Au coeur de la mine [Abandonné]

La journée était ensoleillée et chaude, parfaite pour une petite balade en montagne. C'est d'ailleurs d'humeur particulièrement optimiste que Fëanor s'était réveillé ce matin là. Il avait passé la nuit dans un arbre, protégé d'un quelconque prédateur nocturne et c'était la lumière du jour qui l'avait tiré de son sommeil. La route pour le Relais de Sola n'était pas si interminable Tilamus mais l'elfe aimait prendre son temps quand il le pouvait et la météo avait été favorable si bien qu'il avait profité du paysage et traîné un peu la patte. Il avait donc mit une journée de plus à atteindre la petite vallée haut-perchée dans les montagnes où se trouvait le Relais. Et il n'arriva en vue du bâtiment principale qu'en fin de matinée.
Les épaules protégées par une longue cape de voyage, il portait en travers du dos une étrange sacoche allongée, de conception elfique et qui contenait ses vivres ainsi que tout son matériel pour récupérer herbes, sédiments et fluides qu'il utiliserait dans ses préparations. A sa ceinture étaient accrochées plusieurs petites sacoches contenant sa bourse, un peu de matériel médical et deux ou trois outils utiles lors d'un voyage. Son seul compagnon de voyage était pour l'instant un grand et solide bâton renforcé de métal et qu'il utilisait pour marcher tant qu'il n'avait pas à se défendre. Appréciant la chaleur du soleil, Fëanor préférait voyager sans se couvrir la tête. Mais dès qu'il arriva en vu des petits remparts de pierre, il choisi de rabattre son capuchon. Entre ses longs cheveux et les stigmates sur son visage, mieux valait ne pas s'attirer les mauvaises grâces des gardes. L'endroit était gardé, plus pour la sécurité des personnes qui venaient trouver refuge là que pour contrôler réellement. Les portes étaient ouvertes toute la journée avec deux gardes à l'entrée et une ronde était faite sur le mur d'enceinte pour veiller à ce qu'aucun groupe de truand ou qu'aucune bête féroce ne s'approche. L'endroit était haut dans les montagnes et plutôt isolé, installer des bâtiments sans protection aurait relevé de la bêtise profonde.

L'elfe passa les portes sans encombre en saluant d'un petit mouvement de tête les hommes en faction puis il s'engagea dans l'avenue principale. L'endroit n'était pas très grand, ce n'était même pas un village. Une grosse auberge servait de refuge pour la nuit et de place de ravitaillement et prenait toute la largeur du mur du fond. Une écurie et une forge longeait le mur d'enceinte sur la gauche et à droite se tenait plusieurs petites bâtisses vendant matériel pour le voyage, potion et onguents ainsi que quelques grigri pseudo magiques. Les seuls habitants perpétuels étaient les commerçants et leur famille qui vivaient souvent au-dessus de leur lieu de travail. On avait prit soin de paver le sol pour éviter qu'il ne devienne un bourbier dangereux au fil des années et des saisons. Contre la forge s'ouvrait le corps de garnison où vivaient la trentaine de soldat en poste au Relais. Le reste des âmes ici présentes étaient des voyageurs de passage ou des commerçants venu remplir les stock du relais.
Ces gens n'avaient pas d'ennuis et se tenaient toujours près à faire face à un ours des montagnes qui se serait introduit dans les murs, si bien qu'il régnait une atmosphère relativement amicale et détendue. Fëanor ne se sentait pas plus assuré pour autant mais au moins il n'était pas plus mal à l'aise que d'habitude. Sans hésiter il se dirigea vers l'auberge et s'installa à une table pour manger. Se faisant aussi discret que possible, il garda son capuchon bien baissé sur son front mais sa grande taille et son yeux fascinants lui valurent quelques regards étonnés. On voyait peu d'elfe sortir de Drayame et encore moins aller si loin en montagne. Intimidé, Fanor termina son assiette rapidement en jetant de temps en temps un oeil par la fenêtre.

A la fin de son repas, il ramena lui-même son plat au comptoir en bois poli et attendit que le patron lui accorde son attention. Quand celui-ci s'avança avec l'air étonné de voir un client ranger tout seul sa vaisselle, l'elfe prit son courage à deux mains et lui demanda:

« Excusez moi, j'aurai besoin de renseignements. Savez-vous où je pourrai trouver un tableau d'affichage ? Je souhaiterai passer une annonce. »

L'homme hausse les sourcils, encore plus étonné mais lui répondit qu'il n'existait rien de tel ici et que tout passait par lui et le bouche à oreille.

« Je suis à la recherche d'une personne ou deux pour m'accompagner. Je vais descendre dans les mines à la recherche de créatures. J'ai besoin de leur venin pour une de mes préparations. Pensez-vous qu'il y ai quelqu'un ici qui soit prêt à tenter le voyage ? Je rémunèrerais chaque participants bien sur. »

Le gérant sembla réfléchir mais ne vit personne qui pourrait correspondre à la recherche qui soit présent mais il assura l'elfe que pas mal de monde arrivait le soir. La personne qu'il cherchait serait peut-être présente dans la soirée ou le lendemain. Déçu, Fëanor lui prit une chambre et demanda à ce que le message circule. Beaucoup de monde passait par ici après tout, il pouvait bien attendre quelques jours, rien ne pressait. En attendant de diner, il alla déposer quelques affaires dans sa chambre avant de redescendre. Il prévint le patron qu'il serait de retour en début de soirée et sortit de l'établissement pour faire un tour chez les autres commerçants et autour du Relais.

