Une forêt, sombre, inquiétante pour ceux qui ne la connaissent pas, rassurante pour ceux qui y vivent, intimidante pour les autres. Dans cette forêt, une clairière, qui n'a de clairière que le nom : sans lumière, avec seulement un peu moins d'arbres que le reste de ce bois, une maisonnette a cependant trouvé la place de s'y loger. La fumée sortant de sa cheminée et la lumière filtrant par les fenêtres laissent voir que toute vie n'a pas déserté le lieu. C'est à se demander ce qu'une quelconque famille a bien pu trouver de positif à cet endroit pour s'y installer... Zoomons un peu plus vers l'une des fenêtres. Nous pouvons voir qu'à l'intérieur de cette petite habitation, se trouve en effet une famille, attablée pour le dîner. Le père est assis en bout de table, face à une chaise vide, à l'autre bout. Entre eux, face à face, se trouvent deux jeunes filles, sans doute celles de l'homme. Alors que celle qui semble la plus jeune, âgée en vérité de neuf ans, possède la peau ambrée, les yeux bruns et la chevelure, tout aussi brune, mais aussi lisse et soyeuse de son père, sa soeur, elle, probablement âgée de quatorze ans, est blonde aux yeux bleus, et possède une peau pâle. Elle rit avec sa soeur, tandis que leur père les couve d'un regard attendri. C'est alors que la mère arrive, portant le dessert. Elle présente de longs cheveux blonds ondulés, des yeux saphir et une peau pâle... Comme sa fille aînée, qui, avec sa cadette, se jette en riant sur le plateau, avant même qu'il n'atteigne le sol. C'est une fillette joyeuse, insouciante, aimant la musique, et se nommant Mérilda. Son père est un humain, sa mère une sylphide, tout comme sa soeur. Son repas terminé, elle laisse sa famille autour de la table, et sort, souriant toujours, pour la promenade à laquelle elle s'adonne tous les soirs.

Plus tard, après s'être enfoncée dans les profondeurs de la forêt, comme à son habitude, elle se met à chanter, pour tromper sa solitude, et aussi retranscrire ce calme apaisant qu'elle retrouve chaque soir à la même heure. Sans cesser de chanter, elle lève les yeux au ciel. La lune est pleine, éclairant un minimum ses pas, et elle est heureuse de ne pas marcher dans le noir complet, pour une fois. Elle entonne le refrain :

-Marchant dans la forêt, une nuit de pleine lune...

Mais, après le premier vers, elle s'interrompt. Elle a entendu un bruit, comme un frôlement dans les sous-bois. Désirant connaître la nature de l'être présent, elle retourne sur le sentier, et, alors que la créature s'approche, elle se décale pour laisser un rayon de lune l'illuminer... Et elle ne peut retenir un cri d'effroi : l'être est plus grand qu'un homme, il possède une queue et des oreilles de loup, ses yeux sont injectés de sang, et une telle sauvagerie émane de lui que Mérilda ne réfléchit pas et s'enfuit de toute la vitesse que lui offrent ses trop jeunes jambes. Le monstre ne tarde pas à la rattraper, et il a tôt fait de l'immobiliser. sa victime ne cessant de hurler, il juge plus prudent de l'attirer dans les sous-bois. Ne sachant comme la faire taire, il s'approche d'elle, et lui déchire la gorge. Le dernier hurlement de la jeune fille, de douleur, cette fois, s'achève dans un gargouillis. Sans plus de cérémonie, le loup-garou la laisse étendue au sol et s'éloigne.

La lumière éclatante de la lune finit par la réveiller. elle est étendue sur le sol, ses ongles sont devenus des griffes de fauve. Inquiète, se rappelant la scène dont elle vient d'être victime, elle se relève. Elle aperçoit alors sa queue, touche son crâne, effleure ses oreilles de louve. toutes les légendes qu'on lui a racontées sur les loups-garous lui reviennent en mémoire. Avec un frisson d'horreur, elle réalise qu'elle est devenue l'un de ces monstres. En se concentrant de toutes ses forces, elle parvient à chasser les horribles attributs inhérents à sa nouvelle nature te à redevenir elle-même. En reprenant le chemin de sa maison, elle se jure de ne dévoiler cette scène à personne, de le garder secret le plus longtemps possible.Elle ne sait pas encore que cet événement contribuera à faire d'elle une fille plus réservée, mais qu'elle se fermera bien plus deux ans plus tard, après le meurtre de son père...