Gloire, honneur et mort, trois mots d'ordre qui suffisent à résumer un personnage.
Histoire D'abord une indicible douleur, mêlée à une sensation d'étouffement. Il se débattit comme il put, agitant les bras, les pieds, frappant tout autour de lui sans distinction. Il n'avait plus d'air et il se sentait mourir. Déjà. Tout près de lui, ou presque, il apercevait une vague lueur, ou ressentait au moins qu'il y avait un échappatoire. Des hurlements fréquents lui vrillaient les tympans, il avait l'impression que son monde s'effondrait autour de lui et cherchait à le réduire en bouillie. Le désespoir lui fit chercher la fameuse sortie que son instinct lui désignait, et il se tortilla comme un verre en collant ses bras à sa poitrine. Il sentit la chair se déchirer sous son arrivée, et si tôt qu'il parvint à quitter sa prison, des hurlements assourdissants achevèrent de baptiser ses oreilles. A cela se mêla bientôt l'aveuglement causé par la lumière tamisée qu'un foyer disposé juste en face de lui projetait sur son visage informe et encore gluant. Les hurlements ne tardèrent pas à cesser, et des mains puissantes et caleuses achevèrent de l'arracher au ventre de sa mère que sa naissance avait achevée.
Sigmar Dagmärson avait abattu sa première victime, et malgré la mort de sa femme, Dagmar porta bien haut son fils en quittant sa chaumière, hurlant son nom aux quelques villageois qui s'étaient rassemblés devant sa porte pour célébrer avec lui cette première et dernière naissance.
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- Plus haut ton bouclier. Plus haut ! brailla Dagmar tandis qu'il écrasait sa hache à répétition sur le bouclier d'un jeune homme charpenté qui reculait à chaque impact et se tassait de plus en plus. Tandis que son fils peinait à parer ses assauts, il exploita la faille qu'il créait en gardant son bouclier devant ses yeux après chaque parade et envoya son talon s'écraser contre son umbo pour le projeter au sol.
Comme après chacune de ses défaites, Sigmar se relevait en grommelant et rejoignait son père sur un tronc d'arbre taille qui leur faisait office de banc, près de leur maison. Il l'écoutait alors lui conter les nombreuses histoires qu'il connaissait, mettant en scène les grands héros de Saline ou du reste des Glaces, suspendu à ses lèvres et fasciné par la gloire qu'ils avaient amassés tout au long de leur vie. Une gloire qui leur avait valu une immortalité qu'il se mît bientôt à convoiter à son tour.
Pendant les années qui suivirent, le jeune Sigmar suivit son père sur la voie des armes et développa rapidement une préférence pour le maniement de l'épée en plus d'une facilité pour l'ambidextrie qui lui valut quelques brimades de la part de ses camarades. Malgré le statut correct de son père, il dut toutefois quitter sa demeure et entra au service d'un forgeron qui en fit son apprenti pendant quelques années de mieux. Tout au long de cet apprentissage rigoureux, le Salinéen étudia avec passion les propriétés des métaux qu'il traitait, et, au terme de son enseignement et malgré son talent naturel pour la profession, il choisit de succéder à son père à la gestion et l'administration du domaine fermier familial.
Dès lors qu'il fut en âge, Sigmar prît femme et se joignit aux osts guerriers du Jarl qui régnait sur ses terres pour contrer les invasions barbares qui menaçaient le pays, et il s'illustra dans la guerre plus que dans tout les autres domaines.
Et cela ne lui suffit pas. Rapidement, sa femme lui devint difficile à vivre; en plus de ne lui donner aucun enfant, et ses combats perdirent en intensité à mesure qu'il développait son potentiel.
Lassé d'une vie à laquelle manquait l'épice qu'il retrouvait dans les contes de son père, le jeune homme âgé d'à peine vingt ans quitta sa ferme qu'il céda à sa femme et prît la route, sans emporter davantage que son épée et son bouclier. Il parcourut d'abord les landes de Saline, puis poursuivit son chemin vers le nord, traversant Selian et Silena de long en large, avant de retrouver le chemin des côtes pour prendre le premier navire pour Terre Dès qu'il le pouvait, il vendait ses talents aux locaux et il ne tarda pas, alors qu'il s'enfonçait dans les terres de Terre, à découvrir que son affinité avec le métal allait au delà de la simple maîtrise de la forge.
