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La corneille et le loup. [PV : Sig'] | |
| Aller à la page : 1, 2 | Dim 15 Fév - 12:36 | | | | Sous le couvert des arbres, le vent s’était tu à demi. L’aube claire ne laissait filtrer qu’une pénombre traversée de rais de soleil pâle, à travers les épais branchages des sapins ; cela ne semblait pas gêner outre mesure ni la jarl ni son compagnon de chasse et tous deux filèrent en silence entre les arbres. Sigrid, courbée comme un oiseau de proie en chasse, allait à quelques pas d’Ulrik, et dans la lumière hésitante les deux guerriers se dessinaient tout en ombres et en contre-jours, furtifs comme des spectres, quoiqu’il fallut sans peine accorder à la dame de Svarholt la primauté en matière de sinistreté et d’effroi. Ses yeux de fer brillaient d’un feu déroutant au milieu des grandes flaques d’encre noire qui lui teintaient les paupières et les pommettes et sa chevelure nouée de tresses et de colifichets battait son épaule comme l’aile d’un corbeau. Njörd allait à quelques pas devant elle, son pelage blanc teint de brou de noix et de diverses couleurs brunes et noires pour mieux se fondre dans son environnement. Pareille bête devait être fort efficace dans les temps hivernaux pour se fondre dans la neige, mais aux beaux jours, il fallait bien procéder autrement.
Elle fut surprise de voir avec quelle rapidité Ulrik s’était fait à un environnement qui ne devait rien avoir de commun avec la Toundra. Silencieux, comme elle, il passait comme une ombre entre les arbres, au point que sa silhouette massive semblait à demi se fondre dans le paysage et n’y paraître pas plus que ne le ferait un animal. Sigrid fila un peu plus en avant, tandis que la rumeur des arbres courait au-dessus d’eux. De loin en loin dans les collines on entendait le vacarme des chiens de chasse, des sonneries de cor et des galops furieux sur les rochers. Ici tout était calme, et c’était comme percevoir de loin les remous assourdissants d’une grande mer en furie.
Il fallut un long moment pour trouver la piste de la bête. Njörd s’agita soudain, flaira l’air venteux, puis s’en fut à un trot rapide le long de la pente escarpée d’une ravine au fond de laquelle ruisselait une rivière de montagne. Sans hésiter, Sigrid le suivit, sans craindre de suivre son chien dans un chemin aussi périlleux. Tous les deux avaient le pied montagnard, accoutumé à de tels terrains accidentés et dotés d’un sens de l’équilibre à toute épreuve. Elle s’assura néanmoins que Ulrik pouvait les suivre aisément et s’enquit d’un regard de sa situation. Un homme des plaines en montagne, cela pouvait toujours être plutôt déstabilisant. Pour l’heure, ce n’était pas la partie la plus exaltante, du moins pas selon l’avis de la plupart des gens qui prenaient pour chasse le tumulte des grands équipages traquant un gibier déjà acculé. Sigrid aimait le silence de ces lieux quand elle allait en solitaire traquer et débusquer sa proie jusqu’au cœur de sa tanière ; là, quand il n’y avait plus qu’elle dans l’immensité de la nature, tout était plus simple, tout était pour le mieux.
D’un pas alerte, elle eut tôt fait de suivre son chien jusqu’au fond du ravin. Si c’était la piste du loup que Njörd avait repérée, elle se perdait de l’autre côté de la rive et il fallut un long moment pour la retrouver. Plus encore que d’ordinaire, Sigrid était muette, silencieuse comme une ombre, toute son attention focalisée sur sa traque. Elle avait le pas sûr et l’allure soutenue, et si on eut pu se demander de quel bois cette femme plutôt maigrichonne était faite, il était soudain évident que c’était de l’aubier dur et noueux des vieux arbres tannés par le gel. Infatigable, elle allait à un rythme étonnamment rapide compte tenu de la nature du terrain qui obligeait à suivre les flancs de collines et franchir des éboulis de pierres instables, voire à escalader des pentes tellement raides qu’elle dut s’aider de ses mains pour avancer. Elle prit soin néanmoins de ne pas distancer son hôte, ce qui aurait été d’une impolitesse flagrante.
Bientôt, quelques traces plus tangibles que le seul odorat du molosse qui les accompagnait se firent entrevoir dans les feuillages. Quelques brins de poil fauve accrochés dans les épines d’un arbuste, quelques empreintes sur le sol ; ils touchaient au but, plus ou moins. Entre temps, le soleil s’était élevé haut, au-dessus des montagnes. Le vent n’avait pas faibli et poussait sur son sein de lourdes nuées qui voilaient la lumière de temps à autre et faisaient comme des ombres profondes qui noyaient la forêt de temps à autre.
