[Terminé]Affaires au milieu de la tourmente | |
| Aller à la page : 1, 2 | Dim 2 Fév - 19:10 | | | | La situation présente était de ce genre de moments qui laissaient peu de temps à la reflexion ; repousser la gnolle lui paraissait-être l'idée la plus adéquate avec ses valeurs, mais son expérience lui avait appris qu'il valait mieux mettre de côté ces dernières, parfois. La main, au poil aussi doux que piquant, enserrait sa mâchoire doucement comme l'avaient déjà fait de nombreuses avant elle. Néanmoins, elle hésitait bien plus à mordre les doigts taquins de celle-ci, pourvue de griffes qui avaient déjà fait leur oeuvre. Dans les yeux sournois de la créature, elle devinait des envies que ses propos ne cachaient pas, elle tournait les mots à son avantage, jouait de son physique et de son aura sauvage pour asseoir sa domination. Thaja n'avait qu'à se taire et jouer le jeu, ou lutter et payer les frais de son caractère, mais toute résistance qu'elle offrait était un peu plus de plaisir pour Leuffa Shteinguell. Si la matronne avait été une humaine, Thaja aurait encore pu trouver son intérêt, quelque part, mais les crocs, les griffes, et tout ce qui éloignait de sa nature la gnolle étaient des aspects qui la dégoûtaient bien trop pour qu'elle joue le rôle qu'on attendait d'elle. Soufflant, elle relâcha la tension qu'elle avait accumulée, abdiquant comme les lapins avaient toujours finis par faire après une heure à lutter contre les pièges qui leur coupaient les pattes.
« J'irai dormir si j'étais vous ; demain risque d'être une journée froide et pluvieuse. »
Elle avait lancée cette phrase tout en jetant un regard triste vers la fenêtre sur laquelle s'abattaient des dizaines de gouttes lourdes et bruyantes. Elle resta figée ainsi, un moment, en proie au doute, à des sentiments qui lui donnèrent envie de hurler, puis, quand enfin elle considéra bien la chose, elle se releva, saisit son assiette et l'envoya brutalement contre la gueule de la gnolle. Les idées s'étaient de nouveau mélangées violemment en elle ; sa fierté l'avait poussé à agir, et l'adrénaline qui circulait à présent dans ses veines la faisait tenir droite, digne des enseignements de son père qui ne l'avait jamais quittée. Que cette chienne aille au diable, qu'elle et ses ancêtres crèvent dans l'oubli !
« Agnès ne m'a pas demandé de jouer à tes jeux débiles, sale hyène ! Plutôt crever que de me laisser toucher par tes sales pattes ! »
Elle avait hurlé et murmuré à la fois. Ses mots étaient gorgés d'une haine pour la femme animale, et tout ce qu'elle représentait. Tant d'insultes auraient pu sortir de la bouche de Thaja à ce moment, et l'envie ne lui manquait pas, mais elle s'était contentée de se tenir droite et fière, pas encore sûre de l'impact qu'avait eu l'assiette à présent en morceaux. Les jambes fléchies, les yeux soutenant le regard féroce de la gnolle et la main serrant son couteau, Thaja faisait face. Tout dans ce monde avait disparu dans les ténèbres de la nuit, il ne restait plus que la silhouette animale qu'elle repoussait, qu'elle voulait à tout prix tenir loin d'elle. La machine était lancée.
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Lun 3 Fév - 16:13 | | | | Toute finaude qu'elle se pensait, Leuffa ne vit pas le coups venir. Non qu'il y ait eu des signes avant-coureurs : un instant la servante était tranquillement assise à la couver avec des yeux de chienne battue, l'autre la gnolle se retrouvait avec le museau endolori et couvert de jus de viande. Non pas qu'elle n'eut pas cherché à trouver le point de rupture moral de l'humaine, mais elle ne s'attendait pas à ce que le résultat de son investigation soit aussi spectaculaire. La bris de l'assiette au sol interrompit son moment de stupeur à la façon d'une bulle qui éclate. Elle eut soudainement une conscience aiguë du ronflement du feu à ses côtés, du tambourinement de la pluie sur les vitres de la chambre... et du regard que Thaja portait sur elle. Du dégoût, de la peur primale, de la haine qu'elle éprouvait, pauvre petite créature faible et quasi-imberbe face à son prédateur. Ses yeux prirent la dureté du jade dont ils avaient l'éclat tandis qu'elle fixait la femelle qui osait la menacer. D'un geste lent, elle déposa son écuelle presque vide au sol puis se leva avec la fluidité d'un fauve qui s'étire, la dominant d'une bonne tête. Puis elle fit un unique pas en direction de l'outrecuidante, les muscles déjà gonflés par l'afflux d'adrénaline qui galopait dans ses veines.
- Hyène, répéta-t-elle dans un grondement sourd.
La gnolle fit un second pas, écartant cette fois légèrement les bras du corps. Le feu de la cheminée, hérissant le contour de sa silhouette de reflets fauves, rendait plus perceptible encore l'intensité de son regard ainsi que la cruauté de ses courtes griffes.
- Tu oses me comparer... à un animal ? Toi qui n'as même pas même pas la fierté d'une chienne ?
Un autre pas, destiné à faire reculer Thaja vers le mur. Leuffa ne regardait même pas le couteau, se contentant de planter ses yeux dans ceux de la femme de chambre.
- Une chienne qui aboie mais ne sait pas mordre. Qui n'attend que d'être saillie que par le plus fort mâle de la portée.
Les jambes arquées de la-femme-bête se plièrent imperceptiblement, ses babines se retroussèrent puis elle bondit. Un instant plus tard, elle agrippait la servante et la plaquait dans contre le mur se trouvant derrière sa victime en poussant un grognement d'attaque. Mais pas n'importe comment : sa main droite s'était immédiatement refermée sur la gorge de la rousse en un véritable étau de muscles et de poils mu par une unique volonté de ne laisser passer ni son ni air, que ce soit dans un sens ou dans l'autre. La gauche quant à elle s'était refermée sur le poing tenant le couteau, et s'était mise à serrer de plus en fort, comme si elle cherchait à briser les os en même temps que la garde de l'arme improvisée. Fermement campée sur ses jambes torses, la gnolle pesait de tout son poids pour maintenir sa proie plaquée contre le mur, tandis que son visage n'était plus qu'un faciès de mort ricanante.
- Les... animaux... n'ont pas droit... à la parole. Les... chiens... domestiques... n'ont pas droit... à des crocs !
Un craquement se fit entendre.
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Mar 4 Fév - 22:25 | | | | Thaja tenta de hurler, mais sa gorge comprimée ne lui autorisa pas un son, pas une seule bouffée d'air. Plus elle luttait contre la bête qu'elle avait enragée, et plus son monde sombrait dans les ténèbres, la douleur gémissante de son bras droit se dissipant au profit d'une perte de sa conscience. Puis, quand ses pensées furent si nébuleuses qu'elle en oublia les raisons de sa présence et le lieu où elle se trouvait, un craquement, et un relâchement au niveau de son cou, la réanimèrent des tréfonds de son esprit. Elle inspira violemment l'air chaud de la pièce et, tout en expirant, hurla de douleur, ses jambes ne supportant plus le poids de son corps rompu. Glissant le long du mur, de chaudes larmes coulant sur ses joues, elle se recroquevilla aux pieds de la bête, soutenant son poignet brisé de sa main gauche, tremblante. La gnolle avait été bien trop forte pour elle, et elle s'éteignait comme toutes les proies que son père avait tuées sous ses yeux d'enfant autrefois, misérable. S'il la voyait... que penserait-il d'elle ? « Acharne-toi... tu ne sortira jamais d'ici vivante... tu n'as pas la moindre idée d'où tu es... les miens te dépèceront dès qu'ils sauront... et Agnès ne pourra plus rien pour toi. » Des mots lancés avec difficulté, et une menace réelle. Leuffa était l'invitée de la reine et même si aucune des filles de cette dernière n'aurait l'infidélité de trahir la gnolle, la poignet brûlant et craquant de Thaja était un signe qui ne tromperait pas les regards curieux. Reprenant son souffle petit à petit, l'humaine se redressa contre le mur, mais toujours au sol. Sa robe démise, sa peau marquée par endroits de bleus et ses yeux rougies par les larmes, elle avait néanmoins conservé dans ses prunelles une détermination qui lui était propre. Provocante, elle retrouva de ses mêmes airs d'insubordonnée et lança sur les hautes courbes de la femme qui la dominait un regard de défi. ~ ~ ~ Ysabelle se frottait la joue doucement en montant les marches des escaliers qui menaient à sa chambre, qu'elle avait quittée plus tôt dans la fin de journée à Agnès et son invitée. Fine silhouette au physique atypique dans les Glaces, elle se déplaçait dans les couloirs avec une aisance qui ne trahissait que trop bien sa connaissance des lieux. Depuis ses quinze ans, elle vivait ici... et si la roche et la pluie ne lui inspiraient aucune sympathie, elle retirait de son service un plaisir immense qui parvenait à combler ses désirs irréalisables. Agnès Felina Wallah était celle qui l'avait sauvée, élevée et l'aimait, autant dire le seul être humain sur cette terre qui lui ait jamais manifesté la moindre compassion, et cet être de lumière qu'elle aimait servir dans son ombre l'avait, ce soir-là, giflée. La douleur qu'Ysabelle éprouvait était bien plus émotionnelle et mentale que physique, mais elle persistait à se frotter la joue de sa manche comme si ce sentiment de brûlure allait disparaître. Mais rien n'y faisait. Les mots avaient résonnés en elle, faisant vombrir son coeur de peine et gorger ses yeux de larmes aussi lourdes que les gouttes de pluies glissant sur les vitres qu'elle passait. A présent lavée des marques de sa tristesse, elle s'était présentée face à la porte de bois épaisse qui emprisonnait sa chambre dans un silence mortuaire, hésitant à toquer de son petit poing sur la surface dure et froide. Entourée des éléments furieux, le fantôme qu'elle était parfois trahi par un éclair inquisiteur qui dévoilait sa silhouette dans les ombres du corridor, elle se lança finalement, repassant en boucle dans sa tête les paroles qu'elle préparait depuis une dizaine de minutes. « Madame Shteinguell ? »
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Sam 8 Fév - 9:04 | | | | Il s'en était fallu de peu pour que Leuffa ne tue d'une façon peu ragoutante l'insolente soubrette. Portée par une rage légitime de propriétaire lésé que son bibelot tente de le menacer avec une arme de fortune pour défendre son soi-disant honneur, elle avait serré des deux poings jusqu'à ce que quelque chose se brise dans l'étau de ses puissantes phalanges. Le hasard avait voulu que ce soit le poignet de la gourgandine qui se rompe en premier dans un craquement sec qui l'avait poussé à la relâcher et à la laisser glisser contre le mur comme un poisson dont on aurait ôté les arêtes. Néanmoins, elle fut agréablement surprise de constater que sa proie en avait encore suffisamment de tripes pour oser la menacer malgré la douleur : elle trouvait toujours plus gratifiant d'apprendre le respect à un esprit fort. Pliant les jarrets de façon à se mettre à son niveau, la gnolle fit mine de lui tapoter la tête comme à un chien affectueux quoique un peu long à la comprenette. Un sourire plein de crocs lui déforma la mâchoire, illuminé par la chute d'un éclair non loin.
