[Terminé] Quand le lapin rencontre un soleil

Leyceline marchait sereinement dans la ville de Faestalia. Elle avait trois contrats. Elle en avait rempli deux sans grand problème. Il ne lui en restait plus qu'un, et allait savoir pourquoi, elle ne parvenait pas à mettre la main sur sa cible restante. Elle aurait envie de hurler de rage. Mais non, après le bruit qu'elle avait fait autour de la mort de Morgana, la lapine devait être saaaage.

//Tu parles !// songea-t-elle en se passant une main dans les cheveux.

La nuit tombait petit à petit, ce qui rendait la température extérieur supportable, même si les vêtements très courts de Leyce étaient toujours justifiés. Elle se dirigea vers une rue plus étroite, la dernière où elle pouvait espérer trouver son homme : Un vendeur de poudre arc-en-ciel. Pourquoi elle devait le tuer ? Parce que. Elle ne savait pas. L'ordre était tombé ainsi. Peut être tentait-on de l'éloigner de la capitale pour un moment ?

Elle secoua sa tête, et vit enfin sa cible. Il l'attendait. Leyce fronça les sourcils. Ça, c'était pas habituel ! Elle sortie son arme dans un chuintement feutré.

-Alors Lapin blanc... Tu pensais pouvoir tuer mes subordonnés puis moi sans que je ne réagisses ?

Leyce ne répondit pas, se contentant de froncer les sourcils.

-T'en prendre à moi, le chef de la garnison n'est pas malin !

Un dealer devient un chef de garnison... d'accord...

//Il vaut mieux pas chercher à comprendre je pense...//
-Allez, viens là ma belle qu'on en finisse...

Leyce se fendit et de son arme, elle désarma le... sa cible. Trop facile. Elle lui trancha la tête en cherchant autour d'elle. Il y avait un problème...

//Ah oui... effectivement...//

Sur les toits couvrant la petite rue, une dizaine d'archer se mirent en position. Avec une injure, elle détala comme... un lapin, zigzaguant dans la foule du quartier populaire comme si elle dansait. Comment faire pour qu'ils la lâchent ? Elle cracha par terre de rage, prit un virage serré et manqua de percuter un homme. Il faisait environ sa taille, ce qui était pas si courant que ça, et portait une armure de couleur or très... ouverte. Accompagnée d'un lion, il était pas des plus discret... exactement ce qu'il lui fallait !

Elle l'attrapa et le tira à elle pour lui donner un baiser qui pouvait paraître passionné. Elle prit bien soin de laisser tomber ses oreilles pour qu'elles n'apparaissent pas. La ruse fonctionna, et les hommes de l'Aile poursuivirent leur route sans même marquer un temps d'arrêt sur le couple.

Lorsqu'ils eurent disparu à l'angle de la rue, Leyce se laissa aller contre le mur vers lequel elle avait attiré l'homme, en soupirant.

-je vous pris de m'excuser... Mais apparemment ici, ils dépècent les lapins plutôt que de les écouter...

Son ton était ironique, bien qu'elle fut consciente qu'elle n'était pas passé loin de la fin pour ce coup-ci.

Faestelia … Pourquoi avais-je voulu revenir ici ? C’est une bonne question. La nostalgie, probablement. Je ne voyais pas d’autres raisons. En revanche, j’étais étonné de voir et de constater tous les changements qui ont pu avoir lieu. Enfin bon … En plus de 3 000 ans, il ne fallait pas être trop surpris. De toute manière, un monde ne peut jamais rester le même ; surtout en tant d’années. Ou alors, il fallait être assez crédule et croire aux miracles. Ce qui n’était et n’est toujours pas mon cas. Mais passons. C’est inutile d’épiloguer sur le pourquoi du comment. Ça ne m’avancerait à rien et j’en suis bien conscient. Assez, je fus assez étonné de constater que, malgré mon armure fort peu discrète, personne ne se souciait de moi. Oh, tant mieux. Ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre, non. Justement, je voulais être tranquille alors que les m’ignorent … C’est très bien ainsi. Mais ce n’était que le calme avant la tempête. Évidemment, même ici, il m’est impossible d’être tranquille.

Sans que je ne comprenne pourquoi ou comment, une fille m’attrapa et … Une minute ! Elle faisait quoi, là ? C’était bien un baiser, non ?! Et tout ça pour … Échapper à des homme d’Aile Ténébreuse. Génial. C’est super de servir d’échappatoire à une … Lapine ? Oui parce que visiblement, c’est ce qu’elle était. Calme-toi, Gilgamesh. Calme-toi … Elle s’est excusée, après tout. Laÿon restait à l’écart et ce n’est pas plus mal. Je pense que j’aurai assez mal pris une certaine réaction venant de sa part. Je reculai de quelques pas pour être sûr qu’elle ne me sauterait pas à nouveau dessus avant de me mettre à la fixer :

« - Ce n’est rien. Cependant, évitez ce genre de chose à l’avenir. Par contre, j’aurai juste une question. Qui était ces hommes ? »

Leyceline retourna un regard amusé à celui qui lui avait servi de couverture. Elle avisa le lion qui ne semblait pas vouloir agir, et effleura sa garde avec un sourire bien à elle.

-Vous plaisantez je présume, souffla-t-elle amusée.

A voir son air, il ne plaisantait pas. Leyceline déchanta.

//Il se fout de moi ou quoi ? Tout le monde à entendu parler d'Aile Ténébreuse ! C'est... c'est normal ! Surtout à Faestalia !//

La lapine regarda autour d'eux, personne ne leur prêtait attention... tant mieux... Mais il ne valait mieux pas rester fixe... sinon, ils attireraient l'attention ! La lapine marcha alors au hasard des rues, invitant l'homme en or à la suivre.

-Vous n'avez jamais entendu parler d'Aile Ténébreuse ?
-Bien sûr que si. Rare sont ceux qui ne le connaisse pas aujourd'hui, non ?
-En toute franchise, je pense pourvoir affirmer que tout le monde a entendu parler de lui... Pourquoi cette question sur ses hommes ?
-J'ignorais que ces hommes étaient sous ses ordres.

