Séraphin était un jeune homme joyeux et plein d’enthousiasme. Il faisait partie des êtres les plus vivants, chaleureux et frivoles qu’il pouvait exister à l’époque. Il était même plutôt du genre assez insouciant, mais toujours désireux de faire ce qui est le mieux pour Sylfiria et pour Leineichte.
Malgré son aspect assez jovial il restait un jeune homme réfléchit et soucieux du bien de Sylfiria. Il était attentionné avec chacun de ses habitants, et, en accédant au titre de Prince, il est resté très proche de chacun des citoyens de l’Île. Il était toujours près à se mêler à la foule, à jouer avec les enfants, à les consoler et à rassurer les rassurer les adultes.
Mais, ce qui comptait encore plus que Sylfiria à ses yeux, c’était Leineichte. Il l’aimait plus que tout au monde et lui vouait un culte irréprochable, si bien que de son vivant il chercha jamais à se trouver une compagne. Malgré son côté joueur il ne fut jamais intéressé par les aventures amoureuses et/ou sexuelles et resta ainsi vierge toute sa vie. Évidemment, il lui arriva d’attirer les regards de certaines femmes, mais jamais il s’engagea et resta fidèle à Leineichte sans aucune condition.
Désireux de faire le bien, et de protéger son Île ainsi que le culte de Leineichte, il s’engagea dans la première guerre entre les différentes race. Mais ce choix le changea à jamais.

Après sa mort :
La guerre, la sentence de Leineichte et la mort l’ont beaucoup changé. Il est devenu quelqu’un de plus froid juste après sa mort. Il restait quelqu’un de discret, mais toujours obéissant aux moindres désirs de Leineichte. Il apprit à garder son sang-froid et à garder une certaine neutralité. Il fut également longuement torturé de son choix et des horreurs qu’il a vues et commises pendant les combats. Il fut aussi lourdement torturé de sa punition et de sa mort douloureuse.
Mais le caractère de Leineichte l’influença beaucoup. Grâce à elle, au fur et à mesure du temps, il redevint peu à peu le jeune homme qu’il était, mais bien plus mûr. Aujourd’hui, il s’agit d’un jeune avec beaucoup de la volonté, près à tout pour accomplir chacune des quêtes que lui confie sa Mère. Il s’est mit aussi à croire à la rédemption, certain qu’avec le temps et beaucoup de patience Leineichte finira par le reconnaître et le pardonner. Il s’agit d’un homme bon, vivant et très chaleureux.
Cependant, son amour inconsidéré pour sa Déesse le rend jaloux. Il lui arrive donc de retrouver un aspect assez froid et sérieux. Mais la Déesse finit toujours par avoir raison de lui et elle est l’une des seules qui fait tomber son sérieux et lui redonne son cœur d’enfant. Il est aussi devenu encore plus proche des enfants qu’il ne l’était de son vivant, toujours prêt à les protéger au péril de sa vie. Pour lui, les enfants sont l’avenir des peuples et ils doivent être protégés au maximum.

Autres choses importantes à savoir sur Séraphin, c’est son goût pour les Arts. Il lui arrive souvent de peindre le Berceau, mais aussi, de mémoire, les plantes de Sylfiria et sa faune, si proche de celle du Berceau. A ce propos, Thalia adore lui cacher ses toiles ou ses peintures, ou encore à éparpiller de la couleur un peu sur n’importe quoi. Cette jeune Immortelle, semblable à Leineichte, l’amuse mais finit parfois par l’agacer. Il lui arrive aussi d’être jaloux de Thalia, dont Leineichte se souvient parfaitement, et qui ressemble tant à leur mère divine.
Il lui arrive aussi d’écrire. Il tient d’ailleurs une sorte de journal, qu’il garde toujours près de lui, où il écrit ses souvenirs les plus noirs et les plus beaux, il y écrit aussi chacune de ses observations et note certains noms d’enfants qu’il juge intéressant de continuer à observer.

Extrait du journal de Séraphin.

La guerre... Un mal qui en a déchiré plus d'un. Aussi bien les mortels que les divins ont souffert de ce mal qui ne cesse depuis des années, des siècles, voire des millénaires. La guerre, elle m'a déchiré, elle a fait disparaître mon monde. La guerre est la cause de mon oubli et du malheur d'une déesse, Leineichte. Ma mission semblait si simple : traverser le continent avec ma troupe. Mes amis. Mes frères owliens. Nous pensions tous que cette mission serait simple, mais à aucun moment nous n'imaginions que jamais nous ne pourrions rentrer chez nous.