En effet, au terme d'un combat contre un sorcier rencontré aux abords de Drayame, le vagabond, poussé dans ses derniers retranchements et acculé parvint à soulever son épée malgré la distance qui le séparait d'elle et à la projeter en travers des côtes de son adversaire. C'est d'ailleurs sur le cadavre de ce sorcier qu'il trouva l'anneau qu'il conserverait jusqu'à aujourd'hui, sans jamais réellement avoir conscience de sa nature magique. D'abord surpris et curieux de sa condition d'Esper, Sigmar se renseigna auprès de qui voulait bien lui en parler, puis, dès lors qu'il fut en mesure d'appréhender son don autrement que comme une aptitude aléatoire, il s'exerça à employer ses armes au travers de cette forme de télékinésie. Conscient des efforts que cela représentait quand il s'agissait d'employer l'épée, il forgea lui même les quatre armes qui allait l'accompagner pour le reste de sa vie, des dagues longues à un seul tranchant et à la pointe bien taillée munies d'une garde efficace qu'il gardait par quatre pour pouvoir jongler avec au cours de ses affrontements.
De combat en combat, de succès en succès, le guerrier développa à la fois ses talents et aptitudes et sa perception du monde, qui se restreignit bientôt à la recherche d'une mort glorieuse au cours d'un ultime combat. Impétueux, audacieux mais pas au point d'en être suicidaire, le guerrier continua de repousser ses limites d'affrontement en période d'apprentissage auprès d'un maître quelconque, accumulant les techniques diverses et variées pour étendre ses perspectives et combiner les différents styles de combat des terres qu'il visitait.
Au cours d'un affrontement à la lisière de Flore contre une des créatures de Drayame, Sigmar fut sévèrement blessé et recueilli par les Nymphes qu'il côtoya pendant un long moment. En effet, malgré son amour du combat, il s'accorda une longue période de repos auprès d'elles, abandonnant pendant près d'un an sa vie de vagabond. Au cours de cette courte année, Sigmar entretint un amour aussi bref qu'intense avec l'une des filles de l'Ancien, et il repartit au terme de leur relation en emmenant avec lui le fruit de leur union; une fillette qu'il ne souhaitait pas livrer à la vie qu'il estimait trop simple des nymphes. Si cette période avait été salvatrice pour lui, il considérait qu'une vie entière d'insouciance n'avait pas la moindre saveur, et confia l'enfant dont il ne pouvait pas non plus se charger à une famille de fermiers de Terre.
Une fois libéré de son fardeau et réinvesti par son désir de gloire et d'honneur, le guerrier reprît la route et l'entraînement, qu'il avait partiellement délaissé au contact des Nymphes, et, à peine deux ans plus tard, entendit les échos de la venue d'un nouvel ennemi. Si il n'en voyait pas le bout du nez, il redoubla d'efforts et accrût encore le rythme de ses défis, étendant ses aptitudes au combat monté et dans des environnements les moins favorables.
Quand les premières vagues de l'arrivée de l'Aile ténébreuse percutèrent les côtes volantes de Ciel, Sigmar traversa Terre à toute allure pour rejoindre Sen'tsura et rallier le continent volant. S'il n'assista pas aux premiers affrontements, il eut un premier contact avec l'Aile lors de la seconde bataille de Misora où Ciel connut sa première défaite remarquable; première d'une longue série. Loin d'être découragé par la perspective d'une défaite, le mercenaire enchaîna les batailles aux cotés des Anges et considéra l'armée du démon comme un nouveau défi. Naturellement, il ne parvint jamais à remporter la moindre victoire au coté des anges, et fut contraint de fuir Ciel avant que la capitale du continent ne soit prise.
Si cela passait pour de la lâcheté auprès de certains, il estimait que combattre un ennemi d'une telle force nécessitait d'avoir des alliés fort, et se mit à regretter son pays natal, où la force était considérée comme une vertu et élevée au rang de culte. Jugeant les camps qui composaient les différents royaumes de Terra Mystica comme trop faibles pour opposer une résistance digne de ce nom au démon, il continua de combattre contre les monstres de Zelphos et de poursuivre une longue route de défaites enrichissantes, apprenant de chacune d'entre elle pour le plus grand malheur des adversaires qui suivaient.
Malgré son obstination et la nécessité de ces défaites, le fait de voir mourir l'essentiel des compagnons d'arme qu'il trouvait sur son chemin eut tôt fait d'atteindre l'entrain du guerrier qui ne tarda pas à sombrer dans une mélancolie qu'aucun combat ne savait éradiquer.
