Du bruit, des rires, des cris, de la bière qui coulait à flot. Une soirée habituelle pour cette auberge. En général, Sunaï passait devant ce genre d’établissements en ignorant le vacarme qui en provenait, ou s’y arrêtait la journée pour boire un verre. Rien de plus. Mais ce soir-là était un soir différent.
La mercenaire ne comprenait plus très bien ce qui se passait autour d’elle. Plusieurs personnes lui firent des embrassades au hasard, lui donnèrent de grandes claques dans le dos, et trinquaient avec elle à tout bout de champ, la félicitant pour son dernier numéro. De quel numéro ils parlaient, elle n’en avait plus la moindre idée. Habituellement, jamais on ne la trouverait dans cet état, jamais, au grand jamais, aussi éméchée ! Elle n’aimait pas perdre le contrôle d’elle-même. Comment en était-elle arrivée là ? Elle ne s’en souvenait plus très bien à vrai dire… Il lui semblait que son ami Arthadel était dans le coup, mais… Ah… Oui, c’était bien ça…
Un pari à deux sous, comme d’habitude. Ils s’étaient arrêtés en fin d’après-midi pour se reposer un peu. Arthadel l’avait taquinée, elle avait répondu, et cela s’était terminé par un pari sur qui s’écroulerait le premier à force d’enfiler les verres. Pari le plus stupide qu’elle ait jamais fait. Les gens autour d’eux s’étaient amusés, encourageant leur préféré, les acclamant à chaque bière terminée ! Mais au bout de la troisième ou quatrième chope, Sunaï avait déjà perdu le fil et oublié le pari. Tout comme la majorité des gens présents ici, qui tout le long de la soirée, s’étaient abreuvés comme des ivrognes. Une belle petite bande d’incapables !
Sunaï tituba et manqua de s’étaler par terre, évitant au passage une chope de bière qui vola non loin de sa tête. On l’attrapa alors par les épaules, et elle fut obligée de cligner plusieurs fois des yeux avant de comprendre qui se tenait devant elle. Arthadel était parti avant que le sens de ses paroles n’atteigne les brumes de son cerveau. Sunaï le suivit tant bien que mal à travers le tumulte. Ayant attrapé un homme par le col, un pichet de bière dans l’autre main, il le secouait comme un vieux pruneau. Son ami était méconnaissable, affublé d’une perruque blonde et d’une robe, mais étrangement cela n’étonna pas Sunaï plus que ça. Ses propres vêtements étaient dans un sale état, et la bière avait rendu son haut transparent par endroits.
La mercenaire attrapa une écharpe à froufrous et à plumes roses qui se trouvait là et entoura le cou de son ami avec. Elle le poussa un peu, l’arrachant aux prises de l’homme, et l’enlaça – tout en manquant de lui tomber dessus et de l’entraîner dans sa chute – pour crier à son oreille par-dessus le vacarme :
- Oh ma mortadelle d’amour ! Elle lui palpa les fesses à travers sa robe du soir d’une main et entortilla une mèche blonde de sa perruque autour de l’index de son autre main.
- C’toi qu’est encore plus sexy comme ça ! Tu devrais en mettre plus souvent… Elle retint un hoquet.
Viens là !Elle s’écarta en l’entraînant par l’écharpe rose à travers la salle. Elle le laissa devant la petite scène de l’auberge tandis qu’elle montait dessus avec difficulté. Enfin, lorsqu’elle fut en hauteur à la vue de tous, elle hurla :
- HOOOOOOOYYYYYY !!! ON NE S’ENTEND PLUS, LES AMIS !!!Pour la forme, elle fracassa la chope qu’elle avait encore en main sur la scène. Quelques secondes de latence furent nécessaires pour que la majorité de l’assemblée porte son regard sur elle.
- N’est là pour s’amuser non ? Alors… La jeune femme eut soudain un haut-le-cœur, mit sa main contre ses lèvres, puis se retourna pour rendre le contenu de son estomac sur un côté de la scène. Avec toute la dignité que l’on pouvait encore avoir dans ce cas, Sunaï s’essuya le coin de la bouche, se redressa et reprit son discours.
Alors pourquoi qu’on n’entend pas la musique ? Sunaï redescendit de la scène pour attraper le pianiste qui batifolait avec des filles pour le ramener par la peau du cou à son poste. Elle le fit asseoir brutalement devant son instrument. Complètement ivre comme les autres, les notes qui résonnèrent n’avaient aucune cohérence entre elles, mais cela sembla satisfaire la mercenaire, qui se tourna à nouveau vers son ami.
Elle attrapa alors Arthadel, n’attendant ni son approbation ou sa négation. Elle colla sa poitrine sur son torse, son bassin sur le sien et l’entraîna dans une danse endiablée et sensuelle, chose totalement impensable en temps normal. Mais personne ne l’empêcherait de s’amuser ce soir !
[HRP : Je me suis bien marrée à écrire ça ! XD Ma pauvre Sun ! D8 Première et dernière fois que je lui donne une telle déchéance...]