Nous étions partis le cœur léger, sûrs de réussir et de rendre Leineichte fière de nous. Cela nous le pensions avant de voir ce qu’était réellement cet endroit. Un continent où chaque jour des frères ennemis se battaient pour quelques morceaux de terres. Nous les regardions se battre, au début… Nous avons vu des hommes donner leur vie pour l’honneur de leur terre natale. Nous avons vu des hommes bons se battant pour protéger les leurs. Nous avons vu des hommes malhonnêtes tuer et mourir pour gagner des territoires qui n’étaient pas les leurs. Nous ne pouvions pas rester indifférents à cela. Je ne le pouvais pas !
Quand je regardais ces hommes s’entre-tuer, je pensais à Sylfiria, si calme, si paisible, loin de tout cela. Dans ma tête, ce que je voyais, c’était la guerre atteignant mon île adorée et causant la mort de nos familles. Je ne voulais pas cela. Je devais prendre part à cette guerre, il fallait une paix. Je choisis l’un des camps, celui me paraissant le plus juste et bon. Ils se faisaient nommer les anges. Plusieurs de mes frères me suivirent, mais pas tous. D’autres choisirent le camp des démons, le mal selon moi.
Cette guerre enleva la vie à la plupart d’entre nous. Notre sang se mélangea à celui des autres mortels. Je vis les plumes colorées de nos ailes perdre leurs éclats, perdre leurs couleurs si bienfaisantes. Nos ailes prirent peu à peu la couleur de la poussière, de la boue, du sang, de la guerre. Cette dernière nous fit perdre nombre des nôtres. Nous avons même du parfois nous battre les uns contre les autres. Nous avons perdu nos âmes, si pures et innocentes, non imprégnées de tout ce sang. Mais cet éternel déchirement entre ange et démon nous enleva bien plus que cela.

Notre choix déchira Leineichte, notre Déesse à nous, owliens. Elle nous avait donné une mission tellement simple en apparence, elle avait une telle foi en nous. Jamais elle n’a pu imaginer un seul instant que nous prendrions part dans cette guerre. Elle nous vit nous entre-tuer et mourir pour une cause qui n’était pas la nôtre. Elle nous vit mourir les uns après les autres, lui déchirant le cœur et lui arrachant des larmes de douleur. Nous, ses créations, ces êtres ailés qu’elle aimait tant, nous nous étions détournés un instant de notre neutralité, de notre amour pour elle. Elle perdit des êtres qu’elle considérait comme ses enfants, d’une certaine manière. Elle ne put supporter cette tristesse et cette rage qui l’habitait. Nous avions échoué et nous avions commit une grave erreur, il nous fallait une punition de taille.
Vers la fin de la guerre, quand enfin la paix montrait le bout de son nez, notre sentence tomba. Elle nous damna. Voilà notre triste sort. Elle condamna, chacun des quelques owliens encore vivants et ayant participé à ce carnage. Aucun de nous ne pourrait jamais retourner sur Sylfiria, notre île tant aimée, notre « chez nous ». Pire, elle me condamna aussi personnellement. Moi, celui qui devait être sa fierté, celui en qui elle avait le plus d’espoir. J’avais échoué, la rendant honteuse d’avoir eu une telle foi en moi. Elle devait me donner une punition encore plus forte. Elle choisit de me bannir pour toujours. Jamais je ne pourrais rentrer sur mon île natale, comme mes frères owliens, mais aussi, après ma mort, je serais effacé de la mémoire de tous alors que je serais condamné à garder chaque souvenir.
Se furent les dernières paroles que j’entendis d’elle de ma vie « mortelle ». Étant le fils d’Amiel, le premier Owlien, et le champion Leineichte, une déesse, j’avais un « pouvoir » que les autres owliens ne possédaient pas. À ma mort, je reviendrais à la vie, sous une autre forme, mais une forme bien plus charnelle que mes frères. Tandis qu’eux rejoindront les plaines de lumières, loin de toutes souffrances, ne gardant que de vagues souvenirs de leur vie, moi je deviendrai un Immortel. Un être magique, ayant une chair et une puissance magique. Un être ayant gardé tous les souvenirs de son vivant alors que tous auront oublié mon existence et même mon nom.

