- Citation :
- "raconte le moment ou tu t'es enfuis de chez toi et que tu as compris en te voyant dans la rivière, que ta solitude commençais."
hrp : Bon ... j'ai fait un truc ... mais j'pense pas que c'était ce à quoi tu t'attendais :p Moi même j'm'y attendais pas...Tasphren se reveilla en sursaut, alerté par le bruit d'une conversation que tenaient deux femmes un peu plus loin sur l'étang. Elles ne l'avaient pas remarqué car il était caché par une broussaille dense et épineuse à quelques dizaines de pieds de sa position. Il faisait grand soleil et il dut se protéger les yeux à l'aide de son bras pour enfin apercevoir quelque chose. Il était au bord d'un étang entouré par une forêt clairsemée. De petits pontons répartis sur l'autre rive du point d'eau permettaient de pécher et quelques barques abandonnées agonisaient sur le rebord du petit lac, grignoté par le temps et l'humidité.
Durant un bref instant il oublia la raison de sa venue en ce lieu. Il oublia la mort de sa sœur et le coup porté par son propre père à sa hanche désormais très douloureuse. Mais dès qu'il se redressa pour se mettre à genou, la vive douleur qu'il ressentit lui rappela le malheur qu'il venait de vivre. Une larme perla sur le bord de son œil. Elle quitta sa paupière pour glisser délicatement jusqu'à la joue, avant d'atteindre discrètement le sol. Tasphren rampa jusqu'au bord de l'étang et s'aspergea le visage à l'aide de ses mains pour se revigorer un instant. La surface de l'eau était troublée mais son reflet flou lui semblais déjà bien étrange. Il semblais beaucoup plus bronzé qu'a son habitude. Plus il se regardait plus il semblait terrifié. Non c'était une sorte de dégout mélangé à une profonde incompréhension. Il se frotta les yeux plusieurs fois avant d'y croire et lorsque plus aucun doute ne fut permit, il poussa un léger cris qu'il s'empressa d'étouffer pour que les demoiselles ne l'entendent pas.
*Que ce passe t-il? que m'est il arrivé?* se demanda t'il frénétiquement.
Il se releva brusquement, ouvrant ses plaies à la hanche. Il poussa alors une complainte brève mais sonore qui éveilla l'attention des femmes en train de remplir leurs sots. Il se rendit compte de son erreur lorsqu'il arrêta d'entendre leurs voix.
Il tendit l'oreille.
-A tu entendu? commença la femme potelée à la robe verte
-Non. Qui a t'il? répondit la seconde. Elle était pour sa part vétu d'une robe pourpre dans un corps svelte et filiforme. Il était incontestable que ces femmes étaient trop bien habillées pour être pauvres et qu'elles étaient d'ailleurs trop bien habillées pour qu'elles eurent à chercher elles-même leur eau pour le foyer.
-Il m'a semblé entendre un gémissement, peut-être y a t-il quelqu'un de blessé dans les environs ! continua la grosse femme.
-Ne raconte pas de bêtise voyons, il n'y a personne a des kilomètres à la ronde !-Je vais voir.La femme en vert s'approcha dangereusement de la position de Tasphren. Celui-ci tenta de fuir mais bouger lui causait de terribles souffrances. Il opta pour la solution de facilité et se cacha dans un buisson, en espérant de tout son être que la femme n'irais pas fouiner avec insistance.
Elle arriva dans la clairière où il s'était réveillé, il remarqua alors qu'il avait laissé une belle trace de sang allant de sa position à son reveil jusqu'à sa cachette en passant par la rive de l'étang et son poste d'observation. Il était fichu. Elle le trouverai et l'écorcherai comme son père avait tenté de le faire quelques heures plus tôt. Si un membre de sa propre famille n'avait vu en lui qu'un monstre assoiffé de sang, qu'en serai il pour ces bonnes femmes innocentes et sans histoires? Il fremissa et tenta la seule chose qu'il lui restait à faire.
Il révéla sa position à la demoiselle et tenta de lui faire peur en rugissant et en agitant les bras de manière incohérente. La femme écarquilla les yeux mais ne dit mot. Au contraire, il semblait qu'elle souriait. L'instant d'après, tout devînt noir.
Il se reveilla ... à nouveau... , attaché a un arbre. Des roulottes en bois étaient disposées en cercles et certains individus travaillaient leurs numéros de cirque. Il avait été enlevé par une caravane d'artistes itinérants. Hier encore, cette aventure l'aurait fait sourire car il aimait beaucoup les numéros de cirques, mais à présent qu'il était lui même une attraction de par sa laideur, il trouva la situation dramatique et désespérée.
