La nuit est déjà tombée depuis un moment. Dans l'ombre, discrète, Melphit est déjà en train de se déplacer vers sa nouvelle cible. Beaucoup sont de ceux qui, parmi son groupe, ont trouvé l'entreprise risquée depuis que l'information traînait en ville sur l'augmentation des gardes présent dans l'enceinte, mais la jeune et intrépide demoiselle n'en avait que faire, comptant bien s'engagée dans cette entreprise des plus risquée. Et puis elle avait une réputation à tenir depuis son vol puis la revente au marché noir de cette superbe statuette sacrée de Yehadiel. La voleuse blasphématrice commençait à faire son chemin, et ça n'allait pas être un quelconque surplus de danger qui allait la dissuader d'accomplir ses rapines. C'est pourquoi les trois pauvres gardes ajoutés pour la protection de ce prétendu lieu sacré n'était pas pour elle quelque-chose d'assez alarmant pour la faire changer d'avis, et elle allait entrer dans cette bâtisse, et en ressortir sans même que le moindre petit patrouilleur ne puisse se douter de son passage.
Passant d'une ombre à une autre, évitant tout endroit où la lumière permettrait de l'identifier, elle se dirige le plus rapidement possible vers la haute forme de l'église, malgré les nombreux zig-zags qu'elle est obligée de faire pour ne pas avoir à faire avec la lumière de la lune, ou les quelques torches qui éclairent les grandes rues de cette ville. Ses pas sont légers, rapides, et quasiment insonores, même si elle préférerait être le silence même dans ce genre de situation, car il n'y a jamais de trop peu quand il s'agit de discrétion. Abordant les dernières rues avant sa cible, elle ralentit la cadence pour désormais privilégier la sus-nommée discrétion, s'approchant à pas de loup de la place au milieu de laquelle se trouve la belle et imposante église, nouvelle preuve de toute l'infinie richesse des clergés et de leur supposées légitimités. Melphit se mord la lèvre, la colère remontant en elle alors qu'elle repense à l'inutilité complète des religieux dans ce monde de guerre et de souffrance, puis prends le temps nécessaire pour se calmer et redevenir professionnelle, les émotions ne devant jamais être présente sur le lieu d'un vol.
Elle attend le passage de la patrouille qui se trouve autour de l'édifice pour passer comme une flèche derrière eux, puis se jeter sur un des piliers pour se réceptionner un peu en hauteur, alors que les trois comparses se retournent, croyant avoir sentit quelque chose. C'était une des choses que tout voleur apprenait, les humains sont bien dotés d'un sixième sens, mais ils sont généralement dupés par leur propres principes de vérités et des classiques comme "j'ai dû rêvé". Là les trois gardes sont juste en train de chercher derrière eux, au niveau du sol, et c'est bien pour ça que la voleuse avait prise un bon mètre de hauteur pour éviter de se faire repérée. De plus, placée dans l'angle mort du pilier extérieur, elle doutait qu'ils pensent y chercher, et effectivement ils repartent au bout d'un court moment en évoquant la présence d'un chat ou d'un autre animal, tel un rongeur. Redescendant alors au sol, elle regarde en l'air et cherche un possible endroit où ficher un grappin, mais se trouve vite bredouille sur ce point de vue. Elle allait donc devoir passer par la porte de service.