- Après l'insolence et les grognements de bête, voici venir les jappements. J'ai comme l'impression que tu n'as toujours pas compris la leçon... alors je vais t'apprendre quelque chose, petite chienne en chaleur.
La main qui tapotait d'une façon faussement amicale la tête de la soubrette se contracta brusquement et enserra toute une touffe de cheveux roux, l'obligeant à tenir son occiput droit tandis que le museau de la gnolle s'approchait pour lui murmurer à l'oreille quelque paroles doucereuses.
- Je n'ai rien à craindre de toi, car tu n'es que la digne descendante d'une longue, très longue lignée de larbins. Larbins de cuisine, larbins de terre, larbins de plaisir... mais sais-tu ce qui est le plus amusant ? C'est qu'il est certain que mes ancêtres ont dû dresser les tiens et qu'au fond, tout au fond de tes jolies tripes roses, tu commences peu à peu à te rappeler du goût de leurs fers, du plaisir qu'ils avaient pris à les porter. Savoures-le. Il est là, juste... là !
Tandis qu'elle parlait, le poing libre de la gnolle s'était une nouvelle fois contracté en une boule de muscle qui vint sèchement se lover dans le creux de l'estomac de Thaja, venant ponctuer son propos d'un argument plus percutant. Elle relâcha sa prise capillaire et laissa sa proie se plier en deux dans l'espoir de reprendre sa respiration déjà hachée, puis s'affaira à quelques préparatifs. Tout d'abord, la gnolle s'affaira à déchirer rapidement le corsage et la jupe de la servante, puis se servit des hardes pour constituer trois jeux de liens aussi solides que chamarrés. Profitant de sa force supérieure, de son savoir-faire et de la sainte terreur que l'humaine devait ressentir, elle l'incita à ne pas se démener et à se courber suffisamment pour qu'elle puisse l'harnacher presque convenablement : elle la bâillonna, lui lia les pieds puis les mains jusqu'à être certaine de l'avoir réduite à l'impuissance. Il ne s'agissait certes là que d'un bricolage de fortune, et il lui était arrivé par le passé de se montrer plus artistique ou imaginative, mais elle se fit la réflexion que le sujet ne valait pas la peine de trop se casser la tête.
A présent passablement en sueur aussi bien à cause du voisinage de la cheminée, de l'effort fourni ou de la vue de ces rondeurs dévoilées (quoique trop glabres à son goût), la mère maquerelle soupira, jaugea son trophée ficelé d'un œil critique, puis haussa les épaules. Elle s'empara ensuite de sa chope de bière, s'aperçut avec désarroi qu'elle était vide, et se rabattit sur celle qu'avait amené le tendron en désespoir de cause, renversant une petite partie du breuvage à terre par mégarde. Ce n'est qu'alors qu'elle revint vers l'humaine et la fixa avec un regard qui en disait long sur l'amusement global qu'elle tirait de la situation.
- Bien, bien... où en étions-nous ? Ah oui, apprendre le respect dû aux supérieurs. Il semble que je m'y sois mal prise avec toi. Mea culpa et tout le tralala, il faut dire que je n'ai pas pratiqué depuis une paye... bref, tout ça pour dire que j'ai commencé trop haut, je vais donc reprendre par les bases avec toi et corriger cette attitude inadmissible, toute la nuit si il le faut ! Agnès ne pourra que me louer de cette initiative, j'en suis certaine.
Nous allons débuter par quelque chose de très simple, que vous autres imberbes infligez à vos propres petits. Si cela ne suffit pas, je me montrerai plus persuasive, et ainsi de suite jusqu'à ce que tu fasses preuve de la déférence que l'on attend de toi aussi bien envers ta maîtresse que des invités auxquels elle t'offre en pâture. Prête ? Alors commençons.
Crochetant d'une patte le pied d'un siège, elle l'attira près de la cheminée et le tourna de trois quart le dos à la porte. Ensuite, elle empoigna Thaja par les épaules et les hanches puis la souleva avec un faible grognement avant de faire quelques pas et de s'écrouler sur le fauteuil réquisitionné avec son colis sur les genoux. Leuffa se délecta quelques instants de l'odeur de sa peau humide de bête paniquée, leva la main droite comme un chef d'orchestre au commencement d'une symphonie... et l'abattit rapidement sur le derrière rebondi qui s'offrait à elle, l'égratignant au passage. Elle recommença sur des rythmes et des intensités variables, savoura les soubresauts de la servante qui ne devait plus savoir à quel saint se vouer, encore et encore pendant un temps infini.
Du moins jusqu'à ce qu'elle soit grossièrement interrompue par des coups frappés avec insistance à la porte. Peu décontenancée et ayant une excuse toute trouvée à portée de main, la gnolle asséna une ultime claque pour la beauté du geste puis ordonna à l'intrus d'entrer. Quelle ne fut pas sa surprise de constater en pivotant la tête qu'il s'agissait de la secrétaire de la reine, celle-la même qui lui avait tapé dans l’œil plus tôt.
- Oh, bien le rebonsoir. Isabel, c'est cela ? Ne prêtez pas attention au désordre, je vous prie. Thaja ici présente m'a proposé de me débarrasser d'une terrible "démangeaison" si je lui rendais d'abord une faveur d'ordre physique. Ma foi, j'ignorai que de telles pratiques avaient cours ici, mais je m'avoue assez mal placée pour juger... bref, que puis-je pour vous ? A moins que vous ne souhaitiez nous rejoindre ?
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Sam 8 Fév - 21:52 | | | | Ysabelle avait vu des choses dans sa vie, de belles comme d'horribles choses, et le spectacle qui s'offrait à ses yeux se situait entre les deux. Tout d'abord, elle resta interdite un très léger instant, ne refermant derrière elle la porte qu'àprès quelques secondes d'hésitation. Puis, vint la satisfaction, le plaisir de voir Thaja payer pour ses années d'arrogance et de condescendance. La grande salinéenne, si fière de sa chevelure de feu et de ses formes, était bafouée, ces derniers traités avec autant de respect que pour une chienne.
« Ysabelle, madame, avait-elle répondu, ses pupilles de jais dissimulant presque parfaitement la joie avec laquelle elle posait ses yeux sur la déchéance de Thaja. »
Son corps presque nu laissait apparaître des rougeurs et des bleus qui témoignaient des instants difficiles qu'elle avait eu, sans parler de son visage tordu par une foule de sentiments et d'émotions, et griffé. Dans le regard que lui jeta Thaja, Ysabelle pouvait y lire toute la haine qu'elle ressentait ; il était vrai que jamais elle ne s'était attendue à ce que son petit tour marche aussi bien, chose que n'avait pas ignorée Agnès, d'où sa présence.
« Je suis navrée de vous déranger, alors, mais Agnès réclame la présence de Thaja au plus vite. Une affaire urgente, vous vous en doutez, expliqua Ysabelle tout en se rapprochant à petits pas de la maquerelle. »
Thaja s'était arrêtée de trembler, son corps tendu ne réclamant qu'à être libéré. De ce qu'il restait de sa fierté qu'elle exhibait, elle valait moins qu'une esclave de Dahalia. Quinze années qu'elle et Ysabelle se cotoyaient aux côtés d'Agnès, et depuis toujours la métisse ne souhaitait que la voir disparaître. C'était elle qu'Agnès avait choisie, pas cette rouquine !