Leyceline jeta un regard vers un garde qui avait ce blason si typique. L'homme ne la reconnut pas. Évidemment... Ils ne savaient pas à quoi elle ressemblait. Ils savaient juste qu'elle devait attaquer... Trop facile. Pas assez de challenge. Elle se concentra à nouveau sur son compagnon.

-Ils portaient son blason au poitrail. Il vaudrait mieux que vous appreniez à le reconnaître... Ça pourrait être utile.
-Si vous le dites.

Leyce le dévisagea un moment. Mais d'où il sortait celui là ? Merde, les hommes de l'aile faisait des massacre et ça le laissait de marbre ?

-Vous ne m'avez pas l'air bien au courant des choses... Faîtes attention. Faestelia de nos jours n'est pas un endroit tranquille... Autrement je n'y serais jamais allé...

Elle eut un sourire sardonique. Elle devait tuer les troubles fêtes. Ceux qui étaient trop... bruyants, trop dangereux ou quoique ce soit d'autre de trop pour la rébellion.

-J'ai remarqué. Cette ville est effectivement différente d'autrefois. J'admet que je ne suis pas au courant de ce qui se passe en ce moment mais je me renseigne.

Autrefois... Mais autrefois quand ?

-Je... Je ne suis peut être pas très vieille, mais je n'ais jamais connu Faestelia comme un havre de paix... Même avant l'Aile...

Elle prononça ses phrases, avancement d'une hypothèse qu'elle avait, comme si elle réfléchissait en même temps.

-Moi, si. Mais c'était il y a bien longtemps.

Elle cligna des yeux. Longtemps. Mais longtemps quoi ? Avant la guerre des nations ? Mais il devait même pas avoir son âge ! Ou alors pas beaucoup plus ! Bon, laissons de côté la logique, ce gars était... vieux. Donc il résistait. Mais dans la même, il semblait un peu débarquer de... nulle part. A moins que... Leyce fronça les sourcils, et décida de jouer le tout pour le tout, quitte à ce qu'il soit un pro-AT, au moins elle le saurait.

-Je me présentes. Leyceline Métivier, autrement connu sous le pseudonyme de lapin blanc... Mais je doute que vous ayez entendu parlé de moi... Accessoirement, je suis une assassine... c'est pour cela qu'on me poursuivait.

Elle esquissa une courbette sans pour autant le quitter des yeux.

-Enchanté. Je m'appelle Gilgamesh. Je comprends pourquoi vous étiez poursuivie, alors.
//Ce mec est carrément bizarre !//

Leyce lui offrit un sourire amusée.

-D'ordinaire ma fonction fait plus d'effet que ça ! Remarqua-t-elle en mimant une déception feinte.
-Oh vous savez, plus rien ne m'étonne vraiment aujourd'hui.
//J'aurais pas deviné !//
-J'ai cru remarquer effectivement... Que savez-vous exactement sur le pigeon roy... euh... Aile Ténébreuse.

L'erreur était volontaire afin de tester son interlocuteur. Leyce était curieuse. D'où, par Nayris, pouvait-il venir ?

-Pas grand-chose. Seulement qu'il vient d'une autre dimension et qu'il a instauré un règne de terreur sur Terra.
-Hum, souffla-t-elle avec dédain. Vous savez le principal... Mais vous devez faire attention... Si vous avez connu le monde en paix, voilà longtemps qu'il ne l'a pas été. Encore heureux que quelques uns résistent...

Elle le dévisagea afin de voir sa réaction vis-à-vis de la mention de la rébellion. Elle le testait, purement... Mais c'était plus fort qu'elle. Il fallait qu'elle soit sure qu'elle ne risquait rien avant de partir.

-Personnellement, je me fiche un peu de ça.

La véracité de ses paroles la soulagèrent. Aussi, elle décida qu'elle ne craignait rien de lui. L'assassine s'arrêta alors de marcher et lui fit face.

-Bien, merci encore et ne vous inquiétez pas... je ne vous importunerais plus de la sorte.

Elle esquissa une nouvelle courbette, attendant une réaction de sa part avant de partir.

Cette fille était … Intrigante. Elle était sûre d’elle et ne laissait paraître aucune faiblesse. Il valait l’avoir comme alliée que comme adversaire. Je voyais assez facilement qu’elle se méfiait également de moi mais je ne pouvais pas lui en vouloir pour ça. C’était tout à fait légitime. Par la suite, elle me posa tout un tas de questions auxquels je répondis le plus honnêtement possible. Il y avait de fortes chances pour qu’elle cherche à me tester. Alors mentir maintenant, ce serait une erreur. Surtout que je n’avais rien de particulier à cacher. Elle se présenta comme étant Leyceline Métivier. Je fis immédiatement de même, par politesse. Elle me prenait peut-être pour un fou ou quelque chose du même acabit mais qu’importe. Ce n’était pas bien important, de toute façon. Elle fit alors une courbette en ajoutant qu’elle ne m’importunerait plus de la sorte. A vrai dire, ça m’avait surtout gêné sur le coup. Je ne suis pas habitué à ça … Que ce soit pour de faux ou pour de vrai.

Tiens, visiblement, elle allait partir. Or, je venais à peine de la rencontrer alors ce serait dommage de ne pas prendre un peu de temps pour discuter. Il me fallait donc trouver un sujet de conversation. Intéressant, évidemment. Je ne vois pas l’intérêt, sinon. Réfléchissons … Qu’est-ce qui pourrait bien intéresser une personne comme elle ? Mais oui ! Bon, ce n’était pas sûr qu’elle connaisse mais au moins, ça lui en apprendra un peu plus sur moi. Normalement :

« - Dites-moi Demoiselle, aimez-vous l’histoire ? Si oui, vous devriez connaître la légende des chevaliers d’Arthurios, non ? »

Leyce parut surprise. Se retenant de cligner des yeux comme si elle ne comprenait pas, elle voulait demeurer neutre. Néanmoins, elle était curieuse. Elle en avait entendu parler de ces légendes là d'il y a elle ne sait quel millénaire. Mais cela ne l'avait pas plus marquée que ça. pour tout dire, elle se souvenait de l'avoir lu quelque part, mais était bien incapable de se souvenir de où, quand, comment, ou tout simplement quoi avec exactitude.