Reprenant son chemin en suivant discrètement les trois gardes qu'elle a précédemment dupée, et ce à une distance respectable, elle fait le contour de la bâtisse jusqu'à atteindre la porte de derrière. Abandonnant alors ses innocent compères avec un petit sourire, elle va prendre à sa ceinture ses instruments de crochetage, deux longues tiges aux embouts variés, et teste une première fois la serrure pour voir si elle est fermée. Les résultats étant positifs, elle entame donc de très discrètement déverrouillée la porte, y perdant trois bonnes minutes de son temps avant de faire jouer la poignée et d'ouvrir lentement la porte en bois. Personne, parfait ! Elle se glisse dans l'arrière-salle et se dirige de manière tout aussi précautionneuse vers l'autre porte et y colle son oreille pour écouter ce qu'il se passe. Deuxième règle, les gardes sont des pipelettes quand ils sont bloquées à un poste fixe, et font beaucoup de bruit quand ils se déplacent. Pour eux, c'est discrétion zéro. N'entendant rien de l'autre cotés de la porte, elle ouvre la porte sans un bruit et passe un rapide coup d'oeil. C'est bon pas un mauvais bougre dans le coin. Elle passe dans le couloir du contour d'Église et tend l'oreille à nouveau.
-Tu sais que les prêtres ont amené une pièce rare dans la grande salle ? Ils disent qu'ils veulent attirer les fidèles.
-Voyons Farad, si ils voulaient vraiment attirer des fidèles, c'est des putes qu'ils devraient engager !
-Mouef, me dis pas ça alors que je vais me marier ... Moi je vais plus pouvoir y goûter. Surtout Miranda, elle va me manquée ....
Des voix à gauche, très bien, la demoiselle se déporte sur la droite, profitant du tapis au sol pour mieux amortir ses pas. Se glissant dans la zone la plus ombragée possible, elle les écoute encore pour être sure de leur position, et surtout pour leur position, car leurs sujets de conversation grivoise lui donnerait plutôt envie de les secouer contre un mur. Approchant de la porte latérale qui permet de rejoindre la salle principale, elle passe à nouveau une des aiguilles de son matériel de crochetage pour tester la serrure, et remarque que par bonheur la porte est bien ouverte. Ce soir elle avait une chance terrible ! Écoutant à nouveau à la porte, un grand sourire commençant à naître sur son visage, elle étouffe son ricanement avant qu'il ne la trahisse auprès des abrutis qui sont censés protéger les lieux, puis tourne la poignet pour entrer dans la grande salle, et refermer immédiatement après la porte derrière elle. C'est bon, elle y était, ne manquait plus qu'à trouver son butin et à repartir aussi sec.
Elle avait fait un repérage de journée et avait vu l'objet sacré que ces idiots du clergés avaient fait ramenés depuis la capitale. Un petit livret aux airs étrangement bateaux, qui selon les dires fut écrit par Von Luar et placés entre les mains des hommes pour parfaire leurs connaissances du monde. Bien sur le clergé se prétextait unique détenteur d'une telle vérité et il fallait suivre aveuglement ce qu'il ressortait du bouquin. Unique, divin, ou rien, la jeune demoiselle s'en moquait éperdument, et pour cause : la chaos qui se créerait quand elle mettrait la main dessus sera la plus belle des pubs possible pour sa revente de l'objet au marché noir, et c'était bien là tout ce qui l'intéressait. S'approchant de l'autel qui lui était dédié, elle monta les quelques marches sans un bruit et s'approcha de la forme de pierre supportant le saint bouquin. Oui il était si banal, et à la fois si précieux. Sans un mot elle sortit de son gantelet droit un long tissu dans lequel elle enrobe le livre avec délicatesse, puis le cale sous son bras avec un radieux sourire sur ses lèvres. Voilà une affaire rondement menée. Elle tourne les talons et s'avance donc vers l'escalier pour pouvoir repartir rapidement, ayant terminée son boulot de la soirée.