Peu avant la guerre froide, Sigmar vécut une défaite particulièrement remarquable, et fut personnellement vaincu au combat. Là où il aurait pu considérer que son temps était révolu et qu'il ne parviendrait plus à rien dans cet état d'esprit, il choisit de vivre pour vivre plutôt que de fuir pour apprendre davantage. Un choix qu'il n'avait jamais fait auparavant et qui acheva de lui coûter son moral déjà sévèrement entamé. A peine un instant avant que le coup ne porte et que la lance du démon qu'il affrontait ne lui perfore la poitrine, sa peur et sa magie naturelle activèrent l'anneau qu'il portait au doigt et qui n'avait jusque là jamais fait état de la moindre capacité magique, et il se retrouva en une fraction de seconde transporté dans un endroit qu'il ne connaissait pas. Ils étaient rares, et il lui fut aisé de reconnaître Feu et son désert.
Marqué par sa défaite et profondément dépressif, le mercenaire erra dans les déserts sans retrouver son chemin, s'accrochant à ce qu'il restait de sa vie avec une ferveur démentielle. Il avait sacrifié son honneur sur l'autel de la vie, ce n'était pas pour mourir lamentablement anx les profondeurs d'une mer de sable. Nayris attendrait encore. Sans savoir où aller, il finit par rallier Volcania et fut contraint d'en affronter les créatures et de se terrer dans les caveaux brûlants des caldéras, d'adapter son rythme de vie à celui des monstres des volcans, et d'apprendre de nouveau.
Si cette perspective là lui rendit un peu de son moral, il lui fallut près de deux ans avant de retrouver la volonté de rentrer - et d'en avoir la capacité -, mais son voyage fut moins difficile au retour qu'à l'aller. Sa volonté était partiellement restaurée, et si, dans sa solitude, le mercenaire avait développé un cynisme à toute épreuve en parlant seul ou à ses victimes, il avait retrouvé son désir de postérité.
Stigmatisé par les épreuves subites à Volcania, marqué au fer par les assauts des monstres de lave et de feu auxquels il avait échappé de peu quand il n'avait pu les vaincre, la peau brunie par le soleil agressif du désert et brûlée par le sable, Sigmar avait eu le temps de repasser sa vie au peigne fin, et considéra qu'il ne lui restait qu'un devoir à accomplir avant de s'estimer de nouveau complet.
Pour la première fois, il ignora sciemment les conflits qu'il croisait, et passa son chemin sans s'arrêter jusqu'à atteindre une ferme où il avait déjà fait halte des années plus tôt. Plus de quinze ans plus tôt. Il interrogea les fermiers auxquels il avait confié son unique fille connue et apprît d'eux qu'elle s'était enfuie, moins d'une semaine plus tôt. Consterné par l'attitude des parents qu'il lui avait choisie mais appréciant l'audace de son sang, il suivit les indications successives des différents villageois et rejoignit bientôt l'enfant.
Mais enfant, elle ne l'était plus, et il fut presque frappé par le temps qui avait passé depuis qu'il avait choisi de l'abandonner aux fermiers, et choisit de la suivre un moment avant de l'aborder. Il n'avait jamais ressenti beaucoup de gène à l'égard des femmes, ni à l'égard de ses semblables, mais pour une raison qu'il ne s'expliquait pas, il ne parvenait pas à l'approcher. Il avait su par les fermiers qu'ils avaient avoué qu'elle n'était pas de leur sang à la jeune fille, cause de son départ, et s'imaginait assez mal lui avouer dans la même lancée que son père était un tueur des Glaces qui avait préféré l'abandonner pour assouvir sa soif de sang que de s'occuper d'elle dignement.
Méthodique, comme dans tout ce qu'il faisait, le mercenaire se tint à bonne distance et lui fila le pas jusqu'à une auberge dans laquelle elle prît une chambre; et exigea de l'aubergiste qu'il lui en trouve une à proximité. Etendu sur le lit inconfortable de sa chambre, il fixait le plafond sans un mot, les mains croisées derrière la tête, encore tout habillé, prêtant attention aux bruits qui lui parvenait de la chambre voisine. La nuit était tombée quand il entendit des pas et des portes s'ouvrir, à intervalle régulier, et il se leva pour glisser un oeil dehors. Quatre hommes, armés, se faufilaient dans chacune des chambres successivement et finirent par atteindre celle de la jeune fille.
