- Citation :
- Raconte ton premier contact avec le monde extérieur après que Lunéra t'ai libéré de tes entraînement. Tu insisteras vraiment sur les ressentis de ton personnage.
Les faubourgs de la capitale s'étendaient sur plusieurs kilomètres après la muraille nord de la capitale. En fait de faubourgs il s'agissait d'un groupement d'habitations plus ou moins salubres abritant une population elle aussi plus ou moins salubre. Il n'était pas conseillé aux touristes en visite dans la capitale de s'y aventurer une fois la nuit tombée, d'ailleurs il n'était conseillé à personne de s'y risquer. En guise de rues et d'avenues le bidonville comptait un réseau infini de venelles et de ruelles,le tout formant un labyrinthe qui n'avait jamais été cartographié. Autant de possibilités de voir son existence soudainement écourtée et d'adopter pour dernière demeure terrestre le sol recouvert d'immondices d'une impasse, là où personne ne trouverait jamais votre dépouille et où vous pourriez tomber dans l'oubli en toute tranquillité.
C'est dans ce charmant lieu à l'allure si champêtre que Danalieth fit son entrée en ville après une journée de voyage éreintante. La première chose qui le frappa fut l'odeur. Lui qui avait toute sa vie ou presque été habitué aux effluves enivrantes de Flora découvrait tout à coup un tout autre panel olfactif. En se concentrant on pouvait aisément identifier chaque odeur, ici une légère odeur d'urine, là-bas une odeur de fruits en décompositions, dans ce coins-ci un animal (non identifiable à ce stade) finissant de se décomposer, enfin et dominante, une odeur de misère et de pauvreté. De celles qu'on ne peut pas reconnaître lorsque toute sa vie l'on a vécu dans un château avec des nuées de serviteurs insignifiants à son service.
Cette odeur Danalieth l'avait déjà portée sur lui, c'était avant. Bien avant.. C'était de ces odeurs qui font faire la grimace aux bonnes gens, de ces odeurs qui vous collent à la peau. L'odeur de la misère humaine et de tout ce qu'elle inclue. Danalieth vivait sa première rencontre avec la civilisation depuis dix ans. La Jungle, ainsi surnommée par ses habitants, rassemblait tout ce qui pouvait se trouver à Sen'Tsura de voleurs,meurtriers,violeurs et autres hors-la-loi. La lie du genre humain somme toute.. Oh bien sûr une infime part de la population était contrainte,faute de moyen, de vivre dans ces taudis, ces gens là vivaient dans la peur du lendemain,se demandant au moment de fermer les yeux si oui ou non ils reverraient le jour se lever. Malgré la dureté de la vie dans le bidonville il s'était trouvé quelques individus assez courageux, ou assez fous, pour ouvrir des auberges et des hôtelleries. Le soleil étant couché depuis de nombreuses heures l'odeur était devenue supportable.
Danalieth s'avança vers le premier établissement qu'il croisa, peu désireux de s'attarder à l’extérieur. L'endroit avait été nommé par son propriétaire, un homme nerveux et sec comme une trique, « La Pucelle du roi », bien qu'au vu de l'état de la salle commune cet endroit ai vu passer plus d'un homme. L'aubergiste quitta son comptoir et s'approcha de Danalieth un sourire mauvais aux lèvres.
-S'tu veux bouffer mon bonhomme ce sera cinq pièce de bronze,pour la nuit quinze et pour une fille quatre de plus.
Danalieth regarda le tenancier sans comprendre.
-Une fille ?
-Ba ouais mon gars une d'moiselle pour passer la nuit au chaud quoi ! Écoute si t'as pas d'argent tu sors de mon auberge avant que je m'en charge. On prend pas les mendigots ici !
Danalieth comprit enfin ce que l'aubergiste lui proposait, un instant il fut tenté de payer les quatre pièces de supplément, mais il se reprit bien vite en avisant dans le fond de la salle ce qui lui sembla être les filles en question.
-Je prend le repas et la chambre.