« Agnès a également insisté pour que je remplace Thaja, dit la brune une fois à quelques centimètres de la gnolle, ses petites mains se posant sur la chair en sueur de Thaja pour l'aider à se relever. »
Qu'importait les désirs et les souhaits de Leuffa Shteinguell, les ordres de la reine passaient avant tout, ainsi ne demanda-t-elle pas sa permission pour mettre sur pied la saliéenne et la défaire de ses liens. Thaja se saisit alors aussitôt de sa fourrure pour cacher sa nudité et les quitta sans demander son reste. Une fois disparue, elle laissa derrière elle la pièce dans ce même silence qu'avait rencontré Ysabelle avant de franchir le seuil de la porte puis, seulement alors, s'étonna du désordre total des lieux. Son attention se porta d'abord sur le sol et les murs, près de la cheminée, qui étaient tâchés par de la sauce, et quelques morceaux de viande et d'assiettes gisaient encore sur le parquet. Lorsqu'elle remonta sur la gueule de Leuffa, elle put comprendre que Thaja avait osé bien plus qu'elle ne l'en avait cru capable.
« Oh... je vais nettoyer tout ça, s'excusa-t-elle à la place de la rousse qui n'avait surement su que geindre et pleurer, à n'en faire qu'à sa tête, comme à son habitude. »
Ysabelle prit torchons et serviettes et essuya, sans plus atteindre qu'elles s'incrustent, les taches rougeoyantes et luisantes, rassemblant les haricots, la porcelaine et la viande. Rapidement, agilement, elle fit disparaître le plus gros du désastre efficacement, sous les yeux de la maquerelle.
« Vous êtes la première à avoir traitée Thaja comme elle le mérite, une bonne correction ne lui a surement pas fait de mal, se permit-elle tout en finissant son oeuvre. »
C'était osé, mais Ysabelle ressentait trop de satisfaction pour la garder enfouie, et si celle qu'elle précédait avait mis en rogne la gnolle, autant partir d'une meilleure base. Thaja ne devait sa survie qu'à ceux qui l'avaient toujours protégée, trop idiote et fière. Ysabelle, elle, avait fait beaucoup de sacrifices, et était capable de s'adapter à tous les esprits que cette terre portait. Si certains considéraient la maquerelle comme sadique ou cruelle, ils étaient à mille lieux de s'imaginer quels monstres vivaient en certains. A côté des démons de son enfance, Leuffa Shteinguell était un caniche avec quelques caprices.
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Lun 10 Fév - 11:00 | | | | L'apparition de la confidente de la reine donna lieu à un petit moment de flottement. Ayant fait son fond de commerce des réactions parfois aberrantes que pouvaient avoir les humains vis-à-vis de leur propre sexualité, Leuffa eut le temps de se demander brièvement si son mensonge éhonté était crédible. Tout allait se jouer sur la connaissance qu'aurait la prénommée Ysabelle des vices de Thaja et de sa définition du service qu'un serviteur était amené à rendre à une invitée royale... ou de l'inimitié que pouvaient se porter deux larbins à la personnalité aussi affirmée que ces deux-là. Réflexion futile, car même si la gnolle vit passer dans le regard de la brune quelque chose qui ressemblait à une lueur d'amusement, elle se contenta d'intervenir en douceur pour libérer sa "camarade", sans poser la moindre question ou accusation. Elle vit donc s'esquiver avec une pointe de regret mêlée de satisfaction le petit lot roux qui ne présentait quant à elle plus que l'attitude saine de la bête domestique craignant le fouet. Ne quittant pas son siège auprès du feu, Leuffa préféra continuer à savourer la paisible chaleur qui s'en dégageait tandis que la dévouée Ysabelle s'employait à faire le ménage. Du coin de l’œil, elle soupesa ses chances d'obtenir quelque service... mais, la baisse de l'adrénaline aidant, elle se dit qu'elle avait déjà probablement beaucoup forcé sur les limites de l'hospitalité de son hôtesse, et qu'une larbine aussi distinguée méritait de toute façon davantage d'égards de la précédente. Et puis elle lui plaisait, à ne pas mâcher ainsi ses mots !
- Je vous en prie, répondit-elle en secouant la tête avec modestie. Quand je peux mêler l'utile à l'agréable, je ne m'en prive pas. Était-ce vraiment l'unique raison pour laquelle vous êtes revenue, pour arracher une pauvre rouquine aux griffes de l'infâme monstresse à face de chien ? En ce cas vous avez eu tort : je gage que d'ici la fin de la nuit j'en aurais fait une petite chose adorable qui vous aurait mangé dans la main au moindre claquement de langue. Quel dommage... la vie est trop courte pour se laisser ennuyer par des problèmes domestiques, ne croyez-vous pas ?
La gnolle se mit à glousser, déployant une large denture.
- Notez cependant que je serais ravie de vous en débarrasser. C'est d'ailleurs une idée qui m'est venue en tête pendant que je barbotais : pourquoi est-ce que je ne pousserais pas la collaboration avec dame Wallah jusqu'à implanter une extension de mon établissement sur ces terres ? Je veux dire, dans une cité aussi froide et séculaire, il doit y avoir de la demande pour un peu de chaleur et de réconfort, non ? Si tel est le cas, autant que ce soit quelqu'un qui s'y connaisse, qui puisse garantir la salubrité des clients aussi bien que des employés. Si votre maîtresse s'est renseignée comme il se doit, elle sait que c'est déjà ainsi que je gère la Perle de Dravaas.
Leuffa leva le museau et fixa tranquillement Ysabelle, son sourire éclatant remplacé par une expression entendue, preuve de son sérieux.
- Ce serait également plus pratique pour nos rapports : si quelque chose clochait à Sen'tsura avec les types qu'elle compte m'envoyer, je n'aurais aucune garantie que mon message lui parviendrait en temps et en heure. Alors que si j'ai quelqu'un dont je sois sûre et dont dame Agnès puisse répondre, comme au hasard une certaine rouquine de notre connaissance... vous voyez où je veux en venir ?
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Jeu 13 Fév - 8:59 | | | | Ysabelle esquissait un sourire, d'une légèreté telle qu'il lui semblait naturel, mais ce n'était là qu'une des nombreuses mimiques que la servante avait empruntée à sa maîtresse. Tout en faisant son petit ménage, rendant à la chambre son éclat d'origine et un ordre plus appréciable, elle écoutait la gnolle avec une attention toute particulière. Jouant le jeu des sous-entendus que laissait planer la maquerelle, qui avait déjà cernée les envies et projets de la métisse, Ysabelle accueillait ses propositions d'un language corporel et gestuel délicat. Leuffa Shteinguell avait des projets, et il aurait été idiot, voire déplacé, de penser qu'un tel animal économique, profiteur et sournois dans tous ses aspects puisse n'être venu que pour quelques saltimbanques et produits exotiques. A la fois rassurée et fière que l'invitée royale ne porte pas les mêmes considérations envers elle que pour la rouquine, Ysabelle se laissa, à la fin de sa tâche, glisser le long du dossier d'un des fauteuils entourant le feu pour animer de son avis, tout en rassemblant la vaiselle, les braises du débat qu'avait déjà entamé Leuffa avec le prince Alrik.
« Soyez certaine que je serai la première ravie qu'un tel établissement voit le jour à Cardrak ; du bien qu'on dit du vôtre, et de ce que j'ai pu voir ce soir, nos deux partis en seraient grandis, assura la jeune femme, ses fins doigts agiles regroupant en un petit tas intelligent les contenants vides et couverts, silencieusement. Seulement, ma maîtresse n'est pas seule responsable de la vertu de nos filles, mais c'est le peuple de Saline qui s'oppose à de telles pratiques, en général. »
Ysabelle se leva du siège en même temps qu'elle ramenait au centre de son mélange de porcelaine et d'argent le dernier couteau, affichant toujours un sourire poli mais néanmoins réellement ravie des idées qu'avait élevées son interlocutrice. Bien entendu, tout cela relevait de la fantaisie et d'un projet que seul un esprit étranger aux valeurs et normes cardrakiennes avait pu ériger, mais l'ensemble était plaisant et suffisamment séducteur pour permettre à l'humaine de sourire sincèrement. Comme à l'accoutumée, elle se déplaca par derrière Shteinguell pour ne pas lui couper la chaleur des flammes, toujours aussi légère et discrète. En quelques mouvements rapides et efficaces, elle vida le bain tiède en remplissant les seaux métalliques à disposition, qu'elle porta dans le couloir, permettant l'espace d'un instant au vrombrissement naturel et constant du pays de s'immiscer et détruire la tranquilité du lieu.
« C'est peut-être moi qui ai mal compris, et j'oserai alors accuser la célébrité de votre établissement, mais pourquoi ne pas, pour commencer, proposer comme le font certains des nôtres, une auberge ? L'idée est simple et basique, mais le peuple de Saline l'est d'autant plus. Et, pour être sincère, je suis certaine que nous n'auriez aucun mal à faire concurrence à celles que vous avez eu l'occasion de croiser. Avec un peu de patience, et de chance, vos projets pourraient bien se concrétiser à la longue ? avança en toute modestie Ysabelle, se rapprochant de la gnolle, toujours assise dans son large fauteuil. »
Dans l'ombre du mobilier qui la cachait des flammes, Ysabelle déplia une des serviettes propres rangées dans une des quelques commodes de la pièce. Aussi légère et discrète qu'un chat noir dans la nuit sombre, elle sépara un peu plus la distance qui la séparait de la tenancière, ses pieds effleurant le tapis comme le vent glissait sur les vagues, au dehors. Finalement, elle sortit des ténèbres pour être frappée par la chaleur des flammes, se tenant sur le côté droit de Leuffa Shteinguell, sa serviette se rapprochant du museau de la gnolle pour la débarasser des quelques restes de ses ébats avec Thaja. Tout en demandant l'autorisation d'un mélange subtil du geste à la parole, l'humaine vint assainir le poil empoissé de la maquerelle de quelques mouvements doux mais précis, ses yeux brillant d'une intensité qu'on aurait prêtée à un peintre.