Nous ne voulions pas croire à cette condamnation tellement sévère, je ne voulais pas être oublié et perdre Sylfiria. J’abandonnais ce début de paix qui s’installait lentement. Mon combat à moi venait de commencer alors qu’un autre avait prit fin. Je fis le chemin inverse, traversant à nouveau les paysages de ce continent que j’avais déjà vu. Je voulais rentrer chez moi, retrouver Sylfiria et sa gaieté de vie. Tout autour de nombreux arbres, plus petits, nos maisons si étranges aux yeux des autres mortels. Je voulais revoir les couleurs de nos cultures, entendre les quelques bêtes de nos élevages, sentir les odeurs des nombreuses fleurs colorées décorant toute l’île. Je voulais revoir l’entremêlement que formait chaque plante avec sa voisine. Je voulais à nouveau toucher les tissus si soyeux. J’avais aussi envie de revoir la beauté de nos bijoux si finement fabriqués. Je voulais entendre à nouveau les rires des enfants owliens qui voletaient entre les arbres pour jouer. Et surtout, je voulais revoir la magnifique statue de Leineichte, devant laquelle nous nous rassemblons souvent pour chanter en son nom.
Quand enfin j’atteins les côtes du continent, je me mis à déployer mes ailes. Mes ailes, leur couleur jaune orangée, devenues marrons, tachetées de sang. Le sang de ceux que j’ai vu périr près de moi et de ceux à qui j’ai enlevé la vie. Ces ailes je les ouvris en grand, volant comme jamais. Je voulais juste Sylfiria, la cherchant avec désespoir. A chaque fois ce fut un échec. Une sorte de brouillard embrumait mon esprit. Je pensais me souvenir de l’emplacement exact de mon île natale, je voyais cet endroit dans ma tête. Chaque jour je tentais de l’atteindre, quand j’y arrivais, la confusion la plus grande me gagnait. Rien. Juste du brouillard. Ce n’était pas possible ! IM-POS-SI-BLE ! Je le savais, elle était là. J’en étais tellement sûr. Je me mis à douter de moi-même. Je me mis à sillonner les océans, cherchant désespérément Sylfiria. Mais rien. Toujours rien. Sylfiria avait disparu.
Je ne voulais pas l’abandonner, je ne DEVAIS pas l’abandonner. Jour après jour je continuai à chercher, mangeant peu, dormant peu, oubliant mes besoins de mortel, continuant de sillonner les airs au dessus d’un étendue d’eau quasi immobile tout le jour, sans prendre le temps de me reposer. Jamais je ne pu la retrouver. Mes pleurs n’y changèrent rien. Mes accès de folie non plus. Encore moins mes crises de rage. Je continuai de prier Leineichte, l’appelant à me pardonner, de me donner une autre chance. Rien. J’entonnais même parfois nos chants owliens, faisant apparaître une orbe lumineuse, d’un blanc si pur, me donnant une incroyable sensation de joie, mais de façon si brève. J’avais beau continuer mes chants, l’orbe finissait toujours par s’éteindre, la joie laissant place à la dévastation de mon cœur et à des torrents de larmes. Leineichte m’avait renié et ne voulait plus de moi.
Au bord du désespoir, je finis par rejoindre les côtes du continent. Le sel et les morsures du soleil avaient entamé ma peau, la brûlant sévèrement. Je m’en fichais. Mon manque de nourriture et d’eau en bonne quantité m’avait rendu squelettique. Peu importe. Mes magnifiques ailes étaient devenues de véritables lambeaux, hideuses et réellement dégoûtante. Et alors ? Tout ce que je voulais c’était Sylfiria. J’avais tout perdu. Mon île natale, la vie de mes amis, mais aussi, quelque part, ma fierté et une partie de ma bonté. J’étais détruit. Je n’avais plus ma place.
Je finis par m’asseoir sur une des plages longeant les côtes du continent Je me mis face à l’étendue d’eau dont on ne voyait pas le bout. Quelque part, là bas, se trouvait Sylfiria. Plus jamais je ne pourrais y retourner. Je me mis à pleurer encore et encore, réalisant enfin mon triste sort. Je voulais mourir et tout oublier, ne plus souffrir. Je ne mangeais plus, ne buvais plus. Je continuais de regarder inlassablement l’horizon, espérant apercevoir Sylfiria. Même quand mes muscles ne parvinrent plus à me maintenir assis et que je tombai dans le sable, à bout de forces, je continuais à chercher Sylfiria du regard. Mon calvaire dura plusieurs jours, me causant d’atroces souffrances, je n’en avais que faire. Je finis par quitter ce monde, sans fermer les yeux à un seul instant. Ma vie mortelle prit fin en ayant les yeux grands ouverts sur l’horizon, mes derniers mots se perdant dans le silence.

« Pardonne moi, Mère… »

Je pensais enfin mourir en paix. Je pensais arrêter de souffrir et pouvoir tout oublier. Je pensais rejoindre les plaines de lumières, avec mon père. Non. Cette mort là n’était pas la mienne. Cette mort là je ne l’aurais pas. Ma mort, à moi, m’effacerait de la mémoire de tous ceux que j’ai connu, aimé, ou simplement croisé. Tous m’oublièrent. Aucun souvenir ne subsista de moi. Même Leineichte m’oublia. Mais moi, moi je me souvenais de tout. Et ça, croyez moi, il s’agit de la pire des punitions. C’est mon bannissement.