Elle sourcilla finalement, et pencha sa tête sur le côté. Ses deux oreilles étaient repliées vers l'avant. Elle porta un doigt à sa bouche en réfléchissant, essayant de se rappeler de tout ce qu'elle avait dans sa mémoire... Mais il lui fallait avouer qu'il n'y avait rien de plus que le titre de la légende qui restait disponible.

-J'en ai entendu parlé oui, dit-elle alors. Mais pas en profondeur, je dois bien l'avouer...

Elle le fixa un peu plus intensément, le dévisageant de ce fait. Il était blond, et avait des yeux rouge... ça, ce n'était pas commun. Il brillait autant qu'elle était discrète. Quelque chose qu'elle pouvait dire, c'est pour autant qu'il n'attirait le regard que de jeune demoiselle qui soupirait à son passage, avec une mine boudeuse de voir la lapine à ses côtés.

Cela faisait rire Leyce. Rien ne l'intéressait mise à part sa liberté. Que ces pucelles en chaleur dévisage l'homme de la sorte, la faisait beaucoup rire. Un peu jaune certes, mais quand bien même. Elle ne comprenait jamais ce qui se passait dans la tête de ce genre de fille ! Elle, elle avait envie de les gifler et de les secouer.

//Il y a la guerre bon sang ! Elles pourraient pas arrêter de se pavaner et prendre les armes pour se battre ? Merde !//

Leyce n'était pas en reste. Son physique la rendait assez agréable à regarder... Il fallait avouer tout de même qu'elle n'était pas particulièrement mise en valeur, que les hommes semblaient ici être plus discret (à moins que Konijn ne sois décourageante), et qui plus est, elle n'était pas non plus une beauté fatale. Elle était belle, oui... mais sans plus.

Mais cela n'était certainement pas ses préoccupation principale non... Elle ne comprenait en fait pas pourquoi le guerrier lui avait posé cette question là.

-Vous êtes un... spécialiste de cette lointaine époque ?
//Où bien vous venez de cette époque// songea-t-elle avec un sourire sardonique

Ainsi, cette époque ne lui était pas inconnue. Tant mieux. Comme ça, je pourrai aller directement dans le vif du sujet sans prendre la peine de détailler. Normalement. Je ne faisais même pas attention aux filles qui me regardaient. A vrai dire, ça n’avait aucune importance. Par contre, je ne tenais pas à être entendu par d’éventuelles oreilles indiscrètes. C’est pour cela, que, prenant doucement le bras de Leyceline, j’ai pris la direction d’un coin un peu plus tranquille. Dévoiler ma vie à n’importe qui … Je préférais éviter. Certes, je ne connais pas Leyceline plus que ça mais … De toute manière, maintenant que j’avais commencé à en parler, j’étais bien obligé d’aller jusqu’au bout. Les principes, vous voyez … Bref.

Je ne l’avais pas emmené bien loin. J’étais juste allé au bout de la ruelle ; là où c’était plus sombre et où il y avait très peu de chances pour que quelqu’un nous remarque. Laÿon nous avait suivi mais toujours en restant un minimum discret. J’avais également remarqué le sourire qu’elle avait eu avant que l’on change de place. J’ignorai si elle me prendrait au sérieux quand je lui aurai tout raconté mais au fond … Peu importe. Qu’elle me croie sur paroles ou non … Ça ne changera pas ma vie. Enfin bon, je l’avais déjà trop fait attendre :

« - Je suis même plus qu’un spécialiste. Vous pouvez me prendre pour un fou ou n’importe quoi d’autre si vous le souhaitez mais ce que je vais vous révéler et on ne peut plus réel. »

Je m’arrêtai pour prendre un peu de souffle avant de reprendre :

« - Croyez-le ou non mais je viens de cette lointaine époque. Je suis Gilgamesh, le chevalier du soleil. Bien que mes confrères m’aient également surnommé le chevalier parfait. J’ai vécu ici … Il y a environ 3 000 ans. »

Leyce cligna des yeux. Alors son idée qu'elle avait trouvé saugrenue s'avérait être la simple vérité ? La lapine manqua d'accuser le choc. Elle se souvenait parfaitement de la façon dont avait réagit l'homme. Des manières si... Étranges !

Elle fronça les sourcils en réfléchissant à toute vitesse.

//Je sais parfaitement toute cette histoire avec Nayris la mort tout ça... Mais est-ce possible, réellement, de demeurer dans les lymbes autant de temps ?//

La lapine soupira. Quel prise de tête ! Et de toute façon, elle s'en fichait un peu d'où et de quand il venait, même si elle devait avouer que c'était impressionnant que de se trouver devant une personne de cette époque lointaine.

//Le chevalier soleil... Le chevalier parfait... Hum... De souvenir... Je n'en ai aucun. Si, le roi Arthurios entouré de ses chevaliers... Deux chevaliers... Houlà, l'histoire c'est pas pour moi !//

-Je... Je dois avouer ne pas savoir tellement quoi dire... C'est... Assez... Singulier.

Elle s'appuya contre un mur, et regarda à tour de rôle Gilgamesh et le lion. Pourquoi devrait-elle les croire ? Bon, elle savait qu'elle n'avait rien à craindre d'eux, mais... la question n'était pas là...

Pourquoi dire cela ? Elle l'ignorait.

-Je... suis impressionnée, même si je n'ai pas encore décidé si je pouvait vous... croire ou non.

Elle s'arrêta le temps de réfléchir à ce qu'elle allait dire.

-Pourquoi me dire cela ?

Sa curiosité était piquée au vif. Elle voulait comprendre et savoir. Qui diable était ce Gilgamesh ?