Avec une lenteur maîtrisée, le mercenaire quitta sa propre chambre et vint coller l'oreille à la porte de la chambre voisine, devinant aisément le sort des autres locataires. Il entendit la plainte d'un homme, puis les menaces qu'il proféra à l'égard de sa fille, l'unique fruit de sa chair, et resta pourtant de marbre. Quelque chose au fond de lui lui ordonnait d'agir immédiatement, quelque chose d'autre lui recommandait la prudence; lui recommandait de faire comme il avait toujours fait et de ne pas se mêler du destin des autres.
Ce n'est que quand résonna le son caractéristique d'un coup porté à la tête qu'il enfonça la porte d'un coup d'épaule et se jeta sur un premier bandit. Il lui lança un revers de poignet en pleine tempe et le manant s'en alla percuter l'un de ses confrères. Le troisième se retourna aussitôt et tenta de poignarder le mercenaire avec un surin de mauvaise facture. L'expérience du gaillard lui faisait frapper juste, mais Sigmar s'effaça sur le coté en déviant la trajectoire de son coup d'une main, envoyant la paume de l'autre démettre l'os de son coude exposé, le forçant à lâcher son arme que le mercenaire réceptionna aussitôt pour la projeter en travers du front de celui qui avait frappé la jeune fille et se tenait jusque là au plus proche du lit. Il s'effondra raide mort et le mercenaire acheva d'écarter le bras-cassé d'un coup de coude qui lui fit exploser le nez dans un craquement sinistre.
Il bascula en arrière, et son confrère le plus intact, repoussant le premier bandit que Sigmar avait frappé, tira son sabre de son fourreau tandis que l'autre, sonné, se redressait et dégainait une dague et une massette.
Un bref instant de tension figea la pièce dans le silence tandis que les deux gaillards observaient leur adversaire, se consultant du regard l'un l'autre en se demandant quoi faire, attaquer, fuir ? L'un de leurs camarades était mort, le second se tordait de douleur au sol en geignant, les mains plaquées sur son visage couvert de pulpe écarlate.
La pièce était exigüe et la distance qui les séparait les uns des autres relativement courte, si bien que les armes des deux gaillards ne leur conférait pas vraiment d'avantage. L'épéiste mit fin à cette brève période de silence et se fendit en tentant de harponner le mercenaire qui bondit en arrière et écarta la pointe du sabre d'un revers de poignet, se blessant la main par la même occasion. Sans répit, l'autre bandit se jeta à la suite de son compagnon et tenta d'abattre son adversaire d'un coup de dague en travers des côtes. Sigmar se jeta presque contre lui, agrippant son poignet pour le contraindre à lever le bras et éviter l'impact, le repoussant jusqu'au lit où il s'écrasa sur lui, roulant aussitôt sur le coté pour éviter une éventuelle attaque du sabreur. Il employa son pouvoir dès lors qu'il retrouva le sol pour extraire les deux lames de lancer à la ceinture du sabreur et les retourner immédiatement contre lui en enfonçant la première entre ses côtes et la seconde en travers de sa carotide. Le gaillard s'effondra sur le côté en poussant un gargouillis infâme tandis que son sang achevait de l'étouffer en envahissant sa gorge meurtrie, et le dernier survivant rampa sur le lit avant de se dresser sur le genoux pour bondir sur le mercenaire.
Ils roulèrent en arrière et le crâne de Sigmar heurta le mur, le sonnant un moment tandis qu'il agrippait les mains de son agresseur qui s'essayait à le poignarder à nouveau. Le choc lui avait fait perdre un brin de sa concentration, et il s'essayait à mobiliser le pouvoir qu'il sentait fourmiller entre ses doigts et vibrer dans toute la pièce. Il y avait quelque chose d'inhabituel dans la réaction de ce qui l'entourait à l'usage de ses aptitudes, qui, habituellement, avaient peu de conséquences sur l'environnement. Mais cette fois-ci, il avait le sentiment qu'en plus de résonner en lui, son pouvoir entrait en collision avec quelque chose d'extérieur.
