Le grand loup était allongé sur le ventre, la tête posée sur ses pattes avants. Ses grands yeux gris-bruns refletaient le bleu du ciel renvoyé par le cours d'eau qu'il contemplait en silence. Les muscles relachés, les griffes rentrées, la queue balayant doucement le sol, il n'était pas en chasse. Beaucoup auraient dit qu'il avait dans le regard quelque chose d'humain, une tristesse captive. Ignorants! Le noble animal ressent avec bien plus de precision et de force la nostalgie amère de ceux qui restent quand la vie s'empare de leurs proches. Non, ils ne pleurent pas, ils ne gemissent pas, ils ne crient pas, leurs traits ne sont pas défigurés par la douleur. Mais leur regard noir deviennent un abime obscure à l'image de celui où se perd leur esprit.
La foret restait immobile, respectant la peine du predateurs, même l'étrange serpent, enroulé sur une haute branche d'un arbre dont les racines enjambaient doucement le ruisseau, ne disait rien. Son regard reptilien restait fixé sur ce que son protégé refusait de voir.
A moins d'un mètre du loup, une louve noire. Les yeux clos, immobile, sereine. Morte.
Quand le soleil entama sa descente dans le ciel, l'Opilion se laissa glissé le long du tronc. Repondant à un signal silencieux, Dinaholt se leva souplement. Il resta un moment immobile, affrontant la réalité, les yeux enfin  posés sur le corps de sa compagne. Furtivement, il passa sa langue râpeuse sur le museau de la louve avant de s'enfoncer dans la foret derrière Silmon.

***

- Humai nou loup, ça ne changera rien. Maladie, blessures, vieillesse... Ils meurent tous.
- D'autres peuples sont immortels! Démons, vampire, yogai, ...
- Je n'ai rien a voir avec eux Sil. J'aime la faiblese des humains et l'état d'esprit des loups. Je ne trouverais rien de tout cela ailleurs.
- Les lycans? Assume ton sang bon sang!
- ça suffit maintenant!

***

Dinaholt fini par ceder aux remontrances de Sil et revint vers les villes. Quittant son corps de loup avec regrets, il proposa son expérience dans les auberges qu'il croisait, décrochant du travail pour quelques jours, rarement plus d'une semaine.
Un mois plus tard, en arrivant dans un village, il retrouva par hasard une amie installée sur les lieux depuis peu, Philine. La commune s'agitait pour la préparation des fetes et Philine n'eut pas besoin d'insister longtemps pour convaincre Dina de rester les aider. L'ambiance festive balaya rapidement les pensées moroses du lycan pour le bonheur de Sil qui retrouva son mauvais caractère.
Les activités furent concentrées sur la grand place que l'on aménagea en prévision des visiteurs extérieurs que la fete attirait chaque année. Chants, danses, repars, musiques, animations, décoration, jeu, logements, ... Tout le village travaillait avec application à l'organisation de la gete, soit une cinquantaine d'adultes sous les encouragement d'autant d'enfants.
Renouant rapidement avec le monde humain, Dina mit ses capacités avec au service de la communauté, allumant les lampes, feux, bougies, offrant aux plus fatigués un isolement sonore, aidant à porter les charges loures, ... Occupant son corps et son esprit, il pansait son coeur au son des rires de ses camarades,des discussions animées le soir dans la taverne, des cris des enfants quand les étincelles jaillissaient au bout de ses doigts.
Le village était un petit havre de paix où les habitants étaient décidé à brandir humour et amour en bouclier contre tout les malheurs susceptibles de les frapper. Dina, par ses pouvoirs et sa race de lycan n'était pas plus étrange que la majorité des villageois. De multiples races, des pouvoirs étranges mais qui s’intégraient au quotidien de tous. Si bien que, quand on le questionna, il n'hesita pas à révéler sa nature, bien qu'il se garda de prendre sa forme lupine par respect pour les croyances pouvant subsister sur cette race.
***
- Dina! Diiiinn!
Le voix de l'Opilion résonnait dans sa tete avec autant d’excitation qu'un gamin le jour de son anniversaire. Cela ne pouvait dire qu'une chose...
- Devine Dina, devine! Devine qu'est ce que Banoun m'a demandé ce matin!? Allez!
-Banoun.. Si tu l'a écouté... Il y a du cannouuur dans l'air! Il t'a demandé de me demander d'un préparer pour ce soir?
- Gagnnééééé! Tu sais que je t'aime mon familier préféré?
- Parce que je fait de la cuisine? C'est un amour un peu ingrat!
- Mais non, je t'aime aussi quand tu me complimente!
- ça arrive?
- Non, c'est ta crise de trentenaire mais tu réalisera bientôt a nouveau combien je suis genial!
- Sans doute oui.. Ils veulent quoi? Un hachis permanenté?
- Oui, il a meme dit "avec beaucoup d'alcoll"!
Philine entra à cet instant dans le salon où Dina avait réquisitionné un canapé. Repliant rapidement ses couvertures, le jeune homme la salua.
- Matinale ce matin! Merci encore pour ce sublime canapé!
- Pas de quoi tu me payera ce soir par une danse!
- Tu ne voulait pas profiter de la fete pour voir Heriq?
Un sourire malicieux sur les levres, la jeune femme se leva et se dirigea vers les escaliers:
- Justement, je veut le rendre jaloux!
- Mais je ne veut pas le ...
- Tssss, tu me doit cette danse je te rappelle! Le coupa-t-elle avant de monter les marches d'un pas vainqueur.
Dehors, il ne restait plus que des hommes s'affairant à déployer de long tissus sur les murs, des guirlandes de papier d'un toit a l'autre, déposer des fleurs sur l'estrades, ... On entendait les voix des femmes qui se préparaient par les fenetres ouvertes des maisons tandis que les premiers voyageurs arrivaient, encore peu nombreux, souvent des habitués, cousins, amis, ... Dina aide quelques heures avant de retourner chez Philine.
Après l'avoir complimenté sur sa robe, ils déjeunèrent ensemble, au calme, tandis que la foule s'agitait dehors. Quand ils sortirent, la fete avait déjà commencé. On gardait les danse pour la soirée mais spectacles et jeux rivalisaient déjà sur toute la place.
Appelé a aider un viel homme aux pouvoirs de guérison, Dinaholt ne vit pas le temps passer et bientot ce fut Philine qui le renvoya chez elle pour qu'il se change et "soit présentable pour danser avec" elle. En riant, il s'executa.
Quand il revint, il ne restait plus qu'une petite scene pour l'orchestre et les tables disposées le long des murs encore chargés de victuailles accueillant les danseurs fatigués ou les viellard discutant de politique, choppe de biere a la main. Au centre, la danse occupaient la majorité des festivités, musique se mêlant aux rires et aux chants.
Il balaya les lieux en cherchant Philine du regard.