« Agnès est un femme sensée, madame. Elle sait saisir les opportunités lorsqu'elles se présentent, et n'est pas de celles qui vous trahiront. Elle m'a demandé d'ordonner à un homme qu'il vous réserve la vente de sa pêche, dont les fameux oeufs qui composent votre skuuma. Je dirai que vos chances d'établir un lieu tel que vous le concevez dépendront du prix que vous en donnerez. »
Ysabelle termina sa phrase au moment où sa serviete finit son oeuvre. Satisfaite de son travail, Ysabelle alla poser sur un des plateau qu'avait ramené Thaja la vaisselle qu'elle avait rassemblée. Ses gestes lents et calculés, voulus dans l'attente des décisions de Leuffa.
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Jeu 13 Fév - 15:51 | | | | Sans faire mine de bouger le moindre orteil hors de sa confortable place devant la cheminée, Leuffa avait observé d'un œil plus qu'amusé le véritable ballet qu'effectuait Ysabelle dans la pièce, véritable fée du logis en sus de ses autres qualités. Cela laissait-il transparaître une compétence à faire disparaître des faits ou même des cadavres encombrants ? Peut-être, mais dans ce cas ce ne devait pas être elle qui devait donner la première main à l'opération : elle était certes assez douée pour ne pas laisser apparaître ses sentiments lors d'un échange d'idées raisonnables, mais elle n'avait ni la désinvolture ni même l'odeur d'une tueuse de sang-froid. Il serait surprenant qu'elle soit autre chose qu'une sbire dévouée ou une confidente. Probablement moins que ce qu'elle souhaiterait être et qu'elle ne serait jamais.
- Ce n'est pas sot, dit la gnolle en hochant la tête. Plus j'en apprend sur les habitudes de vie des saliniens, plus celles-ci me paraissent aberrantes... et pourtant mes congénères s'y connaissent en honneur et en conneries diverses.
Leuffa lâcha un grognement de désappointement, haussa les épaules et finalement se pencha en avant, posant son menton sur le large dos de ses mains tandis que ses coudes venaient s'appuyer sur ses genoux. Une pose pensive qui avait également la propriété de laisser pendre ses mamelles d'une façon aussi nonchalante que suggestive.
- Hum... je suppose qu'il faudrait que je me trouve un cuistot et des saltimbanques locaux, histoire de ne pas déparer dans le décor. Pour les serveuses, je pourrais toujours mélanger des Terrestres et des Glaciales, de toute façon les clients ne verraient pas la différence. Les contacts, ça se trouve au fur et à mesure. Non, la seule difficulté serait vraiment de savoir qui mettre à la tête de l'établissement : y coller quelqu'un de la trempe de Thaja, c'est me garantir des poils blancs et des traversées maritimes chaque fois qu'elle tentera de faire couler l'affaire pour me faire rager. Le mieux serait sûrement de lui coller un de mes hommes de confiance en guise de laisse... bah !
Leuffa secoua la tête, indécise. Elle poussa un nouveau grognement et s'extirpa de son siège avant de s'étirer, faisant longuement craquer les os qui se dissimulaient sous l'épaisse couche de muscles et de poils échauffés. Dehors, l'orage semblait avoir baissé d'intensité.
- Il sera toujours temps de voir ça quand il fera jour. En tous cas, vous êtes de bon conseil, Ysabelle... par hasard, est-ce que parmi vos nombreux talents vous auriez celui de savoir masser les dos ? Cela à ses avantages d'être voûtée, mais j'en viens à choper de ces crampes, parfois...
Oh, pas la peine de me lancer ce regard-là. Si j'avais voulu vous sauter dessus, je l'aurais déjà fait. Un massage, c'est tout ce que je demande.
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| | Leuffa Shteinguell
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| | Sam 15 Fév - 6:31 | | | | « Avec plaisir, madame, répondit Ysabelle, toujours fidèle à cette distinction qu'on attendait d'une servante royale.
Ysabelle laissa le plateau en place suite à la demande de Leuffa. Jaugeant quelques secondes la gnolle qui étirait son large dos, elle lui signifia qu'elle pouvait s'installer sur le lit de Thaja, derrière elle. Délicatement, alors, l'humaine remonta ses manches, enroulant le tissu sur lui-même, tout en se rapprochant de la gnolle qui avait pris place. En posant ses mains sur le dos que lui présentait Leuffa, elle se rendit compte de la puissance qui habitait ses pans de chair ; sous le poil, qui piquait lorsqu'on le prenait à contre-sens, les muscles s'étaient détendus, mais il était aisé de deviner quelle force ils pouvaient exercer. A cause de sa morphologie humaine, et de son sexe, on avait la facilité de penser que Leuffa Shteinguell représentait autant de danger qu'une humaine, lorsqu'on excluait ses crocs et ses griffes, mais elle était d'un gabarit qui la rapprochait plus de celui d'un humain. Déplacer ses mains sur le dos d'un tel corps était comme caresser un tigre, ou un loup, cela convenait mieux au caractère de la gnolle. A l'aide de ses mains agiles, Ysabelle supprima les tensions qui régnaient tout autour de la colonne vertébrale de la maquerelle. Lentement, mais en appuyant bien, elle descendait d'entre les omoplates jusqu'aux reins, remontant ensuite en élargissant la zone sur laquelle elle effectuait une pression pour venir saisir les épaules et redescendre sur la nuque. Pendant quelques instants, elle effectua ce balais, faisant disparaître à petit feu les douleurs, ou crampes.
« Notre reine, et les femmes de Selian, ont pour habitude de prendre un bain dans les sources de Luütra, et le massage sous la vapeur est très bénéfique. »
Après cette petite anecdote qui expliquait autant le savoir-faire d'Ysabelle dans le massage que la forme physique et la beauté dont faisait preuve Agnès, la servante fit glisser ses mains, sans briser le contact, sur les côtés du dos, chassant les dernières tensions qui habitaient la chair de la tenancière. Enfin, quand l'océan sembla s'être calmé et que la pluie ne battait plus les vitres en un vacarme auquel leurs oreilles s'étaient habituées, Ysabelle laissa échapper dans la douceur de l'instant une idée séduisante.
« Proposer un lieu où nos hommes, et nos femmes, pourraient se faire masser trouverait surement plus de succès auprès de notre roi que votre projet originel... surtout lorsque notre reine pourrait en devenir la cliente, chuchota-t-elle presque, concentrée. »
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| | Harald Wallah
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| | Mar 18 Fév - 16:29 | | | | Si il n'est pas rare de voir un gnoll faire preuve de confiance envers quelqu'un (en particulier un compagnon d'arme et dans une moindre mesure tout employeur), il est en revanche extraordinaire d'en voir un s'abandonner aux mains d'autrui autrement qu'inconscient ou sévèrement cuité, instinct de survie oblige. Pourtant, Leuffa se retrouva soudainement si lasse, si épuisée après cette journée riche en émotions qu'elle ne trouva pas matière à refuser de passer entre les mains d'une experte en massage. Après tout, elle avait lancé cette proposition sans aucune arrière-pensée, et si elle savait pertinemment qu'Ysabelle n'était rien de moins que l'âme damnée de la reine, elle ne sentait aucune menace émaner de l'humaine. Etant déjà torse nu, elle s'était contentée de s'écrouler en avant sur une couche et de la laisser œuvrer, les bras pendant de chaque côté du lit et le museau tourné vers la gauche. Elle ne tarda pas à s'apercevoir que l'humaine était douée, très douée... si bien qu'elle ne tarda pas à laisser échapper de petits grognements de contentement à chaque fois que les mains habiles venaient dénouer un nœud de son large dos. De délicieux fourmillements envahirent progressivement son échine, et sa langue râpeuse ne tarda pas à pendre en-dehors de ses babines avec un halètement régulier. Bien que sa vigilance soit endormie, l'esprit fécond de Leuffa ne l'était pas, et elle entendit parfaitement la suggestion que lui fit la masseuse. Le moins que l'on pouvait dire c'est que celle-ci avait des idées fixes : comment diable pouvait-on imaginer faire des bénéfices avec un établissement qui ne proposait rien de mieux que ses voisins, alors même qu'elle aurait l'inconvénient d'être une étrangère ?
- Hum, gronda-t-elle tandis que ses épaules s'affaissaient un peu plus. Coûteux, les bains. Très coûteux, pour quelque chose qui risque de faire concurrence à des établissements plus connus.
La gnolle secoua légèrement la tête et soupira profondément.
- Il faudrait... je ne sais pas, quelque chose de plus... original. Pourquoi pas... un cercle de lutte ? Cela ferait...
On ne saurait jamais ce que ça ferait, car Leuffa venait de s'endormir au milieu de sa phrase et ronflait doucement comme une bienheureuse, finalement terrassée.
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Lun 24 Fév - 16:23 | | | | Quand, enfin, le corps sauvage et exténué de la gnolle s'offrit, ses muscles dénoués et sa voix profonde transpirant dans ses longues hésitations la fatigue, Ysabelle acheva la séance d'un dernier passage de ses mains entre les omoplates. Leuffa s'était assoupie comme les chiens de leurs cuisines se renversaient sur le flanc, leurs côtes contre le sol pavé de pierres, profitant de la chaleur des flammes qui chauffaient les récipients bouillants. Assoupie ainsi, on aurait jamais pu deviner quels desseins l'animaient, cette fause bête, dont elle partageait sans aucun doute les traits les plus prédateurs mais à l'intelligence bien plus vicieuse que n'importe lequel des canidés sur cette terre. La servante la laissa ainsi, étendue sur le lit trop petit pour elle, les ombres de la cheminée dansant sur son corps à moitié nu, si on pouvait qualifier une silhouette si touffue ainsi. Dans la subtilité qui la démarquait de sa rivale, Ysabelle ne dérangea pas le sommeil de la maquerelle, et s'éclipsa après avoir laissé sur une note quelques conseils pour le lendemain. Je serai à votre disposition dès demain matin dans le hall principal. Prenez votre temps, Agnès sera déjà sur le lieu de rendez-vous, je vous y accompagnerai.