Sylfiria, une toute petite île perdue au milieu des eaux, gardée en lieu sûr par une Déesse. Sur cette île vit des êtres incroyablement beaux, et fascinants pour le reste du monde. J’en faisais partit. Voici mon monde, ou plutôt mon ancien monde, celui où j’ai vu le jour. Voulez-vous que je vous décrive mon histoire ? Très bien. Alors tout a commencé ici.

Le Commencement ♫

Un petit groupe de personnes tenait dans ses bras un nouveau-né. C’était l’aube, on se trouvait dans la capitale, Sylfiria. On s’approcha d’une sorte de falaise, et la personne tenant l’enfant lui mit une bonne claque sur les fesses et le lâcha dans le vide. Le petit poussa son premier cri ainsi, et déploya en même temps ses ailes. Elles étaient jaune orangé, et assez large pour un nouveau-né. Il réussit à battre doucement des ailes et à voltiger un peu, avant de finir plus bas dans les bras d’un homme qui le réceptionna. L’homme sourit à son enfant, il s’agissait d’Amiel, le premier Owlien. La mère de l'enfant si magnifique était une femme-dragonne, morte à l'accouchement du nourrisson. Il regardait son fils avec tendresse, il était vraiment mignon, ses petits yeux mi-clos.

« Bienvenue à Sylfiria, Zakarel… »

Le petit émit un petit gémissement, ses petites ailes battant un peu l’air. Amiel déploya ses ailes et s’envola, rejoignant le petit groupe au sommet de la falaise. Il garda son enfant dans ses bras, et alla ensuite le présenter au peuple Owlien, afin qu’ils voient le petit Prince qui venait de naître.

*****

Zakarel volait joyeusement au milieu des grands arbres de Sylfiria. Il rigolait tout en poursuivant un de ses amis. Il toucha le gamin devant lui puis repartit de plus belle en slalomant à toute vitesse entre les arbres. Il croisa d’autres enfants, jouant également et essayant de se cacher. Il les imita, se cacha dans un arbre assez touffu. Ses larges ailes colorées le gênaient un peu, certes ils faisaient partit des plus rapides, mais il était difficile de se cacher ! Un bruit. Il s’arrêta de respirer un moment, surveillant le gamin qui était le « Loup ». Zaw avait bien envie de lui faire peur. Il attendit que le gamin le dépasse, puis d’un coup sortit de sa cachette et fonça sur lui en lançant un gros « BOUUUUH ! » Le petit eut peur, puis ils se mirent à rigoler ensemble, bientôt rejoint par les autres enfants.
On entendit une voix les appeler, tous les enfants se retournèrent et se dirigèrent vers l’homme qui les appelait. Aujourd’hui c’était Infantopos, une tradition de Wodel, une journée où les enfants s’amusaient beaucoup. Le matin, ils avaient confectionné de nombreuses couronnes de fleurs, ils iraient ensuite les déposer sur les portes des demeures de l’île avec leur famille. Cet après-midi, ils allaient donc confectionner des cerfs-volants. Le petit groupe était composé d’enfants ayant tous eu sept ans, il s’agissait donc de leur première fois dans cette fête. Un Owlien c’était donc porter volontaire pour leur expliquer comment faire leur cerfs-volants. Les enfants suivirent l’adulte dans la bonne humeur, faisant sourire ce dernier. Quand tous furent installés dans un endroit plus calme, l’homme commença ses quelques explications. Ce n’était pas très compliqué, et tous les enfants réussirent à faire de jolis cerfs-volants qui étaient tous uniques.
Puis, toujours dans l’insouciance et la bonne humeur, les enfants se dirigèrent vers une côte ventée de l’île. Là, tous ensemble, ils firent voler leur cerfs-volants. Certains essayant de faire des figures, d’autres essayant de faire voler leurs cerfs-volants plus vites, d’autres s’amusant à des courses, mais tous s’amusaient beaucoup. Zaw, lui en tous cas s’amusaient beaucoup. C’était sa première journée d’Infantopos. Le matin il avait fait plusieurs couronnes de fleurs, toutes différentes, mais très jolies. Il s’était ensuite acharné à faire un cerf-volant le plus solide possible, pour qu’il vole longtemps ! Maintenant, il faisait la course avec un de ses copains. Il perdit la course, mais ce n’était pas grave, ils recommencèrent juste après. Plusieurs adultes regardaient ces enfants rirent et jouer, et cela les faisait sourire et leur rappelait leur propre enfance.
Quand le soir vint, et que les enfants eurent finis de jouer avec leurs cerfs-volants, chacun rejoint sa famille. Zaw rejoint donc son père, Amiel. Il était en réalité son unique famille, mais il considérait tout de même tous les habitants de Sylfiria comme sa famille. Le petit, des étincelles pleines les yeux avait hâte d’aller déposer ses couronnes de fleurs. Après le repas, le petit trépignait d’impatience, et Amiel le laissa partir devant. Le petit Prince déposa une jolie gerbe de fleurs sur une première demeure, chez quelqu’un de gentil. Puis Amiel le rejoint, et ce dernier lui proposa plusieurs lieux où Zaw alla mettre des couronnes toujours en voltigeant à tout vitesse, faisant rire son père. Quand il ne resta plus qu’une couronne, le petit insista pour aller la placer à un endroit précis. Son père finit par accepter, après plusieurs minutes de supplication. Zaw se dirigea donc vers la statue de Leineichte, accompagné d’Amiel. Il alla déposer sa couronne dans l’une des mains de la statue, il avait gardé la plus belle pour la déesse.

