Pourtant élevée dans un environnement propice au calme, Lenore s'est toujours montrée intenable. Curieuse et frivole, elle aime explorer le monde et découvrir de nouveaux lieux ; rencontrer de nouvelles personnes. Cependant, son insouciance est sans doute ce qui la caractérise le mieux : un scorpion mortel est comparable, à ses yeux, à un mignon petit animal inoffensif... C'est aussi son plus grand défaut ! Incapable de discerner le bon du mauvais, elle doit toujours compter sur ses camarades pour la remettre sur le juste chemin -  encore faut-il que ces Camarades soient dignes de confiance !

Malgré ce caractère de fille naïve à problèmes, Lenore se révèle être d'une intelligence déconcertante. Elle a acquit, grâce au temps et à ses facilités d'apprentissage, un savoir bien plus important que la majorité des êtres humains - pour une jeune femme de 19 ans . La pirate utilise ces connaissances afin d'améliorer le quotidien de son équipage (notamment celui de son frère), qu'elle considère comme sa véritable famille. "Chercheuse" plus que "pillarde", elle n'aime pas prendre part aux conflits ou voir le sang couler, esquivant généralement les exécutions dans l'espoir d'être la première à trouver un magnifique trésor d'or et d'argent... Ou bien une pile de livres !

[Pour plus de détails sur l'histoire, se référer à la fiche de Jihad, qui complète la mienne (la réciproque est vraie).]

Feu : dans cette région ou la végétation et la nourriture sont aussi rares qu'une tempête de sable sur la banquise, une tribu pacifiste avait élu domicile. Positionnée sur une colline, adjacente à la mer, celle-ci semblait reposer dans un calme éternel, loin de tout problèmes , de toutes guerres, de tout conflits... C'est dans ce lieu paisible que naquirent deux enfants, deux probables héritiers. Oh, leurs parents semblaient si fiers d'avoir pu assurer, doublement, leur place de Dirigeant au sein de la tribu ! Leur joie fut néanmoins brisée en deux lorsqu'ils eurent la confirmation que le second-né... Etait une fille ! Peu leur importait, au final, car seul l'un d'entre eux pourrait prétendre au titre de Chef. Dans ce cas-ci, il s'agissait bien entendu du garçon !

Lénore, comme sa mère l'avait nommée, vécue donc dans l'ombre de Jihad. Chouchouté, privilégié, les parents semblaient incapables de détacher leur attention de l'ainé... On aurait pu croire que la fillette développait une haine profonde envers son frère ; en réalité, celle-ci tentait de partager ses "souffrances", lui qui, contrairement à elle, était enchainé à la volonté de leurs parents. Nombreuses furent les tentatives de la cadette pour emmener son frère faire une courte ballade : elles se soldaient le plus généralement par un échec, et des sermons interminables de la part de sa mère, prétendant agir "pour son bien". La nuit semblait être le seul moment qui, pour une raison évidente,  permettait aux deux moitiés d'entretenir une réelle discussion : l'un parlait de sa soif de liberté, l'autre, de son envie de découvrir le monde ; l'un parlait de son désir de voyager jusqu'à l'aurore, l'autre, de son rêve de pouvoir atteindre l'autre bout de l'océan ; l'un prétendait pouvoir devenir capitaine d'un navire de pirates, l'autre, prétendait pouvoir le construire...  Les deux compères parlaient tant et si bien qu'ils décidèrent, un soir comme un autre, de conclure un marché : un jour, ils partiraient ensemble, prenant le large pour découvrir de nouvelles contrées ! Et rien ne les arrêterait... Non, rien.

C'est ainsi qu’un autre soir, les deux compagnons prirent la route – ou, plus précisément, la mer – à bord d’un navire marchand posté à quai, dans un port à quelques dizaines de kilomètres du village qu’ils laissaient derrière eux. Il ne fut pas bien difficile pour les deux déserteurs de se dissimuler dans les cales du navire ! Ces marins semblaient aussi bêtes que leurs pieds, et le Capitaine était bien trop occupé à raconter ses aventures en mer à des femmes de joies, pour se rendre compte que deux passagers clandestins s’étaient invités sur son rafiot… Quand le tumulte créé par les vagues percutant la coque se fit sentir, Lénore gloussa, et ravala sa salive en serrant contre elle la main de son frère. De la peur ? Non. La présence de Jihad suffisait à elle seule pour lui ôter toute crainte… En réalité, elle tentait de stocker toutes les informations et tout les sentiments qui pénétraient son pauvre petit cerveau d’enfant. Elle réussit tant bien que mal à se calmer, pour finalement s’endormir comme si rien ne s’était passé…

(…)

