Misanthrope-Solitaire-Déterminé-Austère-Inhospitalier-Bourru-Elégant-Penseur.
Sen’tsura, capitale du Royaume de Terre. Sen’tsura la Merveilleuse, cette étrange cité qui inspire les rêves les plus fous, Sen’tsura, cette déesse immobile qui finit d'achever les derniers espoirs.
Il y a trente-deux ans de cela dans un quartier aisé, naissait dans la famille Albann le jeune Lothaire fils unique de Luis et Onée Albann. Ce nouveau-né était prédisposé à devenir l’objet de l’avancée sociale de ses parents. Comme beaucoup d’enfants de sa condition. Luis était un juriste réputé, connu pour ses connaissances des lois. Une simple famille de petits bourgeois habitant la capitale comme tant d’autres, mais dont la destinée allait être bouleversée par ce petit être qui tétait le sein de sa mère. Une vie plutôt banale s’offrait pourtant à lui, mais jamais il ne gouterait à cette simplicité bourgeoise. Sa mère, Onée occupait la place de femme au foyer, don le quotidien était l’ennui et les commérages, la pauvre femme n’avait jamais son mot à dire dans l’éducation de l’enfant. En effet Luis, le chef de famille comme il aimait qu’on le surnomme dictait la vie chez lui comme un tyran dans son royaume.
C’était un homme dur avec des cheveux rasés et un regard d’acier qui était redouté des coupables et même des victimes. Il voulait offrir à son fils la meilleure des formations juridiques afin que celui-ci reprenne gentiment le flambeau sans broncher, mais ce n’était pas par amour pour sa descendance, c’était une cause moins noble qui le poussait à vouloir faire quelque chose de petit être, c’était l’avidité. L’avidité d’avoir un fils célèbre, un fils connu et riche. Il voulait être le merveilleux père d’un merveilleux fils à condition que ce soit lui-même qui définisse les merveilles.
On confia donc le jeune Lothaire âgé de cinq ans à peine à Maître Julius, le très redoutable juge Royal de Sen’tsura. C’était un membre de la cour qui possédait une très grande influence et qui dirigeait le plus grand tribunal du royaume. Malgré une apparence rigide c’était un homme passionné par son travail, si bien qu’il avait fondé une corporation de Juristes. Très puissante et très reconnue, cette corporation pesait lourdement sur le pouvoir exécutif du Roi en personne. Cela bien entendu dérangeait fortement mais l’ambition du bonhomme écrasait tout sur son passage.
Maître Julius prit donc le très jeune enfant sous son aile. Et contre une large pension en fit son petit servant. Lothaire passa donc une partie de son enfance à apporter de lourdes piles de documents à son maître sans réellement les comprendre, à préparer son thé ainsi qu’à lui masser les pieds. Julius se trouvait bien trop « pris » par ses affaires pour s’occuper d’un môme incapable de comprendre les subtilités de son métier.
La demeure de maître Julius était un grand hôtel particulier non loin du palais Royal. De lourdes grilles en fer séparaient cet habitat bourgeois du reste du monde, et l’intérieur qui était d’une grande richesse restait malgré tout très strict témoignant de la rigidité de son propriétaire. Julius avait épousé une jeune fille de la petite noblesse qu’il laissait de côté, n’ayant trouvé en elle que le profit de son nom et de son blason. En échange la famille se refaisait une situation. Cette femme était toujours ailleurs, comme maladive, elle souffrait du manque d’attention de mari et restait très souvent au lit si bien que Lothaire ne la rencontra que rarement.
Mais vers les douze ans du jeune Lothaire, son père apprenant et découvrant l’inutilité de cet apprentissage fit un scandale. Luis c’était simplement rendu au cabinet de Julius afin de prendre des nouvelles de sa progéniture et avait surpris son fils unique en train de préparer le café de son maître, et à force de questions apprises qu’il avait été trompé.
On décida donc de changer de percepteur. Et ce fut un certain Matthieu Granz qui fut choisi. Matthieu Granz était un homme riche originaire de Selian qui avait fait fortune en devenant notaire à Sen’tsura. C’était quelqu’un de réputer pour son bon gout, notamment en matière de femmes, on disait que toutes les jeunes filles de bonnes familles étaient passés par chez lui, mais cela n’entachait en rien sa qualité de juriste. C’était un personnage dans la trentaine qui s’habillait toujours chez les meilleurs tailleurs, de plus il était plus attentif aux enfants et moins imbu de lui-même que l’ancien professeur du jeune garçon.