« Papa, tu crois que Leineichte veille sur nous tous ? »
« Oui, j’en suis sûr Zakarel. »

Le petit eut un grand sourire et fit un câlin à son papa. Ils restèrent un moment à regarder la statue, puis ils rentrèrent ensemble.

*****

« Zaw ! Attends moi ! »

Le Prince s’arrêta, laissant son ami Euriel le rattraper. L’Owlien volait en battant rapidement des ailes, alors que Zakarel ne faisait que de légers mouvements d’ailes. Ce dernier sourit à son ami en le voyant essayer de reprendre son souffle. Mais le sourire du jeune Prince était plus triste qu’à son habitude, son père était mort quelques jours plus tôt, malade après plusieurs années à prendre soin de chaque Owlien. Ce soir, l’île allait célébrer la mort de son père. Zaw souhaitait simplement faire un tour de l’île, regarder les Owliens se préparer à rendre hommage à leur défunt Roi. Il était d’abord passé à la statue de Leineichte, sa Mère, il avait prié pour elle, mais aussi pour les autres Dieux, leur demandant de veiller sur l’âme de son père afin qu’il rejoigne les plaines de lumière sans encombre une fois le rituel terminé. Puis, il avait volé entre les arbres, profitant des odeurs, observant les différentes plantes s’entremêlant les unes aux autres. Par moment il descendait plus bas, recevant le soutien du peuple qui partageait sa tristesse. Le jeune homme d’une vingtaine d’années était profondément affecté par la perte de sa seule famille proche.
Le fait qu’Euriel vienne interrompre ses pensées pour l’accompagner lui avait fait chaud au cœur. Les deux hommes avaient presque le même âge et ont toujours été proche depuis leur plus jeune âge. Ils volèrent ensemble, en silence la plupart du temps. Au crépuscule, ils rejoignirent ensemble le rivage où le corps d’Amiel était en train d’être installé. Déjà plusieurs Owliens étaient présents. Euriel restait à côté de Zakarel, le soutenant dans ce moment difficile. Le jeune Prince vint observer une dernière fois son père. L’homme était placé dans une barque que l’on avait peinte aux couleurs de ses ailes, et on avait gravé son histoire. Certains enfants avaient même participé à la décoration de la barque, souhait de Zaw. Les enfants avaient peint des représentations de leur Roi, la façon dont ils le voyaient. L’homme sourit un peu en voyant ces dessins. Il observa un instant le masque posé sur le visage, confectionné avec des plumes d’oiseaux très colorées. Il était magnifique et n’en avait jamais vu un aussi beau.
Le jeune homme recula ensuite, laissant des hommes asperger la barque d’alcool puis la mettre à la mer. On lui tendit ensuite un arc et une flèche qu’il embrasa. Il arma l’arc, visa la barque déjà éloignée et tira. La flèche enflammée atteint la barque qui prit feu rapidement. Tous regardèrent leur Roi partir vers les plaines de lumière. Quand la barque commença à s’éteindre, le groupe se déplaça vers le centre de la capitale, au pied de l’imposante statue de leur Déesse, Zakarel en tête accompagné d’Euriel. Tous s’installèrent au pied de cette statue, le Prince au plus proche. Ensemble, dans un chœur mélodieux, ils entonnèrent un chant d’Ow. Le chant fit bientôt apparaître de nombreuses petites lumières qui procurèrent un élan de joie dans la foule, accentuant le chant. A la fin du chant, toutes les lumières se regroupèrent ensemble, formant une grosse boule lumineuse au plus près de Zaw. Se fut le jeune prince qui reçu la plus grande partie de l’euphorie produite par cette magie. Quand le chant se termina, la boule commença à s’éteindre et replongea la foule dans la pénombre. Peu à peu elle se dissipa, laissant leur Prince se calmer. Euriel fut le dernier à partir, comme il avait été le premier à venir le soutenir. Quand tous furent chez eux, Zaw rentra également, sans un bruit.
Le lendemain, tous accueillirent le Prince et Euriel vint le chercher. Tous s’étaient assemblés, laissant Euriel parler à le nom. Le jeune homme expliqua à son meilleur ami la tristesse du peuple suite à la mort de leur Roi. Il lui expliqua ensuite à quel point chaque habitant de Sylfiria l'aimait et le chérissait, vu depuis toujours comme la merveille de Sylfiria. Tout ceci donna quelques larmes au jeune Prince, et quand son ami lui annonça que Sylfiria l’avait choisi comme leur nouveau Roi, les larmes coulèrent sur un sourire bienfaisant. Sylfiria avait un nouveau Roi, et il s’appelait Zakarel.


