- Citation :
- Après avoir détruit son village par accident et avoir fuit, Magrant se retrouve seul. Raconte nous sa seconde expérience en temps que nécromancien : Pour quelle raison refait-il un essai ? Quels sont ses sentiments vis à vis de cette nouvelle puissance ? Quel est le résultat et quelles conclusions en tire-t-il ?
Fuir. Fuir la honte, la culpabilité. Fuir son passé et ses erreurs. Voilà ce que faisait Magrant Malnoir. Le jeune homme courait à toute vitesse, ne regardant pas derrière lui le massacre qu'il venait de causer. Alors qu'il fuyait, les hurlements de terreur de la population de Constantinople. Il posa ses mains sur ses tempes et courut de plus belle, droit devant lui. Une demi-heure plus tard, il s'écroula sur le sol, épuisé, le souffle haletant. Le village était loin désormais, mais les cris des villageois continuaient à hanter l'esprit de Magrant. Le nécromant, au bord des larmes, leva vers lui ses mains tremblotantes.
"_ Je suis un meurtrier. Je ne voulais pas causer toute cette destruction. Mon seul souhait était de venger mon village du règne de ce maudit chien d'Agnar. Et voilà ce qui en coute. Tout ça à cause de ..."Lentement, ses yeux se tournèrent vers le large grimoire posé près de lui. Tout ça, c'était la faute de ce maudit ouvrage. Ce bouquin maléfique avait fait de lui un monstre, un démon, un ... nécromant. Le crâne grimaçant qui ornait la couverture de cuir du livre semblait rire de son effroi, d'un rire silencieux et troublant. Serrant les dents, il conclut que pour pouvoir se pardonner, il devait avant tout détruire l'objet de la destruction du village.
Magrant ramassa sur le sol les quelques rares branches mortes et feuilles sèches qui traînaient, puis il les rassembla. Ensuite à grand renfort de coups de silex, il parvint à allumer un feu. Satisfait, il ramassa le grimoire du sol .
"_ A' présent, tu ne causeras plus aucun malheur ! brûle, maudit ouvrage ! "Et il lâcha le grimoire. Mais quel ne fut pas sa surprise lorsque le livre évita les flammes et tomba à un pas du feu improvisé. Secouant la tête d'incrédulité, il tenta de nouveau la même chose et cette fois ce furent les flammes qui furent soufflés par un vent venu d'ailleurs.
"_ Tu ne pourras pas me détruire, car je te suis bien trop précieux "Cette voix ... on dirait qu'elle venait du grimoire lui-même ! Par tous les dieux, le grimoire de Kandjar lui parlait d'une voix spectrale froide, mais en même temps si envoûtante. Magrant poussa un juron, les membres tremblants, puis courut vers son sac, cherchant son couteau. Une fois l'ustensile en main, il se jeta sur le livre dont le but de le poignarder. Mais la lame ne parvenait pas à approcher plus d'un pouce de la couverture. Ce n'était ni un champ de force, ni tout autre sortilège. Ce n'était que le bras du pauvre jeune homme qui ne parvenait pas à ne serait-ce qu'écorcher le livre. La sueur perlait à son front, son bras tremblait de plus belle, les dents serrées à se mordre la langue.
"_ Je t'avais bien dit que tu ne pourrais pas me détruire. Sans moi, tu ne serais rien qu'un simple villageois. Je t'ai offert la puissance, les secrets de l'art de la nécromancie. Ce n'est qu'à partir de moi que tu atteindras la puissance. Tu auras beau tenter de te débarrasser de moi, tu reviendras me reprendre, car tu sais bien que seul la puissance et la connaissance comptent en ce monde._ Tu te trompe! rugit alors Magrant et il creusa un trou au pied d'un vieux chêne à l'aide de ses mains.
Ensuite, il y jeta le livre et entreprît de l'enterrer passablement.
_ Ici, je n'entendrais plus tes paroles traîtresses !Et il tourna le dos au chêne, laissant derrière lui le grimoire. Il marchait d'un pas ferme et décidé, mais son regard montrait à quel point l'angoisse et le doute l'accablaient, car malgré le fait qu'il ait enfoui le livre dans le sol, il continuait à entendre le rire sarcastique qu'il lui lançait ...