Il aperçut son amie a l'instant même où s’élevait la voix de l'homme qui annonça le début d'un nouveau spectacle.
Le jeu des lumières permit de faire apparaître une forme de flamme sur la scène encore vide alors que les premières notes s’élevaient du coté des musiciens. Renonçant à rejoindre Phili dans la foule dense, il lui fit signe d'un haussement d'épaule qu'il reportait leur danse de quelques minutes, le rythme médiévale de la chanson captivait déjà toute son attention.

Au centre de la scène apparut la danseuse, une fine silhouette aux cheveux longs mais dont l'ombre dissimulait le visage. Elle se mit en mouvement, entraînant avec elle l'imagination des spectateurs dans l'histoire de la jeune femme. Fasciné, il la regarda danser les premiers couplet, le coeur serré... Était-ce la musique ou la danse? Était-ce les paroles de la chanson ou la grâce de la jeune femme?

L’énergie de la musique remonta le long du dos la danseuse qui se cambra vivement, rejetant ses cheveux en arrière et révélant son visage au public

Une longue marche... Une longue marche pour parvenir au sommet d'une montagne, un voyage commencé des années plutôt... Un trajet difficile, une pente élevé, un sentier hostile, un environnement aride,...
Une quête au cours de laquelle il avait rencontré des personnes formidable, visité des lieux éblouissants, des vies qui ne demandaient qu'a être choisies,... Mais jamais il n'avait perdu de vu son objectifs, son point d'arrivée, la raison de son voyage.
Il n'y avait pas la place pour le doute. Il fallait grimper pour pouvoir vivre. Il fallait atteindre le sommet pour devenir lui-même, entier. Il fallait parvenir à la cime pour retrouver...

... Alyna. Les dernières notes s'envolèrent vers la lune, mais le coeur de Dinaholt avait déjà rejoint les étoiles qui brillaient dans ses yeux.
Les dernières foulées d'une course, la dernière pierre d'un édifice, les dernières lignes d'un livre, font toujours un effet étrange, où le coeur bat plus fort, mais presque douloureusement. Mais qui douterais des derniers gestes à accomplir?