Sigrid pressa encore le pas, serrant l’épieu dans sa main gantée, hâtant la confrontation.
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| | Sigrid Nilfdottir
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Ivor, Phalène, Messaline, SaskiaVitesse de réponse : Lente
| | Mer 18 Fév - 1:26 | | | | Les tracés escarpés que la piste suivit par le limier dessinait étaient loin du chemin de randonné. Ulrik se croyait sur les flancs abrupts des monts enneigés de la toundra, marchant à tatillon afin d'éviter les crevasses et autres pièges plus mortels les uns que les autres. Cette ascension ne semblait pas pour le moins déranger la Jarl qui suivait son animal comme si elle ne faisait qu'emprunter un escalier. Il s'accrochait et faisait au mieux pour rester en piste dans cette course effréné qui se calma légèrement un fois le ruisseau franchit. Le chasseur reprenait une respiration plus tranquille afin de calmer son rythme cardiaque tout en observant les signes évidant de la proximité de la bête.
Les mêmes bois, toujours ces arbres. L'horizon n'était pas loin et tout se ressemblait. Le Jarl nota que sans ses précieux guides, ce serait sans mal qu'il se perdrait dans cette immensité dont il ne savait quasiment rien. L'environnement n'avait rien en commun avec celui dont il avait l'habitude. Il connaissait les vastes plaines qui s'étendaient aussi loin que pouvait se porter le regard. La neige qui tombait drue et la brume se chargeaient en général de dessiner cette horizon vallonnée dont les collines formaient d’autant de points de repères. Par ici, il relevait la présence d'un conifère qu'il aurait juré avoir croisé à quelques reprises déjà. Le clapotis de l'eau sur les rochers dans le ruisseau lui indiquait qu'ils en étaient toujours proche mais la résonance sous ces bois était telle qu'il ne saurait même pas dire d'où il provenait.
Le seul repère auquel il pouvait à présent s'accrocher résidaient dans les traces évidente laissées par la bête qu'il traquaient. Des empruntes, des indices, quelques preuves laissé dans le passage d'une créature qui était belle et bien au courant de ce qui se tramait dans son dos si vous demandiez au Vindsvaléen. Il lisait dans les cachets caractéristiques d'un canidé que ce dernier avait connaissance de leur présence. Par les arrêts fréquent qu'il marquait et l'allure de sa course, le chasseur déduisait tout cela. S'arrêtant quelques instants pour passer ses phalanges dans le creux d'une emprunte formé dans la terre meuble, l'humidité qui y régnait lui susurrait qu'ils se faisaient proche, dangereusement proche.
Ulrik osa se demander si Sigrid le sentait elle aussi. Il était d'autant plus compliqué de lire dans l'attitude de sa consœur lorsqu'ils n'étaient pas assis côte à côte à une table, croisant régulièrement le regard de l'autre afin d'y entrevoir les pensées fugaces qui viendraient à traverser son esprit. Si son visage affichait rarement la moindre expression, caché derrière ce masque de concentration et ce maquillage, il devenait mission impossible d'y entrevoir quoi que ce fusse. Il se faisait moins de peine à décrypter l'attitude du limier qui la flanquait. À en croire ses oreilles et la façon dont il avait de jeter des coup d'oeil à gauche et à droite, l'animal le sentait lui aussi, et si c'était le cas, Sigrid était elle aussi dans cette posture.
Une sorte de sixième sens lui criait qu'il était observé, que la table avait tournée et qu'il n'était plus le chasseur sur ce jeu périlleux. Courbé, et la main dextre fermée sur son épieux, il parcourait les environs à la recherche d'une piste. Il n'eut pas à aller bien loin. Quelques pas, une poignée de mètres sur le flan du chemin choisi par Sigrid, le craquement d'une branche sur laquelle on appliquait une pression déraisonnablement forte, comme pour bondir, et il se retrouvait sous une centaine de kilos de muscles enragés. Ses larges pattes sur ses épaules n'eurent aucun mal à le mettre à terre, manquant de lui couper la respiration. Il s'autorisa là tout le loisir d'observer la bête qui justifiait pleinement sa présence ici. Un loup aux yeux bleus et au pelage jaunâtre se dressait fièrement au dessus de son visage, fielleux et amer.