-Pas de regrets pour les minettes ? Garanties sans maladies tu sais..
Danalieth extirpa de sous son manteau une petite bourse de cuir et en sortit la somme convenue. Les yeux de l'aubergiste brillèrent un instant à la vue de la poche de cuir. Dedans ce trouvait la somme que Lunéra avait bien voulu lui offrir, autrement dit pas grand chose.
-J'ai dit le repas et la chambre. Tiens.
L'homme haussa les épaules et empocha ses pièces de bronze. Il indiqua une table près de la porte et disparu dans sa cuisine. Durant tout l'échange les quelques clients encore présents n'avaient cessé de dévisager Danalieth, le jeune homme gagna sa table et s'assit tentant d'ignorer les regards parfois malveillant des habitués. Lunéra l'avait entièrement habillé de cuir, son ensemble était simple et pratique pour voyager mais surtout il était neuf. Danalieth compris que c'était là la raison de ces regards peu sympathiques, il se sentit soudain un peu moins à l'aise qu'à son arrivée. Il n'avait même pas essayé d'entrer en ville sachant très bien qu'une heure après le couché du soleil les portes étaient hermétiquement fermées.
Danalieth attendit, les secondes s'égrainèrent et devinrent des minutes, de plus en plus nerveux il était sur le point de se lever pour aller quérir l'aubergiste lorsque celui revint, chargé d'une assiette de soupe, où flottait des morceaux de ce qui semblait être de la viande bouillie, et d'une chope. Le regard que Dana' avait lancé à la soupe devait être bien plus qu'éloquent car le tenancier pris un air mauvais et lui lança :
-Un problème avec ma soupe gamin ?
La menace était à peine contenue.
-C'est parfait. Merci.
Danalieth ne portait pas d'arme sur lui, si cela devait dégénérer il y avait fort à parier que les hommes louches accoudés au bar ne se rangent pas vraiment de son côté, aussi valait-il mieux ne pas s’attirer l'inimité des locaux. L'aubergiste fixa un instant Danalieth qui soutint son regard et après un instant retourna derrière son bar d'un pas traînant. Agressé, Dan' se sentait agressé. Tout lui semblait hostile ici, dès l'ouverture des portes il se hâterait de quitter cet endroit et de rejoindre la ville. La salle se vida peu à peu et bientôt ne restèrent plus que l'aubergiste, ses « filles » et Danalieth.
Pendant tout ce temps, le jeune homme avait définitivement renoncé à terminer son assiette et s'était uniquement intéressé au contenu de la chope. De la mauvaise bière, un peu aigre mais buvable.Tout cela était nouveau pour Dana', la pauvreté,la misère, les vices des hommes, en tant que Polymorphe il ne gardait aucun souvenirs de ses dix premières années sur Terra. Pour lui sa vie commençait cette année où Lunéra l'avait recueillie. Il avait donc toujours vécu confortablement et ne manquant de rien, aussi avait-il quelques difficultés à appréhender le fait que des humains puissent permettre en toute conscience que d'autres êtres vivent dans la détresse.
Danalieth jugeant le moment opportun s'approcha du comptoir et demanda à l'aubergiste de bien vouloir lui indiquer sa chambre.
-La troisième à droite à l'étage.
-Je peux avoir la clé ?
L'homme éclata de rire,
-La clé ?! Mais quelle clé ? Ou tu t'es cru mon gars ?
Danalieth se renfrogna et monta jusqu'à sa chambre. La pièce était petite et comme dans tous les établissements de ce genre présentait un matelas de paille et une table de chevet rustique pour tout mobilier. S'allongeant sur son « lit » il repensa à la journée qu'il venait de passer.
Le réveil avait été rude, après son annonce de la veille Lunéra s'attendait bien évidemment à ce qu'il parte le plus tôt possible. Après de courts mais émouvants adieux, Danalieth avait pris la direction de Sen'Tsura, la seule ville où il ai jamais mis les pieds. Le soleil allait bientôt être à son apogée il décida donc de s'arrêter sur le bord de la route afin de déjeuner. L'après-midi à venir s'annonçait aussi chaude que la matinée passée, il hésita donc à se débarrasser de son manteau à capuchon pour essayer d'échapper à la chaleur.