Comme dans un rêve - et peut être était ce un rêve - Dinaholt se fraya un chemin dans la foule qui se dispersait pour reprendre les danses, bien qu'une partie resta regarder la femme prolonger le spectacle avec quelques cavaliers. Parvenu dans l'espace laissé libre aux danseurs, il La vit; elle lui tournait le dos et venait à peine de quitter son partenaire.
Il parcourut les derniers mètres qui les séparaient, le coeur lancé dans une course folle; attrapa doucement les mains de la jeune femme dans les siennes, une légère décharge électrique a leur contact; leva les bras en croix, entraînant ceux de sa partenaire a l'horizontal et commença a danser au rythme de la musique douce qui avait suivie celle de Lady Fae.

Auprès de sa soeur, il se sentait déjà apaisé. Quelques pas de danse et son souffle s'apaisa. Elle était là et désormais plus rien ne pourrait l'attendre. Elle était là, ils étaient réunis.
Lâchant une de ses mains, il utilisa l'autre pour la faire tourner sur elle même, rattrapa ses doigts une fois la rotation effectuée, mais ne repris pas la danse.
Ses yeux brillaient, mais il ne souriait pas, ému en redécouvrant un visage si cher a son coeur... mais tellement changé.

Deux regards qui se retrouvent, se reconnaissent, fusionnent. L'esprit est dépassé par le coeur, la raison par les sentiments. Combien d'information passent alors entre ces deux yeux, sans qu'un mot ne soit prononcé?
Il trembla legerement quand elle lui lacha la main pour se blottir contre lui. Immobilisé par l'émotion, il ne referma ses bras sur elle qu'après avoir entendu une deuxième fois sa voix brisé.

-Dina... pardon... Dina pardonne-moi.

Alors seulement il la serra contre son torse, doucement mais avec force, comme pour annuler les années de distances qui les avaient séparés. Il se sentait ramené plusieurs decenies au paravant, lar dernière fois qu'ils avaient eut la possibilité de se voir, se toucher. La main de sa soeur dans la sienne, qui l'entraine pour courir. Elle a peur, il ne comprend pas mais la suit sans crainte... Et après... La solitude, le monstre... Son absence, toujours prolongée... Jamais il n'avait songé a lui en vouloir, il en était incapable, quand bien meme il en aurait eut toutes les raisons possible.

Une mauvaise parenthese, mais une simple paranthése, se refermait doucement et, inconsciemment, Dinaholt crea autour deux un apaisement sonore remplacé par le doux bruit d'un vent qui n'existait que pour eux.
Inclinant la tete, il murmura à son oreille:

- Aly... Alyna... Je savais, je savais que tu reviendrais.

Et il se mit a sourire pour lui même, realisant qu'il n'avait jamais douté de ne pas la revoir. Et seulement maintenant qu'il l'avait dans ses bras, il se rendait compte que leu retrouvailles n'avaient jamais été acquises et qu'il aurait put leur arrivé une multitude de chose qui annule toute chance de se revoir dans le monde des vivants...

Il trembla légèrement quand Alyna recula, la laissa l'observer sans bouger, s'habituant lui progressivement aux changements sur le visage de sa soeur... Il n'avait aucun mal a retrouver la fillette de 6 ans mais percevait aussi une autre femme, adulte et qui semblait avoir vécu trop de chose pour son age.
Elle revint se blottir contre lui , réveillant un sentiment protecteur chez son frère. Oui, il avait grandi mais sa taille n'expliquait pas cette légère inversion des roles. Lui l'avait attendu pendant plus de 20 ans, lui savait que ce jours viendrais, il l'avait imaginé et rejouer des milliers de fois.
Il brisa sa bulle silencieuse quand Alyna se tendit et s’écarta. Sans s'en rendre compte, il la retint par le poignet alors qu'il se tournait dans la même direction.
Philine. Franche, directe, honnête. Il adorait ces traits de caractères chez son amie meme si dans le cas présent, si les liens qu'il avait avec Alyna avait été d'une autre nature, son intervention aurait été gênante.

- Philine.. Je l'ai ... Elle m'a... Il s'arreta là. Cette histoire n'était encore que la sienne et celle d'Alyna, la vivre était si intense et il n'avait pas envie de la raconter. Désolé, trouve quelqu'un d'autre pour la danse... Désolé, vraiment...