L'unique barrière qu'Ulrik parvint à dresser entre lui était constitué du manche de son javelot qui tenait encore à deux mains quand la gueule de la bête s'ouvrit en un raclement sec qui provenait du fond de sa gorge, couvrant même ses bruyants grognements. Un filet de bave vint s'étaler sur le visage du chasseur avant que la puissance mâchoire ne se referme sur le manche de bois qui se brisa sans mal lorsque les molaires le coincèrent dans leur antre. Ses pieds en appui sur la poitrine du canidé, le Jarl déplia subitement ses jambes afin de repousser la bête loin de lui. À peine cette dernière fut chassée de son chevet qu'il lança la pointe de son épieu comme il l'aurait fait avec un couteau de lancer. Pas grand chose, juste assez pour arracher une entaille au loup qui choisit la retraite.
En se redressant, Ulrik nota que la fatigue n'était plus. Plus rien n'avait d’importance. L'adrénaline coulait dans ses veines et il aurait pu y perdre quelques doigts que son comportement n'en serait pas plus affecté. De toute les substances que l'on pouvait trouver en se monde, cette dernière était certainement la plus puissance. Il ne pouvait s'en passé, il la cherchait partout où il allait. Braver l'interdit, se lancer dans de nouvelles expérience inédite, la recherche du combat et du conflit. C'était une autre facette de la chasse qu'il avait bien du mal à cacher. Cette poussé le retournait la tête et il en voulait plus, car à peine redressé, il tenait déjà une nouvelle lance en main.
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| | Dim 1 Mar - 16:08 | | | | Si l’adage disait qu’un bon chasseur doit apprendre à se priver de l’appui d’un limier, il faisait beaucoup rire à Svarholt où on avait parfois du mal à savoir où finissait le molosse et où commençait l’Homme. La même tension attentive, la même énergie rentrée, contractée se lisaient dans la posture de Sigrid et de Njörd qui marchaien à une allure vive et furtive et traversaient les rochers et les buissons sans montrer le moindre signe de fatigue. Dans la lumière morcelée des feuillages, ils semblaient disparaître, puis ressurgir, touts d’ombres et de noir façonnés, si intimement mêlés à cette terre qu’ils en faisaient partie au même titre que les arbres et les pierres autour d’eux. Il n’y avait pas de hâte dans leur attitude, pas d’impatience : le gibier viendrait, tôt ou tard, mais il viendrait. Ou plutôt, ils le trouveraient, car il n’y avait pas de val, pas de cachette, pas de gouffre où la jarl de Svarholt ne pouvait débusquer un animal, pas de piste trop ténue pour que Njörd puisse la perdre.
Le loup les savait sur ses traces, c’était évident. Tout proche, tout proche, la tension montait encore chaque seconde, comme un arc bandé, prêt à tirer ; chaque son, chaque murmure attiraient le regard de Sigrid qui n’écoutait plus rien que le silence bruissant qui les entourait dans les chants languides de la brise. Elle avait cessé de se préoccuper d’Ulrik, constatant qu’il avait un pied relativement montagnard et qu’il n’avait pas de difficultés à les suivre. Il avait compris, lui aussi, et pour tout dire, elle se réjouit de voir qu’il se débrouillait tout à fait dans ce domaine. Gâcher une traque fructueuse et un si beau gibier par la faute d’un incompétent aurait été une déconvenue terrible.
Le chien et la chasseresse se raidirent de concert lorsque chacun put entendre très distinctement un craquement sonore, une branche piétinée, et soudain la masse formidable du loup qui bondissait vers Ulrik. Sigrid vit volte-face, et déjà le molosse s’élançait vers la bête, arrêté d’un ordre sec par sa maîtresse qui préféra éviter à Ulrik le poids supplémentaire du chien sur lui. Dès que le loup fut mis en fuite, Njörd se précipita derrière lui, négligeant toute furtivité, toute prudence, traçant un sillon brun dans les buissons où il se ruait en grondant, attiré par l’odeur du sang. La brutalité de l’instant avait rompu toute la tension accumulée et l’ivresse folle de la traque s’épanchait dans leurs veines, parce qu’il était temps de courir, d’acculer, il était temps de tuer.
