors, je m'éclaircit la gorge, en un grattement caverneux. J'ouvris la porte de sa chambre. Le lit était fait, la fenêtre ouverte, personne. Haussant les épaules, je me dirigeai vers le rez-de-chaussée. Encore personne. J'appelai, pas de réponse.
J'appelai à nouveau. Ce fut l'aubergiste qui sortit de derrière un mur, pour m'accueillir :
"Ah ! Bonjour monsieur ! Vous avez bien dormi ?"
"Oui. Vous n'auriez pas vu Lula ?" Je parlais de Messine, bien entendu.
"Ah, non, elle n'est peut-être pas encore levée !"
Je le remerciai et sortis.
Le ciel était gris, une brise légère accompagnait la bruine du climat côtier. Mes yeux cherchaient partout, je ne savais pas où elle était, et commençais à m'inquiéter.
Alors je décidai, machinalement, de me diriger vers notre falaise. Peut-être s'y était-elle allongée ? Je savais qu'elle aimait cet endroit autant que moi.
"Messine ?" appelais-je.
L'humidité plaquait mes cheveux contre mon visage, dégoulinant. Cela goûtait. S'infiltrant dans mes vêtement, glaçant mon dos.
"Messine ?"
Je voyais la falaise de loin. Pas la moindre silhouette à l'horizon.
"Messine ?" Demandai-je un peu désespérément.
Je regardai partout. Perdu. Mille questions prenaient place dans ma tête. Je commençais à imaginer tous les pires scénarios possibles, tout en riant de moi-même, disant que j'étais bête de m'en faire pour si peu.
Alors, regardant la falaise, un détail attira mon attention.

Contre un rocher, là, une petite boite, posée au sol.
Je secouai la tête.
"Non." dis-je.
Je me mis à courir, le regard fixant la boite. J'allais le plus vite que mon corps me le permettait. Mes poumons explosaient, j'étais à bout de souffle, mais je continuais de courir.
"Non !" criais-je en courant.
J'arrivai près de la boite, mes mains tremblantes, je l'ouvris en soufflant. Je toussai quelques instant, tout en m'en moquant.
Une plume, de l'encre, et un petit livre.
Des larmes coulaient sur mes joues. Je pris le carnet, l'ouvris à la première page. Dans l'écriture ronde de Messine, un simple message, court, y figurait, laissant le reste du livre vierge.

"Je saute de la falaise, Scedre.
Je ne t'ai jamais aimé.
Adieu."

"Non !" hurlais-je de toutes mes forces, écrasant mes côtes et déchirant mes lèvres.
"Non !" hurlais-je à la mer, en pleurant, cherchant des yeux fous, en bas des falaises, des signes de la vie de Messine.
"Non ! Messine !" et je crachais du sang, encore et encore, me pliant en deux.
Je ne comprenais rien. J'étais perdu. Une confusion brumeuse prenait place en mon crâne. Alors que je continuais de hurler, sans arriver à m'arrêter. Des mots résonnaient en moi. Tout chavirait. Sceptique Scedre cédant son stupide sourire à ses songes sombres. Soufflant son sang. Serpent sifflant sa cérémonie sordide : son sort confus. Sa mort, ses morts.

Ma vie bascula.

Je pleurais chaque jour. Hurlais sur chaque homme. J'étais rejeté, je devenais un clochard, une âme en peine. J'errais dans les rues en crachant du sang. La folie m'avait gagnée, j'agissais sans comprendre, sans savoir. Rien n'avait d'importance. Dans la tête, je n'avais que le message du livre, qui tournait.
En quelques mois, le temps d'atteindre mes dix neuf ans, j'étais mort.
J'avais vomi tout le sang de mon corps sur les pavé froids, mon squelette sans aliment se contracta, je ne pouvais plus respirer. Et c'en était fini.

Mais, non.
Je ne pouvais pas partir.
Je le refusais.
Je ne pouvais pas partir sans avoir compris. Accepter d'être ignorant jusqu'au bout ? De ne jamais rien comprendre ? De ne pas savoir pourquoi Messine m'avait abandonné ? De ne pouvoir donner aucun sens à ma vie ? De n'avoir d'autres réponses que le silence glaçant ?

Non.

Je voulais comprendre mon passé. Tout mon passé. Tout.

L'absurdité ne gagnera pas.

Alors je restai, fantôme, sur le monde. Explorant ce que je pouvais explorer. A commencer par le fond des eaux.
Je devenais le fantôme des fonds marins, effrayant ceux qui s'approchaient de trop près de ce qui me semblait être l'endroit où son corps aurait pu reposer. Et apprenant, de la même manière, comment me matérialiser. M'habituant à mes pouvoirs.
Je soulevai le sable, essayant de trouver un corps. Sans succès.
Parfois, je trouvais des ossements, mais je ne pus jamais déterminer s'il s'agissait de ceux de Messine.
Des années j'errai, observant les gens, essayant de deviner, dans leur conversations, un détail qui aurait pu me mettre sur une piste. Je me dis que Messine devait fuir, pour errer et changer de nom sans cesse. Qu'est-ce qu'elle fuyait ? Je ne sais pas.
Les décennies passaient, je continuais, obstiné.
Je choisis un arbre, pour y cacher, sous ses racines, la boite, afin que personne n'y touche. De temps en temps je prenais le livre, et je tentais de marquer, avec la plume, différents éléments de ce que j'avais découvert, sur les pages vierges.
En réalité les découvertes n'en étaient jamais vraiment. Je ne faisais que brasser du vide.