Il accompagna ses excuses d'un sourire gêné, se retourna vers Alyna mais son regard glissa le long de son bras en se rendant compte de son geste. Un pincement au coeur accompagna cette découverte. Ensemble, Alyna et lui venait de tourner une page mais celle ci ne serait jamais effacé complètement et il lui faudrait du temps, beaucoup de temps pour laisser partir ALyna sans crainte
Peut etre meme ne le pourrait-il jamais.

Il força un sourire pour sa soeur, mais n'eut pas le courage de la lacher, desserrant simplement ses doigts autour de son poignet pour aller attraper la main de sa soeur et lui proposa de sortir du village.

Main dans la main, comme des enfants, ils sortirent du village. Sans parler, car le silence n'était pas un vide mais une page blanche sur laquelle ils pourraient dessiner leurs vies, leurs passés, et leur futur avec application. Quand ils seraient près.
Pour l'instant, Dinaholt ne cherchait pas à remettre de l'ordre dans son esprit. Il laissait les pensées, les souvenirs, les rêves, les remords, ... naitre, mourir, s'envoller, grandir et changer doucement l'enfant qu'il était resté sans Alyna.

Elle se blottit a nouveau contre son jumeau qui s’émerveillait encore de la retrouver ainsi, dans des circonstances presque féerique à son gout. Il serait resté des heures entières à la garder dans ses bras en écoutant la nuit. En échos a ses propres pensées, elle murmura:

-Je crois qu’on a beaucoup de choses à se raconter, je ne sais pas par où commencer...

Et il n'eut aucun mal à comprendre les pensées d'Alyna derrière ces mots. Il s'assit au pied d'un arbre tout en la gardant contre lui, toujours inquiet d'un départ quelconque et expira lentement. Il était heureux qu'Alyna ait parlé ainsi, qu'elle ne l'ait pas sommé de parler, qu'elle même ne l'ait pas enseveli de paroles.

- Je suis heureux que tu sois là...

Heureux? Oui, heureux dans le sens le plus fort, le plus noble. Heureux comme on le dit trop souvent mais qu'on vit rarement.
Dissuadant sa soeur de prendre la parole en posant un doigt sur ses lèvres, il ferma les yeux, posant sa tète contre le tronc et laissant le bouillonnement de son esprit s’apaiser.
Parfois, il baissait la tête vers Alyna pour la dévisager en silence, gravant ce nouveau visage dans son esprit, croisant parfois son regard mais gardant le silence.

Il la serra encore plus fort contre lui. Son esprit était apaisé et il était prêt à parler. Leur lien de gémellité ne lui permettait malheureusement pas - ou peut être était ce mieux ainsi - de ne faire vraiment qu'un. Et s'ils voulaient reelement reprendre une vie de frère et soeur, Dina et Alyna devaient apprendre a découvrir l'histoire de l'autre, toutes ces choses qui les avaient séparés, qu'ils avaient vecut sans l'autre. Pour se comprendre, meme quand tout semblait couler de source entre eux, il fallait se re-apprendre.

- Je suis pret... J'ai besoin de te raconter, de me raconter a toi... Et surtout de t'entendre toi, de savoir toutes ses choses qui ont fait ta vie pendant toutes ces années...

Il avait un peu mal en disant cela. Il aurait tant aimé pouvoir affirmer connaitre la femme qu'Alyna était devenue...
En pensant à cela, il remarqua et intégra reelement le fait que ça soeur, sa jumelle, l'enfant qu'il avait quitté à six ans etait reelement devenue une femme. Pleine de charme.

- Est ce que... tu te sens prete a parler? Ou a m’écouter?

Qu'importe le temps qu'il leur faudrait. Des heures, des jours, des mois... Ils avaient le temps a present. Et si Alyna n'en avait pas la force maintenant, ils dormiraient tranquillement pour se retrouver dans leur reve, retourneraient danser et gouter les plats preparés, ... Tout ce qu'elle voudrais, lui n'avait plus rien n'a exiger, il n'aurait put etre plus heureux qu'il ne l'était.

Avec un sourire il hocha la tete et Alyna commença son récit. Patiemment elle tressa un pont entre la fillette qu'elle était et la femme qui se tenait maintenant dans les bras de son frère. En l'écoutant, il s’émerveillait de voir a quel point il restait tout deux opposés et complémentaires. Elle n'évoqua pas sa première transformation qui avait été un évènement déterminant pour lui. Elle parla de cet instinct mais Dina eut bien du mal à trouver dans ses souvenirs quelque chose qui puisse ressembler a cette Lyan.
La voix de sa jumelle s’éteignit et le lycan fit un rapide point dans sa tete. Au final, il retrouvait Alyna dans ses paroles, meme si les actes qu'elle avait narré parraissaient bien difficile à associer à la jeune femme.
Il porta sur elle un regard sans aucun autre jugement que celui du jeune frere admiratif.

