La Tourmente, où l'art de devenir Freylienne
La Toundra, cette vaste plaine gelée composée de neige et de terre gelée. Très peu hospitalière, cette terre abrite de nombreuses formes de magie, de créatures étranges et pas forcément très amicales, et c'est pourtant dans cet endroit qu’Elena avait conclu un rendez-vous avec un contrebandier. Elle voulait qu'il arrête de braconner en échange d'assez d'or pour qu'il puisse nourrir sa famille pendant deux années, ensuite elle lui proposerait un métier de bucheron, ils en avaient besoin dans les Glaces.
Le plus important pour l'instant était que l'homme n'était pas au rendez-vous, rendant légèrement nerveuse la jeune Générale. Elle n'avait bien entendu pas peur d'être attaquée, mais certains récits d'histoire rendaient compte de la douloureuse expérience de rencontres entre des humains et des créatures plus... pas très très humaines et loin d'être de gentilles petites peluches qui ne demandent qu'un câlin avant de poursuivre leur route. Non c'était plutôt des créatures qui vous dévoraient entièrement, qui broyaient les os et qui disparaissaient dans les creux du terrain comme ils étaient apparus... C'est à dire d'un coup. Leur pelage était très épais, camouflé aux couleurs de la Lande, ces créatures étaient extrêmement résistantes au froid, elles ne craignaient que peu les vents et les tempêtes sévissant souvent sur cet endroit. La pluie était en fait des minis grêlons extrêmement coupants, et le vent avait le don de pouvoir geler un corps en moins de trois heures et ce malgré les feux et les abris naturels offerts par les dénivellations du terrain. Le vent avait la faculté de changer d'orientation en quelques secondes, passant d'un vent de sud à un de nord, comme s'il était vivant, et avait la faculté de se diriger pour tuer ou faire le plus de dégât possible. Les fleuves et les cours d'eau sont aussi très dangereux, entièrement recouverts de glace, glace affinée par la neige la recouvrant, un piège mortel vu la chaleur de l'eau et l'impossibilité de refaire surface.
Elena était venue seule, elle s'était débarrassée de ses gardes du corps en les plantant dans le marché couvert, et avait rapidement pris cette direction. elle avait marché pendant près de deux heures, et s'était rendu au petit bois du rendez-vous. L'homme n'était toujours pas là. Elle triturait nerveusement le manche de son Katana, regrettant d'un coup d'avoir laissé sa hallebarde dans son bureau. Bien que cela ne puisse trop l'aider en cas de danger, elle se serait senti plus en sécurité avec. Une légende ne pouvait s'empêcher de revenir au premier plan des pensées de la jeune femme: celle de Freylord et de l'Hiver Eternel. la légende du vent hurlant, de la Tourmente, ce blizzard mi tornade mi grêle qui détruisait les hommes et les femmes qu'elle, forme de magie, ne désirait pas. Il parait que la mort était atroce, les hurlements du supplicié s'entendant aàdes lieux à la ronde. Certains soir certains habitants racontaient avoir entendu les hurlements et les supplications des personnes subissant le " Test ". Certains récits étaient même d'une précision à couper le souffle. C'était ceux des femmes transformées par le vent, des femmes devenues gardiennes de leur clans, des femmes devenues différentes, de cœur et d'esprit, mais gardant leur lien. C'était une sorte d'élévation pour certains, il y avait eu des sortes de suicide de masse suite à cette annonce, chaque femme voulant devenir plus forte, plus grande, plus maigre.
Ces femmes-là , les changées, les Freyliennes, avaient chacune un familier assez étrange, ours polaire pour certaines, phoque pour d'autres, loup pour d'autre encore. Les animaux qu'elles ressortaient de la Tourmente étaient tous liés au froid, à la glace, aux paysages dont ils venaient. Elles ressortaient aussi avec une armure et une arme, ces derniers semblaient fait de glace, en avait le peu de chaleur et la consistance, mais était tellement plus solide, et semblait répondre au moindre désir de leur possesseur. Allègement, angle quasiment impossible, c'était monnaie courante avec ses armes là, et les boucliers résistaient à des coups de tranches et d'estocs ainsi qu'a des écrasements. L'armure était assez magnifique, dans les tons de bleu glace et de fer, se mélangeant harmonieusement sur la plaque parfaitement adaptée au corps de la femme le portant.