Je continuais comme cela pendant un temps que je ne pouvais mesurer. Essayant de me matérialiser pour poser des questions. Oui, questionner, comme je l'ai toujours fait.
Au début les gens avaient peur de moi. Parce que je n'arrivais pas à rester longtemps, si bien que ma voix était brutale, sèche, rapide.
"Pourquoi vous faites ça ?" demandai-je à certains.
Et ils ne comprenaient pas ma question.
"Pourquoi vous mourrez ?" m'intéressai-je, en parlant à des gens malades.
Et ils ne comprenaient pas ma question.
"Quel sens vous donnez à vos actes ? A vos mots ?"

Aucune réponse.

Je me perdais dans ma confusion, dans les concepts abstraits, voyant s'effriter, avec l'âge, la réalité des faits.
Le temps avait tellement coulé, que je commençai à me figurer que toutes les personnes qui connaissaient Messine devaient être mortes. Et que plus rien, dans ce monde, ne se souvenait. Rien ne se souvenait de moi, de nous.
Tout était mort.
L'ignorance dominait.

Et plus les instants se succédaient, les uns aux autres, plus je me figurai qu'il serait difficile de répondre à mes questions. De comprendre ce qu'il s'était passé, ce jour là, et de répondre aux mystères de ma propre vie.

J'étais perdu, sans endroit où chercher, et je le suis encore.
Tout ce que je fais, aujourd'hui, c'est observer les gens.
Ma confusion est telle que je remets en cause des éléments totalement stupides, qui me tiennent à cœur sur le moment. Je ne sais plus ce qui est important et ce qui ne l'est pas. Je n'ai plus de priorités, si ce n'est de comprendre.
De comprendre comment sont faites les vies des gens, pour les comparer à la mienne. Ainsi, par les projections d'ombres, en voyant ce qui était absent à ma propre vie, je pourrais peut-être deviner certaines choses.

Parfois, je m'intéresse à une personne, en particulier. Je la suis partout, pendant plusieurs jours, plusieurs mois, puis, enfin, je m'adresse à elle.
Tout ce que j'ai pour elle, ce ne sont que des questions.
Souvent, elle ne peut pas y répondre.

Car la confusion domine, chez elle. Autant qu'elle domine, chez moi.

Je me demande, parfois, si je ne suis pas simplement un être manquant d'intelligence.
Trop bête pour comprendre.
Trop bête pour répondre à ses propres questions.

Mais, plus j'observe, plus j'ai l'impression que les autres sont bien aussi bêtes que moi.

J'ai vu les évènements déferler sur le monde, les guerres. Cela ne faisait que m'emplir de tristesse. Je crois. Je suis devenu intolérant de l'intolérance. Intolérant de ceux qui ne respectent pas le droit à la pensée quelconque, le droit à la vie. Qui, dans leurs idées irrationnelles, faisaient bouillir leurs cœurs, et se permettaient d'en user pour percer ceux des autres.

Plus aucune pensée ne me convainc vraiment. Le bien, le mal, tout ceci n'est plus que concept à mon sens. Il n'y a que la vie, la mort. La tolérance, l'intolérance. Le reste ne me parle plus.
Ni l'amour, ni la joie, ni le bonheur, ni la religion.
Cette dernière, je l'ai découvert après ma mort. J'y crois, et je n'y crois pas. Je suis ouvert et fermé à tout.

Devins-je sénile ? Fou ?
Devins-je dément ?

Parfois je hurle encore.

Dans cette confusion éternelle, qui me couve.

Citation :
Raconte le jour où Scedre découvrit l'arrivée des démons sur Terra. A-t-il tenté de communiquer avec l'un d'entre eux ? Ou bien les a-t-il seulement observé conquérir pays après pays sans jamais essayer de leur parler ?


Dans la réalité

Âge : 22 ans
Avez-vous déjà fréquenté d'autres forums, si oui lesquels ? Oui. Ikigaï, les terres de Feleth, Tuatha de Dearmad, Ex Nihilo, la terre d'Hypolaïs.
Vos passions : L'écriture (Sans dec ?!) et la musique
Votre avis sur le forum? Il est vraiment très bien ! Cependant on se perd un peu dans le contexte lorsqu'on est nouveau, je pense qu'il serait vraiment génial de terminer le projet en ce qui concerne le sujet "contexte", qui se veut devenir interactif !
Comment avez vous connu le forum? Par une amie
Phrase fétiche : Celle que j'aime beaucoup en ce moment est la suivante : "Il me faut mourir : Si c'est à l'instant, je meurs; si c'est un peu plus tard, je dîne, puisque c'est l'heure; après, je mourrai. Comment ? Comme il convient à un homme qui rend ce qui n'est pas à lui." Epictète
Crédit avatar : Virginie Carquin

Scedre Maun

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