Ysabelle. L'écriture était fine et raffinée, aucune bavure, le style était celui d'une femme qui avait appris à manier la plume. Immaculée, la feuille reposa sur la table tout de même débarassée. Si la journée précédente n'avait pas été clémente pour qui ne connaissait pas le climat de Saline, la matinée la suivant était d'une fraîcheur appréciable malgré l'époque, et le ciel était bien plus dégagé que d'ordinaire. Après la pluie, le beau temps, comme on disait. Quelle malchance que ce dicton n'ait jamais concerné les affaires, sans quoi Agnès n'aurait jamais eu à s'embêter avec Leuffa Shteinguell. La soirée avait été une partie de paris sur combien de temps tiendrait Thaja avant de succomber au piège dans lequel l'avait fait tomber Ysabelle, fidèle à cette jalousie que lui connaissait sa maîtresse. Il fallait croire que la rousse avait vidée la gnolle de toutes ses pulsions honteuses tant la métisse avait semblée être réjouie de son tour, et intacte, malgré la douleur évidente que lui avait arraché les réprimandes d'Agnès. Histoires futiles de jeunes esprits torturés au service des plus vieux, et parfois plus vicieux, ce qui s'était déroulé dans la tour était un de ces épisodes étranges qui pontuaient bien souvent la vie de ceux qui accompagnaient la reine dans ses projets et ses volontés. Qui avait le plus profité de l'autre au final ? C'était toujours une question intéressante lorsqu'on traitait avec Agnès, et les réponses étaient d'ordinaire plus trompeuses les unes que les autres. Ysabelle était vêtué à l'identique de la veille, toujours mue par ses manières précautionneuses, et invisible dans la foule, toute relative, des servants et citoyens de passage, nobles et militaires confondus. Depuis les premières heures du matin, quand il semblait encore faire nuit, que la brume n'avait pas quitté les allées de la cité endormie, elle était présente, à veiller au bon déroulement des affaires de sa maîtresse. Le soleil n'était pas levé qu'Agnès avait déjà quitté Cardrak accompagnée de son escorte, transmettant ses ordres à sa fidèle métisse. Depuis, cette dernière avait complété sa mission en bonne et due forme, n'attendant plus que Leuffa Shteinguell se présente, sa silhouette immanquable pour qui prêtait un minimum d'attention. Dans le hall, assez vide pour que les pas résonnent en écho lointains puis s'étouffent dans les couloirs, on se préparait à une journée comme les autres ; les requêtes, la gestion des armées, de la flotte, l'économie du pays, toutes ces choses qui ponctuaient la vie d'un roi, mais c'était le prince qui se tenait dans le trône. Harald n'était pas encore rentré de son voyage dont il avait gardé pour lui les raisons, et c'était donc Alrik qui s'occupait encore de ces tâches plutôt rébarbatives en général, mais pleines de surprises en temps de guerre. Il était jeune, Ysabelle était arrivé au château juste avant qu'il ne passe l'épreuve de Sven, et par les anciens, comme il avait grandit. Sa passion et sa vigueur ne s'étaient jamais éteintes, son regard brûlait toujours de la même intensité lorsqu'il le portait sur la moindre parcelle des terres qu'il protégeait, et il était devenu un plutôt bel homme, pour un salinéen. « - Ysabelle, avait-il lancé à la brune, profitant d'une pause dans ses négociations avec des marchands étrangers. J'ai croisé Thaja, ce matin. Que lui est-il arrivé ?
Si elle put lire de la sincérité dans le regard de son prince, Ysabelle se doutait bien qu'il cherchait à résoudre le labyrinthe de questions que laissaient derrière elle les affaires de la reine. - C'est une longue histoire, Alrik, et je crains de ne pouvoir vous expliquer tout dans les détails maintenant, répondit-elle, son visage ridé par un feint regret. Ses prunelles métalliques cherchant quelques secondes le mensonge dans celles de jais de son interlocutrice, le prince se retourna sur son siège pour mieux faire face à Ysabelle, située sur sa droite. - Je te connais trop bien, Ysabelle. Si elle pouvait s'être brisé le cou comme elle s'est brisé la main, tu en serais la première réjouie. Comment est-ce arrivé ? insista-t-il. » Thaja était arrivé peu de temps après Ysabelle au château, mais était de quelques années la plus âgée, et celle qui avait le plus séduit Alrik dans sa pédagogie. Qu'importe l'éducation, une jeune femme d'une vingtaine d'années au moins avait toujours un certain pouvoir d'attraction sur un garçon, et si la rousse s'était attirée par sa simple existence les foudres d'ysabelle, le jeune prince avait très vite été séduit par cet esprit libre. Dans son univers d'acier, de sang, et d'apprentissages complexes, la légèreté de Thaja avait été pour l'héritier un moyen de relâcher cette pression qu'il gérait désormais à sa manière. « - Nous réglerons cela plus tard, conclut-il d'un revers de la main lorsqu'un dignitaire se présenta plus bas. - Mon prince, souffla Ysabelle, disparaissant de la scène royale pour retrouver l'arrière-salle, et les allées. » Elle n'avait pas encore croisé Leuffa, et mieux valait l'éloigner de la zone d'influence du prince. Petite souris dans les couloirs de roche noire, elle remonta les tours du château pour aller à la rencontre de l'invitée royale qui avait surement trouvé l'occasion de profiter un peu plus de l'hospitalité de la reine, ou alors dormait-elle encore... qui savait ?
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Mer 5 Mar - 13:48 | | | | Après une longue nuit d'un sommeil sans rêves (sa défunte mère aurait dit "aussi profonde que ta tombe), la conscience de Leuffa émergea lentement tandis que ses paupières trop lourdes refusaient catégoriquement de se lever. La faute en était à ce lit, qui si il était trop étroit pour son ample carcasse s'était également révélé assez ferme pour s'approcher de ses goûts, c'est à dire ni aussi raide qu'un grabat ni aussi mou qu'une de ces couches que les riches humains affectionnaient. Oh, et il y avait bien sûr eu ce divin massage qui avait fait disparaître jusqu'au souvenir des courbatures qu'elle avait pu accumuler durant le voyage ou même dans la semaine qui l'avait précédé. Un véritable délice, qu'en temps normal elle ne se serait jamais laissé prodiguer par des mains étrangères. Fermement décidée à faire de ce lit son nouveau bastion pour une paire d'années, la gnolle sentit tressaillir légèrement sa jambe gauche et tenta gaillardement de se rendormir. Du moins jusqu'à ce qu'un rayon de soleil passe à travers une fenêtre et vienne se ficher droit dans l'une de ses paupières, lui arrachant un grognement indigné tandis que la fuyait toute possibilité de sommeil. Avec une lenteur de glacier rompant les amarres avec sa banquise, elle poussa un soupir de résignation et se redressa, le regard vitreux. La gueule pâteuse, elle regarda autour d'elle et mit un temps infini avant de se souvenir de la nature de l'endroit où elle se trouvait. Considérant comme un signe favorable du destin que nul n'ait tenté de la dépecer durant la nuit, elle se leva puis se mit à la recherche de nourriture. N'en trouvant pas, elle parvint néanmoins à dénicher un broc contenant suffisamment d'eau pour faire une toilette sommaire, puis s'habilla non sans bailler d'abondance. Après avoir déchiffré les pattes de mouches laissées par Ysabelle (elle-même, du fait de ses gros doigts griffus, avait plutôt pour habitude d'une lettrine ample et ronde), la gnolle se gratta derrière l'oreille avant de hausser les épaules et de sortir se mettre en quête du hall principal.
Armée de son redoutable sens de l'orientation et d'un désir de ne pas déclencher plus d'esclandre qu'elle ne l'avait déjà fait, Leuffa se dirigea dans les couloirs en essayant de ne pas avoir l'air d'une rôdeuse à la recherche d'une pièce d'argenterie à empalmer. Une entreprise apparemment couronnée de succès, puisque à part quelques gardes auxquels elle rendit bien leurs regards défiants elle parvint sans encombre à l'entrée du château en prenant même le luxe d'éviter la salle du trône, se rappelant le début d'altercation avec ce "crénom de puceau de prince" la veille. La vue d'Ysabelle lui arracha un sourire joyeux ainsi qu'un signe de tête.
- Alors, quelle est le programme ? Implique-t-il une miche de pain fraîche gorgée de beurre et quelques pommes, pour le moins ?
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Lun 10 Mar - 23:58 | | | | Elle était là, comme une autre aurait pu s'y trouver, fière et sans soucis. A l'entendre et à la voir, la veille semblait n'avoir jamais existée, et ses salutations témoignèrent un peu plus de son caractère frivole. Le programme, s'il ne consistait en rien de ce que désirait Leuffa Shteinguell, réclamait qu'elle soit le plus loin possible d'Alrik au moment où ils passeraient les portes du château.