Pour la première fois depuis des semaines, Yuki recevait enfin une permission. Bien qu'elle n'ait ni familles, ni amis à visiter, elle voulait sortir de cette caserne. Comme tout le monde, elle avait besoin de repos de temps en temps. Elle se rendit donc à Sola sur un coup de tête. Elle avait choisi ce lieu pour la simple et bonne raison qu'elle ne l'avait jamais visité avant.
Au cours de ses différentes missions, elle avait eu l'occasion de voyager dans tout Terra. Que ce soit les cieux d'où elle était originaire, les glaces ou le feu, elle avait eu l'occasion de découvrir toutes ses contrées. Néanmoins, elle n'était venu qu'une seule fois dans les Montagnes, à Tilamus. Et les nains l'avaient très bien accueilli.

Elle allait profiter de ce voyage pour faire polir ses armes. Les forgerons des Montagnes étaient connus dans le monde entier pour leur habilité et leur technique si particulière. Même ses armes, d'origine Céleste, trouveraient un peu de soin dans cette contrée.
Le voyage fut très rapide. En effet, elle peut être téléporté à l'intérieur même de la ville, dans une filière de la rébellion. Après avoir passé les formalités de son arrivée, elle put enfin se promener librement dans les rues. Le soleil était encore haut dans le ciel, prodiguant une douce chaleur dans la citée. Les rayons, bien qu'éblouissant, étaient les bienvenues après plusieurs semaines passées sous terre.

Le relais en lui-même n'était pas bien grand, gardé par de hautes murailles contre les possibles envahisseurs. Outre quelques commerces et une auberge, ils n'y avaient que très peu d'habitations. Les rues n'étaient pas bondés comme dans les grandes villes, néanmoins il y avait beaucoup de voyageurs.
Yuki finit par tomber sur la forge. Toute heureuse, elle observa le forgeron. Celui-ci était un nain bien bâti, dont la barbe tressée pendait jusqu'aux genoux. L'ange se demandait comment elle ne la gênait pas dans son travail lorsqu'elle remarqua la petite pince qui la fixait sous son tablier. La fierté des nains... Passait par leur barbe. Chose que la jeune femme avait du mal à comprendre. Alors qu'elle allait enfin vers lui, un homme la bouscula. Il s'excusa rapidement, et continua sa route sans demander son reste. Ce sont des choses qui arrivent partout.

Elle n'avait plus qu'à parlementer avec le nain à propos du prix de la réparation. Celui-ci semblait enchanté qu'elle lui présente une arme céleste mais ne voulait pas baisser de prix. Bien que contrariée, Yuki finit par accepter et voulu prendre sa bourse.
Elle perdit son sourire en moins d'une minute. Sa bourse avait disparu. Mais ou avait elle bien pu la perdre? De rage elle reprit ses armes et s'excusa un peu brutalement devant le nain hilare:

- Une jeune dame comme vous est une proie facile pour les voleurs!

Son commentaire fit moche. L'homme qui l'avait bousculé! Elle était certaine qu'il était le voleur. Ni une, ni deux, elle se mit à la recherche d'un homme encapuchonné. Elle n'avait pas pu voir son visage, mais elle se souvenait du vêtement. Lorsqu'elle le vit tourner au détour d'une ruelle, elle couru et lui sauta dessus, ne lui laissant aucune chance de s'enfuir.

- Espèce de sale voleur! Rends moi ma bourse!

Mais est ce la bonne personne?

L'elfe une fois sortit fit un tour dans la boutique qui prétendait vendre des remèdes. Il y trouva quelques fournitures utiles pour soigner des blessures mais également beaucoup de marchandises "truquées" : des pommades miracle qui ne faisaient que résorber les bleus, des cataplasmes tonifiants qui n'avaient pour effet que de courir la plaie...Beaucoup de ramdam pour rien. Déçu, il sortit rapidement sans rien acheter ni faire de commentaire. Ce n'était pas son travail de dénoncer l'abus de confiance d'un commerçant. Dans la rue, assez peu d'animation. Il décida d'aller demander au corps de garnison si aucun mercenaire n'avait offert ses services récemment. La forge étaient un endroit intéressant mais qu'il visiterait plus tard, pour le plaisir. Peut-être ferait-il affuter ses outils, même si le propriétaire de l'endroit était un nain moqueur. La rivalité qui opposait les elfes et les nains était plus qu'ancestrale, elle était génétique. Bien qu'il ai l'esprit très ouvert à toute forme de vie, Fëanor avait du mal à se montrer longtemps aimable en présence des nains, qui de leur côté ne faisaient pas vraiment d'efforts pour paraitre courtois en général.

Il prit donc la direction du corps de garde et failli d'ailleurs se faire bousculer par un jeune homme à l'air très pressé. Lui aussi portait une longue cape mais était nettement moins grand. Il s'empressa de filer le long d'un bâtiment en marmonnant une vague excuse que l'elfe accepta. Il n'était pas du genre à chercher des noises pour si peu et se contenta de soupirer, un peu agacé. Mais ce n'était rien comparé à ce qui allait suivre.
Alors qu'il allait tourner à l'angle d'une ruelle pour se rendre vers sa destination, une voix retenti dans son dos. Le ton était sec, agressif même et nettement féminin. Presque aussitôt, Fëanor sentit qu'on lui attrapait rudement l'avant bras. Il s'immobilisa net, tout comme son interlocutrice. Avec une lenteur presque menaçante mais qui n'était pour lui que de la prudence, il tourna les épaules et baissa ses grands yeux verts pour regarder en face celle qui le brusquait de la sorte. La jeune femme était d'une beauté surnaturelle et pourtant pas elfique. Plus grande que la plupart des gens que Fanor avait l'habitude de croiser, Sa peau était d'une blancheur immaculée et son regard dur déstabilisa le jeune elfe qui se sentit soudain accusé de tous les tords du monde. Il ne manqua pas non plus de remarquer les discrètes ailes blanches que la jeune femme avait dans le dos. Tiens, un ange ? Il n'en avait jamais rencontré vraiment, c'était une grande première. Mais il aurait préféré que ce soit dans d'autres circonstances. L'air parfaitement impassible, il la détrompa:

« Je suis désolé, vous devez faire erreur. Je ne vous ai rien dérobé. »

Son regard mélancolique s'attarda un instant sur la courbe de la joue de la demoiselle qui avait soudain l'air d'être la plus parfaite qui ai jamais existé. Cette seconde sauva de la panique son esprit peu habitué à ce genre de situation de crise.

« On vous a volé votre argent ? Je crois que vous devriez plutôt porter plainte auprès des gardes, avant que le voleur ne sorte de ces murs. »

Fëanor prit délicatement, de sa main libre, le poignet du bel ange pour libérer son bras de cette étreinte. Il n'appréciait pas beaucoup le contact. Non en fait, il ne l'appréciait pas du tout, sauf avec les animaux. Qui plus est, celui-ci était particulièrement désagréable. Avec douceur et fermeté il lui fit lâcher prise. Il ne comptait pas se laisser traiter en coupable.

Yuki était déçue. Elle n'avait pas attrapé son coupable. Et celui-ci devait être parti depuis bien longtemps. Sa bourse contenait tout l'argent qu'elle avait pour ce voyage. Elle savait qu'elle aurait du diviser son petit pécule en différentes bourses. Ce n'était pas juste. Pour une fois qu'elle était en vacances... C'était rageant.

Elle avait considéré pendant quelques instants que l'homme mentait, mais elle ne put mentir ce jugement en considérant les oreilles allongées de son coupable. Maintenant qu'elle pouvait le voir de près, il lui semblait invraisemblable que cet homme ait eu besoin de lui voler quoi que ce soit. Il dégageait de cet elfe, une prestance et une noblesse d’âme que peu de personnes possèdent. Sans être marqué par la vieillesse, ses traits avaient perdu la candeur des jeunes ages pour libérer ce visage de toute trace d'age. Elle ne put en voir plus, l'homme toujours caché derrière sa capuche.

« Je suis désolé, vous devez faire erreur. Je ne vous ai rien dérobé. »

Ça, elle le savait déjà. Mais pour une étrange raison, elle ne voulait pas laisser partir l'inconnu. Elle n'avait pas croisé d'elfe depuis un moment en dehors de ses frères et sœurs d'arme. Celui-ci était différent. Il ressemblait plus à un elfe que les autres. Pacifiste et de surcroît poli, elle n'avait pas l'habitude.

Mais surtout qu'est ce qu'un elfe venait faire sur le territoire des nains? Encore plus surprenant. Les elfes et les nains se vouaient une haine mutuelle pour un motif qui lui était inconnu. L'homme s'était pour ainsi dire, jeté au cœur dans la tanière du loup...

« On vous a volé votre argent ? Je crois que vous devriez plutôt porter plainte auprès des gardes, avant que le voleur ne sorte de ces murs. »

Un sourire étira ses lèvres. Ce n'était pas la peine, l'homme devait déjà être sorti des murs de ce relais. Rien de plus frustrant que de se rappeler son erreur. Pauvre petite naïve qu'elle était... Ses armes ne pourraient être affûtées et bichonnées avec amour comme elle l'aurait souhaité. Lorsqu'il lui fit enlevé sa main, elle se rappela de sa conduite vis à vis de l'homme:

- Excusez moi, vous aviez à peu près la même cape, je vous ai donc confondu, pour mon plus grand regret. Et ne vous inquiétez pas, le voleur a déjà filé, avec tout mon argent. Il ne se serait pas attardé ici avec autant de monnaie sur lui.

L'elfe semblait assez maladroit pour ce qui était d’interagir avec les gens, c'était vraiment mignon. Visiblement mal à l'aise, il évitait tous contacts avec la foule mais aussi avec elle. On ne pouvait pas lui en vouloir, il avait du être entouré d'arbres et d'elfes depuis sa tendre enfance, sans connaissances des autres ethnie de Terra. Les elfes avaient cette capacité d'ostracisme et cette tendance implacable à l'égocentrisme que les autres peuples de cette planète. L'ange ne comprenait pas vraiment comment il pouvait laisser passer les conflits qui se jouaient en ce moment même.
Un silence gêné s'installa entre eux. Yuki cru même que l'elfe allait s'enfuir.

- Il va falloir que je trouve un travail pour remplir à nouveau ma bourse... Sinon les vacances sont fichues. Au fait, je me prénomme Yuki, enchantée.

Bien qu'elle doutait que l'elfe accepterait de plein gré un nouveau contact avec elle, elle lui tendit la main.