Il repéra les deux femmes qu'il avait espionné plus tôt dans la journée; elles étaient en pleine discussion avec un saltimbanque ou quelque autre artiste du genre.
-Gawen, commença le saltimbanque en parlant à la grosse femme,
tu as fait une belle prise dis moi ! Avec ce je-ne-sais-quoi nous allons faire fortune ! J'ai de grand projet pour lui. Sais-tu s'il connais notre langue?-Je n'en sais rien, il m'a semblé qu'il ne savait que rugir bêtement sur le moment. poursuivit t-elle sans conviction.
Il n'a pas l'air très effrayant, il faudrait peut-être le tuer tout de suite et l'empailler, ça fera une bouche en moins à nourrir.-
Tout à fait d'accords ! Je n'arriverai jamais à trouver le sommeil si je sais que cette monstruosité rode dans les parages ! ajouta la seconde femme.
S'en était assez pour Tasphren, il était certain de mourir s'il ne faisait rien. Il tenta de défaire ses liens mais ceux-ci étaient bien serrés, ce qui rendait sa tache plus ardue. Cependant sa métamorphose avait fondamentalement changé la forme de son corps et bien qu'il avait encore la silhouette d'un homme, ses poignets étaient maintenant plus fins que ses avant-bras, ce qui lui permit de se détacher rapidement. Il se faufila discrètement dans les broussailles et disparut. Quelques secondes après avoir quitté le camps il entendit au loin les cris du saltimbanque
"Voila t'es contente maintenant? Plus de bouche à nourrir, mais plus rien a se mettre sous la dent ! Ce machin était notre dernière chance ! Rattrapez moi cette bête."Tasphren constata par les sons étouffés du campement qu'il était assez éloigné pour courir en grandes foulées et continuer de distancer les artistes. Par chance, ses assaillants l'avaient pansé durant son sommeil ce qui lui autorisa une course à plus vive allure. Il courrait d'ailleurs incroyablement vite pour un humain, tribut plus qu'insuffisant face aux transformations physiques qu'il avait subit.
Il atteignit rapidement la lisière de la forêt et se retrouva dans un grande plaine vide parsemé par endroits de quelques vallons lissés par le vent. Il accéléra encore afin d'être caché par l'un de ces vallons.
Caché par la colline, il s'allongea dans l'herbe et reprit son souffle.
En l'espace de quelques heures, il avait été attaqué par son père et enlevé par des gens du voyage. Tout ça uniquement parce qu'il était poilu et différent. Le jeune homme versa une fois de plus quelques larmes qu'il sécha aussitôt, comme si c'était un crime d'avoir du chagrin.
Il était seul à présent, seul à décider de son destin, livré à lui même pour survivre. Il savait qu'il ne pourrait plus vivre parmi les siens dans l'état actuel des choses. Il ne voulait pas retenter l'aventure. Deux échecs lui suffisaient. Il se demanda comment sa rencontre se serait passé s'il avait tenté de parler aux dames plutôt que de les effrayer sans succès.
Il se plut à réécrire l'histoire en imaginant qu'il était accueillit par ces dames tout à coup devenues gentilles, qu'elles l'auraient aidé à revoir son père pour qu'il lui explique tout, qu'il lui raconte sa rencontre avec l'étrange femme et qu'il s'excuse de n'avoir pu sauver sa soeur du monstre qui l'avait entamé. Il voulu tout changer dans sa vie, et remonter jusqu' avant la mort de sa mère. Il savait qu'elle l'aurait reconnu sous son apparence bestiale. Une mère peux sentir ces choses la.
Mais il était trop tard à présent. Sa mère était morte, sa sœur était morte, son père avait tenté de le tuer et il était sans doute recherché dans toute la région pour un meurtre qu'il n'avait pas commis.
Une rancœur s'installa vis à vis de son père qui l'avait chassé. Il avait surement dit à tout le monde que le monstre - c'est à dire Tasphren - avait tué ses deux enfants...
Il était impossible pour lui de retourner chez lui. Il était tout aussi impossible qu'il revive parmi les hommes vu la mésaventure qu'il venait de vivre. Non, il ne restait qu'une seul chose à faire, vivre seul, loin de tout.
L'idée ne l'enchantait pas, mais il n'avait aucune autre alternative...