Ulrik semblait indemne, et dans les mêmes dispositions que Sigrid qui, l’espace d’un moment, lui adressa un long sourire pareil à nul autre. Rien de ce qu’elle avait pu montrer la veille au soir, pas une attitude, pas un rictus, pas un mot n’avait pu égaler ce qui incendiait ses yeux sombres à présent, comme des nappes de feu noir et mouvant. C’était vivant, soudain ! Pas cette parodie sinistre, aigrelette et morose qu’elle exposait au quotidien, pas cette nonchalance froide qui était la sienne en tout temps, non ; c’était comme de voir une statue prendre vie, le roc et la racine s’animer et courir, tant d’énergie, tant de force, tant de choses qui s’embrasaient sans jamais se consumer. Ulrik avait manifestement cherché à en savoir plus, à percer les masques découvrir ce qui pouvait se tapir derrière la façade morne et sombre de la jarl : et bien il pouvait contempler, à travers le miroir obscur de ses yeux, son cœur incandescent et noir qui hurlait une ivresse sauvage.
Très vite, elle s’en fut, courant à perdre haleine sur la piste de sa proie, tandis qu’au loin les chiens aboyaient pour empêcher le loup de s’échapper trop loin des chasseurs. Si elle avait pu marcher à un train rapide jusque là, allant sans difficulté dans le bois labyrinthique, ce fut encore plus pressant dès qu’elle s’élança, son épieu fermement serré dans son poing ganté. L’énergie et la force dont elle pouvait faire preuve étaient presque étonnantes compte tenu de sa faible corpulence, mais cela lui accordait l’avantage d’une légèreté bien utile quand il fallait suivre la cavalcade effrénée d’un animal en fuite qui tentait de les semer en franchissant des crevasses et des éboulis, dévalant des pentes couvertes d’épineux ou des torrents aux rochers traîtreusement glissants. Rien ne parut décourager Sigrid qui ne fléchissait pas et à qui la soudaine excitation de la traque semblait donner des ailes.
Le vent avait dispersé les quelques nuages et un soleil vif et glacial perçait au travers des branchages. Au ras du sol, tout était pourtant très sombre et la verdure épaisse des sapins ne laissait transparaître que très peu de lumière, mais elle était bien suffisante pour les sens exercés de Njörd qui aurait pu chasser le mulot par une nuit sans lune. Le mitan du jour approchait déjà, mais point de loup encore. Le bref affrontement avait facilité les choses néanmoins, car la blessure causée par son épieu avait répandu l’odeur affolante du sang partout autour de lui, et cette fragrance particulière avait le don de changer le paisible Njörd en véritable prédateur.
La bête était maligne, et bien décidée à ne pas se laisser tuer. Elle avait déjà échappé à plusieurs battues, mais même cette obstination farouche ne pouvait pas faire le poids face à celle de Sigrid. Toutefois, sa détermination semblait aller jusqu’à chercher à renverser la situation à son avantage et transformer ses chasseurs en proies tandis qu’il paraissait les emmener sur des terrains de plus en plus dangereux. Il parvint à les entraîner dans une gorge étroite qui se faufilait entre deux pics rocheux, creusé par une ancienne rivière et malmené par la glace traçait un chemin sinueux, cerné par des pentes abruptes. Un endroit idéal pour une embuscade. Sur la pierre dure, point d’empreintes, mais à en juger par l’agitation de Njörd, l’odeur était bien présente et menait en contrebas, vers l’intérieur de la longue faille. Sigrid répugna néanmoins à s’y engager. L’obscurité qui y régnait et l’exiguïté du lieu rendraient toute attaque périlleuse, et donneraient l’avantage à l'animal qui décida de forcer le destin en surgissant des hauteurs qui les surmontaient.
Dans un sursaut, Njörd avait dressé le museau et grondait avec force en guettant les environs, couverts d’un épais tapis de ronces et d’épineux luxuriants. Il ne s’en fallut que d’une seconde, et la bête émergea des bois, prenant cette fois Sigrid pour cible. Le loup se jeta de toutes ses forces dans son dos, la plaque au sol avec tant de brutalité que sa tête heurta violemment la roche. Dans un aboiement furieux, Njörd s’élança, le frappant de toute sa masse contre le flan pour le repousser et laisser à sa maîtresse le temps de se relever. Une plaie lui entaillait le front et se perdait dans ses cheveux, couvrant une partie de son visage d’un masque écarlate ; le choc l’avait peut-être étourdie un instant, mais elle se reprit très vite et ramassa l’épieu qu’elle avait lâché dans sa chute. Le loup et le chien se faisaient face à présent, le poil hérissé, les babines retroussées sur des rangées de crocs jaunâtres aussi redoutables l’un que l’autre. Leurs grondements sauvages, vibrants de rage et d’agressivités semblaient faire trembler le sol, et il y avait quelque chose de terrifiant dans ces sonorités rauques et profondes.