Fëanor hésita un moment. Il savait, bien sur, que pour se saluer certains aimaient se serrer la main mais lui se contentait généralement d'un mot ou d'un petit mouvement de tête. Il fit cependant un effort. Terminant son demi-tour pour faire face à l'ange, il lui présenta sa main, lui serra fermement mais brièvement la sienne avant de se retirer comme si elle venait de lui brûler la paume. Elle s'était radoucit en constatant qu'il n'était pas son voleur et ça lui allait beaucoup mieux que le ton accusateur qu'elle avait prit pour l'aborder. Le dresseur esquissa un minuscule sourire gêné.

« Vous n'avez donc plus rien sur vous... Je vais peut-être vous sembler un peu cavalier mais je suis ici dans le but de recruter quelqu'un qui pourrait m'aider. Je vais bientôt descendre dans les mines car il y vit une créature dont le venin est très utile pour certaines décoctions dont je fais usage dans mon métier. Je dois refaire mon stock et les marchands de ce genre de denrée se font rares aussi vais-je moi même chercher ce qu'il me faut. Mais c'est un peu...dangereux et à moi tout seul je ne peux pas capturer ces bêtes, les immobiliser et leur extraire le poison, j'ai besoin d'aide. »

Fëanor savait bien que les anges étaient plutôt pacifiques mais celui-ci avait l'air tellement remonté un instant auparavant qu'il espérait pouvoir en tirer une aide précieuse.

« Je compte payer toute cette aide bien sur : 10 Ailes de Bronze. Est-ce que cela pourrait vous intéresser ? »

Il avait toujours entendu dire qu'il n'y a pas d'heure pour conclure des affaires. Si cette mission pouvait rendre service à quelqu'un d'autre en plus de sa propre personne, c'était tant mieux. Et bizarrement, il s'en voulait que cette demoiselle ai perdu son argent. Bien entendu, il n'était pour rien dans ce vol mais il ne pouvait pas s'empêcher de sentir une pointe de culpabilité.

« Bien sur, je ne veux pas vous vexer, si ce travail ne vous convient pas, je ne me sentirais pas offensé que vous refusiez. Mais comme vous avez l'air d'avoir besoin d'argent, cette offre pourrait vous dépanner et le voyage ne devrait pas durer plus de trois ou quatre jours. »

Il n'avait pas pu s'en empêcher...Persuadé qu'il avait pu offenser son interlocutrice d'une façon ou d'une autre, il préférait se reprendre lui même et s'excuser de son comportement avant même de savoir ce qu'il en était. Encore une fois il était complètement paumé et s'embrouillait dans ce qu'il voulait dire.

Quel drôle de personne elle avait en face d'elle. Cet elfe était sûrement quelque chose a voir. Son malaise était apparent... Il avait de la chance de n'être pas tombé sur une mauvaise personne A moins que l'on considère l'ange comme telle.

Elle l'écouta patiemment, le laissant s'embourber en s’efforçant de ne pas rire. A vrai dire, Yuki n'était jamais descendue dans les mines. Elle n'avait pas bien l'habitude des endroits clos comme ceux-ci où ses ailes se retrouvaient inutiles. Mais bon, depuis qu'elle vivait au QG de la Rébellion, elle devait s'y faire. Ce n'était pas comme si sa chambre se trouvait être une niche de quelques mètres de larges et qu'elle s'y cognait le front tous les matins.
Qui plus est, elle avait besoin d'argent et de distractions. Ainsi elle pourrait obtenir les deux en même temps. Quel gain de temps! Et l'elfe était trop marrant à observer pour qu'elle passe son tour sur ce coup ci.

Affichant un franc sourire, elle dégagea une mèche de cheveux qui lui mangeait le visage:

- Eh bien, je serai tout à fait enclin à vous aider. Comme vous l'avez si bien remarqué, j'ai besoin d'argent et votre compagnie m'est très agréable. Je suis une combattante à l'épée, je pourrais donc facilement vous servir de protection et de distraction pour les jours à venir. Mais je ne pourrai absolument pas être votre guide, je ne connais absolument rien aux grottes. Après tout, je viens d'un endroit où les lieux clos se comptent sur les doigts d'un main! Cependant je pose une condition! Je veux connaître votre prénom!

Elle n'avait pas pu s’empêcher de faire une petite blague à l'elfe. Malheureusement pour lui, Yuki avait un tempérament très taquin. Et il allait en faire les frais tout au long du voyage.
Lorsqu'elle connu son identité, elle lui demanda de le suivre afin d'aller récupérer ses affaires. Elle avait laissé sa cape de voyage, son sac de provision et ses sangles dans le repaire rebelle. Elle le fit patienter dehors, n'ayant pas le droit de laisser quiconque s'introduire dans ces lieux. Elle sangla donc ses ailes, afin d'être moins voyante avant d'aller le rejoindre.

Elle n'aimait pas faire cela, mais elle n'avait pas vraiment le choix. D'une part, un ange était rare en dehors des Cieux, d'autre part, elle était encore recherchée par les sbires du Démon. Cacher ses origines angéliques lui permettait de s'affranchir de nombreuses complications. Elle laissa ensuite l'elfe la guider entre les petites bâtisses.

Pour détendre l'atmosphère un peu glacée, elle se mit à questionner son employeur:


- Vous avez évoqué un métier tantot. Puis je savoir duquel il s'agit? Pour avoir besoin d'un venin, ca doit être quelque chose quand même. oh et à quoi ressemble donc cette bête?

