Mer 20 Avr - 11:59 | | | | Un silence parfait régnait dans la bibliothèque du manoir des Tenebrae, en cette nuit claire et tranquille. Au dehors, la pleine lune scintillait doucement, jetant sur les plaines ses pâles rayons argents. Tout semblait dormir profondément, comme bercé par la légère brise qui caressait avec douceur les fleurs aux multiples couleurs des jardins entretenus avec un soin particulier.
Pourtant, une certaine personne était encore debout. Cette frêle silhouette, accoudée devant un ouvrage qui devait peser le double si ce n'est le triple de son poids, dévorait chaque paragraphe, chaque ligne et chaque caractère avec une avidité manifeste. Sa respiration était si discrète que si un chat était passé par là, il l'aurait confondu avec une souris ! On aurait pu croire ce petit fraudeur tranquille, cependant... C'était loin d'être le cas. A chaque fois que le plancher craquait au dessus de sa tête, qu'une porte grinçait dans le lointain, ou que le hululement d'une chouette résonnait depuis l'autre côté des grandes fenêtres, un sursaut le secouait entièrement, et sa respiration se coupait. Il restait ainsi quelques instants, le coeur battant à tout rompre... Puis lorsqu'il devenait évident que ce n'était qu'une fausse alerte, le garçon retournait à sa lecture attentive.
Plus que sa propre mort, Dante craignait que son père ne découvre qu'il apprenait la magie en cachette. Il n'osait même pas imaginer ce que son géniteur lui réservait s'il devait l'apprendre !... Cet homme, haït et craint depuis toujours, avait été une source de terreur aussi loin que remonte la mémoire du jeune Dramerion. C'est pourquoi l'enfant prenait le risque d'avoir l'air d'un déterré la journée, et étudiait la nuit, aussi longtemps qu'il pouvait tenir et rester attentif.
Finalement, vers 4h du matin, Dante referma le vieux grimoire avec précaution, prenant garde de ne pas abîmer les pages parcheminées et jaunies par le temps, avant d'aller le range rà sa place, au millimètre près. Puis il baîlla à s'en décrocher la mâchoire, frottant ses yeux embuées de fatigue. Enfin, il quitta la bibliothèque, rejoignant sa chambre sur la pointe des pieds...
~ Le lendemain matin, le garçon fut réveillé par sa nourrice, qui lui parlait de sa douce voix mélodieuse. De mauvais poil, comme à chaque fois qu'on le tirait de son sommeil, le Dramerion tira la couverture sur sa tête en ronchonnant dans sa barbe. Assise sur le côté du lit, la domestique se mit à rire doucement :- Allons, debout, mon jeune maître ! C'est une magnifique journée qui s'annonce. Regardez ce soleil !- Rien à faire... Je préfère la lune !- Toujours aussi oiseau de nuit, à ce que je vois...soupira-t-elle. Puis, elle se pencha vers Dante avant de murmurer là où elle estima être son oreille :- Vous avez encore passé la nuit à la bibliothèque, n'est-ce pas ?...Le petit Dramerion s'assit soudain, rejetant sa couette sur ses jambes. Son regard noisette paraissait lancer des éclairs. - Je crois qu'on ne t'a pas entendue, au royaume de Selian ! Parle plus fort ! articula-t-il, les dents serrées.- Pardonnez-moi, mais je doute que quelq'un d'autre que vous m'ait entendue. - Prudence est mère de sûreté, Nina.- Je le sais, c'est moi qui vous ait transmis cet adage. Oublions cela ! Levez-vous, autrement votre petit-déjeuner va refroidir. - J'arrive, j'arrive...La nourrice se leva, s'inclina légèrement, puis sortit de la chambre. Dante resta songeur. Un très mauvais pressentiment semblait lui glacer les entrailles... Pourtant, il était certain d'avoir été très prudent, autant qu'il aurait pu l'être !... Alors pourquoi cette sensation ?...
~ Plusieurs jours s'écoulèrent calmement, sans incident notoire. Si bien que le garçon finit par se convaincre qu'il devait avoir inventé une contrariété. Peut-être était-ce dû au stress occasionné par ses escapades nocturnes ?... Toujours était-il qu'il continuait à s'instruire en secret.
~ Un matin, son père le fit convoquer dans son bureau. Alors qu'il marchait vers cette pièce qu'il ne voyait quasiment jamais, son imagination s'emballait. Qu'avait-il encore bien pu faire ? Piétiner l'une de ses fleurs adorées ? Oser faire du bruit pendant sa lecture ? Marcher sur la gauche du couloir alors qu'il aurait dû marcher à droite ? Bref, il n'en savait fichtre rien, et cela le rendait particulièrement nerveux.
Et... Il y avait de quoi. Lorsqu'il entra dans la salle, l'enfant avisa une pile d'ouvrages qui s'entassaient sur le bureau de son père, ce dernier se tenant juste à côté. C'est un frisson d'horreur qu'il reconnut tous les livres et grimoires qui lui avaient servi à apprendre l'art de la magie. Néanmoins, il resta immobile, impassible autant qu'il le pouvait. Passé quelques instants, Viktor commença, d'une voix froide et tranchante :- Dante, j'ai l'impression qu'il y a quelque chose que tu ne comprends pas dans la phrase : "Je t'interdis formellement d'excercer n'importe quelle forme de magie." Serais-tu idiot à ce point ?... Réponds !- Non, père. - Alors tu m'as désobéit délibérément. Quelque chose à dire pour ta défense ?- Je... Je suis un Dramerion, père. La magie, ça fait partie de moi. Je ne peux pas ne pas la pratiquer !- Je te conseille de baisser d'un ton, mon garçon. Tu es déjà dans une fâcheuse posture, n'aggrave pas ton cas. D'ailleurs, ta désobéissance te vaut une punition. A ce mot et à la lueur qu'il distingua dans les yeux de son géniteur, Dante se mit à trembler. Il songea à essayer de s'échapper, mais... Pour aller où ? Et surtout, comment sortir de cette pièce ? Finalement, le garçon finit par se résigner et accepter son châtiment, sans même essayer de se défendre.[H.S : je vous ai épargné la séance de... "Tortures" qu'inflige son père à Dante après cela. Pas envie de faire souffrir mon perso ! xD]
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