Après son anniversaire, Mélozia décida de retourner quelques temps en Adhès, juste quelques semaines pour prier tranquillement. Mais elle ne pouvait abandonner son duché aussi longtemps sans éveiller les soupçons. Si seulement elle pouvait avoir ses foutus vers avec elle, en moins d’une semaine elle aurait rejoint les adorateurs et aurait pu rester plus longtemps. Elle convoqua son intendant et lui déclara qu’elle devait s’en aller quelques temps dans les montagnes pour aller se recueillir au monastère de Tishérou.
Une fois arrivée à destination, elle y resta quelques jours puis utilisa une vieille ruse : sa femme de chambre. Cette dernière était une polymorphe et se transforma donc en sa maîtresse, laissant cette dernière partir à la faveur de la nuit vers le sud. C’est au galop qu’elle arriva à Foam d’où elle prit un navire en direction de l’Adhès. Le voyage était éprouvant mais elle était heureuse de pouvoir enfin prier à l’air libre sans jamais craindre que ses paroles, ses gestes ne dévoila son appartenance aux adorateurs. Après s’être changée, coiffée, Mélozia se dirigea vers le temple. Elle aimait ce lieu, elle aimait croire que, de là, elle était très proche de Nayris.
Elle avait une pensée aussi pour cet Andromaque qu’elle avait envoyé rejoindre Nayris et qui devait revenir un jour…peut-être. Elle chassa alors ce bel homme de ses pensées pour réciter les prières rituelles.
Elle se leva et crut apercevoir Andromaque au loin mais peut-être n’était-ce qu’un rêve. De retour dans l’aile des Confirmés, elle se mit à travailler et à œuvrer pour la communauté. Elle discutait avec tout le monde et oubliait un instant ces préoccupations.
Mélozia apprit que l’Élu Andromaque était bien de retour des Limbes et elle dut utiliser tout son savoir-faire dans l’art de la dissimulation pour ne pas exploser de joie. Elle était heureuse et sa foi en parut plus grande, plus forte que jamais. Sa joie était si grande qu’elle était presque insultante envers une déesse toujours prisonnière.
Il lui fallut plusieurs jours pour se calmer et ne pas sursauter, ne pas se précipiter vers la porte pour voir si Andromaque venait. Mélozia passait son temps au Temple et ses prières étaient souvent perturbées par ses pensées. Mais la fièvre retomba, se rappelant qu’elle n’était rien d’autre qu’une confirmée et que l’Élu ne se souvenait plus d’elle, probablement. C’est grâce à cela et en se rappelant ses convictions qu’elle put reprendre un contrôle totale sur elle-même.
À peine ce sentiment de paix totale était revenu que l’Élu aborda la jeune femme. Il lui parla avec ce « nous » qui le caractérisait tant et avec cette douceur, cette élégance. Qu…QUOI ! Être Élu….Mélozia élu…il devait y avoir un problème…Andromaque avait-il toute sa raison ? Une simple confirmée devenir élu ? Elle regarda avec stupéfaction son interlocuteur. Celui-ci sourit et maintenait son propos. Elle avait fait acte d’une foi sans pareil en le tuant lui sans que sa main tremble ou que sa volonté hésite. Mélozia devait donc se rendre à l’évidence : elle était choisie pour être le nouvel Élu Libérateur.
Il n’est pas nécessaire de rapporter ici les paroles de Mélozia pleines de reconnaissance. Car vint alors un choix difficile pour elle : sacrifié un être cher. Excepté ses parents, personne n’avait réussi à s’attacher à elle. Il y avait bien ce guérisseur mais, depuis longtemps, le cœur de Mélozia l’avait quelque peu oublié et le sacrifier ne lui coûtait pas tant que ça. Andromaque ? Non, non, elle l’aimait bien et ressentait du bonheur à le savoir de nouveau là mais ce n’était pas un être cher. Il ne restait pas grand monde qu’elle…son général. Il était le seul homme au monde qu’elle voulait voir encore en vie, le seul souvenir de ses parents, la seule personne qu’elle n’arriverait pas à tuer de sang-froid. Il fallait donc le sacrifier.
Elle envoya un message directement au général lui disant de la rejoindre à Foam, elle envoya un message à Foam pour les prévenir de l’arrivée du général. Puis, elle envoya un autre message à sa femme de chambre restée au monastère. Tout cela lui servirait d’alibi le moment venu et aurait même une autre utilité.
Le général vint et fut accueilli par Mélozia. Il ne connaissait pas l’Adhès et elle lui fit ignorer jusqu’au lendemain où il était et pourquoi elle l’avait fait appelé. Quand il le sut, il voulut s’échapper, mais trois adorateurs le retinrent. Il finit par supplier Mélozia de lui laisser la vie sauve, lui rappelant le passé mais elle demeura de marbre.
On l’emmena jusqu’à l’autel et là, elle prit le poignard. Elle ferma les yeux, inspira, expira, inspira, expira, inspira et trancha d’un coup net la jugulaire. Elle dut recueillir le sang et regarda, juste un instant, son général. Inspirer, expirer. Elle se tourna alors vers la foule, un large sourire aux lèvres.
- A la gloire de notre Déesse !
Sa première décision en tant que nouvel Élu fut de choisir un adorateur comme personne de liaison entre l’Adhès et elle-même. Elle devait à présent rentrer à présent et retenir ses larmes pour plus tard.
Une fois de retour dans son palais, on lui demanda des nouvelles du général, elle demanda pourquoi et on lui répondit qu’elle l’avait fait demandé et elle le nia. On le rechercha et on amena à la duchesse une femme qui déclarait l’avoir vu se battre et mourir dans les montagnes. Mélozia explosa en larmes et supplia la femme de revenir de temps en temps lui rendre visite pour parler en détail de son combat. Cette femme était l’adoratrice qui faisait office d’agent de liaison. On fit des funérailles et personne ne se douta de rien.