Visiblement, ma révélation l’avait quelque peu surprise. Mais c’était tout à fait compréhensible. Après tout, il est vrai que ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de rencontrer un chevalier des anciens temps. D’ailleurs, elle avait encore du mal à me croire mais ça ne m’étonne pas. Elle est l’une des rares personnes à qui j’ai révélé ça. En fait … Je dirai même que c’est la seule ; outre les personnes qui ont vécu à mes côtés il y a tant d’années. … Autant dire, très peu de gens, donc. On revient à la case départ. Mais passons, ce n’est pas bien grave. Maintenant, la question légitime qu’elle devait se poser doit être : pourquoi me dire ça à moi alors que l’on vient de se rencontrer ? Eh bien, à vrai dire … Même moi, je ne le savais pas trop. Une envie de se confier ? C’était le plus plausible. Même si j’admets volontiers que se confier à une quasi inconnue, ça pouvait paraître très étrange. Toutefois, il n’y avait vraiment pas de quoi se méfier de moi. Pour le moment, j’avoue que je suis encore un peu perdu dans ce Terra qui n’a plus rien de celui que j’ai côtoyé autrefois. Tout a été chamboulé. Et pour reprendre mes marques, il va me falloir plus de temps que ce que je pensais.

En y réfléchissant, peut-être que le fait que je me sois confié aussi facilement à Leyceline n’est pas dû à un quelconque hasard. Il y a probablement une raison derrière tout ça. Raison qui m’apparaîtra sûrement plus tard. Il va donc falloir que je me montre patient. E toute façon, je le saurai bien un jour ou l’autre :

« - Croyez-moi si vous le voulez. Je n’ai aucune raison particulière pour l’avoir fait, je l’avoue. Peut-être que le fait de garder ce secret m’est insupportable. Enfin … En toute honnêteté, je pourrai vous sortir plusieurs raisons plus ou moins plausibles mais la réalité, c’est que … C’est sorti tout naturellement. »

Leyce plissa les yeux. Elle ne comprenait pas vraiment les motivation de l'homme, mais finis par hausser les épaules. Elle se détendit petit à petit. Elle avait encore le goût de l'adrénaline dans son corps... Et cela ne signifiait jamais rien de bon pour elle. Son instinct de survit animal tirait la sonnette d'alarme. Elle plissa les yeux et pressa légèrement le pas. Gilgamesh la suivit, et le lion aussi. Elle tourna dans des ruelles de plus en plus petites mais qu'elle connaissait par cœur pour y avoir passé le plus clair de son temps avec son maître.

-Navrée, je... Je le sens pas forcément là, souffla-t-elle d'une voix un peu plus grave.

Sa démarche s'était faîte plus souple, ses mouvements plus fluides... Tel l'assassine à l'oeuvre qu'elle était. Elle avait peur que des soldats descendent s'amuser dans les rues comme ils le faisaient parfois et s'en prennent à Gilgamesh ou peut être même elle.

Oulà ! Minute ! Elle pensait quoi là ? Qu'il n'arrive rien à ... On se calme, c'est un grand garçon de... de... beaucoup d'année ! Et elle est une assassine. Pas une garde du corps ! Il est trop bizarre pour elle ! Vraiment !

//J'aimerais vraiment le comprendre ! Il... m'intrigue !//

La lapine se surprend à le dévisager un peu trop longtemps par rapport à ce que le voudrait la bienséance. Elle se détourne et regarde la rue.

-C'est l'heure de la sortie des bars. On sait jamais quand ça peut arriver... ni ce que les soldats vont faire. Ça me plairait biend 'en écraser un où deux... ça permettrait à des filles de rester vierges...

Le dédain avec lequel elle dit ça lui échappa. Acide, mauvaise. Elle rageait purement, comme un animal qui n'a pas la limite de la morale. Elle secoua doucement sa tête et se tourna vers le chevalier.

-Navrée. Vous vous êtes ouverts à moi, j'en fais de même... Je suis en partie animale... Mes réactions le sont aussi. Je sais que ça peut surprendre... Il vaut mieux vous prévenir...

//Ne prends pas peur beau chevalier, je ne te veux aucun mal//

Oui, il est mignon. Beau, à son goût. Et il est plus grand qu'elle... C'est rare !

Elle préfère se concentrer sur la rue... L'agitation qui en émane confirme ses dires. Elle serre les poings, ses oreilles de lapin se hérissent. Elle ne doit pas agir. Pas encore. Elle n'a pas de mission. Elle risquerait trop à se faire prendre. Elle soupire, comme impuissante.

Un animal. C'est tout ce qu'elle est. Un animal qui se terre en attendant son heure. Des fois, elle regrette sa si belle liberté.

Je ne posais aucune question lorsque Leyceline nous entraîna, Laÿon et moi, dans des ruelles de plus en plus petites. Elle avait probablement dû repérer du danger ou quelque chose du même genre. Rien d’anormal, donc. Je ne pris même pas la peine de me poser des questions lorsqu’elle se mit à me dévisager pendant un moment. Je me contentai de la fixer à mon tour. Finalement, elle détourna la tête en expliquant que c’était la sortie des bars. D’après elle, c’était aussi à ce moment-là que les gardes étaient le plus imprévisible. Concernant la dernière partie de son explication … Je ne ferai aucun commentaire ; n’étant pas un fin connaisseur de la chose. Je ne suis pas Ilidwën, après tout. Toutefois, l’acidité avec laquelle elle avait prononcé ces mots ne m’échappa pas. J’étais surpris mais je n’aurai rien dit. Même si elle ne s’était pas excusée d’elle-même. Elle est donc en partie animale ? Je me contentai d’un haussement d’épaule. J’ai passé une longue période de mon existence accompagné d’un lion et d’un Lycan alors un peu plus ou un peu moins … Peu m’importait :

« - Ce n’est rien. Je me ferai rapidement à vos réactions les plus incongrues. J’en ai l’habitude, vous savez. »

Cette jeune femme était étrange. Je n’en avais jamais vu comme elle. Vu ses oreilles … Son côté animal devait être un lapin. Rien à voir avec un loup ou un lion, donc. Pourtant, elle n’avait pas l’air d’être quelqu’un d’inoffensif. C’était plutôt le contraire, même. Tout en elle –ses actions, sa façon de se mouvoir, de regarder- absolument tout montrait qu’elle était faite pour être le prédateur et non la proie. Actuellement, j’avais l’impression qu’elle attendait quelque chose. Elle guettait. Mais quoi ? Décidément, j’avais encore beaucoup de choses à apprendre de ce nouveau Terra Mystica et ce, malgré mes deux ou trois millénaires d’existence :

« - Vous … Regardez quelque chose ? Excusez-moi si mon comportement vous paraît étrange mais le monde actuel est bien différent du mien et j’avoue que j’ai encore beaucoup de mal à trouver mes repères. »

Leyce tourna ses yeux vers lui à nouveau. Elle cessa de guetter la rue, et soupira longuement.