L'elfe fut plutôt satisfait qu'elle accepte si rapidement. Cela lui évitait d'avoir à aller jusqu'à la caserne pour demander des contrats de mercenaire. Elle savait se battre à l'épée, ce qui pouvait être très utile contre les créatures qui rôdaient sous terre. Fëanor se dit qu'il aurait put faire l'effort de prendre son arc, le pauvre commençait à se couvrir de poussière. Mais l'idée d'avoir à tuer encore, comme lors de la Bataille Verte, ou de blesser des animaux lui était insupportable. Il préférait de loin son bâton. Avec sa force et les renforts en métal, un coup à la nuque pouvait très bien être fatal et sinon, il donnerait quelques bleus à ses adversaires, ce qui lui suffisait en terme de satisfaction guerrière.
Alors qu'il allait prendre congés de l'ange pour retourner à sa visite, elle lui imposa une condition avec un air taquin. Intrigué et un peu inquiet à l'idée de ne pas pouvoir la remplir, il hocha cependant la tête pour l'inciter à continuer.

« Mon nom...J'ai été nommé Fëanor. »

Le jeune elfe n'arrivait pas à voir où était le comique de la situation et la blague qui semblait amuser sa partenaire lui échappait complètement. Mais il avait renoncé depuis longtemps déjà à saisir le moindre trait d'humour qu'on pouvait lui servir. Encore que l'humour elfique lui était désormais familier et que certaines blagues humaines pouvaient le faire rire. Mais le reste du temps, il ne comprenait pas l'hilarité d'un mot ou d'un geste. Yuki semblait tout à fait charmante mais agitée, ce qui promettait un voyage animé. Fanor ne savait pas bien s'il devait s'en réjouir ou s'en lamenter.
Une nouvelle fois il s’apprêta à lui souhaiter la bonne journée et lui donner rendez-vous le soir pour de plus ample explications mais elle l'entraîna à sa suite sans lui demander son avis. Curieux de ces manières et de savoir où ils se rendaient, le dresseur elfique se contenta donc de marcher derrière elle, allongeant ses grandes jambes sans avoir trop de difficultés à suivre la cadence. Quand elle le planta devant une porte en lui demandant d'attendre, il n'articula pas un mot et se contenta de se mettre hors du passage. S'il ne l'avait accompagné que pour lui tenir compagnie, il était un peu déçu. Avec un soupir, il prit son mal en patience, espérant avoir assez de temps pour passer à la forge et faire quelques achats pour le voyage.

Enfin, l'ange finit par ressortir avec tout son paquetage et ils purent revenir vers l'auberge. Fanor ne disait pas un mot, il n'en avait pas besoin. Parler ne lui était pas familier et il n'avait, de toute façon, rien à raconter. Il pouvait bien attendre le soir pour expliquer son expédition. Mais apparemment, tout le monde n'était pas de son avis et Yuki lança la conversation :

« Vous avez évoqué un métier tantôt. Puis-je savoir duquel il s'agit ? Pour avoir besoin d'un venin, ça doit être quelque chose quand même. Oh et à quoi ressemble donc cette bête ? »

Le dresseur tourna légèrement la tête pour poser son regard vert sur elle. Il resta silencieux un moment, comme pour réfléchir à ce qu'il allait lui répondre. En fait de cela, il se demandait plutôt comment on pouvait poser autant de questions en une seule fois.

« Je suis soigneur, dresseur et herboriste. J'ai besoin du venin car, une fois préparé correctement, il possède des vertus assainissantes et régénératrices. La créature qui le produit s'appelle un Scha. C'est une sorte de lézard, gros comme un chien de guerre et dont la queue est recourbée avec au bout, un dard remplis de venin. Un peu comme les scorpions. Ils ne vivent pas très en profondeur, heureusement, mais leur vivacité en fait des proies difficile à capturer. Leur piqure peut être mortelle. »

Peut-être qu'il n'aurait pas du préciser cela mais il n'avait pas conscience que ce détail pouvait en effrayer quelques uns. Pour lui c'était naturel et même fascinant de voir comme la nature pouvait donner des armes aussi puissantes à un être vivant. Il admirait ces créatures pourtant jugées répugnantes et dangereuses.

« Et vous ? Êtes-vous mercenaire ? »

Si elle avait aussi vite accepté son offre et qu'elle savait se battre à l'épée, il y avait des chance qu'elle exerce ce métier. Après tout, le Relais attirait pas mal de mercenaires.

Ils avançaient tranquillement dans la rue, en direction de là d'où ils venaient. La forge était sur le chemin, Fëanor comptait y faire un arrêt. Après tout, si elle se permettait de le promener, il pouvait bien faire de même, d'autant que c'était un service important qu'il avait à demander au forgeron. Avec un peu de chance, il n'y aurait pas de grosse prise de bec.

Yuki suivait docilement l'elfe. Elle ne savait pas vraiment où ils se dirigeaient, mais elle savait que ça l'amènerait à son salaire. En tout cas, la bête qu'il décrivait n'était pas bien jolie. Elle n'avait jamais eu l'occasion de rencontrer cette dernière. Pour ce qui était de l'agilité, elle n'avait pas vraiment peur de ce point la. C'était sa meilleure arme.

Elle n'était pas très à l'aise avec toutes ces notions de remèdes. Que ce soit des plantes ou des venins, elle n'en avait jamais eu besoin. De par sa nature, elle était capable de guérir les petites coupures et les petites plaies. Elle n'avait jamais eu recourt à un cataplasme ou un onguent, ce qui expliquait son manque cruel de connaissance à ce sujet.

« Et vous ? Êtes-vous mercenaire ? »

Elle ne pouvait pas vraiment lui expliquer ce qu'elle faisait en réalité. Mercenaire s'approchait le plus possible de sa profession. Du coup, vu qu'elle était incapable de mentir, elle acquiesça en souriant. Ce serait plus facile ainsi.