- J'ai fuit... Sil m'a sauvé et on a fuit... Il faisait froid... Je crois que j'était malade... Sil n'était plus là et puis ... Une famille, une grande famille m'a accueillit. Il sourit a ce souvenir. Il reconnaissait sans mal sa chance d'avoir eut pendant quelques temps un foyer, une protection, des rires et des pleurs.

- J'ai grandit avec les humains pendant quelques temps et puis... Et puis ma vraie nature ne m'a pas laissé le choix. Ils ne m'auraient pas acceptés tel que je suis, et je ne me serait pas accepter au naturel avec eux... La foret... J'était loup Aly! Je suis loup... Si Sil ne m'avait pas retrouvé, si je n'était pas a ta recherche, je serais resté loup toute ma vie... Avec eux, je suis moi. Encore une fois ses yeux petillaient.

- Mais les plats chauds sucrés des humains m'ont ramenés vers le vrai monde, reprit-il avec un grand sourire. J'ai appris a cuisiner, et petit a petit a gerer tout un etablissement.... Et pour avoir plus de chance de te trouver j'ai voyagé le plus possible.

- Dina! Tu te moque de moi!? Dinaaaa!

Le serpent glissait vers lui a toute vitesse, lachant quelques etincelles du bout de la queue. Il se redressa devant son familier et siffla

- Tu n'a pas encore cinquante ans! Pars encore une fois sans me prevenir et je te...

L'Opilian tourna la tete vers Alyna, comprenant que la jeune femme n'était pas dans les bras du garçon par hasard. Ses grands yeux noirs fixerent la jeune femme intensement. Dina se mordit la levre...


- Une femme gamin, une femme comme une autre! Si c'est pas toi qui la laisse tomber, ça sera elle!
- Non, Alyna c'est pas pareil... Quand je la retrouverais elle ne me laissera pas tomber, et moi non plus...
- Alyna, Alyna, Alyna! Tu la dessine, tu en parle, tu en reve, tu la voit partout!

- Tiens, regarde ça! Je vais me lancer dans la sculpture, j'ai du talent non? Je me demande si aly...
- Dina, arrete ça! ça fait 15 ans que tu la cherche, que tu l'attends! Elle en vaut pas le coup, vit ta vie gamin!
- Mais ma vie sans ...
- Dinaholt Hiel écoute moi bien, ta soeur est sans doute encore en vie. Mais quelqu'un qui laisse mourir son frere de sang ne merite pas que tu la mette au centre de toutes tes pensées!

- Tiens, elle est partie la blonde?
- Telia. Et oui.
- Laisse moi deviner...
- ça va, lache moi!
- "Alyna, Alyna, Alyna! Et moi alors? Tu m'aime ou pas? Fait ton choix!"
L'imitation de Sil tirra un sourire au lycan
- Va te prendre une biere Sil, laisse moi cinq minutes.
- Cinq minutes, pas plus, compte pas sur moi pour te la faire a l'envers comme ta soeur!
- Sil!

- Il m'a l'air louche ce type...
- C'est quoi qui te gene? Son troisieme oeil ou son collier rose?
- Un peu des deux... Tu lui fait confiance toi?
- A mon avis il est aussi fiable qu'Alyna ...
- Sil!

- Allez, allez Sil, des chasseurs, depeche toi!
- Prend ta forme humaine!
- Nan, faut prevenir les autres!
- Cours donc devant, je t'attends ici. Appele moi Alyna.
- Sil! C'est pas le moment!



Dina hesitait a intervenir. Les piques regulières sur sa soeur de Sil n'étaient pas mechantes, il en était convaincu. Il aurait meme été touché que Sil prenne aussi injustement sa defense si ce n'était pas au detriment de sa soeur.
Prudent, il tendit la main vers l'Opilian qui claqua sechement de la queue pour le dissuader de continuer son geste.
Le serpent a poil se pencha encore un peu plus vers Aly, a une dizaine de centimètre du visage de celle ci, sa tete reptilienne toujours aussi inexpressive.
Finalement il se redressa et declara:

- Bon sang, c'est un exploit! Elle reussit a etre ton portrait craché tout en etant bien belle pour un mamifère! Et elle n'a pas cette lueur stupide dans les yeux qui te caractèrise si bien.