Se secouant, la jeune générale sourit en voyant finalement l'homme s'approcher. Il était venu, c'était déjà un bon point, mais est ce qu'il allait accepter de se tenir tranquille pendant plusieurs années et de redevenir un honnête citoyen? Elle ne savait pas, c'est pour cela qu'elle allait le faire surveiller. Ils avaient eu de la chance de l'attraper sur unes des terres, le braconnage étant interdit, surtout en temps de guerre, Elena avait conscience que certaines familles peinaient à sortir la tête de l'eau, et cela l'énervait, même si elle ne pouvait rien y faire. Ce n'était pas à elle de s'occuper de ça et cela lui serrait le cœur. Elle était fatiguée de devoir supporter toutes ses douleurs là, de voir des gens vêtus de haillons. Bien entendu le peuple s'entraidait, mais l'attitude de ses parents, assez riches, l'énervait au plus haut point. Malgré cela , elle non plus ne faisait pas grand-chose pour que ça change. Pour ne pas dire rien du tout, elle donnait certes quelques pièces d'or aux plus pauvres, mais rien d'autre, et maintenant qu'elle avait une bonne occasion de pouvoir faire le bien, elle en profitait. Elle allait voir si l'être humain était foncièrement mauvais ou non, ça allait être stressant , décevant ou réconfortant, elle ne savait pas. Elle ne se faisait que très très peu d'illusion sur la nature humaine, en étant une elle-même elle savait ce que l'esprit et le pouvoir pouvait causer à une personne pourtant bien élevée. Elle en avait eu l'exemple avec sa sœur, et elle-même, ainsi qu'avec de nombreuses familles nobliaudes.
L'homme s'inclina devant elle et elle lui sourit en retour, inclinant légèrement la tête à son tour. Détaillant ses habits, elle remarqua qu'il était plutôt bien vêtu pour un braconnier, faisait-il du recel? Pour le moment elle s'en fichait, ce qui l'intéressait était le paysage autour d'eux. Il semblait avoir changé, le lointain champs de vision qu'elle avait sur cette petite colline au bois semblait avoir rétréci, être devenu plus flou. Dans doute la fatigue, elle n'en savait rien et n'avait pas trop envie de s'attarder à cet endroit, comme si son instinct lui hurlait de déguerpir au plus vite, mais elle n'en faisait rien. Jugeant l'homme de son unique œil rouge, l'autre maintenu caché sous son cache œil, elle sortit lentement la bourse et remarqua soudain que le bâton de marche de son interlocuteur était un gourdin. Engourdie par le froid, pas très attentive aux détails et sa main porteuse éloignée du manche de son Katana elle n'eut que le choix de bondir en arrière et de se laisser tomber, laissant le bâton filer au-dessus d'elle, manquant sa tête de peu. Malheureusement pour elle, la chute eut lieu sur un rocher affleurant du sol, lui brisant deux côtes, manquant de la faire tomber dans les pommes sous le choc. Elle vit le bâton de l'homme se lever une nouvelle fois et entendit un léger craquement quand il heurta sa tête de plein fouet. Le gout du sang inonda sa bouche, mais elle ne perdit pas conscience. Quelque chose semblait la tenir éveillée, elle ne savait pas quoi, peut être son instinct encore une fois? Elle ne savait pas, tout ce qu'elle savait c'est que l’homme, passablement horrifié parce qu'il avait fait avait saisit sa bourse et s'était empressé de courir, la laissant aller à une mort certaine.