« - Vous trouverez de quoi vous sustenter chez notre hôte, commença Ysabelle. Il vaut mieux ne pas s'éterniser ici. »
Les voix émergeant de la salle du trône accompagnèrent les sous-entendus évidents de la métisse, qui faisait bien entendu allusion au prince. Sans perdre plus de temps, elle demanda à la gnolle de la suivre le long d'un couloir étroit à l'abri des regards curieux de l'assemblée qui commençaient à s'évader dans leur direction. Le tunnel qu'elles longèrent était à peine éclairée, condamné par une lourde porte dont Ysabelle tourna la poignée au prix d'un certain effort, et en suivant une suite de manoeuvres. C'était un passage que peu utilisaient, et la discrétion que la suivante avait mise pour y entrer témoignait qu'elle ne voulait en aucun cas attirer l'attention du prince. Cette matinée devait bien se passer, elle ne devait pas faillir. Après de longues minutes à défiler sous le bas plafond humide d'un sentier d'un mètre et demi de large, elles rencontrèrent une porte similaire à celle qu'elles avaient passée. Jamais la lumière blafarde de Saline n'avait paru si intense, tout comme son froid. Elles débouchèrent sur une cour qui flanquait les murailles du château. C'était un bel endroit, petit et discret, bordant un précipice qui donnait sur Cardrak. Il n'y avait personne pour noter leur apparition, juste le vent qui grondait à leurs oreilles et gonflait leurs vêtements. Ysabelle jeta un regard derrière elle, comme pour s'assurer que Leuffa la suivait bien, puis verouilla la porte, semblait-il, avant de reprendre les devants. Elle suivit les murs qui les flanquaient, s'engouffrant sous les immenses arcades de pierre qui soutenaient le château, cet édifice effrayant et austère. Enfin, elles arrivèrent aux grands escaliers qui menaient aux portes principales de la demeure royale, à leur mi-hauteur, et les empruntèrent pour descendre jusque dans les rues abrîtées de la cité. Les murailles et les habitations coupaient le chemin au vent, et le gel sembla immédiatement plus supportable, mais on sentait une certaine humidité dans les rues qui pouvait gêner plus souvent que la houle et la glace. Sans se retourner de nouveau, Ysabelle traça son chemin jusqu'à l'ouest de la ville, amenant Leuffa à découvrir les immenses portes d'entrée de la capitale, encadrées par deux imposantes statues. Ouvertes la majorité du temps, elles quittèrent l'enceinte de Cardrak, suivant une large route pavée avant de bifurquer pour un sentier sinueux qui descendait la pente des falaises salinéennes.
Il n'y avait pas d'endroit sur ces côtes où un navire pouvait accoster sans crainte d'être déchiré par les rochers cruels et fourbes de la mer agîtée. A l'exception du port qui s'était formé autour de la seule baie exploitable, les Glaces, dans cette région, rencontraient l'immensité océanique de haut, comme un marin observait l'horizon du haut de sa proue. Ainsi, les quelques maisons de ceux qui vivaient en dehors de la cité étaient pareilles à des nids d'aigles, de solides petites bâtisses accrochées à la terre glaciale. Ce fut vers l'une d'elle qu'Ysabelle emmenait Leuffa. Il avait beau faire jour, des lanternes allumées entouraient son toit. Des filets pendaient aux murs et des instruments et armes veillaient sur le parvis, la route boueuse trahissait le passage récent de chevaux, qu'elles trouvèrent attachés à une balustrade de bois, tout près d'un tas de bois fraichement coupé. Deux gardes s'étaient assis sur la base d'un large arbre qu'on avait découpé. Coupant leur discussion dont elles avaient pu entendre les murmures du haut du sentier, ils les ignorèrent de nouveau lorsqu'ils reconnurent Ysabelle, sans avoir auparavant jeté un regard attentif à celle qui la suivait. Sans hésitation, la suivante tapa trois fois à la porte de bois. Sur le côté droit de la façade, les rideaux s'écartèrent et les yeux d'un homme les scrutèrent quelques instants, puis, après une autorisation sonore, Ysabelle poussa la porte, elles entrèrent.
L'intérieur était intime, chaleureux, malgré toute sa simplicité. Une grande pièce réchauffée par un feu avec en son centre une large table entourée de chaises solides. Une réplique de la chambre dans laquelle avait dormi Leuffa mais les étagères en moins, et des têtes d'animaux, des outils et des armes en plus. A leur gauche crépitait le feu dans l'antre, à leur droite le large lit du propriétaire qui collait un des murs de la demeure rectangulaire, en face d'eux la table, qui n'était pas nappée, et les regards si différents de ceux qui les accueillaient. Un homme d'une quarantaine d'années, une barbe aussi longue que son avant bras et aussi noire que la nuit, couvrant une mâchoire solide et carrée. Ses yeux bruns exprimaient à la fois amusement et sévérité, surmontés par deux larges sourcils, les mèches de sa chevelure sauvage tombant sur ces derniers. Enfin, une large cicatrice lui barrait le visage du bas de sa joue gauche à son arcade droite. Il était assis, le buste en avant et ses poings sur la table, l'un deux tenant fermemant la lame d'un couteau qui tranchait la chair d'un poisson sur une planche de bois. Il leur faisait face et avait salué leur entrée en salinéen.
« - Vous devriez vous mettre à l'aise, proposa Ysabelle à Leuffa alors qu'elle fermait la porte derrière elle, la laissant s'avancer jusqu'à la table. »
Dos au feu, désormais visible, Agnès portait son regard muet et poli sur l'invitée. Vêtue d'une de ses robes qu'elle aimait simples mais qui avaient souvent le don de souligner sa finesse, elle se tenait avec élégance sur une des chaises de leur hôte, la simplicité du bois sur lequel elle reposait n'enlevant rien à sa grâce naturelle.
« - Posez vot' barda sur l'pieu, rajouta l'homme qui continuait son oeuvre, zieutant à moitié tandis que la gnolle déposait ses affaires. Bien ! V'nez vous poser là, ordonna-t-il en pointant de sa main inactive la chaise qui lui faisait face. Ceci fait, il planta sa lame verticalement dans la planche de bois, puis plongea ses yeux malins dans ceux de la maquerelle. Vous savez faire du skooma ? »
Ysabelle s'était assise plus loin, son regard faussement perdu à l'extérieur, mais ses petites oreilles ne perdant assurément aucune miette de l'entretien. Agnès, elle, entre l'homme et Leuffa, était animée par cette éternelle tranquilité.
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Ven 21 Mar - 15:41 | | | | Suivant docilement sa guide malgré son estomac bruissant d'un faible gargouillis, Leuffa ne perdit pas une miette de la visite guidée des abords du château puis de celui de Saline. Crapahuter sur une corniche ne lui posait pas de problème de bon matin, car malgré sa démarche chaloupée due à ses jambes arquées elle avait le pas sûr. Du reste, l'effet piquant de l'air marin sur ses babines retroussées en un sourire d'aise était vivifiant, et le spectacle du soleil se reflétant sur l'onde valait bien quelques risques modérés. Chantée par les bardes comme une immense plaine liquide qui avait servis de monture à certains des plus grands héros de son peuple vers leurs aventures les plus glorieuses et lointaines, la magnificence tranquille de cette étendue l'impressionnait presque davantage que le tas de pierrailles qui constituaient Cardrak. Être membre d'une race demeurée proche de la nature aidait sûrement à mieux apprécier les merveilles de celle-ci, il fallait croire.
Toujours est-il que le voyage s'effectua en silence jusqu'à une cabane accrochée à la falaise au milieu de nombre de ses consœurs, ce qui était étonnant pour un repaire de contrebandiers en herbe. Plus étonnant encore, l'intérieur de la cabane s'avéra assez propret (dans le genre rustique), sans doute en l'honneur de la présence de dame Agnès. Leuffa la salua d'un signe de tête respectueux, avant de jauger attentivement le colosse qu'on désirait semble-t-il lui imposer comme fournisseur de skooma : bien bâti, le poil noir, un regard de mâle qui a vécu une vie tumultueuse, il fleurait bien le poisson et la sueur virile. Attentive, la gnolle s'assit sur le siège qu'on lui proposait et posa le sac contenant ses maigres affaires à ses pieds avant de croiser les bras sous son opulente poitrine, affichant un air concentré de circonstance.
- Je n'en sais que ce qu'en dit un alchimiste de ma connaissance : le skooma, ce sont des œufs d'un poisson argenté au dos zébré de rouille, séchés, mélangés avec une plante, tamisés, puis réduits en poudre fine. Pour les détails, je compte sur vous pour me les apprendre.
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| | Leuffa Shteinguell
Partie IRLCrédit avatar : ShaksaagDouble compte : nonVitesse de réponse : rapide
| | Lun 24 Mar - 18:24 | | | | Garon avait plissé les yeux à mesure que Leuffa avait décrit la préparation du skooma. Il n'avait pas bougé d'un pouce, puis, quand elle eut fini, son large corps fut remué par un léger rire qu'il ne cacha pas.
« - Je n'vais rien vous apprendre, trancha-t-il. »
Il prit un bol en bois pas loin de sa planche et y déposa la rogue qu'il avait récoltée sur le poisson. Poussant alors le récipient vers Leuffa pour qu'elle constate le produit, il se renfonça dans son siège, la jaugeant.
« - Chacun sa recette, et ses ingrédients, dit-il finalement, les bras croisés sur son large poitrail.
- Le skooma que vous trouverez ici n'est pas celui auquel vous avez pu goûter, Leuffa, intervint Agnès. Il est presque deux fois plus puissant et addictif que celui qu'on trouve actuellement en Terre, de quoi ravir vos clients difficiles...