... Du moins cela aurait du se faire ainsi. Bondissant au dernier moment, la voleuse évita de peu le coup de lance, mais lâcha le livre si important dans son mouvement, ayant écarté les bras par un réflexe des plus naturels. Désormais à la place ancienne du livre, sur le piédestal, elle voit quatre gardes dont l'un avec la lance encore dans la finition de son précédent mouvement. Son excitation de plus tôt lui avait fait aller trop vite, et elle n'avait pas prise le temps de vérifier la présence de garde dans l'immense salle. Grave erreur, car eux l'avait repérée de loin et l'avait prise à son propre jeu, redoublant de discrétion pour la prendre en traître. Interdite, sa vue passe du groupe au bouquin et c'est un autre garde qui s'élance pour l'attaquée, l'obligeant à repartir en arrière une nouvelle fois, s'approchant bien trop près du mur à son goût ! Ils comptaient la bloquée pour l'arrêtée, la situation allait bientôt ne plus être gérable ... Ah non il ne fallait pas qu'elle finisse coincée ici !
-À la garde, on tente de nous voler !
Pas bon du tout ! Fuyant de coté à une vitesse vertigineuse, elle saute les hautes marches alors qu'une lance la réceptionne dans son élan et passe son armure de cuir bouilli, la blessant au flanc droit. Elle bascule en avant, roule au sol alors que la douleur envahit son corps, puis profite du dernier mouvement pour se remettre sur ses jambes alors qu'une vague de douleur la paralyse dans sa tentative de fuite. C'est un instant court où elle empoigne sa plaie bien saignante, retenant le mal alors qu'elle se mord durement la lèvre pour ne pas crier, mais c'est l'instant qui suffit aux gardes pour se reprendre et se mettre après elle, tandis que le reste arrive par une porte. Elle n'as pas le temps de réfléchir et fuit en se tenant son flanc blessée. Non elle ne veut pas être capturée ... pas la prison. Pas le viol. Pas la mort ! Elle court sur l'allée central de l'Église, désormais paniquée, des larmes commençant à coulée sur son visage. Elle va se faire avoir, elle vas se faire avoir, elle va ...
Non miracle ! La patrouille extérieur ouvre naïvement la porte de sortie alors qu'elle s'en approchait. Cri véhément du garde supérieur à l'intérieur, visage stupéfait des trois autres gardes mais trop tard... Melphit fonce vers cette sortie inattendue en éjectant les gardes sur les côtés, puis s'enfonce dans les rues sombres pour trouver un lieu de survie. Elles les entends encore derrière, le sang qu'elle perd doit les guider ...Il faut qu'elle monte, ou qu'elle descende ... Mais elle ne peut pas trouver une bouche d’égouts comme ça, et ne peux user de son grappin avec un flanc dans cet état ... Vas-t'elle devoir fuir jusqu'à l'évanouissement ? Elle voit déjà trouble ... Commence à se sentir faible ... Non, là des caisses ... Si elle saute assez haut elle devrait pouvoir sortir. Elle prend une impulsion, puis une deuxième, passe sur une caisse puis la deuxième, bondit. Les gardes débouchent sur une rue vide. Plus rien, les dernières gouttes de sang se finissent au milieu de la rue pavée, rien sur les caisses, pas de forme visible sur le toit, la voleuse a disparue.
321, 322, 323, 324, 325 ... Ils partent. Épuisée, mais retrouvant un peu la vue et ayant réussie à tenir le coup malgré le sang qui continue de couler, elle repart vers le bord du toit en restant allongée et les observe au loin. Attendant d'être sûre qu'ils ne l'attendent pas, elle saute du toi et se réceptionne au sol avec un couinement de douleur à la réception. Qu'est-ce qu'elle a mal ! Quel échec ! Laissant enfin les larmes couler, elle part en boitant pour ne pas appuyer sur son flanc blessé. Elle clopine, les joues pleins de larmes, repensant à l'échec de ce soir et à la honte qu'il lui ont infligée en l'obligeant à se croire vaincue. Elle se vengera bon sang ! Elle se vengera et les fera payer au centuple. L'aube se voit au loin quand enfin elle arrive au repère. Elle frappe à la porte, avec le bon code, voit son camarade lui ouvrir, lui sourit... Et s'écroule dans ses bras. C'est bon ... Maintenant elle est en sécurité. Elle s'en souviendrait de cette nuit !