Il s’en était mieux sorti qu’elle, ayant vécu une vie plus paisible, elle sourit paisiblement, oui lui n’avait pas eu l’entraînement rude que lui avait fait subir son père. Elle se demanda cependant qui était ce Sil dont parlait son jumeau, de plus elle sentit la panique se saisir d’elle quand son frère lui avoua que si les plats sucrés des humains n’avaient pas été là il serait resté loup, chose dangereuse puisqu’il arrivait que les lycans restent figés à jamais, c’était déjà arrivé. Ses lèvres s’étirèrent en un sourire en lisant dans le regard de son frère cette joie d’avoir appris à être gérant de gîte et taverne tout en voyageant. Elle s’apprêtait à lui dire qu’elle serait ravie de goûter à ses préparations, mais un sifflement sonore et un claquement de queue détournèrent son attention et elle tourna la tête pour apercevoir un étrange serpent qui s’approchait en rampant, il se dressa devant elle en la regardant dans les yeux, elle retenait pour l’instant son grondement, mais sentait son instinct se redresser, attentive aux réactions du reptile.

Elle n’allait pas gronder sans raison, pas devant son frère, elle refusait de montrer cette part agressive d’elle-même tant qu’il n’y aurait pas de signe de danger, cependant elle s’était légèrement redressée et son expression avait changé, plus sérieuse et fermée, méfiante. Elle vit son jumeau tendre la main vers la créature et celle-ci claquer de la queue, mouvement qui la fit réagir immédiatement, d’autant plus que le serpent se pencha en avant à quelques centimètres d’elle. La louve laissa monter un grondement sourd d’avertissement dans sa gorge et retroussa les lèvres, laissant voir ses canines. Pourtant quelque chose l’empêchait d’agir et d’attaquer, peut-être parce qu’elle sentait confusément un lien entre l’animal et Dinaholt, tient peut-être que c’était lui Sil. Elle fit taire son grognement, mais continua de fixer le serpent étrange.

-C’est lui « Sil » ? demanda-t-elle en penchant la tête sur le côté une expression intriguée sur le visage.

Son frère répondit par l’affirmative et la jeune femme étira ses lèvres en un nouveau sourire sincère examinant le serpent de haut en bas avec attention. Elle prit son menton entre son pouce et son index, la mine songeuse avant de lâcher un sourire.

-Il est bien étrange, ravie de te connaître Sil, dit-elle avec politesse, de la même façon que si elle s’adressait à un être humain. Moi aussi j’ai quelqu’un à te présenter, mais d’abord je dois finir de te conter mon histoire.

Elle lui raconta toute la fin de son histoire, parlant de ces dix années à vivre de la chasse, puis sa rencontre avec John, l’entrée à la Meute pour son besoin d’appartenir à un groupe et chasser la solitude et l’ennui qu’elle sentait venir, ses différentes rencontres et le retour de Lyän, le fait qu’elle soit devenus chef des chasseurs, puis bras droit de l’alpha, sa rencontre avec Ivor où elle prit sans s’en rendre compte une expression rêveuse et lointaine, se souvenant soudain de la façon dont ils s’étaient séparés. Elle passa sous silence une partie cependant de ses activités, comme par exemple son séjour à Adhes, cependant elle n’omit pas l’existence de Fylia, ni son séjour en prison, bien qu’en abordant le sujet son visage se fermât complètement pour mettre de la distance entre ce qu’elle racontait, évitant ainsi de revivre cette lourde expérience.

-Voilà, on peut dire que j’ai essayé de vivre pour deux puisque je croyais que tu étais mort. Et je te présente la dénommée Fylia, un peu mes yeux pour surveiller le monde depuis le ciel, déclara-t-elle en levant son bras gauche vers le ciel.

Un battement d’ailes se rapprochait et une ombre fantomatique blanche plongea du ciel nocturne vers Alyna pour ralentir et se poser en douceur sur l’avant-bras de la jeune femme, elle fit attention de ne pas blesser son amie avec ses serres et tourna son regard de rapace vers Dinaholt en penchant la tête sur le côté, ébouriffant ses plumes blanches, elle lâcha un hululement doux.

-Elle te salue, ainsi que Sil. En fait littéralement elle a dit : Bonjour vous deux.

Elle tendit la main vers un buisson proche d’elle et Fylia comprit le message apparemment puisqu’elle s’envola vers le végétal pour s’y poser, tournant ses yeux à nouveau vers Dinaholt et son amie, lissant ses plumes et les laissant discuter.