L’inconvénient d'être un ange résidait dans cette incapacité atroce à ne pas pouvoir mentir. Yuki avait donc appris de nombreuses façons pour jouer avec la vérité. L'omission et le silence restait les armes les plus puissantes, mais les gestes étaient quand même bien pratique dans certains cas.
Un grand silence s'installa entre eux. Cette fois-ci, Yuki ne prit pas la peine de le déranger. L'elfe semblait préférer le silence aux paroles, et surtout, elle n'avait plus besoin de renseignements.

Ils arrivèrent enfin devant la forge, où elle s'était faite voler son argent quelques temps auparavant. Quel dommage de finir ses vacances ainsi.

La forge du nain Borhin, très réputée jusque dans les lointaines contrées de Terre, abritait un nouveau venu qui avait fait son apparition entre temps. Il était accoudé au comptoir très bas placé du forgeron et devisait avec celui-ci d'une voix rapide et enjouée. De dos, le jeune homme (puisque c'en était un) ne laissait que peu d'indice quant à son identité. Yuki et Fëanor pouvait distinguer une grande silhouette élancée, à la longue chevelure qui faisait penser immédiatement à un elfe. Mais quelque chose dans son maintien, son allure générale écartait cette option. C'était bien un être humain et les blagues salaces qu'il débitait à Borhin en étaient la preuve.

La région des montagnes avaient toujours attiré Ronan. Depuis qu'il avait hérité du rôle de Sentinelle de la rébellion de Terre, le jeune homme œuvrait surtout dans la cité de Sent'sura. Lui, qui avait passé sa jeunesse dans les plaines mystiques et la forêt de Drayame en compagnie des elfes, ressentait toujours le besoin de ce retour à la nature. Les montagnes offrait ainsi ce calme salutaire sur un plateau, d'autant plus que les armées d'Aile Ténébreuse se faisaient encore rares dans le secteur. Ainsi, dès que l'occasion se présentait, il partait volontiers pour quelque mission dans les montagnes. Cette fois-ci, Lencart Gralhin en personne lui avait demandé de régler un petit souci diplomatique avec un nain haut placé dans la sphère de Tilamus. Une fois son travail terminé, Ronan en avait profité pour faire un petit détour par Sola. La région l'avait toujours enchanté, notamment par rapport aux histoires légendaires qui se racontaient à propos des mines et tunnels du coin. Depuis tout petit, il rêvait secrètement d'explorer l'une d'elles à la recherche d'un fabuleux trésor. La vie d'adulte l'avait rattrapé, mais sa part d'enfance était toujours vivante. De plus, il avait entendu parler d'un artisan diablement efficace qui fabriquait et vendait des pointes de flèches forgées dans un métal inconnu et capable de percer n'importe quelle armure. Ronan ne savait pas quel crédit accorder à cette histoire, mais il aurait regretté de ne pas se faire sa propre opinion.

Lorsqu'il entendit les pas des deux nouveaux arrivants (ou plutôt revenants), Ronan se retourna brusquement et son mince sourire disparut presque immédiatement. Il jaugea les deux individus qui venaient de débarquer, alors que, dans son dos, Borhin retournait à ses forges. Comme par réflexe, le regard de Ronan vint se poser sur la jeune femme. Malgré son jeune âge, il avait déjà croisé de nombreuses créatures belles à en mourir. Mais celle-ci était tout simplement divine. Le garçon eut du mal à cacher son enthousiasme en découvrant le visage angélique et les courbes diaboliques de la demoiselle. Il ne décela pas les ailes repliées de Yuki, mais il comprit que la jeune femme n'était pas humaine. En tous cas, pas dans le sens où on l'entendait habituellement. Celui qui l'accompagnait semblait vouloir rester plus en retrait. Un elfe... Ronan s'approcha et scruta son visage.

- Hey ! Qu'est-ce que tu fous ici, Fëanor ?

Les traces vertes sur le visage de l'elfe ne laissaient aucun doute quant à son identité. Ronan connaissait Fëanor depuis qu'il avait été presque adopté par les elfes de la foret de Drayame. Ils s'étaient souvent croisé mais n'avaient jamais eu de véritable affinité. Ils avaient quasiment vingt ans d'écart, bien qu'aujourd'hui cela ne se voyait plus. Et le caractère de chien fou malpoli de Ronan n'avait pas semblé pas convenir à l'elfe qui apparemment n'avait pas vraiment cautionné ses jeux de chasse et de séduction au sein de sa communauté. Néanmoins, Ronan avait toujours respecté cet être mystérieux et peu avenant. Il était même sincèrement heureux de le recroiser, si loin de chez eux.

- Tu ne nous présentes pas ?

Ronan était peut-être surtout content que quelqu'un puisse l'aider à aborder la jolie créature qui l'avait littéralement envoûté.

Fëanor quitta son masque habituel de sérénité emprunte de mélancolie pour une expression de réelle surprise. Il ne s'attendait pas du tout à revoir Ronan un jour car depuis qu'il était partit de Drayame, il n'avait pas eut l'occasion de le recroiser. Il se souvenait cependant parfaitement de lui, de ses blagues et de ses frasques. Ce petit homme était un savant mélange d'humain et d'elfe, chose qui le mettait un peu mal à l'aise et parfois, qui l’horripilait. Mais au fond, il savait que Ronan était quelqu'un de bien et qu'il méritait le titre honorifique qu'on lui avait décerné. A son arrivée, l'elfe était déjà presque adulte et s'occupait déjà plus des bêtes que des gens mais ils avaient eut le temps de faire connaissance.