-Je suppose que non, soupira-t-elle. L'habitude, vous devez connaître ça.

Elle voulut regarder encore, mais s'obligea à s'éloigner du bord du mur pour s'appuyer contre, plus loin.

-Au vu de qui je suis, je ne peux pas vraiment me permettre d'agir. Certains ont vu mon visage aujourd'hui. Je sais qu'ils mourront, mais j'étais censée être discrète. Mes hommes sont bons et entraînés... Mais ils ne sont pas toujours là pour corriger mes erreurs.

Elle soupira à nouveau, ses oreilles se baissèrent, comme s'il émanait d'elle de la tristesse.

-J'ai horreur de laisser mourir ou souffrir des gens. Rien n'est meilleur que sa propre liberté. Un viol ou un meurtre... C'est horrible quand on y pense. Ces hommes là tue pour le plaisir de tuer. Ils aiment agir de la sorte, et ils aiment dominer ces jeunes filles... Pourtant, je ne peux pas les punir.

Elle posa son regard sur lui et lui offrit un sourire triste, bien que teinté d'un humour noir macabre.

-Cher chevalier, je vous présente le monde tel qu'il est de nos jours ! Les partisans d'AT tue et viole, et les rebelles se cachent pour agir. Je n'ai pas le droit de faillir. En tant que chef des assassins, je n'ai pas à agir. Je dois toujours réfléchir au conséquence. Puis-je laisser cet homme violer cette enfant, et sauver un gros et riche marchand qui soutient la rébellion... Mes choix sont limités.

Elle s'arrêta soudain, consciente qu'elle déversait sa rancoeur au chevalier, comme un défouloir, pour oublier, pour se pardonner, pour accepter.

-Navrée... Mes histoires doivent vous embêter... Je... J'ai déjà trop abusé de votre précieux temps... Je... Navrée.

Elle le salua d'une courbette, puis se détourna doucement. quelque chose en elle lui soufflait de rester. Elle voulait continuer à parler. Depuis combien de temps s'était-elle fermé ? Dans son esprit, elle voyait le visage d'une louve... Elle s'était ouvert. Avait agit comme un animal, mais s'était ouvert...

Elle se retourna vers lui, agissant sur instinc.

-Puis-je vous offrir quelque chose à boire en compensation pour ce temps perdu ? S'enquit-elle soudain.

Elle voulait le connaître, le comprendre, lui faire confiance et lui parler. Alors elle oublia ce qu'elle était pour redevenir Leyceline Métivier, la musicienne, et non l'assassine.

L’habitude … Oui, j’avais connu ça à une époque. Enfin, cessons de se torturer avec ça. Effectivement, niveau discrétion, j’avais déjà connu mieux. « Au vu de qui je suis … » ? Faisait-elle partie de cette « organisation » appelée Rébellion ? C’était tout à fait possible. Ce serait le premier membre que je rencontre. Ça expliquerait beaucoup de choses. … Oui, décidément, je suis vraiment à la traîne, moi. Pour le moment, je me contentais de me taire, en écoutant attentivement les paroles de Leyceline. Au fond, je la comprenais. Personne n’avait le droit d’agir comme le faisaient les hommes de cet Aile Ténébreuse. Ainsi, c’était donc ça la définition du monde d’aujourd’hui … Voilà quelque chose de bien triste. Heureusement qu’il y avait encore quelques personnes pour lutter contre ce genre de choses. Des siphonnés, j’en ai connu même à mon époque, mais il fallait avouer que ça allait très très rarement jusque là.

Puis, elle s’arrêta et, chose à laquelle je ne m’attendais pas, elle me présenta ses excuses. Sauf que contrairement à ce qu’elle pouvait penser, elle ne m’avait pas fait perdre mon temps, bien au contraire ! J’ai pu en apprendre plus sur le Terra Mystica d’aujourd’hui et ça, c’est loin d’être quelque chose de négligeable. Non vraiment, elle n’avait aucune raison de s’excuser ainsi :

« - Ne vous excusez pas. Je trouve vos histoires très intéressantes, elles m’aident à mieux comprendre comment fonctionne Terra en ce moment. De plus, vous ne me faites pas perdre mon temps. »

Pendant un court instant, elle se détourna ; prête à partir. Finalement, elle se ravisa et me refit face. Quelque chose à boire ? Pourquoi pas. Je ne m’en étais pas spécialement rendu compte mais c’est vrai que ça fait un bon moment que je n’ai rien bu. De toute façon, je n’avais rien à perdre en acceptant et ça me permettrait également de mieux la connaître :

« - J’accepte. Toutefois, je le redis, vous ne me faites pas perdre mon temps. Bien … Les lieux ont bien changé, je vous laisse nous guider vers une taverne si vous le voulez bien. »

La lapine parut surprise que Gilgamesh accepte sa proposition. Avec un sourire surpris, mais assez heureux, elle acquiesça, et entrepris de le mener vers une taverne qu'elle connaissait bien. L'agitation des rues ne désempirait pas, mais la chef des assassins ignorait du mieux qu'elle le pouvait la moindre agitation. Soupirant longuement, elle savait qu'aucun des soldats ne tentaient de l'approcher, elle ou Gilgamesh pour l'excellente raison qu'ils étaient armées et qu'ils se dégageaient d'eux une aura guerrière ou meurtrière suffisamment percevable pour que les soldats comprennent qu'ils n'avaient aucune chance.

Aussi, elle le guida à travers les rues, veillant par moment à ce que ni lui, ni le lion ne soit trop à l'écart, mais ils suivaient parfaitement. La taverne semblait miteuse, comme on pouvait s'y attendre en voyant l'extérieure, mais un délicieux fumet attirait irrésistiblement. L'intérieur, pas franchement plus seyant que la devanture, n'était pas pour autant sale à nourrir les rats. Leyceline se dirigea immédiatement vers le bar et se pencha à l'oreille du serveur et patron des lieux. L'homme acquiesça, et lui indiqua les escaliers qui donnaient sur une autre pièce.