Finalement cela avait été une énorme déception. Les hommes n’étaient que des animaux, plus obnubilés par l'argent que par la valeur de l'entraide humaine. Bien entendu l'argent apportait le pouvoir, mais ce n'était pas tout, l'argent apportait aussi le malheur de la perte d'une vie simple, de la perte d'ami. La doxa parlait uniquement de l'argent , des riches, de l'abondance, mais l'abondance est le mal dans une certaine mesure, car elle n'apporte que jalousie et égocentrisme.Car celui qui a ne veut pas donner, il veut tout garder pour lui, et ses proches, il se replie sur lui-même, oublie ses anciens amis et celui qu'il était; L'argent transforme les Hommes. Voilà la leçon qu’Elena allait retenir. Sa dernière car elle allait mourir sous peu, de froid? Par des animaux? Elle ne savait pas, la Toundra déciderait seule, où alors elle la laisserait agoniser de longues heures, l'épargnant du froid, des bêtes sauvages ou de la "Tourmente " ce fléau qui aurait pu ou la sauver, ou la broyer et la faire souffrir mille morts.
Elle ferma finalement les yeux, se résignant à la mort, après avoir fait des adieux silencieux à ses proches, à ses soldats et à ses ennemis. Elle savait que cet endroit allait représenter son tombeau, et que sans un coup de chance extrême, ou le fait que le braconnier parle elle ne serait jamais retrouvée. Ses cotes cassées ne lui faisaient plus mal, pas plus que l'énorme hématome qui fleurissait sur son front. Le froid avait tout engourdi, peut être que la Toundra n'était pas si monstrueuse que ça finalement, elle essayait de ne pas la faire souffrir, le froid engourdissait tout, même son cerveau, ses yeux d'où des larmes avaient coulés étaient clos, fermées par le gel, ainsi elle ne put voir la bise se rapprocher petit a petit d'elle se faufilant silencieusement jusqu'à la jeune femme résignée à la mort. Elena ne se sentit pas soulevée immédiatement, pas plus qu'elle ne sentit les particules pénétrer ses atomes, par contre elle sentit bien les pics de glace s'infiltrer dans ses poumons, tout aussi bien que son sang se geler.
Elle tenta d'hurler, de se débattre, mais elle ne pouvait pas. La douleur était atroce, son corps entier semblait brûler, ses yeux semblaient prêt a sortir de leurs orbites. Puis soudain son cache oeil lui fut retiré et un hurlement inhumain réussit à franchir la barrière de ses lèvres malmenées par le froid. C'était un cri inarticulé, long cri de souffrance. Chaque parcelle de son corps semblait brisée , son esprit était décousu et la douleur la rendait presque folle. Elle ne pouvait lutter contre ce froid implacable qui la maintenait en suspension au dessus d'un gouffre, soit elle luttait et survivait, soit elle choisissait la mort et elle chutait. Malgré elle, son corps, son esprit et ses pensées la ramenaient à la vie, elle ne pouvait lutter plus pour survivre qu'elle le faisait actuellement.
Puis aussi soudainement que la douleur l'avait saisi elle la quitta, la laissant haletante sur le sol de neige. Roulée en boule, son cache oeil reposant à quelques centimètres d'elle, elle sentait qu'elle n'en aurait plus besoin. Baissant les yeux sur ses mains, elle remarqua qu'elles étaient maintenant d'un bleu profond. Elle avait une armure sur elle, et un bouclier reposant à coté, sous un fléau, fait de fer et de glace semblait il. Une voix profonde raisonna soudainnement en elle, l'électrisant.
" Griffe de L'hiver, annonciatrice de l'Hiver Éternel, Tu as été choisi pour être le porte glace du peuple de Tourmente. Tu garderas tes pensées, tes sentiments d'avant. Tourmente a du te modifier pour que tu répondes aux attentes du peuple. " Puis la voix disparut, laissant Elena se redresser. Se tournant elle remarqua une forme blanche. De vagues pensées dans sa tête, elle se mit à voir double, se voyant d'un coté et de l'autre. Elle tomba a genoux et se tint la tête à deux mains, torturée par les visions. La vision finit par passer et elle releva les yeux en sentant une présence proche d'elle, une présence animale, contre elle même. C'était son familier, un phacochère blanc, une femelle d'après les pensées. La jeune générale se blottit contre elle, et remarqua enfin qu'elle n'avait plus froid. Malgré sa nudité, elle ne sentait plus le froid. Se redressant elle remarqua son armure, et des tissus en dessous, rouge et noir, déchiquetés gelés, inutilisables. Elle enfila l'armure, ne sentant même pas le métal gelé sur sa peau. Elle était devenue une créature de l'hiver éternel, une femme forte et capable de combattre les ennemis de son peuple. Elle n'était plus seule, elle avait un familier proche d'elle, et une mission enfouie au plus profond de son être, mais de cela elle n'en avait pas encore conscience.