« Ronan. Je ne m'attendais pas à te voir non plus. Tu travailles avec...les nains maintenant ? »

Le grand elfe jeta un coup d'oeil par-dessus l'épaule de l'humain pour observer le gérant, un parfait exemplaire de mâle nain. Il ne put retenir un soupir. Parfois, nains et humains se ressemblaient beaucoup et en général ils faisaient bon ménage. Ce n'était pas si étonnant que le jeune homme se soit lié à l'un de ces mineurs bourrus.
Cependant, si Fanor était prêt à pardonner cet écart de conduite (oui oui, pour un elfe c'est un écart de conduite de fréquenter un nain trop longtemps), il n'allait pas simplifier les choses à Ronan pour autant. Il baissa les yeux vers Yuki et lui adressa un petit sourire gêné et désolé avant de revenir à son demi compatriote. Un pas en avant et voilà qu'il se trouvait entre lui et sa proie. Avec un sourire à demi innocent, il rabattit enfin son capuchon sur ses épaules et répondit à la question:

« Yuki, je vous présente Ronan, une sorte de frère d'adoption. Mais il faudra demander à toutes les jeunes femmes de la Cité des Arbres, si vous souhaitez en savoir plus, elles le connaissent toutes bien mieux que moi. Ronan, la demoiselle ici présente répond au nom de Yuki et elle a bien aimablement accepté de m'accompagner dans les mines. »

Sans s'étendre plus et parce qu'il savait que ces piques faisaient parti du jeu (chose qu'il avait mit longtemps à comprendre), il posa son sac sur le comptoir en bois derrière lequel se trouvait l'homme et sortie trois serpes fines.

« J'aurais besoin que tu les aiguise du mieux que tu peux s'il te plais. Je vais en avoir besoin et il faut que le tranchant soit aussi fin que possible.»

Fëanor ne voulait pas se montrer possessif envers Yuki, ni lui manquer de respect en la tenant à l'écart, mais il connaissait Ronan et préférait qu'il se concentre sur son travail plutôt que de compter fleurette à la jolie jeune femme.

Le nouveau venu était plutôt intéressant. Ainsi l'elfe était capable de se faire des amis? Honnêtement cela l'étonnait un peu, mais après tout, ils ne se connaissaient que depuis quelques heures. Aussi elle laissa Faenor prendre soin de cet... énergumène. Cet humain, bien que très agréable à regarder, semblait trop immature à son goût. Et pour dire! Vu le caractère de l'ange, elle n'aurait jamais du se permettre de le juger. Grand, beau, brun, il devait avoir un succès fou auprès de la gente féminine.

Malheureusement pour lui, Yuki n'était pas d'humeur à se laisser séduire. Aussi voulut elle l'arrêter tout de suite... Mais elle fut encore plus surprise de l'attitude de l'elfe. Ce dernier, non content que de la protéger de par sa position, fit bien comprendre à la jeune femme qu'il s'agissait d'un homme frivole. Il n'avait pas besoin de l'expliciter, le caractère de Ronan transpirait dans chacun de ces gestes. Ce qui perturba le plus l'ange, c'était les actions de Faenor. Il ressemblait... à un homme jaloux!

Elle fut stupéfaite par sa propre déduction. Bien qu'elle n'y croyait pas une seule seconde, c'était l'attitude qu'il usait vis à vis d'elle. A moins que ce soit pour embêter son frère d'adoption. La suite le lui confirma. Il ne voulait simplement pas que ni l'un, ni l'autre soit distrait dans leurs travaux respectifs. Cela ne dérangeait nullement la jeune femme qui aurait besoin de concentration pour protéger son employeur. Mais... Elle avait tellement envie de le taquiner maintenant qu'elle en avait l'occasion... Le voyage serait bien plus distrayant ainsi, non?

Lorsque l'humain eut fini son travail, elle lui saisit le bras avec douceur et lui sourit doucement. Ses yeux, toujours aussi noirs, brillaient d'une admiration feinte, et elle posa la première question qui lui passa par la tête:

- Comment un humain peut être adopté par des elfes? C'est impressionnant!

Que le voyage allait être amusant... Afin qu'il soit totalement sous son charme, elle vint lui murmurer à l'oreille:

- Il est pas très bavard ton ami, j'espère que tu le seras plus!

Et voila, les vraies vacances allaient pouvoir commencer.

Ronan faillit éclater de rire en voyant le visage franchement ahuri de Fëanor. Le monde était petit, mais il était presque ironique que ces retrouvailles aient lieu dans la forge d'un nain. D'ailleurs, l'elfe ne se gêna pas pour en faire la remarque au jeune homme. Ronan montra le sac de pointes de flèches qu'il venait d'acquérir.

- Eh bien... Je travaille avec les meilleurs, si possible. Mais c'est plutôt à toi qu'on devrait poser cette question !

Le rire franc de l'archer retentit enfin et montra qu'il n'attendait aucune réponse de la part de son interlocuteur. Ronan était taquin, quelque soit la personne qui se trouvait en face de lui. Fëanor devait probablement s'en souvenir.. En tous cas, il ne se vexa pas et apporta des précisions, bien que sommaires, sur l'identité de celle qui l'accompagnait. Une mercenaire ? Il était vrai que, malgré sa jeunesse apparente, elle semblait être redoutable. Cela accentua davantage l'intérêt que Ronan portait à cette dernière, et ce malgré les allusions de Fëanor à son égard. Il semblait que le jeune homme traînait encore, chez les elfes, une réputation parfois difficile à assumer, notamment en ce moment précis.