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Magrant se réveilla en sursaut, sa couverte collée à sa peau moite. Un bruit étrange avait tiré le jeune homme de son sommeil troublé des murmures du grimoire. Il tourna la tête de gauche à droite, n'apercevant que les buissons, les arbres, la pleine lune, les éclats jaunes, les ... Quoi ?
Son regard se repositionna en direction des sombres lueurs jaunâtres qui approchaient de lui. Lentement, il se releva, sortant précipitamment son couteau de sa chemise mouillée de sueur. Devant lui surgissait un chien-loup agressif, la bave au babines, crocs et griffes dehors, le poil hérissé. Il était tenu en laisse par un grand individu chauve au visage couvert de balafres et aux dents aussi sales que ses vêtements étaient crasseux. Sans crier gare, le bandit lâcha sa bête. Cette dernière se jeta sur Magrant avec un cri de rage. L'apprenti-nécromant se laissa tomber juste à temps pour éviter les crocs du chien enragé. La bête, à peine tombé par terre, s'était de nouveau précipité sur lui. Seul la chance, ou le caprice du destin, sauva alors Magrant, car le chien s'était accidentellement empalé sur le couteau tendu du pauvre homme.
Le brigand fila ensuite prévenir ses compagnons. Magrant ne demanda pas son reste et fila aussitôt au sens opposé. Il ne lui fût pas longtemps avant d'entendre le hurlement des autres chiens-loups qui le traquaient. Sentant la mort le poursuivre, il se mît à prier tous les dieux qu'il connaissait, leurs suppliants une fin pas trop douloureuse et le repos éternel.
"_ Inutile de fuir ... déterre moi et à nous deux nous ferons ramper ces pauvres vermines !"Magrant s'arrêta net dans sa course folle. Lorsqu'il tourna la tête en direction de la voix, il se rendit compte qu'il était revenu vers le vieux chêne ou' il avait enterré le grimoire.
"_ Je t'avais dis que tu auras bientôt besoin de la puissance que je peux te conférer !"La façon dont avait été prononcés ces mots étaient un mélange d'amusement et d'assurance maladive. Magrant ferma les yeux, réfléchissant à quel choix était le plus judicieux.
"_ Je suis le seul pont vers l'ultime connaissance des arts noirs ... prends-moi et ensemble faisant régner notre loi !"Magrant ouvrit lentement les yeux et un sourire perfide s'afficha brusquement sur son visage.
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Les brigands fauchaient chaque brin d'herbe avec leurs larges épées volées. Suivant de près leurs chiens, ils se racontaient la façon dont ils allaient saigner le fuyard lorsqu'ils entendirent un bruit à mi-chemin entre un hurlement de terreur et un cri de pure sauvagerie. Ils s'arrêtèrent alors, cherchant du regard la source du cri. Les chiens avaient perdus leur rage et à présent ils reculaient, la queue entre les jambes.
Alors que l'un deux allait demander aux autres ce qui ce passait, une immonde créature surgit : une goule. Une créature ressemblant à un zombie, avec des yeux jaunes exorbités, une gueule grande ouverte avec des crocs jaunis et usés, un corps à moitié décomposé et des griffes pourries. La bête était plus rapide, et surtout plus féroce et intelligente qu'un zombie normal. Et poussa un autre cri de haine affamé . Alors qu'elle se jetait sur le premier brigand, d'autres de ces créatures d'outre-tombe surgirent des buissons et suivirent leur sœur pour participer au massacre. Les brigands se défendaient à grand coups d'épées maladroits, tandis que les goules les faisaient ployer sous des coups répétés de griffes et de morsures implacables.
Bientôt, le dernier bandit tomba par terre, les entrailles pendantes. Les goules se jetèrent sur leurs proie et débutèrent un funeste festin. Derrière elles se tenaient leur créateur : Magrant. Curieusement, il semblait plus sombre, plus sûr de lui. Un sourire fourbe ne quittait pas ses lèvres devant ses "filles" dévorant ses poursuivants. Son âme n'était plus la même. Elle était entachée par le pouvoir noir, par la soif de puissance. Il se sentait un homme nouveau et surtout un homme plus puissant. Il poussa un rire satisfait et s'en alla, suivis de ses goules encore tachées du sang poisseux de leur repas.
Accroché à sa ceinture, le crâne du grimoire de Kandjar semblait rire aux éclats devant un spectacle invisible après une victoire écrasante ...