« DEBOUTS LA DEDANS ! Prenez balais et serpillères et astiquez moi ce pont ! Et m’faites pas répéter ! »

Sans ronchonner, les mousses se levèrent en trombe et s’équipèrent du matériel de nettoyage adapté, avant de monter les escaliers grinçants menant à l’étage supérieur. Là hauts, la plupart se mirent à genoux, nettoyant farouchement  le bois pourris du navire dont l’âge surpassait celui de tout l’équipage réunit. Le quartier-maître inspecta une dernière fois les lieux, et remarqua une silhouette sur son hamac, immobile, endormie… Il s’approcha silencieusement de l’individu, avec toute la grâce et la souplesse qu’un pirate peut s’offrir, et hurla une nouvelle fois aux oreilles de sa pauvre victime.

« JE CROIS PAS AVOIR EXEMPTE QUI QUE CE SOIT ! »

Lénore sursauta cette fois-ci, bel et bien réveillée ! Elle se positionna assise sur son lit improvisé, et essuya sans grande insistance ses pauvres yeux fatigués…. Le contremaître lui adressa un sourire, puis prit une voix bien plus adaptée à la personne à laquelle il s’adressait.

« Ah, désolé ma ptite. J’avais pas vu qu’c’était toi. T’vas quand même pas me dire que t’es trop fatiguée pour aller faire l’boulot des autres lampettes ? »

La jeune femme maugréa, et passa subtilement sa main sur son ventre, mimant une douleur imaginaire.

« C’est que… Je ne me sens pas très en forme pour… »

« Tatata ! On me la fait pas à moi ! » plaisanta t-il, un sourire inquiétant sur son visage. « J’en ai connu des gamines comme toi, et on va pas m’faire le coup du mal de ventre pour être dispensée des  tâches ingrates. »

Elle soupira ; son plan venait de tomber à l’eau ! Vaincue, elle sauta sur ses jambes et s’étira longuement, lâchant presque par instinct un long soupire d’ennui. Le contremaître l’observa faire, et il attendit qu’elle ait entamé les premières marches de l’escalier pour l’interrompre dans sa course.

« Tu m’as vraiment pas l’air douée pour les trucs physique, ma piote… Tu sais garder des secrets ? »

Quelles genre de choses ce vilain pirate préparait-il ? Voulait-il lui tendre un mauvais piège ? Lui donner une tâche bien plus horrible encore que le nettoyage d’un vieux plancher mordu par les champignons ? Elle gloussa, et tenta de cacher son inquiétude, mais exécuta un « oui » timide de la tête, rejoignant alors son supérieur sans dire un mot.

« Suis-moi, ce que j'vais te montrer devrait te faire plaisir… »

L’éphémère regrettait déjà d’avoir tenté de dormir quelques minutes de plus… Bon sang, il n’allait pas la louper ! Sa façon de présenter les choses, son ironie, son sourire… Tout laissait croire que ce Pirate allait lui en faire voir de toutes les couleurs. D’ailleurs, le simple choix de sa direction suffit à la faire frissonner de tout son corps : il se dirigeait dangereusement vers la « porte interdite », une simple porte bloquant l’accès à une salle non-autorisée aux simples mousses. Un son de clef, du contact de la serrure avec celle-ci, avant qu’un « clic » caractéristique ne se fasse entendre ! Et lui se tenait la, rire au visage, attendant avec impatience que sa proie dédaigne entrer – ce qu’elle fit, tête basse…

« Tu devrais te plaire ici. »

Elle mit plusieurs secondes à relever la tête, et ce qui se tenait devant elle la laissa bouchée-bée : des laboratoires, une forge ?! Dans un bâteau ? Pirate ?

« Que… Que-ce que ça fait là? »

« La femme du Capitaine, s’tait une sacré alchimiste et une enchanteuse hors-pair ! Et son premier gamin  vouait un culte à la forge, alors pour garder sa famille près d’lui, il a jugé bon de leur offrir un petit espace personnel… »

Émerveillée, Lenore osait à peine poser les yeux sur les différents instruments qui se tenaient devant elle. Incroyable ! Une bibliothèque se dressait même en face de l’entrée, remplie de bouquins à en craquer ! Cet endroit semblait être un brin de paradis en enfer…

« ‘Tention, j’t’ai jamais dis que tu pourrais rester ici. J’en parl’rais avec le Capitaine, et si on voit que tu nous es plus utile ici, bah… »

« Je vous décevrais pas, Monsieur ! »

L’homme rigola à la façon d’un vieillard desséché, puis posa sa main dans les cheveux de la gamine avant de l’ébouriffer, affectueusement.

« Oublies ce ‘Monsieur’. N’oublies pas que tu restes une Pirate, piote. »

Citation :

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