Lothaire fut pris en tant que clerc notaire et Matthieu lui apprit les bases du droit tout en lui enseignant la conduite à avoir en société. Il lui apprit même le maniement des sabres. Lui en offrant d’ailleurs pour son anniversaire. Et c’est vers ses quatorze ans que le notaire découvrit les pouvoirs de son apprenti et sa nature d’Esper. Lothaire Albann s’était découvert une toute petite maîtrise du vent qui consistait à repousser quelque peu l’air afin de pouvoir faire tomber un vase.
Hélas le pouvoir n’était encore que minime. Le premier choix de Matthieu fut de convoquer les parents du garçon dans son cabinet. Un cabinet d’exception puisque celui-ci se trouvait presque en face du palais et avait été conçu par le même architecte que celui qui avait façonné les parties les plus grandioses de la maison royale. Quand Luis apprit que son fils avait quelques talents sorciers il ne voulut rien savoir. Il serait juriste, pas prêtre ou savant.
Malgré les revendications paternelles, Granz choisis de mettre un mage à disposition de son élève, ce ne serait que bénéfique que de développer ses dons même s’il était appelé à devenir Juge. Pendant donc deux ans le jeune reçut un apprentissage extrême que ce soit juridiquement pour rattraper le temps perdu ou en magie pour apprendre à utiliser ses capacités naturelles. Le mage, un certain Crénéon lui enseigna ce qu’il devait savoir sur sa race mais aussi à développer des pouvoirs aussi différents les uns que les autres. Lors de ces deux années il apprit à se comporter en société, mais il avait toujours du mal à s’adapter aux autres, il était différent et il savait parfaitement bien, d’ailleurs ses camarades et les jeunes de son âge lui rappelaient toujours de façon cruelle. La cruauté du manque d’amour, d’amitié et le sérieux du travail, au centre même de son existence lui forgeait peu à peu une personnalité rigide, à l’écart des autres. Il n’appréciait que son maître. Même le mage l’ennuyait et s’il l’écoutait parfaitement et était bon élève il n’était pas passionné par la maîtrise propre de la magie. Il voulait tout bêtement apprendre, il passait des fois des nuits entières sur des documents concernant l’histoire de Terra mais aussi sur les occultismes de ce monde. Apprenant toutes sortes d’étrangetés sur Akaor Mir et Nayris, sur Exios et sur les continents perdus.
Les choses se bousculèrent alors vers ses dix-sept ans. Un démon venu d’un autre monde avait envahi Ciel, Feu et Eau. Ne restait qu’une partie de Terre qui entrait alors en guerre. On parlait d’affreux et de terribles êtres maléfiques qui auraient massacré la famille royale de Ciel. Des barbares venus d’un autre univers qui auraient été aidé par un puissant mage, un immonde traître qui avait renié les siens pour pactiser avec l’horreur même.
Lothaire fut renvoyé chez lui, Crénéon était appelé à servir dans les rangs de l’armée et Granz avait décidé de rejoindre Selian où selon des rumeurs l’impératrice avait convié les seigneurs des glaces afin de se préparer à une éventuelle guerre. Mais c’était avant tout l’année de la nomination de Lothaire, l’année qui l’avait vu recevoir un diplôme décerné à la va-vite par des bourgeois apeurés qui se moquaient d’examiner quel candidat méritait ou non. Le monde était lâche. Beaucoup trop lâche pour Lothaire qui regardait tous ses compatriotes, tous les gens qu’il avait connus s’enfuir où pleurer devant un ennemi.
Qu’en était-il de la justice triomphante ? De la gloire de mourir au combat ? Cette extase de couardise rendait le jeune Lothaire malade. L’immonde vérité de ce monde n’était que le ridicule. Galaad combattrait à la place du Roi ? Voilà qui était une farce. Que faisait le pouvoir ? Que faisaient les hommes ? Tous préféraient se cacher. Il vit même une patrouille de soldat entrer dans le tribunal qu’on lui avait décerné afin de s’y cacher. Des déserteurs, le combat à peine commencer et il y avait déjà des déserteurs.