La Fin du Commencement ♫

La Guerre… Elle faisait rage entre deux camps. Ange et démon. Le Bien et le Mal. Sylfiria était à l’écart de ce conflit, loin de tout, ignorant même jusqu’à l’existence de cette guerre. Mais les Dieux, eux n’ignoraient pas cette guerre. Elle était un divertissement pour eux, chacun pariant sur son groupe et ses favoris. Leineichte, elle-même souhaitait montrer que les Owliens valaient mieux que les habitants du continent principal. Elle décida donc de donner une mission à son fils. La chose était simple : il devait partir, dans quelques jours, avec un groupe d’hommes, les meilleurs champions de l’île, traverser le continent. Évidemment, elle ne parla à aucun moment de la Guerre, elle voulait montrer que son peuple, tenu à l’écart depuis toujours, ne participerait pas à ce massacre. Elle avait confiance en eux, elle savait qu’ils allaient réussir. Peut-être à tord au final.

*****

Zakarel finissait les derniers préparatifs avant leur départ. Lui et un groupe de champions devaient partir à l’aube. Leineichte en personne avait donné cette mission au Prince, il n’allait pas refuser. Ils devaient simplement traverser un continent, quoi de plus simple ? Euriel viendrait avec lui, il était le deuxième champion de Leineichte, après le Prince en personne. Cet homme était un allié indispensable, il pouvait compter sur lui. A l’aube, le petit groupe s’assembla à Odael. Après un dernier au revoir à leur famille, les champions prirent leur envol au-dessus des eaux. Ils volèrent de longues heures avant d’atteindre la terre. Dès qu’ils le purent ils atterrirent, observant le nouveau lieu qu’ils allaient devoir traverser. Il n’y avait rien de si impressionnant. Le petit groupe avança un peu à pied, observant la nouvelle nature qu’ils allaient côtoyer les prochains jours. Le groupe reprit vite son envol et continua son cheminement. Ils observaient les nouveaux lieux, bien différents de Sylfiria. Jusqu’à présent ils n’avaient rencontré que des végétaux et des animaux en tous genres. Pourquoi la Déesse des Enfants et des Jeux avait-elle donné cette mission ? Où en était donc la difficulté ? Le Prince ne se plaignait pas, si cette mission pouvait être accomplie sans problème c’était la meilleure chose possible.
La difficulté arriva après plusieurs jours de voyage. Après avoir vu s’enchaîner des climats différents, le groupe fut confronté à un problème de taille. Un champ de bataille, un véritable massacre. Des villages étaient en feu par endroit, des champs étaient jonchés de corps. Le groupe devint livide, tous regardaient cette scène d’horreur. Et puis l’affrontement arriva. Deux groupes approchaient l’un de l’autre. Une nouvelle bataille dans cette Guerre allait commencer. Un groupe portant des armures de couleur verte, une autre avec des armures rouges. Il y avait des créatures en tout genre, de la magie, des combats physiques très violents. Zaw regardait cela avec effroi. Aucune idée, mais cela était affreux.
Le petit groupe resta à l’écart quelques jours, observant le massacre. Que devaient-ils faire ? Beaucoup proposaient d’y prendre part. Euriel et Zaw restaient à observer tout en réfléchissant en silence. Le Prince se demandait surtout si cette Guerre pouvait atteindre Sylfiria. Il ne souhaitait pas cela, il ne voulait pas voir ses frères et sœurs se faire tuer. Il ne voulait pas que les enfants soient traumatisés. Au bout de deux jours il donna son verdict. Il allait rejoindre le groupe des hommes en Vert, ceux qui lui semblaient les plus justes après ses observations. Beaucoup le suivirent, mais d’autres préférèrent le camp des Rouges. Chacun alla rejoindre un camp, proposant ses armes et sa magie, jusque là inutilisée, à son nouveau camp. Ils furent intégrés, les hommes fascinés par ces êtres ailés. Quand une nouvelle bataille vint, chacun des champions se donna corps et âmes dans le combat. Certains durent s’affronter, beaucoup perdirent la vie, d’autres survécurent. Le combat ne faisait que commencer.