- Y'a de quoi leur faire oublier jusqu'à leur nom, ajouta Garon, apparemment persuadé de ce qu'il avançait. Si c'est trop puissant pour eux, vous n'aurez qu'à demander ; le résultat final dépend aussi de la plante, donc on peut diminuer les effets. »
Garon se leva et alla au fond de la pièce, s'agenouillant pour ouvrir les portes d'un buffet duquel il sortit un petit coffret. Revenant, il le déposa devant Leuffa, l'ouvrant de telle façon qu'elle puisse voir ce qui s'y trouvait. A l'intérieur, une sombre poudre aux grains épais reposait sur son plancher. Il y en avait une quantité suffisante pour tuer l'esprit de plusieurs hommes dans leurs vices.
« - Goûtez si cela vous chante, j'en ai un baril qui n'attend que d'être livré, l'invita-t-il, recroisant de nouveau les bras, la défiant de porter à sa langue cette nouveauté qui, à coup sûr, avait de quoi lui hérisser le poil. Après ça, vos clients ne voudront de rien d'autre, avança le salinéen. »
Garon savait dans quel était son skooma pouvait mettre un homme, et le pousser à des folies qu'il n'avait même jamais envisagées. Sous l'effet de cette poudre, les barrières que fixait la morale étaient repoussées, oubliées, et laissaient libre cours à la passion, les plaisirs de la chair étaient incomparables et trouvaient leur paroxysme, tout était un flot ininterrompu de merveilles. Quand cette frénésie prenait fin, la vie paraissait alors morne, dénuée de sens et on ne cherchait plus qu'une chose ; retrouver cette liberté qui avait coulée dans les veines. Mais à chaque fois, on en voulait plus, toujours plus, et le consommateur devenait alors l'esclave de celui qui le tenait par le besoin. Se défaire de l'emprise du skooma, c'était une chose que peu d'entre ses victimes avaient réussi à faire. Garon se leva après avoir jeté un regard à Agnès qui lui avait donné son accord d'un léger hochement de tête. Je reviens, avait-il lancé, disparaissant au-dehors.
« - Alors, Leuffa. Cela vous semble-t-il correct ? demanda Agnès, joignant ses mains sur la table tandis qu'elle se penchait vers la gnolle. »
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| | Harald Wallah
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| | Jeu 3 Avr - 11:03 | | | | Sans s'offusquer de l'attitude cavalière du contrebandier (chacun avait après tout droit à son jardin secret, surtout si celui-ci lui permettait de gagner de quoi acheter tout le village de cahutes où il se trouvait), Leuffa tâcha de ne pas montrer son excitation devant toute la provende que celui-ci lui agitait insolemment sous les mirettes. Bien au contraire, elle se contenta de lever un ample sourcil intrigué et de sortir un grand mouchoir blanc de sa poche, dans lequel elle cracha avant de se le plaquer contre la truffe. N'ayant jamais vu de skooma qu'en quantités infimes, elle connaissait néanmoins parfaitement la virulence de ses effets (n'était-ce pas la raison de tout le périple qu'elle avait entrepris ?) et savait qu'elle risquait d'être victime de son influence priapique rien qu'à cause de son odorat développé. Et non seulement elle avait trop besoin de toutes ses facultés pour traiter avec ses hôtes, mais elle avait trop souvent usé de drogues sur d'autres dans sa jeunesse pour que cela la tente d'en faire les frais à son tour. Le sexe, la viande, l'or et le vin lui suffisaient amplement comme addictions. Elle plia donc brièvement mes genoux pour jauger de l'étrange substance qui présentait une étrange couleur, ce qui n'était pas étonnant si comme l'affirmait l'humain la recette pouvait varier en fonction des effets désirés. Une perspective intéressante, qui signifiait également que l'homme avait à cœur de protéger son investissement et celui de son importante protectrice.
La gnolle finit par se redresser et par replacer son masque dans sa poche, dardant sur Agnès un regard entendu tout en passant sa patte épaisse dans la crinière qui lui tenait lieu de chevelure.
- Pour autant que je puisse en juger, cela me semble correct. Un tonneau de skooma devrait me faire un ou deux mois, selon sa puissance et la façon dont je le doserai. Donc... sur quelle base de prix démarrons-nous ? Au prix où sont les produits de ce genre en Terre, je vous propose quarante ailes par chargement, en sus de notre accord.
Une offre plus que généreuse, car mis à part les produits les plus raffinés, la plupart des drogues se monnayaient aisément un tiers moins cher que cela à quantités équivalentes. La proposition d'Ysabelle lui trottait en tête, diablement tentante.
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| | Leuffa Shteinguell
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| | Mar 15 Avr - 19:41 | | | | Agnès regarda sans ciller la gnolle étudier le produit, protégée par son mouchoir. Tous savaient quels tours pouvaient jouer à un esprit la saveur et les effets de cette poudre brune, la reine en particulier ; ce n'était pas pour rien qu'elle facilitait la tâche à Leuffa, et qu'elle passait sur son comportement tout bonnement abject. Mettre sur le marché Terrian une drogue aussi puissante et addictive était comme enfoncer lentement une fine lame dans la chair d'un homme, tôt ou tard elle attendrait son coeur. La plupart des sujets soumis au règne d'Aile Ténébreuse étaient déjà pourris par la propagande qu'on leur déversait, une poudre rongeant leur raison et leurs envies ne pouvait qu'être un plus. Qu'importait, donc, qu'une gnolle arrogante et certaine d'être dans son bon droit où qu'elle soit vienne faire de ses caprices à Saline, Agnès pouvait aisément supporter cette épine qui menaçait sa patience, pas même éraflée.
« - Garon a des hommes à nourrir, Leuffa, et une famille, commença Agnès, son sourire de façade mais toujours si naturel accompagnant son début de réponse. Allons, soixante ailes par tonneau, c'est un présent que je vous fais, un de plus, sans compter la clientèle que pourraient représenter mes hommes une fois sous votre toit. Cela n'a l'air de rien mais, je vous assure, certains ont de l'appétit. »
Agnès en était certaine, même en doublant les prix, Leuffa aurait accepté, mais elle ne jouait ici aucun intérêt économique. Comme elle l'avait explicitement indiqué à la gnolle, et peut-être cette information était passée au travers des mailles de sa vigilence, quoique ç'aurait été étonnant de la part d'une femme si débrouillarde, la reine avait des projets et des intérêts qui dépassaient de loin les vues d'une maquerelle. Pour avoir passé sa jeunesse dans la nouvelle noblesse, aux quatre coins de Terra, et le reste de sa vie en tant que reine de Saline, elle avait un regard tout autre sur son avenir, et les répercussions de ses choix. Cardrak l'avait endurcie, plus qu'elle ne voulait l'admettre, et si son interlocutrice n'avait représentée aucun intérêt, jamais elle ne serait mise en avant pour lui venir en aide... qui sait de quelle manière grotesque elle aurait pu finir. A la place, elle lui présentait sur un plateau d'argent un avantage que sa dure vie n'avait jamais eu la générosité de lui offrir, une chance d'écraser pour de bon toute concurrence.
On frappa à la porte, puis Garon entra. A sa suite, un jeune homme entre la trentaine et la vingtaine, une mine sombre. Sa mâchoire carrée se nouait et ses yeux, cachés par les quelques mèches de sa chevelure longue et brune, balayaient sans cesse la pièce, ne pouvant s'attacher à un regard.
« - Daniel Lenfor, ma reine, madame, se présenta-t-il en même temps que Garon reprenait sa place en face de la gnolle.
- Daniel est un résistant, originaire de Sen'tsura, il connaît très bien la ville et se chargera de vous accompagner lors de votre retour afin de...
- ... tâter le terrain, continua Garon, lassé des formes.
- ... établir des repaires, dit en même temps le dénommé Daniel.
- Cela même ! affirma Agnès, radieuse. Il respectera bien entendu l'accord que nous avons, et servira de médiateur les premières semaines de son installation en ville avec nos agents déjà présents. »
Daniel s'était penché en avant, fixant le sol, et ne s'était redressé qu'une fois que la reine eut fini de parler. Son teint était pâle, il semblait fatigué et ses vêtements, rien de plus remarquable que ce que portaient les émigrants tout juste arrivés dans le port la veille, étaient usés, mais il faisait preuve d'une droiture dans sa manière d'être qui laissait supposer que, peut-être, il ne s'agissait pas simplement d'un garçon de ferme ou du fils d'un quelconque crevard.
« - Nous disons soixante ailes, donc, et Daniel vous accompagnera pour le retour. »
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Ven 18 Avr - 16:00 | | | | Malgré sa bonne volonté et le fait qu'elle se soit auparavant morigénée à faire preuve de prudence dans une situation qui risquait très vite de dégénérer, Leuffa ne put s'empêcher de pousser un reniflement dédaigneux lorsque la reine répondit à sa première offre en invoquant la sempiternelle ritournelle des employés et des enfants à nourrir. Argument fallacieux s'il en était, car elle doutait que l'humaine se soucia le moins du monde du bien-être de ses sbires... et ce n'était pas l'éclat métallique de froide détermination qu'elle lisait dans son regard qui la pousserait pas à y croire. Les babines légèrement retroussées en un sourire moqueur et les bras croisés sur la poitrine, elle s'apprêtait à contre-attaquer avec l'une des réparties piquantes dont elle avait le secret lorsqu'un trublion pénétra soudainement dans la masure de pêcheur. Un humain au poil brun et aux vêtements élimés qui se présenta aussi bien comme un porte-couteau de la reine que comme le premier gougnafier d'une longue liste qu'elle était destinée à abriter, sinon à aider. Apparemment, le pêcheur était également dans la confidence, puisqu'il se mit à renchérir les propos du nouveau venu et de sa maîtresse, ce qui eut le don d'agacer la gnolle qui détestait être considérée comme quantité négligeable. Elle ne haussa cependant pas le ton. Au contraire, sa voix baissa de plusieurs octaves tandis qu'elle se tournait vers Agnès, les yeux et les oreilles légèrement plissées par l'irritation.