Dans le blizzard sifflant autour d'eux, les soldats entendaient des hurlements, des cris, des spectres de voix humaines au milieu de ce capharnaüm Claire cru entendre la voix de son amante, poussant encore plus ses hommes avec elle, ils avançaient à travers une sorte de cyclone. Lightning avait l'intime conviction que son amante se trouvait au milieu. Ayant confiance en elle, ses hommes suivaient mais ils étaient de plus en plus nombreux à se demander si elle n'était pas devenue folle. Cela faisait 2 jours que l'homme avait avoué, deux jours que la seconde de la Générale avait manqué devenir une meurtrière. L'homme avait raconté ce qu'il avait infligé à cette pauvre femme, et comment il l'avait abandonné à une mort certaine.
Depuis ce temps là, ils parcouraient la Toundra à la recherche de la jeune Générale. Fouillant chaque mètres carrés de cette vaste zone, ils avaient peu d'espoir; La grande Blanche avait la facultés de camoufler ce qu'elle souhaitait. C'était une entités vivante, consciente.
* Au moins le corps, au moins le revoir une dernière fois, je veux voir mon amante une dernière fois... *
C'était le credo qui tournait en boucle dans sa tête. Débouchant finalement au milieu du cyclone, dans l'oeil, ils ne remarquèrent pas immédiatement le petit bois et la sorte d'igloo a l'entrée du bois. Leurs regard furent attiré par les anciens vêtements de la général, le rouge sur le noir et le gris noirci si cher. Ils l'avaient retrouvés, du moins en partie... Essayant de ne pas montrer son chagrin, l'ancienne seconde d'Elena, nouvelle Générale par testament alla ramasser les restes de vêtements de son ancienne amante. Laissant échapper un sanglot, elle ne put alors s’empêcher de tomber a genoux en serrant le tissus gelé contre son coeur. Elle avait perdu son amante, elle avait perdu la femme pour qui elle avait demandé sa liberté auprès de l'homme auquel elle devait la vie entière de sa famille, elle s'était affranchie de toutes ses contraintes pour cette Femme, qui maintenant la laissait seule.
La laissant seule à son chagrin, ils savaient que la Générale et sa seconde avaient été proches. Les soldats partirent en direction du petit bois avant de se figer. Devant eux, sous la forme d'une immense boule de poil se tenait un phacochère, d'un blanc immaculé, les défenses d'une ivoire parfait, l'air dangereux. Mais ce n'est pas ce qui les avait fait se figer, c'était plutôt la femme sur son dos, une sorte d'amazone sauvage, entièrement bleue, d'un bleu profond, vêtue d'une armure de fer mêlée de pierres de glace, les bras et jambes nues, la gorge nue et la tête recouverte d'un casque a corne.
Elena Mudach, Griffe de l'Hiver, Générale de Saline était devenue une Freylienne, une de ses femmes transformée par la " Tourmente ", cette magie étrange et vieille qui changeait les femmes en des créatures soumises à la Glace. Même si cela ne la changeait aucunement, si ce n'est la couleur de sa peau, et sa taille ainsi que ses équipements, le rouge et noir fut remplacé par le gris et bleu. Elle était devenue une Fryelienne , mais restait Salinéenne et humaine, cela ne dérangeait en aucun cas son travail, et le facilitait même de par son familier qui l'aidait en accroissant ses capacités mémoriales et de combattante.