Dans un ultime effort, il envoya son genou percuter les côtes de son assaillant et le repoussa d'un coté tandis qu'il roulait de l'autre. Le bandit se relevait déjà quand Sigmar se redressait à peine et levait une main, puis l'autre, soulevant toute les armes qui avaient été utilisées au cours de l'affrontement avant de les projeter d'un seul homme vers le dernier valide qui s'écrasa contre le mur avant de glisser au sol en ouvrant et fermant la bouche à intervalle régulier tandis qu'il se vidait de son sang, les mains écrasées sur son ventre mutilé. Le dernier bandit, déjà blessé, s'était éloigné et venait tout juste d'ouvrir la porte, rampant comme un ver pour éviter d'être remarqué. Sans succès, puisque le Salinéen bondit à sa suite et l'agrippa par les jambes pour le tirer vers lui et l'agripper par les tempes pour lui écraser la tête contre le plancher, encore, et encore, et encore, jusqu'à ce que les convulsions nerveuses qui agitaient son corps cessent définitivement et que son visage soit changé en une bouillie sanglante.
Haletant, le mercenaire se redressa et se retourna aussitôt vers la jeune fille, s'en allant s'installer près d'elle, assis, avant que l'agitation ne parvienne aux oreilles de la milice locale. Il posa une main sur son front et sentit que les vibrations qu'il avait perçue plus tôt s'intensifiait. Elle était probablement une Esper, comme lui, ou bien était-ce tout simplement son sang qui parlait et qui lui communiqua quelque chose. Quoi qu'il en soit, il sembla au mercenaire que la mèche blanche qui éclairait la chevelure d'ébène de sa fille n'était pas là quand il l'avait suivie plus tôt dans la journée.
Il prît son pouls, puis rassembla ses affaires et les fourra dans un sac qu'il balança par dessus son épaule avant d'en faire de même avec l'adolescente et de quitter l'auberge à vive allure, rejoignant les écuries et son cheval où il l'installa pour s'éloigner le plus vite possible.
Quand elle se réveilla enfin, le mercenaire ne lui raconta qu'une version tronquée de son "sauvetage", préférant éviter de lui avouer qu'il la suivait depuis plusieurs heures et qu'il avait été, de fait, disposé à lui venir en aide promptement, et plus encore, pourquoi il la suivait. Il choisit de délaisser un peu sa quête pour apprendre à connaître la jeune fille qui répondait au nom d'Ahyliss Biara, un nom qui sonnait bien Terrian, mais qu'il ne pouvait altérer d'aucune manière, et profita de cette occasion pour l'armer face aux épreuves qu'elle devrait affronter.
Le monde était en guerre, et il avait épargné à sa vie la vie des Nymphes - épargnant aussi sa vie par la même occasion, tout le monde connait le destin qu'ont connues les Nymphes ! - pour qu'elle puisse survivre dans un monde hostile, et il avait maintenant l'occasion de lui donner les outils pour résister. Pendant près d'un an, il l'accompagna dans sa traversée de Terre et lui enseigna les bases de la survie dans un milieu comme celui-ci, quelques notions concernant les autres, et le maniement d'une des armes qu'il avait trouvé des plus confortables lors de son dernier voyage, en Feu.
S'il s'était attaché à elle pendant cette période, il n'en montrait pas grand chose, mais malgré son cynisme à toute épreuve et son attitude relativement mauvaise envers elle, il ne faisait rien pour lui porter préjudice et se montrait aussi compréhensif qu'il le pouvait quand il devait lui enseigner quelque chose. Quoi que partisan de l'apprentissage par l'échec, il modéra un peu son entraînement et lui épargna le pire; ce qu'il avait lui même connu au long de sa vie, estimant que ce n'était pas nécessaire d'en arriver là et qu'elle ferait d'elle même les expériences qu'il avait connu, si le besoin s'en faisait sentir.
Il lui épargna également l'enseignement de sa propre voie, de sa philosophie concernant la gloire et la force, mais ne put toutefois s'empêcher de lui conter les légendes épiques des héros de Saline et des Glaces, comme son père l'avait fait pour lui, jugeant qu'elle saurait d'elle même trouver le chemin qui lui sied le mieux.
Au terme de leur voyage, quand la jeune fille atteignit les portes de Sen'tsura, le mercenaire lui confia l'arme qu'il lui avait appris à manier; un Flissa hérité d'un guerrier de Feu qu'il avait vaincu en duel et qui lui avait semblé convenir pendant un temps, avant qu'il ne s'en lasse comme des autres armes et n'en revienne à ses habituelles dagues. Si les adieux furent brefs et qu'il ne se retourna pas, cette période avait eu l'effet escompté, et Sigmar se sentait désormais complet. De nouveau investi par le désir de gloire, il poursuivit sa route vers le sud et embarqua dans une petite barge pour franchir le détroit et rejoindre sa terre natale, où il estimait qu'il devait poursuivre sa voie, maintenant qu'il était investi des connaissances de toute les autres terres.