- Piètre présent, par rapport à tous les ennuis que risquent de me valoir les festivités que me décrivent vos pirates d'eau douce. Je croyais pourtant que nous étions d'accord, reine : ce sera mieux pour vous comme pour moi si j'ignore tout des activités de vos terreurs d'alevins.
La femme-bête poussa un léger grognement méprisant, puis reprit. Son regard de jade ne cilla pas devant celui de la souveraine qui ne devait pas avoir l'habitude d'être contredite par quelqu'un qu'elle considérait à son service.
- Bref, ponctua-t-elle d'un haussement d'épaule. Il est hors de question que je paye soixante ailes par mois pour des œufs de poisson alors que pour le même prix je peux faire venir des produits exotiques de Montagne ou d'Eau. Moi aussi j'ai des mâles, des femelles et des petiots à nourrir au cas où ça vous aurait échappé. J'ai dit quarante, et je ne me dédirai pas... ou alors on rajoute quelque chose dans la balance. Ysabelle, auriez-vous omise de rapporter notre petite discussion d'hier à votre maîtresse ?
Peu importe, fit-elle sans laisser à la servante le temps de répondre, toujours tournée vers la seul seul interlocuteur qui compta dans la pièce. Ce que j'ai à proposer est de toute façon simple : comme vos larbins ont de toute évidence des difficultés à garder leur langue dans leur poche et que je ne saurais leur faire confiance si je dois vous transmettre un message, le mieux serait encore que quelqu'un que je connaisse puisse faire la liaison. C'est pourquoi je vous propose quelque chose qui nous sera profitable à toutes les deux : j'ouvre une auberge tout ce qu'il y a de plus respectable à Saline, avec à sa tête quelqu'un que nous connaissons toutes les deux. Je paye le skooma à QUARANTE ailes le tonneau, je paye les impôts, je paye l'installation et je fournis même un peu de travail aux laissés-pour-compte de votre jolie cité glacée. Gagnant-gagnant.
Un coups audacieux, couillu, digne d'un gnoll. Restait à savoir si la noble allait apprécier de goûter à sa propre médecine.
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| | Leuffa Shteinguell
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| | Lun 28 Avr - 12:25 | | | | Agnès avait écouté la proposition de Leuffa, animée de cette sempiternelle douceur dans ses traits, mais les iris gris de ses yeux plissés reflétant toujours cette dureté intrinsèque à la reine de Saline. Une auberge ? Non, Ysabelle n'avait malheureusement pas eu le temps d'informer sa maîtresse de cette idée, qui avait tout de même une drôle d'allure dans la bouche de Leuffa. La gnolle jouait l'imbécile, ou la naïve... enfin, elles le faisaient toutes les deux comme c'était toujours le cas entre négociants. On s'arrangeait systématiquement pour tirer le plus gros avantage de ses affaires, et Agnès avait atteint son objectif depuis longtemps, au moment même où la gnolle avait accepté le marché, peu importait alors les clauses. Cependant, il fallait être honnête dans ses propres démarches et mettre de côté l'égo, parfois. Leuffa Shteinguell proposait quelque chose de sensé qui arrangeait chacun et, déjà, Agnès prévoyait qui elle allait placer à l'avant-garde de ce "quartier général".
« - Je suis reine de Saline, Leuffa, répéta Agnès, une énième fois. Vous ne négociez pas avec un nobliau, mais avec l'une des mains de Cardrak. Les bénéfices d'une auberge représentent un bien plus grand intérêt pour vous que pour moi, cependant...
Agnès détourna son regard vers Garon qui se tenait plus loin, la mine mauvaise, pas vraiment réjoui de devoir traiter avec une gnolle. Depuis plusieurs années qu'il répondait aux volontés de la reine de Saline, il était capable de sentir les coups qui ne lui profiteraient que moyennement, et il était prêt à parier que cette Leuffa Shteinguell ne lui apporterait que des ennuis. De ce qu'il pouvait en dire, Garon ne comprenait toujours pas, d'ailleurs, comment une femme-bête, si orgueilleuse que celle-ci, pouvait se tenir ici, bercée par tant de privilèges quand certains se seraient déjà retrouvés à croupir dans des geôles pour le même comportement. Ha ! Nul doute qu'Agnès Felina Wallah étendait sa toile un peu plus par-delà le continent.
- ... cependant, votre offre pourrait profiter à certains. Je n'y vois pas d'inconvénients, sauf pour le skooma. Ne jouez pas l'imbécile, Leuffa. Ce n'est pas un produit que vous trouverez autre part que je vous propose, mais bien une occasion unique. Pour soixante ailes, donc, et nous vous trouvons un emplacement dans notre cité qui puisse accueillir votre auberge. Je ne reviendrai pas sur le prix, insista la reine, ses ongles manucurés tapotant légèrement sur le bois de la table. Et pour ce qui est de la fiabilité de mes gens, vous devriez déjà être reconnaissante de respirer encore. Soyez certaine que vous êtes l'une des rares qui ait pu se permettre une soirée comme celle d'hier et que vous ne devez votre peau qu'à ma seule bonté. J'ai été jusqu'ici patiente, mais cela pourrait changer, expliqua calmement Agnès, sa menace appuyée par le raclement de gorge de Garon, la lame de son couteau brillant dans le fond un peu plus obscur de la pièce.
- S'il vous faut des arguments plus parlants, je saurai vous prouver que les hommes et femmes qui m'entourent sont d'une loyauté qui ne s'achète pas, rajouta l'humaine, son regard dérivant vers Daniel, qui tremblait, si on se donnait la peine de le fixer quelques instants. Vous prenez bien plus de risques, Leuffa, en jouant les difficiles ici qu'en collaborant avec mes hommes, dit la reine en se levant de son siège au moment même où Ysabelle lui apporta un manteau de fourrure épaisse et des gants. Voyez plus loin que le bout de votre museau. Nous parlons œuf de poisson aujourd'hui, qui sait de quoi nous parlerons demain, conclut-elle, se dirigeant vers la porte d'entrée.
- Nous sommes d'accord ? »
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| | Harald Wallah
Partie IRLCrédit avatar : Double compte : Vitesse de réponse : De lente à très rapide
| | Mar 29 Avr - 12:04 | | | | Bien que mordante, la répartie de Leuffa fit long feu et contribua surtout à mettre tous les occupants de la pièce un peu plus à cran; et tandis qu'Agnès se fendait d'une petite réplique fort peu à propos sur la fleur qu'elle lui faisait en traitant avec elle, la négociante vit du coin de l’œil luire la lame d'un couteau dans la poigne du dénommé Garon. Bien que se sachant sur le fil du rasoir, la gnoll se contenta de demeurer les bras croisés, le sourire aux lèvres et le regard tranquillement fixé su sa principale interlocutrice, consciente que dans ce genre de situation le moindre signe de faiblesse équivalait à présenter sa gorge à son adversaire. Elle aurait probablement pu les tuer tous les quatre et s'en sortir vivante, ou leur asséner quelques-unes des phrases qui lui traversèrent l'esprit. Le titre de roi ne signifiait rien pour une gnolle, sinon qu'il s'agissait d'un titre héréditaire à conquérir assorti d'un morceau de métal à poser sur le crâne. Rien de plus qu'un titre inventé par les humains pour "légitimer", ou plutôt camoufler à grand-peine leur soif de domination sur les autres... comme si il fallait en avoir honte. Elle avait été aux premières loges pour assister à la reddition des seigneurs de Terre et à leur embastillement; et elle avait pu constater qu'un roi pouvait mendier pour sa vie, saigner et tremper ses chausses comme le dernier des gueux. S'abriter derrière un titre équivalait pour elle à se protéger derrière un bouclier de papier. Autant dire que le peu de respect qu'elle avait pour Agnès s'effrita. Non pas tant à cause de la menace sous-jacente proférée que de son inanité. Et le fait qu'elle prenait la défense de ses larbins alors qu'ils avaient commis une bourde sous ses yeux ne plaidait pas plus en sa faveur. Quant à l'impudence de Garon... elle lui promit du regard qu'ils règleraient leurs comptes plus tard, probablement dans une ruelle dont le sol enneigé étoufferait le bruit de la chute de son cadavre. Non, la gnolle se contenta de secouer la tête. Il eut été difficile de voir dans son attitude le moindre signe de défaite, car malgré une attitude neutre ses yeux verts pétillaient d'ironie malsaine. - Ainsi soit-il, "reine". Mais à votre place, je n'oublierais pas ce que disent ceux de mon peuple en de pareilles occasions : - Gredor Mensch weinen Preisch:
A chaque homme son prix , et essayez de deviner pourquoi on dit "mensch" et non pas "gnoll".Sur ce, la femme-bête éclata de rire et se laissa les marins s'occuper du tonneau de skooma tandis qu'elle commençait à s'entretenir avec Isabelle des conditions envisageables pour la fondation de la taverne. Un jeu dangereux venait de commencer, et sa seigneurie salinienne ne tarderait pas à s'apercevoir qu'en pensant avoir adopté une sangsue elle avait enfourché une louve géante.
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| | Leuffa Shteinguell
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