- Dans les mines ? Aurais-tu perdu la raison ?

L'idée était, en effet, plutôt farfelue. Pourquoi alors ne pas envoyer un nain dans les arbres ? Ou un ange sous terre ? Décidément, Fëanor avait toujours été un elfe à part. C'est pourquoi Ronan le respectait particulièrement.
Alors que l'elfe s'avançait vers le comptoir du nain Borhin, Ronan en profita pour se rapprocher de la prénommée Yuki. Sans paraître trop lourd, il tenta de la dévisager un peu plus. Les traits de son visage semblaient tellement parfaits qu'ils en devenaient presque surnaturels. La beauté de la jeune femme l'hypnotisaient littéralement. Du coup, Ronan, qui nourrissait généralement un beau complexe de supériorité, se sentit ridiculement quelconque à côté d'elle. Cependant, alors qu'il s'attendait à se faire gentiment (ou pas) jeter comme un malpropre, Yuki eut un comportement qui surprit grandement le jeune homme. Elle se montrait séduite et lui faisait presque du rentre-dedans ! Visiblement, le fait que Ronan ait côtoyé les elfes l'impressionnait beaucoup. L'archer adopta un visage faussement modeste.

- Oh... Mon seul mérite est d'avoir eu la patience de supporter leurs coutumes ringardes... En fait, j'ai surtout eu la chance de tomber au bon endroit, au bon moment. Les elfes cachent bien leur jeu. Ils sont froids à l'extérieur, mais chauds en-dedans.

Ronan se consterna lui-même devant l'indigence de sa remarque. Il avait trop pris confiance en lui lorsque Yuki s'était délicatement saisie de son bras. Et elle en rajouta une couche en lui murmurant à l'oreille. Pourtant le jeune homme sursauta et leva un sourcil interloqué.

- Serait-ce une invitation ? Je... je ne crois pas que Fëanor accepterait que... Et puis, qu'est-ce que vous allez chercher dans ces mines ?

Quelque chose, dans cette histoire, lui échappait et ce n'était pas un sentiment agréable. Ronan ressentit un brin de méfiance envers cette jeune créature très (trop ?) entreprenante. Et si elle avait déjà manipulé Fëanor, avant lui ? Et si elle était une pro-Aile Ténébreuse, à la recherche d'une proie ? Les interrogations macabres de Ronan disparurent presque aussitôt lorsqu'il croisa à nouveau le regard de Yuki. Bah, même si elle était une harpie... il plongerait avec délice entre ses serres...

Fëanor se contenta d'ignorer le petit manège qui se tramait à côté de lui. Il ne manqua rien des remarques de l'ange ni de celles de Ronan et devait bien reconnaitre qu'il était de moins bonne compagnie que l'humain. Un autre aurait passé outre en se disant qu'il n'avait pas engagé une mercenaire pour lui faire la causette, mais pour l'elfe, ce détachement n'était pas naturel et il prit la réflexion au pied de la lettre. Un peu honteux, il fit silence et sortit tout le matériel qu'il avait besoin de faire aiguiser.
Une fois ceci fait, il referma son sac et se tourna vers Ronan pour répondre à sa question. C'est vrai, un elfe sous terre ce n'est pas courant. Et pourtant c'était nécessaire.

« Je n'y vais pas pour l'immense plaisir de me cogner la tête dans les plafonds bas des nains. »

Le forgeron lui lança un regard noir par-dessus son épaule et marmonna quelque chose dans sa barbe. Pas la peine de savoir parler nain pour comprendre que c'était une délicate insulte à l'encontre de son client elfe, qui se contenta de hausser un sourcil d'un air un peu supérieur.

« Je vais chercher des Schas. Il semble qu'il y en ai une importante colonie dans une des mine non loin d'ici et j'ai besoin de leur venin pour mon travail. Mais je ne vais pas t'assomer de détails à ce propos, ça ne te servirais à rien. Est-ce que le travail peut être fait pour demain matin ? »

Au-dessus des remparts, le soleil commençait à se coucher lentement. Il était temps de rentrer préparer le matériel pour l'expédition du lendemain.
Fëanor se sentait mal à l'aise. Yuki avait l'air d'apprécier Ronan et cette proximité excluait un peu l'elfe, qui n'était pas du tout dans son élément. Il n'avait qu'une hâte : partir pour retrouver sa chambre et ses affaires. Mais rien sur son visage ne laissait présager cette pensée, il ne se serait pas permit autant d'indélicatesse. Au lieu de ça, il se retourna quand le nain sortit enfin de l'ombre de sa forge pour examiner le matériel. Il avait l'air sceptique. Les lames n'étaient pas bien grandes mais elles avaient toutes un usage bien précis et Fanor ne s'attendait pas à ce que cette petite créature barbue le comprenne. Le patron bougonna quelque chose où on ne compris que "Demain ... Levé du soleil". Pas la peine d'en savoir plus, l'essentiel était dit. L'attirail fut ramassé et regroupé dans un ballotin de chiffons avec autant de brusquerie que possible, histoire de faire grimacer l'elfe qui pensait à son précieux matériel. On ne trouvait pas ces instruments partout sur le marché, ils coûtaient cher !

[HJ: désolé pour le temps de réponse et le post très court, je manque d'idées.]