Le dîner était animé, une grande variétés de plats se renouvelaient régulièrement, les serviteurs allaient et venaient entre la grande salle et les cuisines, un orchestre jouait doucement une musique couverte par les discussions des invités. Sinan jeta un regard satisfait sur le résultat d’une longue organisation, impliquant un choix rigoureux du personnel et des convives. Il y avait là de nombreuses familles à la tête de duché, quelques marquis et comte importants, un gratin de richesse et pouvoirs, principalement de Terre, mais aussi de l'étranger. Parmis eux, des vieux auxquels l’ont ne portait d'intérêt que pour leur succession, des jeunes fils de famille qui se provoquaient en duel à toute occasion pour mieux prouver leur supériorité, quelques rares femmes qui avaient sut faire leur place dans ce petit monde clos par leur intelligence, leur force de caractère, leur autorité, ou plus simplement leur charme.
- Et on dit qu’il s’est fait renversé par un petit baron! En moins de deux semaines, c’était plié, tout était sous le contrôle de ce roturier!
- Oh là, c’était un baron tout de même. Si nous ne gardons pas un minimum de solidarité entre nobles, dans quelques années on se fera détrôner par des paysans!
- Comme tu veux, un baron, mais le problème est pas là! Où a t-il trouvé ses armes et ses hommes pour se retourner contre son duc? Si il y est arrivé, qu’est ce qui empêcherais nos barons d’en faire de même?
- Bah, les miens sont tous mariés à mes filles, mes petites filles, mes cousines, … ! Il ne ferait pas ça à leur beau-papa!
Rires amusés mais contrôlés, il ne faudrait pas tomber dans la grossièreté des hommes de taverne.
Un main se pose sur l'épaule de Sinan qui se retourne vers le nouveau venu.
- Sinan? Non, c’est toi? ça alors!! On m’avait dit que tu te conservait bien, mais pas à ce point! Combien d’année derrière toi maintenant?
- Olver! Tu n’aurais pas quelques heures de retard par hasard? 59, 59 années derrière moi!
- Et autant devant toi vu ton état! Dis, j’ai entendu dire que la fille de la marquise d’Ivonimalk s’était entiché d’un jeune marechal ferrant… Au point que plus personne ne souhaite l’epouser tant cet episode l’a plongée dans la honte… Marquise sans époux, sans fils, une fille sans avenir, plus de decendance…
- Mmm… Tu n’arrives jamais sans une bonne nouvelle toi! Tu penses que la Province peut tomber?
- Facilement, le duc des lieux, Trium est occupé par quelques problème sur notre frontière commune.
- Tu espère récupérer la province?
- Non, non, il n’y a rien d'intéressant la bas, plus de dettes qu’autre chose. Mais si on pousse Trium a confisquer la province pour la confier à son fils… Héhé, il lui faudra encore plus année avant de comprendre le bourbier que c’est, et une éternité pour réussir à en sortir!
- Ma foi, j’en suis! Quand est ce qu’on peut… Oh, Blanche! Viens ici s’il te plaît! Je te présente
- Olver de Mitrim, il me semble l’avoir déjà rencontré, il y a plusieurs années. Coupa la jeune femme en s’inclinant respectueusement devant l’ami de son père.
- Il y a 9 ans de cela, il me semble. Vous étiez déjà une ravissante enfant, et les années passée vous ont donné bien des beautés
- Il y a dix ans, pour être précise. Et ces mêmes années ne vous ont pas atteint. Elle ne lui laissa pas le temps de savourer le compliment et enchaîna;
- Dans quelle manigance êtes vous en train d'entraîner mon père?
- Aucune! Votre père est bien trop droit, et trop peu influençable pour me suivre dans ses choses là.
- Il aura peut être du mal à vous y suivre, mais jamais à vous y entraîner!
- Blanche…
- Pardonnez moi, je crois que mon père me fait signe que je remet en cause l'éducation qu’il m’a donné. Pour épargner son amour propre, il est temps que je me retire.
Elle disparut dans foule, sous l’oeil amusé des deux hommes.
- 18 ans de travail sur son caractère, et plus que deux ans pour en faire une jeune femme convenable!
- Deux ans? Tu la marie dans deux ans?
- Non… Sinan baissa la voix. J’ai obtenu d’une mage une protection sur elle. Dans deux ans, le temps de l’atteindra plus.
- Elle le sait?