La lapine fit signe à Gilgamesh de la suivre, et elle se faufila entre les ivrognes et les clients passagers jusqu'à l'étage. La salle sur laquelle ils débouchèrent contenait plusieurs box leur permettant une tranquillité plus certaine qu'en plein milieu des soiffards.

Elle s'installa tranquillement sur la banquette et invita le chevalier à en faire de même en face d'elle. Le lion pouvait, au choix, s'installer sous la table ou carrément sur la banquette. Elle le regarda un moment, impressionnée de la force et de la grâce qui émanait de son être. Un lion était décidément un très bel animal.

Lorsqu'ils furent enfin installé, elle fit signe à un serveur et commanda un jus de carotte, ne buvant jamais, ô grand jamais, d'alcool pendant qu'elle était en mission. Certes, techniquement celle-ci était finit... Mais il lui faudrait encore sortir de la ville, et elle ne pouvait se risquer à être grisée.

Elle attendit que Gilgamesh commende aussi pour s'accouder à la table en le regardant.

-C'est fort aimable à vous de m'accompagner, sourit-elle. Je me doute que ce doit être troublant pour vous de découvrir Terra dans un tel état...

Je laissais Leyceline nous guider à travers les ruelles de Faestelia. Évidemment, je ne m’attendais pas à ce qu’elle nous trouve une superbe taverne. Je me doutais bien que dans ce type d’environnement, les établissements étaient relativement mal fréquentés. Je n’eus donc aucune surprise lorsque Leyceline s’arrêta devant une taverne à l’allure peu engageante. Une fois à l’intérieur, mon guide se dirigea vers le bar et glissa quelques mots à l’oreille de celui qui semblait être le serveur voir même le patron. Puis, elle nous fit signe de la suivre. De toute façon, je ne pouvais rien faire d’autre. Je la rejoignis donc en ignorant les regards parfois étranges des clients ; Laÿon sur les talons.

Elle nous mena dans une petite salle où nous étions sûrs d’être tranquille. Je m’installais sur la banquette qui se trouvait juste en face d’elle. Laÿon, quant à lui, n’hésita pas bien longtemps avant de sauter à côté de moi. … Parfois, je me demandais si je n’avais pas été trop laxiste concernant son éducation. Mais dans tous les cas, ce n’est certainement pas à son âge que je vais le refaire :

« - Lion de luxe, hein. »
*Ça va, tu l’as déjà faite cette remarque.*

Il n’avait pas tort. Bien que son attitude actuelle ne faisait que confirmer ce que je venais de dire. Passons. Pour ma part, je commandais un verre d’hydromel. Je n'en avais pas bu depuis bien longtemps et j’étais curieux de voir si je tenais toujours autant l’alcool. Et une fois de plus, Leyceline visa dans le mille :

« - Vous avez raison. J’ai connu ce monde dans de mauvaises postures mais … Jamais à ce point. Justement, je suis curieux. Vous ne voulez pas me parler plus en détails de ce qu’il s'est passé ces dernières années mais … Je souhaiterais en apprendre plus sur votre personne. Jusqu’à présent, nous n’avons parlé que de moi. »

Leyceline était assez surprise. Il... désirait... réellement...

//Quoi ?// Songea-t-elle clairement surprise.

Elle le dévisagea longuement, le redécouvrant. Il l'observait aussi, comme attendant qu'elle réponde. Ses cheveux de la couleur du soleil était coupé court. Son nez était fin, et ses yeux, d'un rouge presque sanglant. Il avait les traits marqués, comme s'il était fatigué. On ne pouvait pas dire, il était très beau.

Leyce cligna doucement les yeux pour se remettre, presque déçue de s'être laissé surprendre par ce désir qu'avait exprimé le chevalier. Elle croisa ses mains et posa son menton dessus, regardant Gilgamesh par en dessous.

-Comment dire...

Elle marqua une pose, et eut une sourire pour elle-même. Ce sourire si particulier qui nait sur nos lèvres pour un bon souvenir, comme une blague que l'on se raconte. Ses oreilles se baissèrent sur sa tête jusqu'à se plier en deux. Elle rosit légèrement, détournant le regard.

-Je n'ai pas tellement l'habitude de parler de... moi.

Elle lui offrit un sourire contrit. Ce "moi" était sortie presque comme si elle prenait conscience de sa propre existence, ce qui était paradoxal. Autant Leyceline avait beaucoup d'estime pour elle-même, autant, elle s'oubliait souvent... Elle n'oubliait pas tant que ça l'assassine qu'elle était, mais plus la musicienne. Elle voulait tant que les rebelles vainquent enfin l'archidémon qu'elle s'oubliait.

Que pouvait-elle dire d'elle ? Son nom, il le connaissait... C'était suffisant. Il pouvait observer ! Elle était une hybride. En partie lapin. Que de dire d'autre ?

"Un sourire pour un être gentil, un rictus pour un être méchant, un sourire pour un moqueur qu’il se retrouve idiot, un autre pour un compliment."

Leyce releva les yeux à ce souvenir. L'instinct... Que lui dirait-elle en ce moment ?

-Et bien... je ne suis pas ce qu'on peut qualifier de quelqu'un de fréquentable.

Elle baissa la voix, par pure précaution.

-Je fais partie de ceux qui s'oppose aux démons. Je ne peux pas tellement parler de mon rôle, même si vous me savez déjà assassine. Disons que je n'ai qu'un but : La liberté. Rien ne m'importe plus que ma liberté ! J'aime pouvoir faire ce que je désires quand je le désire. C'est un peu comme la musique... Les notes doivent pouvoir s'envoler sans ne jamais rencontrer d'isolant à leur sonorité. Non...

Elle lui sourit. Un sourire très doux, et bien plus proche de la musicienne qu'elle était.

-Je ne peux pas accepter qu'une personne vole la vie ou bien la liberté de millier d'autre. Cela m'est inimaginable. Peut être vais-je y perdre ma vie. Mais mes convictions sont pour moi un chemin droit et sans faille. Je n'en dériverais pas. Je pense que... c'est ce qui peut me décrire le mieux. Bien mieux qu'un nom, qu'une race ou que des étiquettes... Je suis ce que je fais...