*****

Leineichte avait observé ses champions. Elle était sûre qu’ils continueraient leur route après leurs observations. Elle fut grandement déçue quand elle les vit prendre part à la Guerre. Pire, ils décidèrent de s’entre-tuer et de donner leur vie pour une cause qui n’était pas la leur. La Déesse fut grandement blessée en voyant cela. Ses créations s’étaient détournées d’elle. Maintenant elle les voyait mourir un à un. Pourquoi ses champions avait-il choisi un camp ? Elle était atteinte d’un terrible chagrin et d’une profonde colère. Elle devait le punir, lui et les autres. Elle fit disparaître Sylfiria aux yeux des Owliens, la cachant aux yeux de tous, souhaitant oublier ses créatures.

*****

La paix arrivait enfin. Zaw était déchiré à l’idée de la perte des siens, il avait du en tuer de ses propres mains. Mais Sylfiria était sauve, pour lui c’était le principal. Ils n’étaient plus que cinq, Euriel faisait partie des survivants. Leur joie à l’idée d’avoir sauvé Sylfiria ne fut que de courte durée. Leineichte avait prit une mesure pour eux. Ils avaient échoué dans leur mission, ils avaient prit part au conflit en écoutant leur cœur, ce qu’ils n’auraient jamais dû faire. Elle décida d’une lourde sentence. Jamais aucun d’eux ne pourraient rentrer à Sylfiria. Sylfiria n’était plus, elle avait disparu et jamais ils ne pourraient la revoir de leur vivant. La punition était lourde, mais elle le fut encore plus pour le Prince. Le champion de la Déesse l’avait particulièrement déçu et humilié, il allait recevoir un châtiment encore pire. Il recevait la même punition que ses frères de son vivant, mais à sa mort il disparaîtrait de la mémoire de chacun, son existence entière serait oubliée. Plus jamais Leineichte ne s’adresserait aux Owliens, elle ne les écouterait plus et elle bannit son propre champion, sa fierté.
La punition semblait irréelle. Les champions essayèrent de prier leur Déesse, en vain. Zaw était tétanisé par son sort. Euriel tentait de le ramener, mais il semblait ne plus être présent. Non, Sylfiria ne pouvait pas avoir disparu ! Après plusieurs heures, le temps qu’il réalise la lourde peine qu’il venait de recevoir, le jeune homme déploya ses larges ailes, comme jamais. Il prit son élan et s’élança dans les airs à une vitesse incroyable. Euriel tenta de le rattraper, mais au bout de dix minutes il abandonna, le Prince faisait partie des champions les plus rapides. Il vola comme jamais, à une allure incroyable, ne s’arrêtant à aucun moment. Son but ? La côte. Il la rejoignit en quelques jours, alors qu’il avait fallu presque deux semaines à l’allée. Une fois sur la côte du continent il fit une petite halte, tentant de se souvenir du lieu où se trouvait Sylfiria. Après une journée de repos il s’élança à nouveau dans les airs et se mit à chercher. Dans sa tête l’emplacement était très clair, il la voyait. Mais une fois sur les lieux, il n’y avait qu’un épais brouillard. Le brouillard se mit même à atteindre ses pensées. Il finit par se mettre à tourner en rond. Pendant plusieurs jours il chercha, revenant à son point de départ de nombreuses fois.
Sylfiria avait disparu. Après quelques jours de recherche la chose fut évidente. Il se mit à rejoindre la plage et se mit face à la mer. Il tenta de prier sa Mère de nombreuses fois. Aucune réponse. Il tenta même d’entonner les chants d’Ow, jamais la lumière ne réussit à se maintenir jusqu’à la fin d’une chanson. Il avait tout perdu. Son père, sa Mère, son île, son peuple, ses amis, sa famille. Il s’effondra, pleurant à en avoir mal. Il ne voulait plus vivre, il ne voulait plus vivre ainsi, pas sans son île natale et son peuple. Il se laissa mourir lentement en regardant l’horizon. Il tentait de trouver Sylfiria du regard. Jamais il ne la vit. Il voyait encore devant ses yeux, ses frères mourir. Leur sang se mêlant à celui des hommes et de ses cousins. Leurs plumes tombant. Leurs ailes colorées devenir ternes et hideuses. Il revit aussi Myrajh et ceux qui avaient survécu. Son châtiment résonnait dans sa tête. Il voulait seulement mourir. Il s’alimenta plus du tout, laissant ses muscles le lâcher les uns après les autres. Il finit même par tomber sur le sable. Il ne quittait pas l’eau du regard, cherchant son île. Non, elle n’était plus. Son heure arriva, après des jours de souffrance. Avant son dernier souffle il parvint à articuler quelques mots.

« Pardonne moi, Mère… »

Et il quitta ce monde, les yeux toujours ouverts sur l’horizon. Il pensait finir en paix, rejoindre son père et ses frères dans les plaines de lumière. Mais il n’était pas comme eux, il était Zakarel. Il n’allait pas mourir. Il ne venait que de signer la Fin du Commencement.