Il en était à ce point de ses considérations lorsqu'un bruit se fit entendre plus haut sur la route, il se leva et ne tarda pas à distinguer l'origine de cette nuisance sonore. Une vieille charrette descendait vers lui au rythme des aléas de la route, à la place du conducteur, un vieil homme. Celui-ci était vêtu d'une simple robe de bure,sûrement un prêtre en route pour la capitale. La charrette arriva au niveau de Danalieth et s'arrêta, le vieillard fit un grand sourire à son vis à vis
-Je vous emmène jeune homme ?
Danalieth observa cet homme d'âge mur qui osait adresser la parole à un étranger sans s'être assuré de ses bonnes attentions auparavant. Qui plus est il lui proposait..de la compagnie ? Dana' haussa un sourcil, et ne sachant quoi répondre balbutia plus qu'il ne parla.
-Je..enfin..Je..
-Allons je ne vous demande pas votre bourse.
Bien que peu nécessiteux de devoir entretenir une conversation de quelque nature que ça soit, le sourire bienveillant du vieillard acheva de le convaincre.
-Très bien je monte.
Danalieth alla ramasser ses affaires et pris place à côté de l'ancien, celui-ci claqua de la langue et les chevaux repartirent.
-Alors on voyage ? On parcours le monde ?
-Je...oui c'est ça. Puis-je me permettre de vous demander votre nom ?
-Mon nom importe peu mais si cela peut te fait plaisir, appelle moi Isaac. Je me rend à Sen'Tsura, tout comme toi Danalieth.
-Comment connaissez-vous mon nom ?
Danalieth se leva presque de son siège avant de se rappeler où il se trouvait. Il se rassis attendant une réponse de l'étrange vieillard.
-Je sais bien plus de chose que tu ne le penses mon garçon..
-Qui êtes-vous vraiment ? Nous sommes nous déjà rencontrés ?
-Oh que oui mais tu ne peux pas te souvenir de moi. J'ai connu tes parents il fut un temps.
-Mes parents ? ! Je..je ne me souviens pas d'eux..
-C'est fort dommage..
Après un moment de gène la conversation avait repris entre les deux hommes, tout d’abord timide puis se faisant de plus en plus aisée au faire et à mesure. Le vieil homme semblait parfois omniscient et cela avait à plus d'une occasion perturbé Danalieth, il se sentait comme percé à jour. Ce vieillard était tellement différent de Lunéra, la seule personne qu'il eut jamais réellement connue. Si Lunéra pouvait parfois se montrer dure et intransigeante, il leur était arrivé de partager des moments de tendresse et de complicité Aussi Danalieth aimait-il à la considérer comme une mère.
Vint le moment de l'arrivée à Sen'Tsura, le vieil homme le laissa à l'entrée du bidonville, et ils se firent leurs adieux.
-Et bien au revoir Isaac et encore merci !
Le dénommé Isaac sourit à Danalieth et le jeune homme se détourna, avançant vers les masures.
-Adieu..mon fils. Murmura l'ancien.
Cette rencontre avait marqué Danalieth au-delà de ce qu'il voulait bien admettre. Le vieillard avait fait allusion à des épisodes de la vie du jeune homme dont seul lui avait connaissance. Qui était-il ? Une espèce de magicien ? Ou simplement un vieux fou inoffensif ? L'homme semblait parfois omniscient et cela avait à plus d'une occasion perturbé Danalieth, il se sentait comme percé à jour. Mais peut-être se faisait-il des idées.. Et ce sentiment de familiarité qu'il avait ressenti à l'égard de cet inconnu...
Dana' ôta ses vêtements et se glissa dans son lit, la journée du lendemain serait assez longue comme ça sans qu'il ai besoin de se retourner la tête, et les Dieux en soient témoin il avait besoin de sommeil.