Ce monde dégoutait le jeune homme, qui de ses dix-sept ans trouvait les autres bien trop faibles. Voilà donc ceux-là qui c’était toujours moqué de lui ? Mais sa défiance face à la mort ne tarda pas longtemps. Quand il rentra chez lui après plusieurs années ce fut pour trouver la maison pillée, sa mère avait été battu et son père c’était cacher dans le four. Un spectacle qui figea Lothaire. Voilà que les bandits donnaient libre court à leur génie diabolique. La vérité de la lâcheté humaine lui apparut alors. Finis les rêves de preux chevalier, de justice inébranlable. Il ne restait que la misère humaine, et ses larmes. Les larmes de son impuissance. La dureté d’une vérité toujours plus sombre. Il n’y avait donc aucun juste sur Terra ? C’était déjà trop tard. L’Aile Ténébreuse avait gagné. La justice avait perdu, car ses plus humbles serviteurs n’étaient que des coquilles vides, il n’y avait aucun général intransigeant, aucun juriste droit. Il n’y avait que de la peur et de l’égoïsme. Et les démons n’étaient que d’horribles monstres avides de pouvoir et de sang.
Il fallait trouver un responsable pour Lothaire. Et ce responsable était simplement les gens, les humains. Les humains, les elfes, les nains. Tous avaient été des lâches, des bandits et leur manque de rigueur leur avaient valu la pire défaite de ce monde. Ils ne méritaient aucun apitoiement. Aucune pitié. Ils méritaient simplement un châtiment, mais les démons eux non plus ne méritaient pas de gouverner ce monde, ils n’en avaient pas le droit. La couardise des Glaces finit de convaincre le jeune homme. Voilà que le continent restait caché derrière un blocus presque confortable.
C’était trop pour Lothaire qui vomissait l’humanité tout entière et chaque être vivant de sa perfidie, voilà que les pires lâches se mettaient au service de l’Empereur démoniaque. Et s’il eut un moment pensé rejoindre les rangs de la rébellion, il fut vite dégouté apprenant que Galaad, l’officier qui avait déjà perdu une guerre voulait prendre la tête de ce mouvement et tenter de le fédérer. Il y avait comme quelque chose pourrit aux royaumes des Glaces pour oser prendre de telles initiatives. Le manque de sérieux tout cela dégoutait Lothaire et s’il aurait pu rejoindre les rangs zelphosiens pour assumer une punition contre l’humanité il refusait tout alliance avec un envahisseur qui faisait régner la loi du plus fort.
La noblesse s’était perdu dans un océan de fainéantise et méritait son sort, ce monde avait couru à sa propre perte tout en sacrifiant inutilement des milliers de vies. Il fallait que Terra dans son entièreté soit jugé. Et seul un dieu peut se permettre d’ainsi juger la vie humaine dans son ensemble.
C’est d’ailleurs ce qui se présenta à Lothaire. Tandis que les années passaient il apprit l’existence de Lilith, puis des adorateurs de la déesse des morts. Et il savait parfaitement à quoi il avait à faire, il avait pendant de longues journées, de longues semaines étudier le cas de Nayris, de son histoire comme les vils prêtres de Yehadiel, ces crapules tout aussi vendues les uns que les autres, racontait la vie de cette déesse. Il avait étudié l’étrange magie qu’elle donnait aux êtres qui la servaient, la nécromancie. C’était une divinité qui de par sa nature dépassait la justice humaine et qui la rendait elle-même. La mort, quel meilleur juge ? Nous sommes tous égaux devant elle.
Lothaire prit donc la décision de rejoindre les rangs de la justice de la Mort. Travaillant d'arrache-pied à des recherches ésotériques et occultes. Accumulant un savoir autrefois perdu. Il fallait permettre à tout prix à la droiture de venir encercler le monde, à la justice de faire son œuvre et à la mort de rester l’unique règle divine.
- Citation :
- Raconte ton ascension au poste de prêtre maraudeur (nécessite d'accomplir rituel sacrificiel)