Sa réaction ne me surprit pas vraiment. J’avais tout de suite remarqué qu’elle n’était pas le genre de personne à se confier au premier venu. Elle n’aimait pas parler d’elle, ça se voyait clairement. Elle eût un sourire qui en disait déjà beaucoup sur sa vie. Elle disait ne pas être quelqu’un de fréquentable ? Aucune importance. De toute façon, je faisais bien ce que je voulais et aujourd’hui, il n’y avait personne pour me reprocher quoique ce soit en ce qui concerne mes choix. Sans le vouloir, elle confirmait certaines de mes impressions. Ainsi donc, elle faisait bel et bien partie des Rebelles. Ces personnes qui luttent ardemment contre le Démon. … La liberté. Une cause bien noble. Quand j’y repense, autrefois, j’étais libre sans vraiment l’être. Je faisais ce que bon me semblait mais j’étais lié à un homme par le serment d’allégeance que je lui avais fait. Je lui avais juré fidélité. Aujourd’hui encore, alors qu’il s’est écoulé plus de deux millénaires, je suis encore à sa recherche alors que rien ne garantit qu’il soit également revenu. Devrais-je abandonner ? Non. Je ne pense pas. Tout simplement parce que plus qu’un roi ou qu’un supérieur, c’est aussi un ami et un frère d’armes. Au même titre qu’Ilidwën.

Décidément, Leyceline faisait réfléchir. Mais même si je me suis égaré dans mes pensées, je l’ai quand même écouté et j’étais parfaitement d’accord avec elle. Personne ne devrait être en mesure de dicter la conduite d’autrui. Chacun devrait être libre de faire ses propres choix ; de prendre ses propres décisions. Il n’y a que de cette manière que l’on peut avancer. Et Leyceline avait choisi. Elle irait même jusqu’à perdre sa vie pour ses convictions. Chose que je pouvais parfaitement comprendre étant donné que j’avais moi-même perdu la vie pour ce qui me semblait être juste. Mais rêver d’un monde en paix n’est-elle pas une idée trop utopique ? Il y aura toujours des esprits malsains pour semer le chaos. Alors se battre pour une cause, oui mais … si elle s’avère trop irréalisable … Pourquoi passer sa vie à ça ? Une réflexion. On pouvait également se poser la question inverse. Et c’était de celle-là que je comptais parler :

« - Votre métaphore est tellement vraie. Pour parler ainsi, je suppose que vous devez être musicienne. Enfin, sachez que je comprends tout à fait votre vision du monde. Mais dites-moi … si un jour le monde devient un havre de paix où tout le monde s’entend bien, où il n’y a plus aucunes querelles … Que ferez-vous ? Y avez-vous songé ? Vous aurez réussi ce que vous désiriez mais quel serait votre prochain objectif ? Parce qu’un être qui n’a pas –ou n’a plus– de but dans sa vie est voué à mourir lentement. Et ce, quel qu’il soit. »

La lapine eut un semblant de sourire béat à se laissant aller contre la banquette très confortable. Oui... Elle y avait déjà penser. Son envie de tuer presque maladive passait progressivement, et sa violence se calmait. Oh, ce n'était pas encore une gentille lapine inoffensive, et sans doute ne le serait-elle jamais... Cependant, elle s'assagissait, et en était... Rassurée. Elle avait eut peur pendant un moment de cette vive rage en elle. L'hybride s'autorisa alors un réel sourire et ses yeux réintégrèrent le présent.

-Effectivement je suis musicienne... Et il s'agit de ma plus grande passion. La musique... Plus que tout autre chose, j'adore la musique.

Elle ferma un moment les yeux.

-Ce que je ferais après... Mon art. Sans aucun doute.

Ses pupilles rouges s'illuminèrent d'une joie enfantine.

-La musique possède une force que peu connaissent. Je peux comprendre que certains n'aiment pas... Mais je voudrais que tous en est entendu au moins une fois. Je voudrais emplir le monde de musique. Elle adoucit les mœurs et est créatrice de lien. Qui n'a pas une musique en tête pour au moins un moment de sa vie ? Je suis une musicienne de passion. Ma vie est une symphonie inachevée et qui n'est pas prête d'avoir de fin... je voudrais... Tellement que cette paix qu'apporte la musique soit ressenti par l'ensemble des habitants de Terra...

Elle s'empourpra alors.

-Oh... Je... je me suis emportée... Veuillez m'excuser... Mon rêve d'enfant à souvent tendance à me faire partir un rêve très doux. Ciel, j'espère sincèrement ne pas vous importuner avec mes histoires à dormir debout !

Leyceline le dévisagea alors. Il était vraiment beau avec ses cheveux blonds et son visage fin. On aurait presque cru un ange... Et cela plaisait à la chef des assassins. Mais elle ressentit soudain le besoin de s'expliquer.

-Je me bats évidemment pour la liberté de tout un chacun... Mais aussi pour ce rêve vous savez. Et je n'aurais de cesse. A coup de portée s'il le faut... La musique est une culture, la culture amène la réflexion... Je ne peux soulever une armée avec une mélodie... Mais je peux faire chanter les âmes... Voilà... Voilà pourquoi je me bats.

Son rêve. Rêve qu'elle n'avait partagée qu'avec Elio, son maître d'arme. Son rêve qui lui tenait à coeur plus que tout. Un rêve qui la guidait. La musique. Son violon. Son imagination. les voilà ses véritable armes. Leyce n'était pas mortelle. Elle était musicalement mortelle. Et cela la rendait unique.

