Il y a un mois, un nouveau carnage.

Comme toujours, fidèle à tes principes, tu partis dans les froids jardins de la mort. Qu'ils sont tristes ces champs de batailles, répandant leur morts sur des centaines de mètres. Charognes pullulent et peu de monde sont là pour s'occuper d'eux. Les victoires ou défaites se décident, mais personne ne statue sur ceux qui y sont restés. Il faut attendre des années et l'aide naturel du temps pour avoir des réponses. L'odeur, elle, reste, flotte et effraye les voyageurs, plus encore depuis l'arrivé des damnés, ces vils adorateurs. Ils se sont perdus, ils ont renié celui qui leur avait donné la vie. Pourquoi ? Par simple peur. La couardise était donc là un motif essentiel de ceux qui suivent Nayris.

Tu étais donc là et las. Perdais-tu la foi ? Bien sûr que non, mais il était difficile de dormir la nuit, lorsque ces continuelles visions de mort et sang venaient te hanter. Tu étais un elfe, plus philosophe que la plupart des autres espèces arpentant le monde, mais tu sentais la morosité te guetter. Mais si tu n'aidais pas ces âmes en peine à rejoindre le voile, qui le ferait ?

Ton aigle virevolte vers toi et se met à glatir : tu sais pertinemment ce que cela signifie. Peut-être que boule de plumes n'est pas si inutile que ça ? Bref, ce signal est clair : des adorateurs sont proches et tu n'es plus en mesure d'accomplir ta mission. Tu n'as ni le nombre, ni la force de les affronter. La neige couvre le sol, tu pourrais à peiner utiliser de pauvres ronces, bien peu de chose pour arrêter des hordes mortes et donc insensibles à la douleur.

Tu t’éclipse donc loin de ce combat. Non loin, un petit hameau accueille sûrement les vainqueurs, tu ne sais pas si ce sont des démons ou des rebelles. Et tu ne veux pas t'y mêler. Tu trouves une bâtisse où loger la nuit, tu ne perds pas de temps et tu files te reposer, tout en commandant un repas chaud. Tu n'es pas du genre salade et nature, tu dois avoir des forces et tu manges donc ce que les autres prennent, à la différence que, oui, tu ne bois pas une bière, mais une eau. Tu te moques de sa fraîcheur car tu ne tardes pas à la purifier avant de la boire.

Au petit matin, tu te levas et tu cherchas le lieu de culte. Celui-ci allait-il tenir ? Allait-il être profané ? Tu n'en savais rien, mais tu préférais en profiter avant que les choses dégénèrent. Tu te mis à prier, comme tu le faisais toujours lorsque soudain, tu reçus un écho dans ton cœur, dans ton âme. L'espace d'un instant, tu te crus mort, ou réellement en vie, c'était étrange à définir, tu ne vis que du blanc, une douceur semblait t'envelopper, te faisant oublier le tourment de ton corps éreinté.

Tu te sentais étrange et étranger, mais à la fois tellement familier. Tu ne sais pas exactement si c'était lui, mais qui d'autre que lui aurait pu être représenté par une si intense lumière ? Tu crus entendre des mots, ou bien était-ce des fantasmes qui prenaient vie dans ton esprit ? Toujours est-il que tu es convaincu de la pertinence de ces paroles : Il, Yehadiel, t'a choisi pour le représenter parmi les vivants, pour combattre l'infamie. Et plus qu'un souhait, il t'a armé pour lutter.

Bien sûr, ton esprit s'était éclairé, retourner au monde après cela, c'était le voir sous toutes ses imperfections, sous tout ce qui faisait qu'il était terriblement humain. Mais c'était également sa beauté, car dans la faiblesse de la chair, chacun essayait de se transcender. D'autres transgressaient l'ordre naturel des choses et la faiblesse de la chair devenait la nécrose de celle-ci. C'était à toi de les châtier. À toi seul ? Non, tu n'avais pas cette prétention, mais tu faisais à présent partie d'un tout.

Pourtant arpenter le monde des hommes n'était plus aussi aisé. Toi qui marchait avec mélancolie avec tant d'émotions ternies, tu le voyais sous toutes ses couleurs et sous toutes ses décadences, tu ressentais ce que les autres ressentaient, c'était à devenir fou. Tu aurais eu envie que tout s'arrête, tu avais le sentiment qu'un peu plus et ton cerveau explosait.

Mais tu ne pouvais croire que ton Dieu t'avait choisi à la légère. Et donc tu combattis avec toute l'ardeur que tu avais cette folie naissante. Il te fallu apprendre et cette fois, de manière autodidacte à contrôler ce don. Car il n'y avait personne pour te donner la main.

Cela avait bouleverser ta vie, bien sûr. Car à présent, tu avançais en sachant que tout ce que tu avais cru était vrai. Comme tout un chacun, il y a une partie de doute, mais la raison et la foi ont toujours été plus forte. Tu ne savais pas si tu avais été récompensé ou si ton destin avait toujours été celui là, mais tu étais fier, mais en rien arrogant. Tu pouvais reprendre la route des morts avec plus de confiance et avec une "envie" renouvelée.

» Viens, Iera. Nous sommes jeunes alors ne perdons pas notre temps ici, nous sommes des personnes de terrain et nous avons une destinée à accomplir. Nous ne sombrerons pas, Iera. Aujourd'hui nous combattons, demain, nous éclairerons.