Sinan monte les grands escalier du château, s'éloignant peu a peu des bruits et des odeurs de la fête. Celle-ci durera encore longtemps, mais lui n’y retournera pas. Il y a des chambres prêtes pour ceux qui viennent de loin, les autres retournerons sur leur terres dans leur carrosse quand il le souhaiterons. S’approchant de la suite de Blanche, il tend l’oreille.
- Et je vous dis, messire, que je me moque éperdument de la façon dont vous maltraitez vos serviteurs! Il n’y a aucun courage dans ces choses là, aucune gloire, et cela ne prouve en rien votre noblesse, sinon dans la hiérarchie des orgres du marais de la désolation qui vous couronneraient certainement roi de la prétention!
Un jeune homme sortit de la pièce en traînant les pieds, son amour propre brié. Tombant né à né avec Sinan, il perdit toutes ses couleurs sous le regard glacé du Duc.
- Dehors.
L’accusé déguerpit sans protester. Sinan frappe à la porte doucement.
- Inutile de refaire une entrée en espérant que j’ai oublié la première! Sachez que les dames ont ici plus de mémoire que les Trollesses de vos marais, Ô Noble roi des puanteurs prétentieuses!
Son père sourit et poussa la porte.
- Oh, Père, excusez moi…
- Excuses accordée
- Et excusez vous d’avoir des invités aussi peu raffinés que cette caricature d’être pensant sans esprit!
- Blanche, son père possède un duché des plus important de Feu, essaie de ...
- J’essaie! Pourrait-on parler d’autre chose? Ce sujet me contrarie.
Sinan s’assit sur le lit de sa fille et la regarda un instant sans rien dire. Une coiffure soignée qui lui dégageait le visage tout en laissant ses cheveux flotter sur ses épaules et descendre en cascade dans son dos, encadrant un visage au trait fin, sortie de l’enfance, qui s’accordait à son caractère: on pouvait y lire son audace, sa fraîcheur, son tempérament malicieux, … tandis que ses yeux brillaient de conviction, emplis de rêves. Elle se tenait droite, majestueuse et noble, bien qu’elle semblait en décalage avec les lieux. Sa noblesse était plus sauvage que les conventions qui régissaient toute la vie de château. En témoignait la blancheur de sa robe, dont la simplicité tranchait avec la lourdeur des tapisseries, et qui achevait de faire la beauté de cette jeune femme; une fille attachante et intouchable à la fois.
- Ferme les yeux.
Après une infime hésitation, elle obéit et tendis les mains, sachant parfaitement ce que son père souhaitait faire. Depuis plusieurs génération, la famille d’Ouhi avait pris l’habitude d’apprendre à communiquer selon un langage muet, en transcrivant la langue orale et écrite dans des signes fait à la main. Cette forme de communication avait de multiples avantages et on l’utilisait principalement pour “parler” avec sérieux, insister sur un engagement, remercier, faire des demandes importantes, …
Les yeux clos, Blanche lisait avec ses doigts les mots qu’exprimaient les mains de son père.
“Vie plus longue que les tiens, enfant figée dans sa jeunesse”
A son tour, elle répète silencieusement entre les mains du Duc
“Vie plus longue que les tiens, enfant figée dans sa jeunesse?”
“Le Temps pense différemment sur nous” Explique t-il pour replacer un contexte. Elle reste immobile, impossible de savoir si elle a compris ou non, si elle souhaite en savoir plus ou non.
“Trois fois plus de Temps dans ma vie. Tu es libérée du Temps”
Un petit tremblement dans les mains de Blanche. Face à face, les yeux clos, le père et la fille en silence.
“Destin?” Demande t-elle enfin, traduisant de son mieux “pour quelle raison?”.
“Toujours respecter le passé de la Famille, toujours protéger le futur de la Famille” Répond Sinan en citant la devise familiale; il a besoin de s’assurer que quelqu’un de son sang prendra la suite à la tête du duché.
Elle resserre ses doigts sur ceux de son père, sans la moindre affection et signe sèchement le mot suivant, avant de sortir de la pièce sans un mot.
“Egoïste”
Resté seul, le Duc fronce les sourcils, intrigué. Il ne comprend pas ce qui n’a pas fonctionner. Est-ce un mal d’être égoïste?
D’un haussement d’épaule, il chasse ces questionnement et se dirige vers sa chambre. il doit être en forme pour retrouver Olver demain et préparer leur petit complot. Quand à Blanche finira bien par comprendre. A moins qu’elle ne soit vraiment très égoïste.