La musique… En y réfléchissant, c’était quelque chose que j’aimais également. A l’époque où j’étais encore avec les autres, je me rappelle qu’elle embellissait nos soirées. Les rendant ainsi unique. Leyceline m’impressionnait de plus en plus. Elle n’était pas de ces personnes qui n’ont qu’une seule idée en tête. Au-delà de la paix qu’elle voulait apporter, elle possédait un rêve. Que les autres écoutent de la musique, au moins une fois dans leur vie. Je ne pus retenir un sourire lorsqu’elle demanda qui n’avait pas déjà eu une musique dans la tête à un moment de sa vie. Rien qu’en repensant à ma chanson, celle qui avait tant de fois énervé Ilidwën qu’il doit encore s’en souvenir, ça me rendait nostalgique. Je ne pouvais qu’être d’accord avec elle. Je secouais la tête lorsqu’elle s’excusa. Pourquoi le faisait-elle d’ailleurs ? Il n’y avait aucune raison. Par le passé, j’ai connu des personnes avec des rêves vraiment irréalisables ou tout simplement dénués d’intérêts. Mais cette personne là ; en face de moi m’a tout simplement surprise. Elle était sensible. Beaucoup qu’elle ne le laissait paraître. Si elle m’avait dit ça avant de révéler qu’elle était une Assassine… Je ne l’aurais probablement pas cru. Et contrairement à ce qu’elle pensait, elle ne m’avait pas du tout importuné. Loin de là.

Deux causes. Elle se battait pour deux causes qui lui paraissaient juste. C’était tout à son honneur. Et je trouvais ça admirable. Il fallait qu’elle continue à y croire. Qui sait ? Ses efforts pourront porter leurs fruits un jour ou l’autre. Etrangement, j’en étais quasiment persuadé. Je ne saurais dire pourquoi mais elle me donnait envie de croire en elle. Et je ne comptais pas aller contre cette envie. Je plongeais alors mon regard dans le sien.

« - Contrairement à ce que vous pensez, vos histoires ne m’importunent absolument pas. Au contraire, je les trouve très intéressantes. J’aime la musique, vous savez. Certes… Mes anciens compagnons pourraient vous dire que je ne chante pas particulièrement bien ; voir très mal mais ça n’a pas d’importance. Parce qu’au final, la musique nous a fait partager des moments inoubliables. Alors laissez-moi vous dire ceci : je crois en votre rêve. Vous vous battez pour une noble cause avec des armes nobles… Je suis heureux que des gens comme vous vivent à cette époque. Ça me laisse un espoir. Grâce à vous, j’ai envie de croire que le monde d’aujourd’hui a encore une chance… »

Leyceline eut un sourire franc. Son visage s'alluma et dans ses yeux brûla plus fort encore la lueur de l'espoir. Elle sentit un calme apaisant s'emparer d'elle, et elle remit une mèche folle derrière son oreille en regardant vers l'extérieur... Gênée. Elle était gênée, et ne s'en offusquait pas. Leyceline posa à nouveau ses yeux rouges sur son interlocuteur.

Il était vraiment beau. Il avait un elle ne savait quoi d'attachant qui faisait qu'elle aimait lui parler. Est-ce normal que deux personnes qui viennent de se rencontrer s'ouvre aussi facilement l'une à l'autre ? Qui plus est, il était humain... Enfin... Plus vraiment, elle en avait la certitude... Mais à l'origine, il était humain... Il ne se moquait pas d'elle, ne lui voulait pas de mal... Il semblait d'une naïveté à toute épreuve.

Il croyait en elle... Il venait à peine de la rencontrer, elle lui avait déballé sa vie, elle s'était confiée avec facilité à lui... Et il lui disait qu'il croyait en son rêve... Un naïf. Son sourire ut encore plus doux. Elle jeta un coup d’œil vers l'extérieur une fois de plus. La vitre sale de la taverne ne lui permettait pourtant pas de se tromper... La nuit tombait... Elle devait reprendre la route immédiatement si elle espérait rentrer rapidement.

Mais. Il y a un mais, il y a toujours un mais. Elle n'en avait pas envie. Elle ouvrit la bouche en prenant une inspiration pour prendre congé... Mais... Aucun mot ne sortie de sa bouche. Elle soupire en la refermant, fixa un moment la fenêtre.

-Il me faut y aller, finit-elle par soupirer comme à regret. Mes obligations m'appellent... J'en suis navrée... j'aurais aimé faire plus amples connaissances avec vous...

Elle se releva et fit un révérence digne d'une princesse bien qu'elle soit légèrement espiègle.

-Bon voyage chevalier... J'espère vous revoir bientôt... Ou au moins avoir de vos nouvelles !

Elle se dirigea d'un pas lent mais gracieux vers la sortie, et laissa "malencontreusement" tomber un bout de parchemin.

Aucune femme ne m'avait à ce point fascinée. J'ignorais totalement les raisons qui m'avait poussées à tout lui raconter de ma vie. Généralement, ce que j'ai vécu, ce n'est pas le genre de chose que l'on raconte à quelqu'un que l'on vient à peine de rencontrer. Mais quand ça se passe et que cette personne ne vous rigole pas au visage... Que demander de plus ? Pourtant, il y a un moment où ces instants doivent s'achever. Comme la plupart des choses, ils sont éphémères. Parfois, ça rend les choses plus magnifiques encore et d'autre fois... Ça ne fait que rendre davantage triste. Comme celui-là. Sans comprendre pourquoi, j'eus un pincement au cœur lorsque Leyceline m'annonça qu'elle devait s'en aller ; que ses obligations l'appelaient. Moi aussi, j'aurais voulu avoir plus de temps pour faire plus ample connaissance. Mais là, ça ne servait à rien d'insister. Je le savais. Elle avait décidé de partir et rien ne pourrait la faire changer d'avis. J'ignorais pourquoi mais j'en avais la certitude. Je savais aussi que je la reverrai. Il n'y avait pas de raisons pour que ce ne soit pas le cas.

A ce moment-là, elle se leva et fit une superbe révérence ; digne d'une personne de haut rang. J'eus un sourire en la voyant faire. Quelque part, ça me rappelait un peu moi, avant tout ça... Elle me souhaita un bon voyage et disparu. Bien entendu, j'avais remarqué le morceau de parchemin qu'elle avait laissé tomber et c'est pour ça que je me suis empressé d'aller le ramasser pour le lire. Deux mots ; suivis de ses initiales : L.M. Leyceline Métivier... Elle n'avait pas d'inquiétude à avoir car je respecterai sans doute son conseil. Je ne faisais même pas attention au regard malicieux que me lançait mon lion. J'avais autre chose en tête. Mais c'était trop compliqué pour le moment...

« - Je n'y manquerai pas... Faites-moi confiance. »

[RP terminé !]