Ce fut le loup qui bondit en premier, cherchant à prendre le chien au col, heureusement protégé par un épais cerclage de cuir et de fer qui épargna au molosse le tranchant des dents, mais ne suffit pas à lui éviter une suffocation douloureuse. Profitant de cela, Sigrid se plaça de façon à couper toute retraite à la bête et l’obliger à une confrontation directe avec l’un ou l’autre des chasseurs. C’était en général à ce moment-là que l'animal parvenait à s’échapper, de préférence après avoir suffisamment estropié ses assaillants. Mais pas aujourd’hui, elle ne le laisserait pas s’enfuir.
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| | Sigrid Nilfdottir
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Ivor, Phalène, Messaline, SaskiaVitesse de réponse : Lente
| | Lun 6 Avr - 19:27 | | | | Il n'en finissait véritablement jamais. Ces arbres et valons se répétaient encore et encore à tel point qu'Ulrik avait la nette impression de tourner en rond. Il découvrait de temps à autre des empreintes qui lui indiquaient qu'il suivait le bon chemin. Toutefois sans cela, il aurait déjà abandonné cette poursuite effrénée qui semblait ne mener nulle part. Il y avait cela, mais aussi la motivation de rapporter cette proie au château, lui même. C'était un animal d'une taille conséquente, plus qu’à quoi il s'attendait de la part de cette région. Les créatures colossales ça le connaissait. Il restait néanmoins motivé par la prise que représentait ce loup qu'il ne fallait en aucun cas sous-estimer, d'autant que ce dernier à présent blessé risquait de se révéler plus dangereux que jamais.
Il y avait la motivation du chasseur qui le poussait, certes, mais il avait noté autre chose. Ce changement dans l'attitude de Sigrid. Comme si en quelques instants, la nuit laissait place au jour, illuminant soudainement la face de Terra. Ulrik en était à moitié surpris. Il avait compté sur cette occasion pour découvrir la véritable face de cette corneille qui restait de marbre, quelle que soit l'occasion. Plus proche de son élément, plongée dans une traque qui mobilisait le corps et l'esprit, le masque tombait. Elle avait souri. Il n'aurait pas pu s'avancer véritablement sur la cause de cette fissure qui était apparue en travers de son visage, mais il aurait mis sa main à couper qu'elle fut présente l'espace de quelques secondes.
Il finit d'une façon ou d'une autre par mettre les pieds dans la gorge où l'animal s'était terré. Ces paysages laissaient véritablement le Vindsvaléen dubitatif. Il aurait juré avoir mis les pieds ici quelques minutes plus tôt tant le paysage lui semblait monotone. Il était toutefois certain que des détails lui échappaient. La rigole qu'il avait croisée était-elle aussi large ? Y avait-il un arbre couché en travers de cette dernière ? Et pourtant, sans analyse approfondie qui mobilisait son esprit endolori, rien ne semblait différencier ce lieu du précédent.
Le Jarl restait cependant persuadé d'observer cette scène pour la première fois. L'imposant chien de Sigrid et le loup se faisaient face dans la faille creusée par la rivière. De là où il se trouvait, Ulrik ne distinguait pas grand-chose, hormis l'absence flagrante de la maitresse de l'animal. Le face à face des animaux avait quelque chose de tribal. Une sorte de communion naturelle qu'il ne fallait pas briser, mais l'appel du chasseur était bien plus fort que cela pour Ulrik. Saisissant fermement un de ses javelots alors que les choses s’accéléraient du côté des bêtes à en entendre les sons de lutte qui se répercutaient en écho partout dans la forêt.
Débarrassé de tout fardeau superflu, l'épieu affuté prolongeant son bras droit, le Jarl s'élança vers les bêtes qui luttaient en pestant, grognant et bavant l'une sur l'autre. Le combat semblait donner l'avantage au loup qui -malgré le dressage dont bénéficiait le limier- gardait une supériorité physique et une sauvagerie imprévisible. Lorsqu'il fut enfin à porter, s'emparant de la lance comme il l'aurait fait d'une hache de bataille, il envoya la pointe frapper le flanc de la bête afin de libérer le limier de son emprise.
Reculant vivement au contact de l'acier sur sa fourrure dans laquelle il laissa un profond sillon sanguinolent, la bête pivota pour faire face à son nouvel agresseur qui se tenait devant elle sans montrer le moindre signe de peur ou d’intimidation. Cet Homme en retour avait quelque chose d'intimidant aux yeux de la bête. Une sorte d'aura en émanait, la force, la puissance, quelque chose qui parlait à son instinct, qui lui soufflait de courir, de ne pas tenir tête au Jarl qui se préparait pour le combat.
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