La Fin est le Commencement ♫

J’ouvris les yeux doucement. Tout était blanc soudainement. Étais-je bien aux plaines de lumière ? Non, bientôt d’autres couleurs vinrent. J’avais l’impression d’être à nouveau sur Sylfiria. Mais ce n’était pas non plus Sylfiria. Alors, où étais-je ? C’est là que je la vis. La Déesse,, Nayris. Elle me regardait, elle semblait chercher qui j’étais. Je compris. Je compris tout, jusqu’à la véritable raison de ma sentence. Ma propre déesse m’avait oublié. Comment avait-elle pu ?... Je me rappelais alors la Guerre, mon choix, mes frères, mon peuple et ma… mort. Non… Cela ne pouvait pas finir ainsi ! Leineichte ne me laissa pas méditer plus longtemps.

« Qui es-tu ? Tu es mon nouvel Immortel ? Très bien ! Alors je vais te présenter ton travail ici. »

Je la regardais, incrédule. Je ne comprenais que vaguement ce qu’elle disait. Je vis Leineichte me tourner le dos et commencer à avancer. Je l’observais, elle était différente ici, différente de celle que l’on voyait sur Sylfiria. Avait-elle aussi totalement oublié Sylfiria ?... Je me mis en marche, la suivant. En marchant je me rendis compte que je ne portais plus mes vêtements, mais une simple toge blanche. Ce monde était étrange, et je l’observais tel un enfant. Tout était si beau, si réel et irréaliste en même temps. La Déesse me présenta rapidement le Berceau, son territoire en quelques sortes, sa bulle à elle. Et puis elle m’expliqua mon rôle. Elle voulait que je devienne le Gardien des Souvenirs d’Enfants. Quelle ironie… Un Gardien des Souvenirs qui avait été oublié… Elle se fichait de moi ? Non, elle était sérieuse. Elle me donna une première mission, une façon de voir ce que je valais.

*****

J’étais de nouveau sur le continent, vêtu de ma toge blanche. J’observais un peu le lieu où je me trouvais, un petit village quelconque. Je regardais un peu la maison où je devais entrer. Aucune lumière à l’intérieur ni dans les maisons alentour. Tant mieux. Je vins doucement ouvrir la porte en silence, puis déploya mes ailes qui devinrent couleur de nuit. Je sentis mon énergie magique me quitter et se diffuser lentement, touchant les parents et les enfants endormis. Je m’approchais doucement des enfants, repérant la petite fille dont je devais collecter la dent. Je la regardais dormir paisiblement, plongée dans les rêves. Je me mis à soulever doucement son oreiller pour récupérer sa dent de lait, et je mis une pièce d’or à la place. Je remit l’oreiller et remit la petite dessus. Je fis un petit sourire et déposa un baiser magique sur son front.

« Sois bénie, ma petite. »

Je sentais déjà la fatigue m’affaiblir, il fallait que je retourne au Berceau. Comme si c’était fait je disparu comme les Immortels savent si bien le faire, ma magie arrêtant d’opérer et mes ailes redevenant orange, bien rangées sous ma toge. J’apparus devant Leineichte. Je lui tendis la dent de lait avec le sourire. Ce n’était pas la première que je lui apportais, ceci était une habitude désormais pour moi. Elle prit la dent et me remercia vaguement. J’avais prit de l’importance dans son cœur au fil des âges, je restais souvent au Berceau avec elle, veillant sur certaines âmes. Elle m'avait donné un nouveau nom aussi, Séraphin, me faisant oublier Zakarel et une partie de mon ancienne vie. Je l’observais un peu, jouant avec une de ces âmes. Cela me fit sourire, et je retournais à la peinture que j’avais laissé avant de partir. Il y avait un petit problème avec ma toile, il manquait quelque chose. Je me mis à froncer des sourcils. Où étaient mes pinceaux ?

« Thalia ! »

Cette Immortelle joueuse était réellement incorrigible ! Je me mis à chercher où elle avait encore pu caché mes affaires pour me faire une farce. Leineichte ne s’occupa pas de moi, trop occupée avec ses âmes. Je me mis en quête de mes pinceaux et de ma peinture. Devinez où je finis par les trouver… Elle s’était amusée à peindre sur l’une des grandes feuilles d’une plante décorant le Berceau. Je me mis à soupirer, exaspérer par ma demi-sœur. Je regardais un peu son « chef d’œuvre » et je me reconnus. Elle s’était amusée à me peindre sur une feuille. Je me mit à rire et récupéra mon matériel. Évidemment l’Immortelle était introuvable pour le moment et je revint près de ma toile et me remit à ma peinture.